Le mariage sous L'Ancien Régime
Ce frontispice met l'accent sur la consolation que représente les enfants dans le
mariage, selon les deux citations bibliques. La figure féminine prononce les paroles
de Rachel dans le livre de Genèse, XXX, 1, où elle exprime son désir d'avoir des enfants ([...] da mihi liberos alioquin moriardans la traduction de la Vulgate). Le prêtre répond en citant I Samuel I, 17, où Anna demande à Dieu de lui donner un enfant mâle. Le prêtre Eli répond que Dieu lui accordera ce qu'elle a demandé;
Deus Israel det tibi petitionem tuem. (Ce livre de la Bible était autrefois appelé le premier Livre des Rois, d'où
I Regici.) Voir latinvulgate.com.
LA
DIRECTION
ET LA
CONSOLATION
DES PERSONNES
MARIEES,
OV LES MOYENS
infaillibles de faire vn Mariage
heureux, d'vn qui ſeroit mal-
heureux.
Auec l'abregé des vies de quelques Saincts
& de quelques Sainctes , qui ont beaucoup
ſouffert dans leurs Mariages.
Composé par le R. P. Thomas le Blanc ,
de la Compagnie de Ieſus.
Ouurage tres vtile & neceſſaire auxperſon-
nes Mariées.
1 A PARIS,
Chez Gilles André , ruë S.Iacques à l'Ima-
ge S. François , attenant la vieille Poſte. filet maigre M. DC. LXIV.
AVEC PRIVILEGE DV ROY. 2
APPROBATION.
IE Soubſigné Prouincial de la Com-
pagnie de Iesvs, en la Prouin-
ce de Champagne, ſelon le Priuile-
ge accordé à ladite Compagnie : par
les Roys tres-Chreſtiens Henry III.
le 20. Mars 1583. Henry IV. le 20. De-
cembre 1608. Louys XIII. le 14. Fe-
vrier 1619. & Louis XIV. à preſent
regnant le 23. Decembre 1650. Per-
mets à Iean Riuiere , priuatiuement
à tous autres ; de faire imprimer le
liure intitulé : La Direction & la
Conſolation des perſonnes Mariées.
Compoſé par le R. P. Thomas le
Blanc de la meſme Compagnie , &
ce ſur les peines contenües audit
Priuilege. Fait en Noſtre College
de Dijon le 24. Decembre 1663.
pagnie de Iesvs, en la Prouin-
ce de Champagne, ſelon le Priuile-
ge accordé à ladite Compagnie : par
les Roys tres-Chreſtiens Henry III.
le 20. Mars 1583. Henry IV. le 20. De-
cembre 1608. Louys XIII. le 14. Fe-
vrier 1619. & Louis XIV. à preſent
regnant le 23. Decembre 1650. Per-
mets à Iean Riuiere , priuatiuement
à tous autres ; de faire imprimer le
liure intitulé : La Direction & la
Conſolation des perſonnes Mariées.
Compoſé par le R. P. Thomas le
Blanc de la meſme Compagnie , &
ce ſur les peines contenües audit
Priuilege. Fait en Noſtre College
de Dijon le 24. Decembre 1663.
Pierre le Cazre.
3
4
bandeau
lettrine
AVANT-PROPOS.
lettrine
M
ON cher lecteur , ie
vous preſente ce petit
trauail , pour voſtre
conſolation , & pour la ſatis-
faction des perſonnes d'honneur,
qui m'ont ſouuent preſſé , en
France & en Italie , de vouloir
aſſister ceux qui ſont dans le tra-
cas du meſnage : & dans le mal-
heur d'vn mariage infortuné.
vous preſente ce petit
trauail , pour voſtre
conſolation , & pour la ſatis-
faction des perſonnes d'honneur,
qui m'ont ſouuent preſſé , en
France & en Italie , de vouloir
aſſister ceux qui ſont dans le tra-
cas du meſnage : & dans le mal-
heur d'vn mariage infortuné.
Comme la maladie eſt ex-
treme : auſſi la difficulté d'y
trouuer des remedes doux &
efficaces , a pluſieurs fois fait
trembler ma plume , & eſbran-
lé ma reſolution. Mais l'ar-
deur de ceux qui me pouſſoient
à ce deſſein , ne me donnant
neceſſité de ployer ſous leurs rai-
ſons , dont ie vous veux faire
part. Ils me diſoient auec vne
amiable colere & vne charita-
ble importunité.
treme : auſſi la difficulté d'y
trouuer des remedes doux &
efficaces , a pluſieurs fois fait
trembler ma plume , & eſbran-
lé ma reſolution. Mais l'ar-
deur de ceux qui me pouſſoient
à ce deſſein , ne me donnant
ã ij
AVANT-PROPOS.
nulle treue : i'ay eſté commeneceſſité de ployer ſous leurs rai-
ſons , dont ie vous veux faire
part. Ils me diſoient auec vne
amiable colere & vne charita-
ble importunité.
Quoy donc ? Aurez-
vous fait tant d'efforts, pour
aider diuerſes perſonnes, ſans
auiſer au ſecours de ceux de la
vertu deſquels dépend la per-
fection de tous les autres.
vous fait tant d'efforts, pour
aider diuerſes perſonnes, ſans
auiſer au ſecours de ceux de la
vertu deſquels dépend la per-
fection de tous les autres.
N'eſtes-vous pas entré
dans les armées , pour donner
aux ſoldats , au milieu de la
licence de la guerre , vn cœur
Chrestien ; & vne vertu
maſle , qui remporte tous les
iours la victoire ſur les vices :
leur preſentant Le Soldat ge-
Impri-
mé au
Pont à
Mouſ-
ſon.
tré dans les cabarets , pour y
apporter de la moderation : &
pour en retirer ceux qui y noyent
leur raiſon dans le vin , leur
Au Põt
& à
Dijon.
donnant l'Homme de bon-
ne compagnie. N'eſtes-vous
pas entré dans les berlans5, &
dans les lieux de deſbauche , où
les blaſphemes ſont dans leur
regne , pour en bannir les iure-
mens & les execrations , leur
monſtrant les foudres du Ciel ,
qui pendent ſur leurs teſtes : &
A
Dijon.
Dieu vangeur & ennemi
des blaſphemes , des iure-
mens des maledictions, &
des imprecations.
dans les armées , pour donner
aux ſoldats , au milieu de la
licence de la guerre , vn cœur
Chrestien ; & vne vertu
maſle , qui remporte tous les
iours la victoire ſur les vices :
leur preſentant Le Soldat ge-
AVANT-PROPOS.
nereux.
N'eſtes-vous pas en-Impri-
mé au
Pont à
Mouſ-
ſon.
tré dans les cabarets , pour y
apporter de la moderation : &
pour en retirer ceux qui y noyent
leur raiſon dans le vin , leur
Au Põt
& à
Dijon.
donnant l'Homme de bon-
ne compagnie. N'eſtes-vous
pas entré dans les berlans5, &
dans les lieux de deſbauche , où
les blaſphemes ſont dans leur
regne , pour en bannir les iure-
mens & les execrations , leur
monſtrant les foudres du Ciel ,
qui pendent ſur leurs teſtes : &
A
Dijon.
Dieu vangeur & ennemi
des blaſphemes , des iure-
mens des maledictions, &
des imprecations.
Quoy ? N'auez-vous
pas taſché d'exciter tous les
ſilence & à la deuotion : dans
les temples dediez au Dieu vi-
uant : par le Chreſtien dans
A
Dijon.
l'Egliſe : D'eſclairer les peti-
tes filles dans les eſcoles : par
le Miroir des Vierges les
A
Dijon.
ieunes enfans dans les Colle-
A
Paris ,
chez
Binière ges : par le bon Ecolier.
pas taſché d'exciter tous les
ã iij
AVANT-PROPOS.
Chreſtiens à la modeſtie , auſilence & à la deuotion : dans
les temples dediez au Dieu vi-
uant : par le Chreſtien dans
A
Dijon.
l'Egliſe : D'eſclairer les peti-
tes filles dans les eſcoles : par
le Miroir des Vierges les
A
Dijon.
ieunes enfans dans les Colle-
A
Paris ,
chez
Binière ges : par le bon Ecolier.
Vovs auez penetré dans les
Cloiſtres des Religieux : leur
auez porté l'Idée parfaite des
A
Lyon.
Chez
Barbier Religieux, ou le ſainct tra-
uail des mains : qui contient
amplement toute la perfection
qu'ils doiuent acquerir enuers
Dieu , enuers le prochain , &
enuers eux-meſmes.
Cloiſtres des Religieux : leur
auez porté l'Idée parfaite des
A
Lyon.
Chez
Barbier Religieux, ou le ſainct tra-
uail des mains : qui contient
amplement toute la perfection
qu'ils doiuent acquerir enuers
Dieu , enuers le prochain , &
enuers eux-meſmes.
Vous n'auez point negligé
les gens de meſtier , dans leurs
dans le lieu de leurs ſueurs ; leur
A
Dijon.
monſtrant le bon Vigneron,
le bon Laboureur, & le bon
Artiſan. Vous auez mené les
riches & les pauures par les rües:
& par tous les lieux , où ils
peuuent ſe perfectionner , & ſer-
uir leur Createur : leur donnant
A
Dijon.
pour guide le bon Riche &
le bon Pauure. Vous auez
viſité les maiſons , pour y eſſüier
les larmes des veuues , & pour
les auancer en la plus haute per-
fection : leur mettant en main,
A
Dijon.
A
Paris. la conſolation & la dire-
ction des Veuues. Vous n'a-
uez pas meſmes negligé les Co-
chers & les Laquais , eſtant ſur
le point de faire paroiſtre en pu-
Laquais.
les gens de meſtier , dans leurs
AVANT-PROPOS.
boutiques ; & les gens de labeur ,dans le lieu de leurs ſueurs ; leur
A
Dijon.
monſtrant le bon Vigneron,
le bon Laboureur, & le bon
Artiſan. Vous auez mené les
riches & les pauures par les rües:
& par tous les lieux , où ils
peuuent ſe perfectionner , & ſer-
uir leur Createur : leur donnant
A
Dijon.
pour guide le bon Riche &
le bon Pauure. Vous auez
viſité les maiſons , pour y eſſüier
les larmes des veuues , & pour
les auancer en la plus haute per-
fection : leur mettant en main,
A
Dijon.
A
Paris. la conſolation & la dire-
ction des Veuues. Vous n'a-
uez pas meſmes negligé les Co-
chers & les Laquais , eſtant ſur
le point de faire paroiſtre en pu-
ã iiij
AVANT-PROPOS.
blic, le bon Cocher & le bonLaquais.
Apres tous ces trauaux,
laiſſerez vous ſans ſecours ceux,
de la vertu ou du vice deſquels
depend la bonne conduite ou le
naufrage de tous ceux à qui
vous auez tendu la main ?
laiſſerez vous ſans ſecours ceux,
de la vertu ou du vice deſquels
depend la bonne conduite ou le
naufrage de tous ceux à qui
vous auez tendu la main ?
Si vn homme marié eſt deſ-
reglé dans ſon meſnage : où il a
toutes les occaſions de viure en
paix , & de ſeruir Dieu: com-
ment ſe fera-t-il vn ſoldat vti-
le à la Republique , & aſſez
genereux , pour dompter la vio-
lence de ſes paſſions , au milieu
de la tempeſte & de la furie des
armées & des batailles ?
reglé dans ſon meſnage : où il a
toutes les occaſions de viure en
paix , & de ſeruir Dieu: com-
ment ſe fera-t-il vn ſoldat vti-
le à la Republique , & aſſez
genereux , pour dompter la vio-
lence de ſes paſſions , au milieu
de la tempeſte & de la furie des
armées & des batailles ?
Par quelle induſtrie6 fer-
merez-vous les cabarets , ſi vne
me vne megere , & ne donne
aucun repos à ſon mari le tour-
mentant par ſes crieries , par ſes
maledictions , & par ſes rages.
La fumée ne le chaſſera point
ſi-toſt de ſa chambre : qu'elle le
fera ſortir du logis : & chercher
dans vn berlan7, auec des fri-
pons , ce qu'il ne peut trouuer en
ſa maiſon parmy ſes domeſtiques.
merez-vous les cabarets , ſi vne
AVANT-PROPOS.
femme vit dans ſa maiſon , com-me vne megere , & ne donne
aucun repos à ſon mari le tour-
mentant par ſes crieries , par ſes
maledictions , & par ſes rages.
La fumée ne le chaſſera point
ſi-toſt de ſa chambre : qu'elle le
fera ſortir du logis : & chercher
dans vn berlan7, auec des fri-
pons , ce qu'il ne peut trouuer en
ſa maiſon parmy ſes domeſtiques.
Si le mary & la femme s'ac-
couſtument à des iuremens iour-
naliers & à des maledictions re-
ciproques : par quel artifice arre-
ſterez vous la langue d'vn liber-
tin, qui perd tout ſon bien en vn
coup de dez : ou qui reçoit vn
ſanglant affront, par ſon ennemi ?
couſtument à des iuremens iour-
naliers & à des maledictions re-
ciproques : par quel artifice arre-
ſterez vous la langue d'vn liber-
tin, qui perd tout ſon bien en vn
coup de dez : ou qui reçoit vn
ſanglant affront, par ſon ennemi ?
Le veritable moyen d'auoir
Egliſes : des filles modeſtes , dans
leurs eſcoles : Eſcoliers dili-
gens , dans les claſſes : des Re-
ligieux feruens , dans les cloi-
ſtres : des Artiſans , des La-
boureurs , des Vignerons cou-
rageux dans leurs fatigues : des
Riches moderez , dans leur pro-
ſperité : des Pauures patiens ,
dans leur affliction : des Veuues
contentes, dans leur ſolitude : des
valets obeiſſans , dans leurs ſer-
uices , c'eſt de mettre ordre dans
la famille : & rendre la femme
& le mari vertueux.
AVANT-PROPOS.
des Chreſtiens deuots , dans lesEgliſes : des filles modeſtes , dans
leurs eſcoles : Eſcoliers dili-
gens , dans les claſſes : des Re-
ligieux feruens , dans les cloi-
ſtres : des Artiſans , des La-
boureurs , des Vignerons cou-
rageux dans leurs fatigues : des
Riches moderez , dans leur pro-
ſperité : des Pauures patiens ,
dans leur affliction : des Veuues
contentes, dans leur ſolitude : des
valets obeiſſans , dans leurs ſer-
uices , c'eſt de mettre ordre dans
la famille : & rendre la femme
& le mari vertueux.
Si la teste ſe conſerue en bon-
ne ſanté , tous les membres ſeront
dans vne vigueur , capable de
les fortifier pour toutes leurs fon-
cheuſe langueur , tout le reſte du
corps tombera en foibleſſe , & ne
fera rien, dans la perfection ne-
ceſſaire. Lors qu'vne fontaine eſt
empeſtée , tous les ruiſſeaux ſont
corrompus : & cauſent la mort à
ceux qui en puiſent de l'eau.
ne ſanté , tous les membres ſeront
dans vne vigueur , capable de
les fortifier pour toutes leurs fon-
AVANT-PROPOS.
ctions. Si la teſte eſt dans vne faſ-cheuſe langueur , tout le reſte du
corps tombera en foibleſſe , & ne
fera rien, dans la perfection ne-
ceſſaire. Lors qu'vne fontaine eſt
empeſtée , tous les ruiſſeaux ſont
corrompus : & cauſent la mort à
ceux qui en puiſent de l'eau.
Ne croyez donc pas auoir
fait grand progrez par vos li-
urets : ſi vous n'aidez le pere
& la mere de famille : dont de-
pend la vertu & la ſaincteté
de tout le reſte des hommes. Iuſ-
ques icy ſont les entretiens de
mes amis , ou pluſtoſt des vô-
tres: qui me ſollicitoient de vous
aſſiſter.
fait grand progrez par vos li-
urets : ſi vous n'aidez le pere
& la mere de famille : dont de-
pend la vertu & la ſaincteté
de tout le reſte des hommes. Iuſ-
ques icy ſont les entretiens de
mes amis , ou pluſtoſt des vô-
tres: qui me ſollicitoient de vous
aſſiſter.
Ie ne vous rapporteray point
le reſte de leurs motifs. C'eſt
roiſſant tres-fort , i'y ay donné
les mains & le cœur : & me
ſuis euertué de trouuer des re-
medes à tous les maux que
vous ſouffrez : & à toutes les
paſſions , qui vous tranſportent.
Rendez-vous aux diſcours que
ie fais : & ie vous promets de la
part de Dieu , vne paix rem-
plie de ioye & de conſolation ,
dans les plus cuiſans trauaux
de cette vie : & vne immor-
telle felicité, dans le Ciel : où les
larmes & les plaintes ne trou-
ueront plus de lieu : & où vn
eternel repos aſſouuira tous les
deſirs de voſtre ame. Ainſi ſoit-
il.
le reſte de leurs motifs. C'eſt
AVANT-PROPOS.
aſſez , que ce raiſonnement pa-roiſſant tres-fort , i'y ay donné
les mains & le cœur : & me
ſuis euertué de trouuer des re-
medes à tous les maux que
vous ſouffrez : & à toutes les
paſſions , qui vous tranſportent.
Rendez-vous aux diſcours que
ie fais : & ie vous promets de la
part de Dieu , vne paix rem-
plie de ioye & de conſolation ,
dans les plus cuiſans trauaux
de cette vie : & vne immor-
telle felicité, dans le Ciel : où les
larmes & les plaintes ne trou-
ueront plus de lieu : & où vn
eternel repos aſſouuira tous les
deſirs de voſtre ame. Ainſi ſoit-
il.
bandeau
TABLE
filet mi-maigre
TABLE
DES CHAPITRES
CONTENVS EN CE LIVRE.
Livre premier.
filet mi-maigre
-
CHAPITRE I.
LE Mariage eſt vn excellent Eſtat de
vie , & tres-agreable à Dieu. page 1 -
CHAPITRE II.
Il ne ſe faut point marier par phantaiſie,
mais par vne meure deliberation 14 -
CHAPITRE III.
Il eſt fort difficile de n'eſtre point mal
marié. 23 -
CHAPITRE IV.
Ceux qui ſont mal Mariez , ſont dans
vn Eſtat tres douloureux. 30
§. I. Vne Femme mal marièe eſt vne Ame
damnèe, ſi elle n'y prend garde. là meſme.
§. II. Vn Homme mal marié eſt dans vn
faſcheux Purgatoire, quoy qu'il faſſe. 34
- CAAPITRE V.
Ceux qui ſont mal Mariez , ſe peuuentTABLE.faire de grands Saincts. 39
§. I. Vne Femme mal mariée , peut eſtre
vne glorieuſe Martyre de Iesvs-
Christ. 40
§. II. Vn Homme malmarié peut deuenir
vn parfait Confeſſeur de Iesvs-Christ. 44 -
CHAPITRE VI.
Quatre moyens generaux pour viure
content & ioyeux , eſtant mal marié. 49
§. I. La Patience oſte l'amertume des
choſes douloureuſes , qui arriuent dans le
meſnage. 50
§. II. La memoire de la Paſſion de Noſtre
Sauueur Iesvs-Christ, donne de la dou-
ceur dans l'amertume du meſnage. 57
§. III. L'exercice de la preſence de Dieu,
cauſe de la ioye au milieu des plus rudes
attaques. 63
§. IV. L'Oraiſon obtient les forces neceſ-
ſaires , & vne conſtante perſeuerance dans
les afflictions domeſtiques. 70
LIVRE DEVXIESME.
- Chapitree I.
LA Conſolation & la Direction d'vne
Femme , qui n'eſt point aimée de
ſon Mary. 76
TABLE.§. I. Remedes du coſté de la Femme , qui
croit n'eſtre point aimée par ſon mary. 79
§. II. Conſiderations pour le Mary qui
n'aime point ſa Femme. 93 -
CHAPITRE II.
La Conſolation & la Direction d'vne
Femme , qui eſt battuë par ſon Mary. 101
§. I. Aduis à la femme , qui eſt battüe par
ſon mary. 102
§. II. Aduis pour le mary qui bat ſa fem-
me. III -
CHAPITRE III.
La Conſolation & la Dirction d'vne
femme dont le mary eſt ialoux. I2I -
CHAPITRE IV.
La Conſolation & la Direction d'vne
Femme , qui a vn Mary débauché & peu
chaſte. 140 -
CHAPITRE V.
La Conſolation & la Direction d'vne
femme , qui eſt mal obeïe par ſes enfans
& par ſes ſeruiteurs, ſans que ſon mary les
maintienne dans leur deuoir. 162
§. I. Aduis pour la femme bafoüée par ſes
enfans , & par ſes ſeruiteurs. la meſme.
§. II. Aduis pour le Mary; dont la Fem-
me eſt mesprisée par ſes enfans , & par ſes ſer-
TABLE.uiteurs. 173
§. III. Aduis aux Enfans , qui meſpriſent
leur Mere. 184
§. IV. Auis aux Seruiteurs , qui meſpri-
ſent la Maiſtreſſe du logis. 187 -
CHAPITRE VI.
La Conſolation & la Direction d'vne
Femme, laquelle a vn Mary auaricieux; qui
la laiſſe & ſes enfans dans la neceſſité. 190 -
CHAPITRE VII.
La Conſolation & la Direction d'vne
Femme , dont le mary eſt faſcheux à ſon
Pere,à ſa Mere, à ſes enfans d'vn autre lict,
& aux Seruiteurs & Seruantes qu'elle af-
fectionne. 209
§. I. Aduis à la Femme , dont les parens ,
& les domeſtiques ſont mal traitez. la méme.
§. II. Aduis pour le Mary , en ce qui con-
cerne ſes enfans & ceux de ſa Femme. 214
§. III. Auis au Mary , touchant ſes ſer-
uiteurs & ſes ſeruantes , que ſa femme ſup-
porte. 222
§. IV. Auis au Mary , pour ce qui con-
cerne le Pere & la Mere de ſa Femme. 228 -
CHAPITRE VIII.
La Conſolation & la Direction d'vne
Femme , dont le Mary ne gagne rien , ou
parTABLE.par pareſſe, ou par maladie. 232 -
CHAPITRE IX.
La Conſolation & la Direction d'vne Fem-
me, qui a vn mary ignorant , ſtupide & mé-
prisé 252 -
CHAPITRE X.
La Conſolation & la Direction d'vne Fem-
me, dont le mary eſt gourmãd & yurogne. 272 -
CHAPITRE XI.
La Conſolation & la Direction d'vne Fem-
me , qui a vn Mary prodigue & joüeur. 289 - CHAPITRE XII.
La Conſolation & la Direction d'vne fem-
me , dont le Mary eſt impie , qui luy empeſ-
che ſes deuotions. 304
LIVRE III.
- Chap i. La loüange des fẽmes vertueuſes. 333
-
Chap. ii.
Quatre auis generaux , pour faire
d'vne mauuaiſe femme vne bonne. 344 -
Chap. iii.
La Conſolation & la Direction
d'vn Mary , dont la Femme aime trop les
Compagnies. 350 -
Cmap. iv.
La Conſolation & la Direction
d'vn mary , qui a vne femme libertine & dé-
bauchée. 367 -
Chap. v.
La conſolation & la Direction d'vn
Mary , dont la femme dépenſe trop en habit ,
& en d'autres ſuperfluitez. 394 -
Chap. vi.
La Conſolation & la Direction d'vn
mary , dont la femme eſt auaricieuſe. 410 -
Chap. vii.
La Conſolation & la Direction
d'vn mary,dont la femme traite mal ſon Pere,
ſa Mere , & ſes enfans d'vn autre lit. 429 -
Chap. viii.
La Conſolation & la Direction
TABLE.d'vn Mary , dont la femme eſt poſſedée de ia-
louſie. 440 -
Chap. ix.
La Conſolation & la Direction
d'vn Mary, dont la Femme eſt ſterile. 457 -
Chap. x.
La Conſolation & la Direction
d'vn mary , dont la femme eſt laide ou ma-
ladiue. 465 -
Chap. xi.
La Conſolation & la Direction
d'vn mary dont la Femme eſt groſſiere, ſtu-
pide & pareſſeuſe. 476 -
Chap. xii.
La Conſolation & la Direction
d'vn Mary, dont la femme eſt exceſſiue en ſes
deuotions. 486 -
Chap. xiii.
La Conſolation & la Direction
d'vn Mary , dont la Femme eſt babillarde , &
& inquietante par ſes plaintes & par ſes diſ-
cours impertinens. 501 -
Chap. xiv.
La Conſolation & la Direction
d'vn Mary , dont la Femme eſt colere mal
gracieuſe. 518 -
Chap. xv.
La Conſolation & la Direction
d'vn Mary , dont la Femme eſt ſuperbe &
deſobeïſſante. 546
LIVRE IV.
Vies de quelques Saints, de quelques Sain-
tes , & d'autres perſonnes illuſtres & vertu-
euſes , qui ont beaucoup ſouffert dans leurs
Mariages.
-
Chap. i.
La vie de Saint Iob , Miroir de Pa-
tience. 554 -
Chap. ii.
La vie de Louis le Debonnaire ,
Empereur & Roy de France. 564 -
Chap. iii.
La vie de ſainte Monique , Mere
de ſainct Auguſtin. 578
TABLE.
-
Chap. iv.
La vie de Saincte Anaſtaſie , Mar-
tyre. 586 -
Chap. v.
La vie de Saincte Elizabeth, Reyne
de Portugal. 590 -
Chap. vi.
La vie de la Bien-heureuſe Ieanne
Reine de France , & Fondatrice des Religieu-
ſes de l'Annonciation Noſtre-Dame. 602 -
Chap. vii.
La vie de Catherine d’Espagne ,
Reine d'Angleterre. 611 -
Chap. viii.
La Vie de Catherine Iagellon ,
ou de Pologne , Reine de Suede & de Go-
thie. 611 -
Chap. ix.
La Vie de Marie Teſſonniere , dite
Marie de Valance. 632 - Chap. x. La Vie de Saincte Godolene. 644
filet décoratif
Extraict du Priuilege du Roy.
PAr grace & Priuilege du Roy , don-
né à Paris le vnzieſme iourde Mars
1663. Il eſt permis à IEAN Riviere,
Marchand Libraire à Paris , d'imprimer
ou faire imprimer , vendre & debiter vn
Liure intitulé, La Direction & la Conſola-
tion des perſonnes mariées, Composé par le
Reuerend Pere Thomas le Blanc
Docteur en Theologie de la Compagnie
de Iesvs; Et deffenſes ſont faites à toutes
perſonnes de quelque qualité & condi-
imprimer ledit Liure pendant le temps &
eſpace de quinze ans entiers & accom-
plis , à compter du iour que ledit Liure
ſera acheué d'imprimer, à peine d'en cou-
rir l'amande & la confiſcation des exem-
plaires , ainſi qu'il eſt plus amplement
porté par ledit Priuilege.
né à Paris le vnzieſme iourde Mars
1663. Il eſt permis à IEAN Riviere,
Marchand Libraire à Paris , d'imprimer
ou faire imprimer , vendre & debiter vn
Liure intitulé, La Direction & la Conſola-
tion des perſonnes mariées, Composé par le
Reuerend Pere Thomas le Blanc
Docteur en Theologie de la Compagnie
de Iesvs; Et deffenſes ſont faites à toutes
perſonnes de quelque qualité & condi-
tion qu'elles ſoient , d'imprimer ou faireimprimer ledit Liure pendant le temps &
eſpace de quinze ans entiers & accom-
plis , à compter du iour que ledit Liure
ſera acheué d'imprimer, à peine d'en cou-
rir l'amande & la confiſcation des exem-
plaires , ainſi qu'il eſt plus amplement
porté par ledit Priuilege.
Et ledit Riviere a aſſocié auec
luy Gilles Andre' & Clavde Calle-
ville, pour en ioüir coniontement en-
ſemble , ſuiuant l'accord fait entre eux.
luy Gilles Andre' & Clavde Calle-
ville, pour en ioüir coniontement en-
ſemble , ſuiuant l'accord fait entre eux.
Regiſtré ſur le Liure de la Communauté
des Marchands Libraires & Imprimeurs de
cette Ville de Paris , ſuiuant & conforme-
ment à l'Arreſt de la Cour de Parlement ,
du 8. Auril 1653. & aux charges portées
par le preſent Priuilege.
des Marchands Libraires & Imprimeurs de
cette Ville de Paris , ſuiuant & conforme-
ment à l'Arreſt de la Cour de Parlement ,
du 8. Auril 1653. & aux charges portées
par le preſent Priuilege.
Acheué d'imprimer pour la premiere fois
le 24. Avril 1664.
le 24. Avril 1664.
Les Exemplaires ont eſté fournis.
I
bandeau
LA
DIRECTION
ET LA
CONSOLATION
DES PERSONNES
MARIEES.
LIVRE PREMIER.
filet mi-maigre
CHAPITRE PREMIER.
Le Mariage eſt vn excellent Eſtat de
vie, & tres-agreable à Dieu.
lettrine; "I" (J) encadré, entouré de feuilles
I.
I
E
ne pretẽs point diſputer
aux Vierges & aux Reli-
gieux, les auantages & les
prerogatiues qu'ils ont au deſſus de
ceux qui ſont engagez dans les liens
famille.
aux Vierges & aux Reli-
gieux, les auantages & les
prerogatiues qu'ils ont au deſſus de
ceux qui ſont engagez dans les liens
A
2
La direction & la Conſolation
du Mariage , & dans les ſoins d'vnefamille.
Mais ie maintiens,que les perſonnes
mariées peuuẽt arriuer à vne haute,
tres-heroïque , & tres-admirable ſain-
cteté : s'ils veulent cooperer aux graces
que Dieu leur preſente,& ſe ſeruir des
occaſiõs qu'ils rencõtrent pour s'éleuer
aux plus hauts degrez de perfection.
mariées peuuẽt arriuer à vne haute,
tres-heroïque , & tres-admirable ſain-
cteté : s'ils veulent cooperer aux graces
que Dieu leur preſente,& ſe ſeruir des
occaſiõs qu'ils rencõtrent pour s'éleuer
aux plus hauts degrez de perfection.
I'auouë qu'vn homme marié ne
peut demeurer iour & nuict à l'Egliſe
pour y chanter les loüanges de Dieu:
qu'il ne peut ny porter ſouuent des ci-
lices & des haires , ny faire pluſieurs
diſciplines8, ny jeuſner au pain & à
l'eau , ny ſe tenir retiré dans vne ſoli-
tude , pour vacquer à la contempla-
tion des choſes diuines , auec vne ſi
tranquille & ſi parfaite liberté d'eſprit,
qu'vn Chartreux9 ou qu'vn Anachorete10.
peut demeurer iour & nuict à l'Egliſe
pour y chanter les loüanges de Dieu:
qu'il ne peut ny porter ſouuent des ci-
lices & des haires , ny faire pluſieurs
diſciplines8, ny jeuſner au pain & à
l'eau , ny ſe tenir retiré dans vne ſoli-
tude , pour vacquer à la contempla-
tion des choſes diuines , auec vne ſi
tranquille & ſi parfaite liberté d'eſprit,
qu'vn Chartreux9 ou qu'vn Anachorete10.
Mais il peut exercer la Charité , qui
eſt la Reine & la plus eminente de
toutes les vertus , la patience , la de-
bonnaireté, la juſtice, la force, la tem-
perance , l'humilité , & toutes les
ſainctes actions d'vn Chreſtien. Il en
trouue à chaque moment des ſujets
enuers ſes ſeruiteurs & ſes ſeruantes.
Sa porte luy offre tous les iours des
boiteux, des aueugles, des eſtropiants,
& des perſonnes reduites à vne extre-
me pauureté. Il a ſes Fermiers neceſſi-
teux à diriger & à ſoulager. Il entend
ſouuent ſes voiſins , ſes parens & ſes
amis qui implorent ſon aſſiſtance. Il
peut ſelon ſes moyens & ſon eſprit,
ſouſtenir ſa Ville , ſa Prouince & ſon
Royaume : y contribuër de ſes ſoins,
de ſes conſeils, de ſon argent , & de
ſon ſang, ſi la neceſſité l'y oblige. Se-
lon ſa vocation , il aide les villageois
dans leurs procez,dans leurs affaires,
& dans leurs miſeres ; leur donnant
conſeil , trauaillant pour eux, & leur
eſlargiſſant ce dont ils ont beſoin.
eſt la Reine & la plus eminente de
toutes les vertus , la patience , la de-
bonnaireté, la juſtice, la force, la tem-
perance , l'humilité , & toutes les
ſainctes actions d'vn Chreſtien. Il en
trouue à chaque moment des ſujets
3
des perſonnes Mariées.
enuers ſa femme , enuers ſes enfans,enuers ſes ſeruiteurs & ſes ſeruantes.
Sa porte luy offre tous les iours des
boiteux, des aueugles, des eſtropiants,
& des perſonnes reduites à vne extre-
me pauureté. Il a ſes Fermiers neceſſi-
teux à diriger & à ſoulager. Il entend
ſouuent ſes voiſins , ſes parens & ſes
amis qui implorent ſon aſſiſtance. Il
peut ſelon ſes moyens & ſon eſprit,
ſouſtenir ſa Ville , ſa Prouince & ſon
Royaume : y contribuër de ſes ſoins,
de ſes conſeils, de ſon argent , & de
ſon ſang, ſi la neceſſité l'y oblige. Se-
lon ſa vocation , il aide les villageois
dans leurs procez,dans leurs affaires,
& dans leurs miſeres ; leur donnant
conſeil , trauaillant pour eux, & leur
eſlargiſſant ce dont ils ont beſoin.
II. Dieu eſt vn ſage Pere de famille.
Il occupe ſes enfans à diuers Meſtiers;
où ils peuuent s'auancer & faire for-
tune.
Il occupe ſes enfans à diuers Meſtiers;
où ils peuuent s'auancer & faire for-
tune.
Les Vacations & les Offices des
hommes ſont ſemblables aux ſaiſons
de l'année, qui ont leurs commoditez
& leurs difficultez. Dieu les fauoriſe
honoré la Virginité en naiſſant d'vne
Vierge ; il a voulu qu'elle fuſt mariée.
Il a choiſi l'Apoſtre ſainct Iean Vierge
pour eſtre ſon Bien-aimé : mais il a
pris ſainct Pierre qui auoit eſté marié,
pour eſtre le chef de toute ſon Egliſe.
Noé le Reparateur du Monde , Abra-
ham le Pere des Croyans,tous les Pa-
triarches & preſque tous les Prophetes
ont eſté mariez, & ont eu des enfans.
Moïſe , le Legiſlateur des Hebreux,
qui auoit dompté Pharaon & toute
l'Egypte par de prodigieux miracles ;
qui auec ſa houlette auoit changé l'eau
en ſang, & la pouſſiere de la terre en
grenoüilles & en mouſches : qui auoit
ouuert la Mer rouge, pour y faire paſſer
trois millions de perſonnes à pied ſec :
qui ne marchoit qu'à la lumiere d'vn
Ange caché dãs vne nuée: qui parloit à
Dieu face à face, auec la meſme fami-
liarité qu'vn amy diſcourt auec ſon
amy : qui ſortoit de l'oraiſon auec vn
viſage tout éclatant & lumineux : qui
faiſoit pleuuoir le pain du Ciel , &
ſortir l'eau des rochers , auoit vne
hommes ſont ſemblables aux ſaiſons
de l'année, qui ont leurs commoditez
& leurs difficultez. Dieu les fauoriſe
A ij
4
La direction & la Conſolation
tous , & offre ſon aide à tous. S'il ahonoré la Virginité en naiſſant d'vne
Vierge ; il a voulu qu'elle fuſt mariée.
Il a choiſi l'Apoſtre ſainct Iean Vierge
pour eſtre ſon Bien-aimé : mais il a
pris ſainct Pierre qui auoit eſté marié,
pour eſtre le chef de toute ſon Egliſe.
Noé le Reparateur du Monde , Abra-
ham le Pere des Croyans,tous les Pa-
triarches & preſque tous les Prophetes
ont eſté mariez, & ont eu des enfans.
Moïſe , le Legiſlateur des Hebreux,
qui auoit dompté Pharaon & toute
l'Egypte par de prodigieux miracles ;
qui auec ſa houlette auoit changé l'eau
en ſang, & la pouſſiere de la terre en
grenoüilles & en mouſches : qui auoit
ouuert la Mer rouge, pour y faire paſſer
trois millions de perſonnes à pied ſec :
qui ne marchoit qu'à la lumiere d'vn
Ange caché dãs vne nuée: qui parloit à
Dieu face à face, auec la meſme fami-
liarité qu'vn amy diſcourt auec ſon
amy : qui ſortoit de l'oraiſon auec vn
viſage tout éclatant & lumineux : qui
faiſoit pleuuoir le pain du Ciel , &
ſortir l'eau des rochers , auoit vne
5
des perſonnes Mariées.
femme & enfans.III. Dans la Loy de grace , noſtre
Sauueur a voulu aller aux nopces, auec
la glorieuſe Vierge ſa Mere , & auec
tous ſes Apoſtres : & les honorer par
le premier de ſes miracles : conuertiſ-
ſant l'eau en vn vin delicieux.
Sauueur a voulu aller aux nopces, auec
la glorieuſe Vierge ſa Mere , & auec
tous ſes Apoſtres : & les honorer par
le premier de ſes miracles : conuertiſ-
ſant l'eau en vn vin delicieux.
Il donne maintenant ſa benediction
à tous ceux qui reçoiuent le Sacrement
de Mariage : & leur confere la grace
ſanctifiante, s'ils y ſont bien diſpoſez.
Ce qui eſt le plus conſiderable , & qui
peut cauſer vne grande ioye, c'eſt que
le Sacrement laiſſe vn droit d'auoir
d'autres graces actuelles, dans les oc-
currences , & dans le beſoin de l'Eſtat,
où l'on doit viure le reſte de ſes iours.
à tous ceux qui reçoiuent le Sacrement
de Mariage : & leur confere la grace
ſanctifiante, s'ils y ſont bien diſpoſez.
Ce qui eſt le plus conſiderable , & qui
peut cauſer vne grande ioye, c'eſt que
le Sacrement laiſſe vn droit d'auoir
d'autres graces actuelles, dans les oc-
currences , & dans le beſoin de l'Eſtat,
où l'on doit viure le reſte de ſes iours.
Ces graces ont eſté ſi puiſſantes ,
qu'elles ont fait de tres - excellens
Saincts : & ont donné à l'Egliſe des fa-
milles; où le mary & la femme ont eſté
canoniſez. Tels ſont ſainct Xenophon,
& ſa femme Marie : ſainct Caſtule , &
ſaincte Irene : ſainct Nicoſtrate , &
ſaincte Zoë: ſainct Seuerien, & ſaincte
Aquila : ſainct Adrien , & ſaincte Na-
talie : ſainct Maxime , & ſaincte Se-
On pourroit en rapporter diuers au-
tres, s'il eſtoit neceſſaire : & vous eſtes
certain , qu'il ne tient qu'à vous d'e-
ſtre du nombre de ces amis de noſtre
Seigneur.
qu'elles ont fait de tres - excellens
Saincts : & ont donné à l'Egliſe des fa-
milles; où le mary & la femme ont eſté
canoniſez. Tels ſont ſainct Xenophon,
& ſa femme Marie : ſainct Caſtule , &
ſaincte Irene : ſainct Nicoſtrate , &
ſaincte Zoë: ſainct Seuerien, & ſaincte
Aquila : ſainct Adrien , & ſaincte Na-
talie : ſainct Maxime , & ſaincte Se-
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La Direction & la Conſolation
conde: ſainct Lucien , & ſaincte Paule.On pourroit en rapporter diuers au-
tres, s'il eſtoit neceſſaire : & vous eſtes
certain , qu'il ne tient qu'à vous d'e-
ſtre du nombre de ces amis de noſtre
Seigneur.
IV. Le Mariage ne donne pas ſeule-
ment au Ciel le mary & la femme : il
les fait comme des arbres de vie11, au
milieu du Paradis terreſtre de l'Egliſe :
qui portent des fruicts dignes des
yeux, des mains, & de la bouche de
Dieu.
ment au Ciel le mary & la femme : il
les fait comme des arbres de vie11, au
milieu du Paradis terreſtre de l'Egliſe :
qui portent des fruicts dignes des
yeux, des mains, & de la bouche de
Dieu.
Quelle choſe pourroit eſtre plus
agreable à cette diuine Majeſté , que
de contempler la mere des Machabées,
auec ſes ſept enfans qu'elle anime au
martyre ? que de voir les ſainctes Feli-
cité & Symphoroſe auec vn pareil
Mari-
næus
& Ma-
riana
hiſt.
Hiſp.
ſed vo-
cat
Mar-
cellum
nombre ? & ſainct Martiel auec onze
enfans, qui gagnerent tous la palme
& la couronne d'vn glorieux Martyre?
Saincte None ſa femme mourut d'vne
façon miraculeuſe avec le douzieſme.
agreable à cette diuine Majeſté , que
de contempler la mere des Machabées,
auec ſes ſept enfans qu'elle anime au
martyre ? que de voir les ſainctes Feli-
cité & Symphoroſe auec vn pareil
Mari-
næus
& Ma-
riana
hiſt.
Hiſp.
ſed vo-
cat
Mar-
cellum
nombre ? & ſainct Martiel auec onze
enfans, qui gagnerent tous la palme
& la couronne d'vn glorieux Martyre?
Saincte None ſa femme mourut d'vne
façon miraculeuſe avec le douzieſme.
V. Vn Religieux n'a point cét auan-
tage. Il eſt vn arbre excellent au par-
terre de l'Egliſe: mais il eſt ſterile. Que
la culture des ames : il ne trauaille que
ſur la matiere que luy offre le Mariage.
Et il s'eſt trouué des hommes mariez,
qui ont conuerty autant ou plus de
perſonnes à la veritable Foy qu'aucun
Religieux.
tage. Il eſt vn arbre excellent au par-
terre de l'Egliſe: mais il eſt ſterile. Que
7
des perſonnes Mariées.
s'il recompenſe par ſes inſtructions, enla culture des ames : il ne trauaille que
ſur la matiere que luy offre le Mariage.
Et il s'eſt trouué des hommes mariez,
qui ont conuerty autant ou plus de
perſonnes à la veritable Foy qu'aucun
Religieux.
Sainct Eſtienne Roy d'Hongrie,
eſt eſtimé l'Apoſtre de toutes les Pro-
uinces de ce beau Royaume. Sainct
Charlemagne Empereur & Roy de
France, eſt appellé l'Apoſtre des Sa-
xons. Il les a inſtruits & conuertis,
auec la bouche des machines de guer-
re , & auec la langue des eſpées. Il a
auſſi beaucoup ſeruy à l'Eſpagne & à
d'autres Royaumes , pour y mainte-
nir la veritable Religion contre les In-
fidelles ?
eſt eſtimé l'Apoſtre de toutes les Pro-
uinces de ce beau Royaume. Sainct
Charlemagne Empereur & Roy de
France, eſt appellé l'Apoſtre des Sa-
xons. Il les a inſtruits & conuertis,
auec la bouche des machines de guer-
re , & auec la langue des eſpées. Il a
auſſi beaucoup ſeruy à l'Eſpagne & à
d'autres Royaumes , pour y mainte-
nir la veritable Religion contre les In-
fidelles ?
VI. De plus, qui eſt-ce qui a don-
né à l'Egliſe les Religieux. Qui eſt-ce
qui leur baſtit des Monaſteres ? Qui
eſt-ce qui leur donne des rentes ? Qui
conſerue leurs biens des vſurpations
de l'impieté, ſinon les perſonnes ma-
riées,leſquelles par leurs trauaux s'ac-
quierent des richeſſes : & par leur pie-
mains de ſes ſeruiteurs particuliers.
né à l'Egliſe les Religieux. Qui eſt-ce
qui leur baſtit des Monaſteres ? Qui
eſt-ce qui leur donne des rentes ? Qui
conſerue leurs biens des vſurpations
de l'impieté, ſinon les perſonnes ma-
riées,leſquelles par leurs trauaux s'ac-
quierent des richeſſes : & par leur pie-
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8
La Direction & la Conſolation
té les conſacrent à Dieu , entre lesmains de ſes ſeruiteurs particuliers.
Et il peut arriuer que par l'exerci-
ce de la Charité , de la Iuſtice , de la
Patience, & de diuerſes autres vertus:
vn homme marié ſera plus vertueux
qu'vn Religieux, encore que ſon eſtat
ait moins de perfection. Sainct Ald
helme dit, en ſon Traicté qu'il a com-
poſé de la Virginité.
Quand cela ſeroit veritable: ie pour-
rois dire que l'airain de Corinthe a
eſté autrefois plus eſtimé que l'or
meſme.
ce de la Charité , de la Iuſtice , de la
Patience, & de diuerſes autres vertus:
vn homme marié ſera plus vertueux
qu'vn Religieux, encore que ſon eſtat
ait moins de perfection. Sainct Ald
helme dit, en ſon Traicté qu'il a com-
poſé de la Virginité.
La Virginité eſt
de l'Or: l'Eſtat des Veuues eſt de l'ar-
gent , & le Mariage eſt de l'airain.
Quand cela ſeroit veritable: ie pour-
rois dire que l'airain de Corinthe a
eſté autrefois plus eſtimé que l'or
meſme.
VII. Que ſi le Mariage eſt vn eſtat
propre pour les parfaits, il l'eſt beau-
coup plus pour les foibles, qui ſont
agitez de faſcheuſes tentations , &
ſont continuellement dans les flots, en
peril de faire vn triſte naufrage. Le
Mariage eſt un port, comme l'appelle
Sainct Gregoire , lequel conſeille ſa-
gement, à ceux qui ſont dans ces agi-
tations d'eſprit & de corps , de ſe lier à
cét Eſtat qui eſt donné de Dieu pour le
L. 12.
Mor.
procreation des enfans.
propre pour les parfaits, il l'eſt beau-
coup plus pour les foibles, qui ſont
agitez de faſcheuſes tentations , &
ſont continuellement dans les flots, en
peril de faire vn triſte naufrage. Le
Mariage eſt un port, comme l'appelle
Sainct Gregoire , lequel conſeille ſa-
gement, à ceux qui ſont dans ces agi-
tations d'eſprit & de corps , de ſe lier à
cét Eſtat qui eſt donné de Dieu pour le
9
des perſonnes Mariées.
remede de la concupiſcence, & pour laL. 12.
Mor.
procreation des enfans.
Ceux, dit-il,
qui ſouffrent auec difficulté, & qui ont.
peine de ſurmonter les vagues des ten-
tations de la chair, doiuent ſe retirer au
port du Mariage
L'Apoſtre dit clairement , qu'il
eſt meilleur de ſe marier, que de ſe
conſumer dans les ardeurs de ſon
corps. Car il n'y a nulle offenſe en ſe
mariant : pourueu qu'on ne ſe ſoit
point aſtreint par aucun vœu, à vne
autre maniere de vie. Ainſi parle ſainct
Gregoire.
eſt meilleur de ſe marier, que de ſe
conſumer dans les ardeurs de ſon
corps. Car il n'y a nulle offenſe en ſe
mariant : pourueu qu'on ne ſe ſoit
point aſtreint par aucun vœu, à vne
autre maniere de vie. Ainſi parle ſainct
Gregoire.
VIII. La ſaincte Egliſe a condam-
né comme heretiques, ceux qui ont
reprouué les nopces, Et veut meſmes
qu'on ſe puiſſe marier pluſieurs fois,
ſi la neceſſité ou l'vtilité y oblige.
né comme heretiques, ceux qui ont
reprouué les nopces, Et veut meſmes
qu'on ſe puiſſe marier pluſieurs fois,
ſi la neceſſité ou l'vtilité y oblige.
Sainct Paul écriuant à ſainct Ti-
I. Tin.
4. mothée , Eueſque d'Epheſe , declare
ouuertement, que ceux qui defendent
de ſe marier, ſe ſont retirez de la veri-
table creance , qu'ils s'arreſtent à vn
eſprit d'erreur , & à la doctrie des de-
mons : que ce ſont des hypocrites, des
menteurs, & des hommes qui ont la
I. Tin.
4. mothée , Eueſque d'Epheſe , declare
ouuertement, que ceux qui defendent
de ſe marier, ſe ſont retirez de la veri-
table creance , qu'ils s'arreſtent à vn
eſprit d'erreur , & à la doctrie des de-
mons : que ce ſont des hypocrites, des
menteurs, & des hommes qui ont la
A v
10
La Direction & la Conſolation
conſcience cauteriſée.Eſcriuant aux Hebreux12 , il dit,
Eph. 5.
32.
Eph. 5.
32.
Que le Mariage doit eſtre honoré de: Et aux Epheſiens ,
tous
Que c'eſt vn.
Sacrement qui eſt grand en Ieſus-Chriſt
& en l'Egliſe
IX. Dieu l'a inſtitué : & a ordonné
que nulle puiſſance humaine ne puiſſe
ſeparer le mary d'auec ſa femme , ny la
femme d'auec ſon mary : puis que luy-
meſme les a vnis en deux corps, pour
eſtre vne meſme choſe.
que nulle puiſſance humaine ne puiſſe
ſeparer le mary d'auec ſa femme , ny la
femme d'auec ſon mary : puis que luy-
meſme les a vnis en deux corps, pour
eſtre vne meſme choſe.
X. L'Ange Raphaël conduiſit le
jeune Tobie auec de merueilleux ſoins,
& auec vne bonté incomparable : afin
de luy trouuer vne femme. Il luy en-
ſeigna tout ce qu'il deuoit faire en ſui-
te, meſmes pour ce qui concernoit l'v-
ſage du Mariage. Ce qui prouue eui-
demment que tout y eſt ſainct:moyen-
nant qu'on y ſuiue les loix que Dieu y
a ordonnées.
jeune Tobie auec de merueilleux ſoins,
& auec vne bonté incomparable : afin
de luy trouuer vne femme. Il luy en-
ſeigna tout ce qu'il deuoit faire en ſui-
te, meſmes pour ce qui concernoit l'v-
ſage du Mariage. Ce qui prouue eui-
demment que tout y eſt ſainct:moyen-
nant qu'on y ſuiue les loix que Dieu y
a ordonnées.
XI. Dieu meſme commanda au
Prophete Oſée de prendre vne femme,
de taſcher d'en auoir des enfans, & de
leur impoſer les noms qu'il luy deſi-
gna. Que peuuent dire les ennemis du
preſſantes & ſi euidentes.
Prophete Oſée de prendre vne femme,
de taſcher d'en auoir des enfans, & de
leur impoſer les noms qu'il luy deſi-
gna. Que peuuent dire les ennemis du
11
des perſonnes Mariées.
Mariage contre toutes ces raiſons ſipreſſantes & ſi euidentes.
XII. Sainct Auguſtin auance vne
In
Pſal-
99.13 propoſition plus auantageuſe aux per-
ſonnes qui ſont dans le tracas du mé-
nage , aſſeurant qu'vne perſonne ma-
riée , qui eſt humble , eſt meilleure
qu'vn Religieux qui eſt orgueilleux.
In
Pſal-
99.13 propoſition plus auantageuſe aux per-
ſonnes qui ſont dans le tracas du mé-
nage , aſſeurant qu'vne perſonne ma-
riée , qui eſt humble , eſt meilleure
qu'vn Religieux qui eſt orgueilleux.
XIII. Ie ne m'arreſteray point à
vous déduire vne verité qui eſt toute
éuidente. Que le Mariage fait preſ-
que tout l'ornement du monde.
C'eſt le Mariage qui a aſſemblé les
hommes en des Communautez: qui a
eſtably les Loix , qui les a fait obſer-
uer: qui a baſty les Villes & les Palais:
qui a cultiué les terres & les vignes :
qui dirige les armées : qui trauerſe les
mers , & qui exerce tous les Arts que
nous voyons , & que nous admirons.
vous déduire vne verité qui eſt toute
éuidente. Que le Mariage fait preſ-
que tout l'ornement du monde.
C'eſt le Mariage qui a aſſemblé les
hommes en des Communautez: qui a
eſtably les Loix , qui les a fait obſer-
uer: qui a baſty les Villes & les Palais:
qui a cultiué les terres & les vignes :
qui dirige les armées : qui trauerſe les
mers , & qui exerce tous les Arts que
nous voyons , & que nous admirons.
Demandez à vn Marchand qui va
aux Indes , ſans ſe ſoucier ny des flots
de la mer, ny des rochers de la terre,ny
des vens de l'air , ny des Pyrates, ny de
mille incommoditez , quel motif il a
de ſon voyage ? Il vous répondra in-
continent : Que le deſſein d'enrichir
frayeur des perils qui s'offrent à luy
tous les iours.
aux Indes , ſans ſe ſoucier ny des flots
de la mer, ny des rochers de la terre,ny
des vens de l'air , ny des Pyrates, ny de
mille incommoditez , quel motif il a
de ſon voyage ? Il vous répondra in-
continent : Que le deſſein d'enrichir
A v
12
La Direction & la Conſolation
ſes enfans l'anime , & luy oſte lafrayeur des perils qui s'offrent à luy
tous les iours.
Interrogez vn Seigneur, Qui eſt-
ce qui le pouſſe à expoſer ſa vie dans
les attaques des Villes, dans les batail-
les & dans les aſſauts , il dira : Que le
deſir d'auancer ſa famille , pour le bien
de ſa poſterité , luy communique cette
ardeur, & luy fortifie le cœur14 & les
bras.
ce qui le pouſſe à expoſer ſa vie dans
les attaques des Villes, dans les batail-
les & dans les aſſauts , il dira : Que le
deſir d'auancer ſa famille , pour le bien
de ſa poſterité , luy communique cette
ardeur, & luy fortifie le cœur14 & les
bras.
XIV. Enfin , ſi vous oſtiez le Ma-
riage de la terre, vous oſteriez la cha-
rité des familles, n'y ayant nulle liai-
ſon entre les hommes. Aujourd'huy,
on rejette au nombre des beſtes brutes,
ceux qui n'aiment pas leurs femmes,
leurs enfans , leurs peres , leurs meres,
leurs oncles , leurs tantes , leur cou-
ſins , leurs couſines , & tous les
alliez.
riage de la terre, vous oſteriez la cha-
rité des familles, n'y ayant nulle liai-
ſon entre les hommes. Aujourd'huy,
on rejette au nombre des beſtes brutes,
ceux qui n'aiment pas leurs femmes,
leurs enfans , leurs peres , leurs meres,
leurs oncles , leurs tantes , leur cou-
ſins , leurs couſines , & tous les
alliez.
L'eſperance meſme de pouuoir vn
iour s'allier à vne famille, auec laquel-
le on n'a nulle proximité de ſang , fait
qu'on agit auec tous ceux d'vne ville
& d'vn païs auec plus de reſerue , que
ſi l'on eſtoit certain, que iamais on ne
liance : Et pour cette cauſe, l'Egliſe a
defendu , que les parens aux quatre
premiers degrez ne ſe puiſſent marier
enſemble , afin que diuerſes familles
ayent vn moyen plus facile de s'vnir
en charité. Et de ce fait, on trouue des
Villes , où la pluſpart ſont liez
par le moyen de parenté ou d'al-
liance,du mary ou de la femme : ce qui
empeſche beaucoup de haines , de de-
tractions , de proccz , & d'autres in-
conueniens.
iour s'allier à vne famille, auec laquel-
le on n'a nulle proximité de ſang , fait
qu'on agit auec tous ceux d'vne ville
& d'vn païs auec plus de reſerue , que
ſi l'on eſtoit certain, que iamais on ne
13
des perſonnes Mariées.
pourroit y auoir aucune vnion ny al-liance : Et pour cette cauſe, l'Egliſe a
defendu , que les parens aux quatre
premiers degrez ne ſe puiſſent marier
enſemble , afin que diuerſes familles
ayent vn moyen plus facile de s'vnir
en charité. Et de ce fait, on trouue des
Villes , où la pluſpart ſont liez
par le moyen de parenté ou d'al-
liance,du mary ou de la femme : ce qui
empeſche beaucoup de haines , de de-
tractions , de proccz , & d'autres in-
conueniens.
XV. Si Dieu auoit ordonné , com-
me il pouuoit , que la production des
hommes ſe fiſt ſans le Mariage : toute
la terre ſeroit vn deſert. L'vn ſe retire-
roit dans vn bois, pour n'eſtre inter-
rompu de perſonne. L'autre ſe cache-
roit dans quelque grotte de monta-
gne , ou dans quelque petite cabane
de Berger. Chacun demeureroit dans
vn chagrin melancholique , & ne ſe
ſoucieroit de choſe aucune qui con-
cernaſt le bien public.
me il pouuoit , que la production des
hommes ſe fiſt ſans le Mariage : toute
la terre ſeroit vn deſert. L'vn ſe retire-
roit dans vn bois, pour n'eſtre inter-
rompu de perſonne. L'autre ſe cache-
roit dans quelque grotte de monta-
gne , ou dans quelque petite cabane
de Berger. Chacun demeureroit dans
vn chagrin melancholique , & ne ſe
ſoucieroit de choſe aucune qui con-
cernaſt le bien public.
XVI. Ne mépriſons donc point le
Sacrement de Mariage, puis qu'il eſt
que , & pour l'vtilité des familles:que
Dieu l'a inſtitué & commandé : que
Ieſus-Chriſt l'a honoré de ſa preſence,
& eſleué à la dignité d'vn Sacrement
de ſon Egliſe : que les Anges l'ont
conſeillé, & que tous les Saincts l'ont
loüé & reſpecté, dans la conſideration
de ſes vtilitez, pour l'eſtabliſſement des
Royaumes , pour la victoire de tenta-
tions , & pour l'acquiſition des plus
eminentes vertus.
Sacrement de Mariage, puis qu'il eſt
14
La Direction & la Conſolation
ſi vtile , & pour le bien de la Republi-que , & pour l'vtilité des familles:que
Dieu l'a inſtitué & commandé : que
Ieſus-Chriſt l'a honoré de ſa preſence,
& eſleué à la dignité d'vn Sacrement
de ſon Egliſe : que les Anges l'ont
conſeillé, & que tous les Saincts l'ont
loüé & reſpecté, dans la conſideration
de ſes vtilitez, pour l'eſtabliſſement des
Royaumes , pour la victoire de tenta-
tions , & pour l'acquiſition des plus
eminentes vertus.
filet décoratif
CHAPITRE II.
CHAPITRE II.
Il ne ſe faut point marier par phan-
taiſie, mais par vne meure
deliberation.
I.
LE feu de la jeuneſſe eſt ſi actif,
& fait ſes efforts auec tant de
promptitude , qu'il eſt ſouuent impoſ-
ſible à la prudence humaine de mode-
rer ſes ardeurs & d'empeſcher ſes ra-
uages. Que ſi l'amour y meſle ſes
ſemblable à vn torrent impetueux, qui
ſortant d'vne montagne enflammée,
deſole toute la campagne, & ne peut
eſtre retenu par aucune induſtrie15.
& fait ſes efforts auec tant de
promptitude , qu'il eſt ſouuent impoſ-
ſible à la prudence humaine de mode-
rer ſes ardeurs & d'empeſcher ſes ra-
uages. Que ſi l'amour y meſle ſes
15
des perſonnes Mariées.
flammes & ſon aueuglement , il eſtſemblable à vn torrent impetueux, qui
ſortant d'vne montagne enflammée,
deſole toute la campagne, & ne peut
eſtre retenu par aucune induſtrie15.
La jeuneſſe qui bruſle du feu de
l'amour, pour venir à bout de ſes deſ-
ſeins , foule aux pieds ſa nobleſſe , ſes
richeſſes , ſa ſanté, ſes commoditez, &
tout ce qui eſt de plus ſouhaitable en la
vie.
l'amour, pour venir à bout de ſes deſ-
ſeins , foule aux pieds ſa nobleſſe , ſes
richeſſes , ſa ſanté, ſes commoditez, &
tout ce qui eſt de plus ſouhaitable en la
vie.
II. Pour grands que ſoient les
maux , qui ſont cauſez par la temerité
d'vn jeune homme , ils paroiſſent tole-
rables, s'ils ſont de peu de durée. Mais
vn Mariage mal fait eſt vn malheur
eternel, & dont rien ne peut deliurer
que la mort d'vne des deux parties.
C'eſt Ieſus-Chriſt meſme qui l'ordon-
ne en ſainct Matthieu.
maux , qui ſont cauſez par la temerité
d'vn jeune homme , ils paroiſſent tole-
rables, s'ils ſont de peu de durée. Mais
vn Mariage mal fait eſt vn malheur
eternel, & dont rien ne peut deliurer
que la mort d'vne des deux parties.
C'eſt Ieſus-Chriſt meſme qui l'ordon-
ne en ſainct Matthieu.
Que l'homme.
Cap.
19.16 ne ſepare point ceux, que Dieu a con-
joints enſemble
III. L'Amour eſt vn feu de paille
qui s'allume dans vn clin d'œil, qui
éleue ſes flâmes fort haut,& qui a vn ſi
furieux embraſement , qu'il eſt capa-
ble de reduire en cendres les plus belles
Neantmoins ce feu folet s'eſteint fa-
cilement , & lors qu'on y penſe le
moins.
qui s'allume dans vn clin d'œil, qui
éleue ſes flâmes fort haut,& qui a vn ſi
furieux embraſement , qu'il eſt capa-
ble de reduire en cendres les plus belles
16
La Direction & la Conſolation
maiſons , & les plus riches Palais.Neantmoins ce feu folet s'eſteint fa-
cilement , & lors qu'on y penſe le
moins.
Qui plus eſt, lors qu'il n'eſt fondé
que ſur vne vaine phantaiſie, ſur vne
illuſion de beauté , ou ſur quelque
choſe ſujette à changement:il ſe trans-
forme ſouuent en vne ſi grande haine,
qu'on ne peut ſouffrir la veuë de l'ob-
jet , qui auoit charmé les ſens & le
cœur : & qu'on auoit recherché à tra-
uers les eſpées & les hazards d'vne
mort honteuſe.
que ſur vne vaine phantaiſie, ſur vne
illuſion de beauté , ou ſur quelque
choſe ſujette à changement:il ſe trans-
forme ſouuent en vne ſi grande haine,
qu'on ne peut ſouffrir la veuë de l'ob-
jet , qui auoit charmé les ſens & le
cœur : & qu'on auoit recherché à tra-
uers les eſpées & les hazards d'vne
mort honteuſe.
Cette verité parut dans Amnon,
le fils aiſné du Roy Dauid, Ce jeune
Prince,charmé & enſorcelé de la beau-
té de ſa ſœur Thamar , la força &
en abuſa. A l'inſtant, il conçeut vne
ſi déraiſonnable & ſi furieuſe auerſion
d'elle , qu'il la chaſſa de ſon logis , &
n'en voulut iamais plus oüir parler.
le fils aiſné du Roy Dauid, Ce jeune
Prince,charmé & enſorcelé de la beau-
té de ſa ſœur Thamar , la força &
en abuſa. A l'inſtant, il conçeut vne
ſi déraiſonnable & ſi furieuſe auerſion
d'elle , qu'il la chaſſa de ſon logis , &
n'en voulut iamais plus oüir parler.
Pluſieurs ſont comme les poiſ-
ſons , qui à la veuë de la naſſe deſirent
d'y entrer : & qui ne ſont pas pluſtoſt
dedans , qu'ils font tous leurs efforts
pour en ſortir. Vous les pouuez auſſi
l'amorce , & qui ſe trouuant pris au
glu , ſe tourmentent en battant des
aiſles pour ſe dégager.
ſons , qui à la veuë de la naſſe deſirent
d'y entrer : & qui ne ſont pas pluſtoſt
dedans , qu'ils font tous leurs efforts
pour en ſortir. Vous les pouuez auſſi
17
des perſonnes Mariées.
comparer aux oyſeaux qui courent àl'amorce , & qui ſe trouuant pris au
glu , ſe tourmentent en battant des
aiſles pour ſe dégager.
IV. Que feriez-vous ſi vn pareil
malheur vous arriuoit, apres que vô-
tre paſſion auroit jetté ſon feu ? Les
Loix diuines & humaines vous obli-
gent de demeurer iour & nuict & tou-
te voſtre vie, auec la femme que vous
aurez vne fois priſe. Si vous la voyez
pauure ou roturiere, ou beaucoup au
deſſous du luſtre de voſtre famille,
vous aurez vne infinité de regrets,
d'auoir par vne legereté precipité
perdu voſtre reputation , rabaiſſé
vos enfans, attriſté vos parens & vos
alliez.
malheur vous arriuoit, apres que vô-
tre paſſion auroit jetté ſon feu ? Les
Loix diuines & humaines vous obli-
gent de demeurer iour & nuict & tou-
te voſtre vie, auec la femme que vous
aurez vne fois priſe. Si vous la voyez
pauure ou roturiere, ou beaucoup au
deſſous du luſtre de voſtre famille,
vous aurez vne infinité de regrets,
d'auoir par vne legereté precipité
perdu voſtre reputation , rabaiſſé
vos enfans, attriſté vos parens & vos
alliez.
V. Le meilleur conſeil que ie puiſſe
vous donner, eſt : de vous ſeruir d'vne
meure deliberation, de conſulter nô-
tre Seigneur par de feruentes oraiſons,
& de luy demander les lumieres ne-
ceſſaires pour vn choix ſi important,
de vous informer des inclinations &
de la volonté de voſtre Pere, de voſtre
Mere, & de vos autres parens. Sur
pour ce qui concerne les biens , ny
pour ce qui regarde la nobleſſe.
vous donner, eſt : de vous ſeruir d'vne
meure deliberation, de conſulter nô-
tre Seigneur par de feruentes oraiſons,
& de luy demander les lumieres ne-
ceſſaires pour vn choix ſi important,
de vous informer des inclinations &
de la volonté de voſtre Pere, de voſtre
Mere, & de vos autres parens. Sur
18
La Direction & la Conſolation
tout , ne vous mes-alliez iamais, nypour ce qui concerne les biens , ny
pour ce qui regarde la nobleſſe.
VI. Ie vous conſeille meſmes, de
ne point viſer plus haut que voſtre
portée. Car ſi vous auez vne femme
notablement plus noble , plus riche,
& meſme plus belle & plus adroite
que vous : vous eſtes vn euident
peril, qu'au lieu d'vne femme qui vous
obeïſſe ſelon ſon deuoir : vous n'en
ayez vne qui faſſe la Maiſtreſſe & qui
vous gourmande.
ne point viſer plus haut que voſtre
portée. Car ſi vous auez vne femme
notablement plus noble , plus riche,
& meſme plus belle & plus adroite
que vous : vous eſtes vn euident
peril, qu'au lieu d'vne femme qui vous
obeïſſe ſelon ſon deuoir : vous n'en
ayez vne qui faſſe la Maiſtreſſe & qui
vous gourmande.
Ioan.
Peter-
ſius in
Chron.
Holſat. Ces motifs pouſſerent les Holſa-
tiens à ordonner, qu'vn homme no-
ble priſt vne femme noble : qu'vn
homme libre en prit vne libre , &
qu'vn eſclaue ne ſe puſt allier qu'à vne
eſclaue. La peine de ceux qui contre-
uenoient à cette Loy , eſtoit vne mort
ignominieuſe.
Peter-
ſius in
Chron.
Holſat. Ces motifs pouſſerent les Holſa-
tiens à ordonner, qu'vn homme no-
ble priſt vne femme noble : qu'vn
homme libre en prit vne libre , &
qu'vn eſclaue ne ſe puſt allier qu'à vne
eſclaue. La peine de ceux qui contre-
uenoient à cette Loy , eſtoit vne mort
ignominieuſe.
Du
Iarric.
hiſt.des
Ind. l.
2. Ch.
14. Les Loix de l'Empire du Calecut
ſont plus faſcheuſes. Non ſeulement
les Nobles, & ceux qui ont la liberté,
ſont obligez encore aujourd'huy de
prendre vn party égal : mais vn Char-
pentier , par exemple , ne peut auoir
tier: vn Maſſon , que la fille d'vn Maſ-
ſon , & ainſi du reſte. Cela eſt fort ru-
de : & empeſche , qu'vn bel eſprit ne
puiſſe iamais porter ſon vol bien haut.
Mais ce reglement maintient la paix
dans les familles particulieres.
Iarric.
hiſt.des
Ind. l.
2. Ch.
14. Les Loix de l'Empire du Calecut
ſont plus faſcheuſes. Non ſeulement
les Nobles, & ceux qui ont la liberté,
ſont obligez encore aujourd'huy de
prendre vn party égal : mais vn Char-
pentier , par exemple , ne peut auoir
19
des perſonnes Mariées.
pour femme que la fille d'vn Charpen-tier: vn Maſſon , que la fille d'vn Maſ-
ſon , & ainſi du reſte. Cela eſt fort ru-
de : & empeſche , qu'vn bel eſprit ne
puiſſe iamais porter ſon vol bien haut.
Mais ce reglement maintient la paix
dans les familles particulieres.
VII. Il eſt vray , que la reſſemblan-
ce eſt la mere de l'amour, & de l'amour
ſolide & conſtant , toutefois il faut
auoüer , que l'excellence de l'eſprit
peut & doit tenir lieu de nobleſſe & de
richeſſes. Les parens y doiuent auoir
vn grand égard : mais ils ne doi-
uent iamais violenter les enfans à vn
party qui ne leur agrée point.
ce eſt la mere de l'amour, & de l'amour
ſolide & conſtant , toutefois il faut
auoüer , que l'excellence de l'eſprit
peut & doit tenir lieu de nobleſſe & de
richeſſes. Les parens y doiuent auoir
vn grand égard : mais ils ne doi-
uent iamais violenter les enfans à vn
party qui ne leur agrée point.
Il eſt plus facile, mais plus peril-
leux, de faire conſentir les filles à vn
Mariage deſauantageux & deſagrea-
ble. La crainte & la vergogne leur fer-
ment le cœur & la bouche : & ne leur
permettent pas d'expliquer leurs deſirs
ny leurs auerſions.
leux, de faire conſentir les filles à vn
Mariage deſauantageux & deſagrea-
ble. La crainte & la vergogne leur fer-
ment le cœur & la bouche : & ne leur
permettent pas d'expliquer leurs deſirs
ny leurs auerſions.
Pour éuiter ce peril , les Indiens
Cæl. l.
1 .cap.
31. menoient leurs filles dans vne place
publique, lors qu'elles eſtoient en âge
nes gens y accouroit , & la fille choi-
ſiſſoit en toute liberté , celuy qu'elle
connoiſſoit auoir plus de vertu & plus
de rapport à ſes humeurs.
Cæl. l.
1 .cap.
31. menoient leurs filles dans vne place
publique, lors qu'elles eſtoient en âge
20
La Direction & la Conſolation
d'eſtre mariées. Vne multitude de ieu-nes gens y accouroit , & la fille choi-
ſiſſoit en toute liberté , celuy qu'elle
connoiſſoit auoir plus de vertu & plus
de rapport à ſes humeurs.
VIII. Si vous auez vne antipathie
naturelle de quelque perſonne, auer-
tiſſez en ſerieuſement vos parens : &
par vous-meſme , & par ceux qui ont
de l'authorité ſur leurs eſprits. Toute
la contrainte que vous apportez à
vous vaincre, ne ſera point de longue
durée. Et ſi par voſtre ſilence , vous
vous laiſſez engager dans vne alliance,
qui ſoit contre voſtre deſir : la triſteſſe
vous accablera dans la continuation
d'vn malheur, que vous verrez ineui-
table.
naturelle de quelque perſonne, auer-
tiſſez en ſerieuſement vos parens : &
par vous-meſme , & par ceux qui ont
de l'authorité ſur leurs eſprits. Toute
la contrainte que vous apportez à
vous vaincre, ne ſera point de longue
durée. Et ſi par voſtre ſilence , vous
vous laiſſez engager dans vne alliance,
qui ſoit contre voſtre deſir : la triſteſſe
vous accablera dans la continuation
d'vn malheur, que vous verrez ineui-
table.
De cette reſolution dépend voſtre
vie : de voſtre vie, depend voſtre mort :
& de voſtre mort , l'eternité. Parlez
donc auec liberté , mais auec mode-
ſtie. N'acceptez point en vne heure ,
ce que vous regretterez en tous les
momens qui vous reſteront.
vie : de voſtre vie, depend voſtre mort :
& de voſtre mort , l'eternité. Parlez
donc auec liberté , mais auec mode-
ſtie. N'acceptez point en vne heure ,
ce que vous regretterez en tous les
momens qui vous reſteront.
IX. Que ſi la demande de vos pa-
ſoient volages, & mal fondez : accom-
modez-vous à leur volonté : Et gene-
ralement parlant, c'eſt le meilleur, &
ce que Dieu benit dauantage: ſi l'auer-
ſion naturelle n'eſt point trop grande:
ou les defauts de celuy qu'on preſente
trop notables , & qui choquent trop
puiſſamment voſtre imagination. Ainſi
Rebecca accepta Iſaac, Lia & Rachel
accepterent Iacob , & Sara prit pour
mary le ieune Tobie : & le Ciel verſa
ſes plus diuines benedictions ſur tou-
tes ces familles.
21
des perſonnes Mariées.
rens eſt raiſonnable:& que vos amoursſoient volages, & mal fondez : accom-
modez-vous à leur volonté : Et gene-
ralement parlant, c'eſt le meilleur, &
ce que Dieu benit dauantage: ſi l'auer-
ſion naturelle n'eſt point trop grande:
ou les defauts de celuy qu'on preſente
trop notables , & qui choquent trop
puiſſamment voſtre imagination. Ainſi
Rebecca accepta Iſaac, Lia & Rachel
accepterent Iacob , & Sara prit pour
mary le ieune Tobie : & le Ciel verſa
ſes plus diuines benedictions ſur tou-
tes ces familles.
X. Les parens doiuent auoir com-
paſſion de leurs enfans , lors qu'ils
voyent des auerſions naturelles trop
exceſſiues. Il vaut mieux leur laiſſer la
paix & la joye dans vne moindre for-
tune : que de les bruſler des flammes
d'vne colere & d'vne rage infernale,
dans vn eſtat brillant.
paſſion de leurs enfans , lors qu'ils
voyent des auerſions naturelles trop
exceſſiues. Il vaut mieux leur laiſſer la
paix & la joye dans vne moindre for-
tune : que de les bruſler des flammes
d'vne colere & d'vne rage infernale,
dans vn eſtat brillant.
Les antipathes de la nature pre-
uiennent noſtre liberté. Nous en voyõs
aux animaux meſmes, aux poiſſons, &
aux oyſeaux de ſi étonnantes, que nous
aurions peine de les croire : ſi nos yeux
Souuent , dés le premier abord , ſans
iamais s'eſtre veus, ils s'attaquent , ils
ſe tuent , & ſe mettent en pieces les
vns les autres. Ils portent meſme quel-
quefois leur haine apres la mort : Le
ſang des vns ne ſe pouuant joindre au
au ſang des autres , & les chordes fai-
tes de leurs entrailles ſe taiſant , lors
que celles de leurs ennemis ſont pro-
Plin.
l. 28 c.
4. ches & reſonnent. Si meſme vous
mettez les peaux de l'Hyene & de la
Panthere enſemble : le poil tombe à
celle de la Panthere.
uiennent noſtre liberté. Nous en voyõs
aux animaux meſmes, aux poiſſons, &
aux oyſeaux de ſi étonnantes, que nous
aurions peine de les croire : ſi nos yeux
22
La Direction & la Conſolation
ne nous en faiſoient vn fidelle rapport.Souuent , dés le premier abord , ſans
iamais s'eſtre veus, ils s'attaquent , ils
ſe tuent , & ſe mettent en pieces les
vns les autres. Ils portent meſme quel-
quefois leur haine apres la mort : Le
ſang des vns ne ſe pouuant joindre au
au ſang des autres , & les chordes fai-
tes de leurs entrailles ſe taiſant , lors
que celles de leurs ennemis ſont pro-
Plin.
l. 28 c.
4. ches & reſonnent. Si meſme vous
mettez les peaux de l'Hyene & de la
Panthere enſemble : le poil tombe à
celle de la Panthere.
Voudriez-vous donc mettre voſtre
fils & voſtre fille dans vne telle con-
joncture, qu'ils deſſechaſſent ſur leurs
pieds & dans leurs cœurs, eſtant con-
tinuellement tourmentez par ces
auerſions conſumantes.
fils & voſtre fille dans vne telle con-
joncture, qu'ils deſſechaſſent ſur leurs
pieds & dans leurs cœurs, eſtant con-
tinuellement tourmentez par ces
auerſions conſumantes.
XI. Enfin, ſi vous conſiderez com-
bien de qualitez il faut en l'homme &
en la femme, & en tout ce qui ſe trou-
ue dans la famille pour vn Mariage ac-
comply: vous ſerez tres-reſerué à vous
lier à cet Eſtat , & vous y apporterez
vne tres meure deliberation , auant
des liens indiſſolubles , dont on ne
pourra iamais vous déliurer.
bien de qualitez il faut en l'homme &
en la femme, & en tout ce qui ſe trou-
ue dans la famille pour vn Mariage ac-
comply: vous ſerez tres-reſerué à vous
lier à cet Eſtat , & vous y apporterez
vne tres meure deliberation , auant
23
des perſonnes Mariées.
que de permettre qu'on vous ſerre pardes liens indiſſolubles , dont on ne
pourra iamais vous déliurer.
filet décoratif
CHAPITRE III.
lib.2.17
CHAPITRE III.
Il eſt fort difficile de n'eſtre point
mal marié.
I.& THeophraſte
a fait vn Liure tou-
chant les nopces, où il demɑ̃de.
Si vn hõme ſage doit prendre vne fem-
me ? Et il reſpond , que ſi vne femme
eſt recommandable par ſa beauté, par
ſes bonnes mœurs , & par la vertu de
ſes parens , vn homme ſage s'y peut
marier : s'il a vne bonne ſanté , & des
moyens pour faire ſubſiſter ſa famille
auec facilité & auec honneur. Ainſi
parle ce Philoſophe.
chant les nopces, où il demɑ̃de.
Si vn hõme ſage doit prendre vne fem-
me ? Et il reſpond , que ſi vne femme
eſt recommandable par ſa beauté, par
ſes bonnes mœurs , & par la vertu de
ſes parens , vn homme ſage s'y peut
marier : s'il a vne bonne ſanté , & des
moyens pour faire ſubſiſter ſa famille
auec facilité & auec honneur. Ainſi
parle ce Philoſophe.
II. Mais il adjouſte , Que tout cét
aſſemblage de perfections ſe rencontre
rarement dans vn Mariage : & que par
conſequent , vn homme ſage doit s'e-
xempter d'vn joug ſi rude & ſi peſant.
En premier lieu , dit-il , les ſoins le
phie , & il luy eſt impoſſible de vac-
quer ſuffiſamment à ſes Liures, & aux
deſirs d'vne femme. Elle a beſoin de
pluſieurs choſes qui ſont difficiles à
trouuer. Elle deſire des habits pre-
cieux , de l'or, des perles, des ſuper-
fluitez, des ſeruantes, des meubles de
pluſieurs ſortes, des litieres, & des ca-
roſſes dorez. Toute la nuict elle eſt im-
portune par ſes plaintes & par ſes la-
mentations : & rompt les oreilles
d'vn mary , fatigué par le continuel
trauail de la iournée. Celle-la, dit-elle,
eſt mieux habillé que moy : elle en eſt
honorée par vn chacun : & ie gemis dãs
le mépris & dans le rebut au milieu des
compagnies. Pourquoy auez - vous
jetté les yeux ſur noſtre voiſine ? Quel
motif vous pouſſe à tant parler à noſtre
ſeruante? Combien auez-vous rappor-
té d'argent au retour du Parquet?
aſſemblage de perfections ſe rencontre
rarement dans vn Mariage : & que par
conſequent , vn homme ſage doit s'e-
xempter d'vn joug ſi rude & ſi peſant.
En premier lieu , dit-il , les ſoins le
24
La Direction & la Conſolation
detournent de l'eſtude de la Philoſo-phie , & il luy eſt impoſſible de vac-
quer ſuffiſamment à ſes Liures, & aux
deſirs d'vne femme. Elle a beſoin de
pluſieurs choſes qui ſont difficiles à
trouuer. Elle deſire des habits pre-
cieux , de l'or, des perles, des ſuper-
fluitez, des ſeruantes, des meubles de
pluſieurs ſortes, des litieres, & des ca-
roſſes dorez. Toute la nuict elle eſt im-
portune par ſes plaintes & par ſes la-
mentations : & rompt les oreilles
d'vn mary , fatigué par le continuel
trauail de la iournée. Celle-la, dit-elle,
eſt mieux habillé que moy : elle en eſt
honorée par vn chacun : & ie gemis dãs
le mépris & dans le rebut au milieu des
compagnies. Pourquoy auez - vous
jetté les yeux ſur noſtre voiſine ? Quel
motif vous pouſſe à tant parler à noſtre
ſeruante? Combien auez-vous rappor-
té d'argent au retour du Parquet?
Sa jalouſie fait qu'on ne peut auoir
l'amitié d'aucune autre femme : l'a-
mour qu'on témoigneroit à quelqu'v-
ne , luy paroiſtroit vne haine formée
contre elle.
l'amitié d'aucune autre femme : l'a-
mour qu'on témoigneroit à quelqu'v-
ne , luy paroiſtroit vne haine formée
contre elle.
Si quelqu'vn
25
des perſonnes Mariées.
Si quelqu'vn eſt capable de ſe fai-
re connoiſtre par ſa doctrine dans vne
meilleure Ville que la ſienne , il n'y
peut aller auec ſa femme , & ne peut
neantmoins la quitter ſans crime. Si
elle eſt pauure, ſa nourriture eſt diffi-
cile à trouuer. Si elle eſt riche, elle eſt
à charge par ſon inſolence.
re connoiſtre par ſa doctrine dans vne
meilleure Ville que la ſienne , il n'y
peut aller auec ſa femme , & ne peut
neantmoins la quitter ſans crime. Si
elle eſt pauure, ſa nourriture eſt diffi-
cile à trouuer. Si elle eſt riche, elle eſt
à charge par ſon inſolence.
III. Adjouſtez à tous ces malheurs,
qu'il n'eſt point permis d'en choiſir
vne autre. Quelle quelle ſoit il la faut
retenir , la nourrir & viure auec elle
iuſqu'à la mort. Si elle eſt ſtupide,
colere, laide, orgueilleuſe : on ne le
connoiſtra pas bien qu'apres les nop-
ces. On donne permiſſion à vn Mar-
chand d'éprouuer vn cheual, vn aſne,
vn bœuf, vn chien , & les plus chetifs
des eſclaues. Les habits meſmes , les
pots, les chaiſes, les vaſes de terre &
de bois, auant que de s'engager à l'a-
chapt. La femme ſeule ſe tient cloſe
& couuerte: de peur qu'elle ne deplai-
ſe , auant le contract ſolemnel qu'on
Lib. I.
c. 28.
& 29. en fait. Ce ſont les paroles de Sainct
Hieroſme , au Traicté qu'il a fait con-
tre l'Hereſiarque Iouinien. Où il re-
main eſtant repris de ce qu'il auoit re-
fuſé vne femme, qui eſtoit belle,chaſte
& riche : il montra ſon pied , & dit.
Ce ſoulier , que vous voyez , vous pa-
roiſt beau pour ſa nouueauté : mais
vous ignorez où il me bleſſe. Il vou-
loit dire , qu'il ſçauoit des imperfe-
ctions ſecrettes de celle, dont on luy
faiſoit des Eloges.
qu'il n'eſt point permis d'en choiſir
vne autre. Quelle quelle ſoit il la faut
retenir , la nourrir & viure auec elle
iuſqu'à la mort. Si elle eſt ſtupide,
colere, laide, orgueilleuſe : on ne le
connoiſtra pas bien qu'apres les nop-
ces. On donne permiſſion à vn Mar-
chand d'éprouuer vn cheual, vn aſne,
vn bœuf, vn chien , & les plus chetifs
des eſclaues. Les habits meſmes , les
pots, les chaiſes, les vaſes de terre &
de bois, auant que de s'engager à l'a-
chapt. La femme ſeule ſe tient cloſe
& couuerte: de peur qu'elle ne deplai-
ſe , auant le contract ſolemnel qu'on
Lib. I.
c. 28.
& 29. en fait. Ce ſont les paroles de Sainct
Hieroſme , au Traicté qu'il a fait con-
tre l'Hereſiarque Iouinien. Où il re-
B
26
La Direction & la Conſolation
marque , Qu'vn Gentilhomme Ro-main eſtant repris de ce qu'il auoit re-
fuſé vne femme, qui eſtoit belle,chaſte
& riche : il montra ſon pied , & dit.
Ce ſoulier , que vous voyez , vous pa-
roiſt beau pour ſa nouueauté : mais
vous ignorez où il me bleſſe. Il vou-
loit dire , qu'il ſçauoit des imperfe-
ctions ſecrettes de celle, dont on luy
faiſoit des Eloges.
IV. Il eſt tres difficile de trouuer
vne perſonne qui ſoit ſi accomplie
que rien ne luy manque : beaucoup
plus eſt-il impoſſible d'en trouuer plu-
ſieurs. Et neantmoins il y a dans vn
ménage , non ſeulement vne femme,
mais auſſi des enfans, des ſeruiteurs,
des ſeruantes, des Fermiers, des crean-
ciers , des debteurs , qui cauſent plu-
ſieurs faſcheries , pluſieurs procez &
pluſieurs pertes. Comment donc ne
confeſſerons-nous pas, qu'il eſt diffi-
cile de n'eſtre point mal marié.
vne perſonne qui ſoit ſi accomplie
que rien ne luy manque : beaucoup
plus eſt-il impoſſible d'en trouuer plu-
ſieurs. Et neantmoins il y a dans vn
ménage , non ſeulement vne femme,
mais auſſi des enfans, des ſeruiteurs,
des ſeruantes, des Fermiers, des crean-
ciers , des debteurs , qui cauſent plu-
ſieurs faſcheries , pluſieurs procez &
pluſieurs pertes. Comment donc ne
confeſſerons-nous pas, qu'il eſt diffi-
cile de n'eſtre point mal marié.
V. Pour ne parler preſentement
que de la femme , ſi l'on en rencontre
vne mauuaiſe , ſans doute toute la vie
ſera remplie de quantité de miſeres.
que de la femme , ſi l'on en rencontre
vne mauuaiſe , ſans doute toute la vie
ſera remplie de quantité de miſeres.
27
des perſonnes Mariées.
Sainct Chryſoſtome dit,
Qu'vne mau-.
In
Matth.
c. 19. uaiſe femme n'eſt autre choſe , que l'en-
nemie de l'amitié & de la paix , vne
peine ineuitable, vn mal neceſſaire , vne
tentation naturelle , vne calamité ſou-
haitée , vn peril domeſtique , vn dom-
mage delectable , vne malice ornée d'v-
ne belle couleur
Stob.
ſerm.
66. Le Philoſophe Thalés , qui fut l'vn
des ſept Sages de la Grece, auoit vne ſi
grande frayeur de mal rencõtrer: qu'é-
tãt preſſé par ſa mere en la fleur de ſon
âge de prendre vne femme, il répondit,
qu'il n'eſtoit point encore temps : Et
ſur la meſme inuitation, dans vn âge
plus auancé, il luy repartit qu'il eſtoit
trop tard. Ce qui reuient à l'opinion
de Platon , qui diſoit : Qu'en la Ieu-
neſſe il n'eſtoit pas encore temps de ſe
marier : & qu'en la vieilleſſe c'eſtoit
folie de le faire.
ſerm.
66. Le Philoſophe Thalés , qui fut l'vn
des ſept Sages de la Grece, auoit vne ſi
grande frayeur de mal rencõtrer: qu'é-
tãt preſſé par ſa mere en la fleur de ſon
âge de prendre vne femme, il répondit,
qu'il n'eſtoit point encore temps : Et
ſur la meſme inuitation, dans vn âge
plus auancé, il luy repartit qu'il eſtoit
trop tard. Ce qui reuient à l'opinion
de Platon , qui diſoit : Qu'en la Ieu-
neſſe il n'eſtoit pas encore temps de ſe
marier : & qu'en la vieilleſſe c'eſtoit
folie de le faire.
Quelques Philoſophes ont eſcrit,
Que ſi les hommes eſtoient ſans fem-
mes , ils ſeroient dignes de la viſite &
de la conuerſation des Dieux.
Que ſi les hommes eſtoient ſans fem-
mes , ils ſeroient dignes de la viſite &
de la conuerſation des Dieux.
VI. Tout cela ſe dit auec plus de
chaleur que de verité. Le Mariage eſt
comment on l'entreprend. Et lors
qu'on s'y eſt obligé , il faut paſſer par
ſes difficultez , comme par vn chemin
qui eſt bon, & qui meine droict au ter-
me où l'on va : mais qui eſt heriſſé
d'épines.
Laer.chaleur que de verité. Le Mariage eſt
B ij
28
La Direction & la Conſolation
ſainct : mais il faut prendre garde,comment on l'entreprend. Et lors
qu'on s'y eſt obligé , il faut paſſer par
ſes difficultez , comme par vn chemin
qui eſt bon, & qui meine droict au ter-
me où l'on va : mais qui eſt heriſſé
d'épines.
lib.2.17
Le premier eſtant interrogé, ſi vn
homme ſage deuoit ſe marier, repartit
à celuy qui parloit. Me tenez-vous
pour vn homme ſage ? Ouy, Monſieur,
repliqua celuy qui vouloit ſçauoir le
ſentiment d'vne perſonne ſi renom-
mée. Ie ſuis marié, adjouſta le Phi-
loſophe.
Ibid.18
homme ſage deuoit ſe marier, repartit
à celuy qui parloit. Me tenez-vous
pour vn homme ſage ? Ouy, Monſieur,
repliqua celuy qui vouloit ſçauoir le
ſentiment d'vne perſonne ſi renom-
mée. Ie ſuis marié, adjouſta le Phi-
loſophe.
Socrate dit encore mieux. Soit que
vous preniez vne femme, ou que vous
n'en preniez pas : c'eſt merueille , ſi
vous n'auez diuers repentirs de voſtre
reſolution. Il donnoit à entendre, que
le Celibat & le Mariage ont leurs dif-
ficultez particulieres qu'on ne peut
éuiter.
vous preniez vne femme, ou que vous
n'en preniez pas : c'eſt merueille , ſi
vous n'auez diuers repentirs de voſtre
reſolution. Il donnoit à entendre, que
le Celibat & le Mariage ont leurs dif-
ficultez particulieres qu'on ne peut
éuiter.
Le Celibat eſt ſeul ſans enfans, &
en des mains eſtrangeres. Le Mariage
a pour ſes compagnes les anxietez con-
tinuelles , les lamentations qui ne
trouuent iamais de fin , les reproches
du peu de dot qu'on a donné,vn viſage
arrogant des alliez , vne belle-mere
babillarde & querelleuſe, des euene-
mens incertains pour les enfans, pour
la femme , & pour les biens. Ainſi
il n'eſt point icy queſtion de faire vn
choix entre le bien & le mal , mais
entre deux maux, dont il faut peſer la
grandeur, afin de prendre le moindre.
29
des perſonnes Mariées.
ſans poſterité , & voit ſon bien paſſeren des mains eſtrangeres. Le Mariage
a pour ſes compagnes les anxietez con-
tinuelles , les lamentations qui ne
trouuent iamais de fin , les reproches
du peu de dot qu'on a donné,vn viſage
arrogant des alliez , vne belle-mere
babillarde & querelleuſe, des euene-
mens incertains pour les enfans, pour
la femme , & pour les biens. Ainſi
il n'eſt point icy queſtion de faire vn
choix entre le bien & le mal , mais
entre deux maux, dont il faut peſer la
grandeur, afin de prendre le moindre.
VIII. Tous ces raiſonnemens vous
prouuent le peril qu'il y a de mal ren-
contrer ſi l'on ſe marie , & la neceſ-
ſité de mettre vn temps raiſonnable,
pour auoir cette ſatisfaction d'eſprit,
d'auoir fait ſon deuoir en vn choix de ſi
grande importance. Ce ſoin pris dans
la veuë de ſon ſalut, eſt vne des plus
aſſeurées conſolations qu'on puiſſe
auoir dans toutes les amertumes qui
ſe rencontreront en diuerſes occur-
rences , durant tout le cours de la
vie.
prouuent le peril qu'il y a de mal ren-
contrer ſi l'on ſe marie , & la neceſ-
ſité de mettre vn temps raiſonnable,
pour auoir cette ſatisfaction d'eſprit,
d'auoir fait ſon deuoir en vn choix de ſi
grande importance. Ce ſoin pris dans
la veuë de ſon ſalut, eſt vne des plus
aſſeurées conſolations qu'on puiſſe
auoir dans toutes les amertumes qui
ſe rencontreront en diuerſes occur-
rences , durant tout le cours de la
vie.
B iij
30
La Direction & la Conſolation
bandeau
CHAPITRE IV.
Ceux qui ſont mal Mariez, ſont dans
vn Eſtat tres-douloureux.
CHacun eſtime que ce Tyran
Me-
zence. eſtoit tres-cruel, lequel joignoit
vn corps mort auec vn corps viuant:
afin de faire mourir dans la puanteur
du mort, celuy qui eſtoit en vie.
Me-
zence. eſtoit tres-cruel, lequel joignoit
vn corps mort auec vn corps viuant:
afin de faire mourir dans la puanteur
du mort, celuy qui eſtoit en vie.
Mais ce mal n'eſtant point de lon-
gue durée, & ſe finiſſant dans peu de
iours, eſtoit moindre que le malheur
d'vn mary, vny par le contract de Ma-
riage à vne mauuaiſe femme : ou d'vne
femme jointe à vn mauuais mary. Ex-
pliquons cette verité.
gue durée, & ſe finiſſant dans peu de
iours, eſtoit moindre que le malheur
d'vn mary, vny par le contract de Ma-
riage à vne mauuaiſe femme : ou d'vne
femme jointe à vn mauuais mary. Ex-
pliquons cette verité.
§. I. Vne Femme mal mariée eſt vne
ame damnée, ſi elle n'y prend garde.
L'Enfer eſt terrible à cauſe de l'hor-
reur du lieu , de l'ardeur du feu , de la
compagnie des demons & des damnez,
de l'eternité des peines & du deſeſpoir,
qui prouient de tous ces maux.
reur du lieu , de l'ardeur du feu , de la
compagnie des demons & des damnez,
de l'eternité des peines & du deſeſpoir,
qui prouient de tous ces maux.
Le meſme malheur preſque ſe re-
de demeurer toute ſa vie auec vn mau-
Plut.
de ſup.
p. 295. uais mary.
31
des perſonnes Mariées.
trouue, lors qu'vne femme eſt obligéede demeurer toute ſa vie auec vn mau-
Plut.
de ſup.
p. 295. uais mary.
Premierement , ſa maiſon eſt dans
de continuelles tenebres. Elle reſſem-
ble à ce païs des Cimmeriens : qui,
comme on conte , non ſeulement vi-
uoient dans l'obſcurité : mais igno-
roient meſme qu'il y euſt vn Soleil au
monde. Dans cette miſerable maiſon,
ce ne ſont que pleurs , que lamenta-
tions, que regrets,d'auoir iamais mis le
pied, en vn lieu ſi deplorable.
de continuelles tenebres. Elle reſſem-
ble à ce païs des Cimmeriens : qui,
comme on conte , non ſeulement vi-
uoient dans l'obſcurité : mais igno-
roient meſme qu'il y euſt vn Soleil au
monde. Dans cette miſerable maiſon,
ce ne ſont que pleurs , que lamenta-
tions, que regrets,d'auoir iamais mis le
pied, en vn lieu ſi deplorable.
Secondement, le feu de la colere,
& le deſir de la vengeance s'allument
d'vne telle ſorte ; qu'aucunes fois la
rage pouſſe à des actions tres-funeſtes,
dont ie n'oſe ſoüiller ce papier. Le
cœur d'vne femme qui eſt dans vne
continuelle triſteſſe, eſt ſemblable aux
ſtatuës de l'Idole Moloch , qu'on fai-
ſoit embraſer , & lors qu'elle eſtoit
toute rouge de feu, on y iettoit des en-
fans pour les bruſler & conſumer.
Toutes les penſées de ces pauures crea-
tures affligées les tourmentent , les
font perir à petit feu : & ne leur don-
ny nuict.
& le deſir de la vengeance s'allument
d'vne telle ſorte ; qu'aucunes fois la
rage pouſſe à des actions tres-funeſtes,
dont ie n'oſe ſoüiller ce papier. Le
cœur d'vne femme qui eſt dans vne
continuelle triſteſſe, eſt ſemblable aux
ſtatuës de l'Idole Moloch , qu'on fai-
ſoit embraſer , & lors qu'elle eſtoit
toute rouge de feu, on y iettoit des en-
fans pour les bruſler & conſumer.
Toutes les penſées de ces pauures crea-
tures affligées les tourmentent , les
font perir à petit feu : & ne leur don-
B iiij
32
La Direction & la Conſolation
nent aucun rafraiſchiſſement , ny iourny nuict.
Troiſieſemement , vn homme im-
pie & furieux eſt vn demon enragé,
qui ne fait que remplir l'air d'execra-
tions & de blaſphemes , & qui frappe
ſans raiſon, ſur ceux qui luy donnent
le moindre déplaiſir.
Solin.pie & furieux eſt vn demon enragé,
qui ne fait que remplir l'air d'execra-
tions & de blaſphemes , & qui frappe
ſans raiſon, ſur ceux qui luy donnent
le moindre déplaiſir.
pag.97
Les Angiles19,
peuple barbare, n'a-
doroient aucunes diuinitez, que celles
qu'ils reconnoiſſoient dans les enfers.
Les hommes ſcelerats ſont encore plus
execrables. Ils ſçauent qu'il y a vn
Dieu dans les Cieux, qui merite la ve-
neration & l'adoration de tous les
Eſtres créez. Et neantmoins , ils le
blaſphement & le maudiſſent pour
plaire aux demons.
doroient aucunes diuinitez, que celles
qu'ils reconnoiſſoient dans les enfers.
Les hommes ſcelerats ſont encore plus
execrables. Ils ſçauent qu'il y a vn
Dieu dans les Cieux, qui merite la ve-
neration & l'adoration de tous les
Eſtres créez. Et neantmoins , ils le
blaſphement & le maudiſſent pour
plaire aux demons.
Ils ſont en cela pires que ces
Strab.
lib.5: Ethiopiens , qui dés le matin maudiſ-
ſoient le Soleil d'Orient , & ſe ca-
choient dans des Marais pour ſe garan-
tir de ſes ardeurs.
Strab.
lib.5: Ethiopiens , qui dés le matin maudiſ-
ſoient le Soleil d'Orient , & ſe ca-
choient dans des Marais pour ſe garan-
tir de ſes ardeurs.
Dieu donne de la lumiere & de la
chaleur à toute la terre, & merite pour
ſes bien-faits l'amour & le culte de
tous les peuples. Et toutefois ces fu-
par leurs impietez ordinaires.
chaleur à toute la terre, & merite pour
ſes bien-faits l'amour & le culte de
tous les peuples. Et toutefois ces fu-
33
des perſonnes Mariées.
rieux & ces yurognes le deshonorentpar leurs impietez ordinaires.
N'eſt-ce pas vn grand ſupplice
d'auoir ſans ceſſe les oreilles battuës
des blaſphemes de ces monſtres force-
nez , & d'oüir les maledictions & les
imprecations que les enfans, les ſerui-
teurs & les ſeruantes leurs donnent. Si
l'on viuoit parmy les Ours , parmy les
Lions , & parmy les ſerpens , on n'au-
roit point plus de douleur , & on ne
ſeroit pas dans vn plus grand peril
Greg.
9. Mer.
c. 48. pour le ſalut de ſon ame.
d'auoir ſans ceſſe les oreilles battuës
des blaſphemes de ces monſtres force-
nez , & d'oüir les maledictions & les
imprecations que les enfans, les ſerui-
teurs & les ſeruantes leurs donnent. Si
l'on viuoit parmy les Ours , parmy les
Lions , & parmy les ſerpens , on n'au-
roit point plus de douleur , & on ne
ſeroit pas dans vn plus grand peril
Greg.
9. Mer.
c. 48. pour le ſalut de ſon ame.
Quatrieſmement , l'Eternité eſt le
plus grand malheur des damnez , qui
comme dit ſainct Gregoire , ont vne
mort ſans mort , vne fin ſans fin , vn
defaut ſans defaut. Car leur mort vit:
leur fin commence touſiours , & leur
defaillance tourmente , & ne chaſſe
iamais la frayeur : leur flamme bruſle
& eſt ſans lumiere. Tout cela , & ce
que ce ſainct Docteur adjouſte , con-
uient tres-veritablement à vn Mariage
mal fait , qui doit durer tout le long
de la vie.
plus grand malheur des damnez , qui
comme dit ſainct Gregoire , ont vne
mort ſans mort , vne fin ſans fin , vn
defaut ſans defaut. Car leur mort vit:
leur fin commence touſiours , & leur
defaillance tourmente , & ne chaſſe
iamais la frayeur : leur flamme bruſle
& eſt ſans lumiere. Tout cela , & ce
que ce ſainct Docteur adjouſte , con-
uient tres-veritablement à vn Mariage
mal fait , qui doit durer tout le long
de la vie.
Cinquieſmement , enfin de cette
ſeparation ny de ſoulagement , ſuit vn
cruel deſeſpoir de ne ſortir iamais de
ſes douleurs. La femme qui eſt dans
ce deplorable eſtat , maudit mille fois
l'heure qu'elle a veu ſon mary, ou plû-
toſt ſon bourreau : Elle maudit l'heure
qu'elle luy a parlé, qu'elle a conſenty à
ſon alliance , qu'elle eſt entrée en ſon
logis , qu'elle a mangé auec luy , &
fait le reſte des deuoirs du Mariage.
N'eſt-ce pas veritablement eſtre dans
vn enfer continuel que de viure de la
ſorte.
B v
34
La Direction & la Conſolation
perpetuelle durée , ſans apparence deſeparation ny de ſoulagement , ſuit vn
cruel deſeſpoir de ne ſortir iamais de
ſes douleurs. La femme qui eſt dans
ce deplorable eſtat , maudit mille fois
l'heure qu'elle a veu ſon mary, ou plû-
toſt ſon bourreau : Elle maudit l'heure
qu'elle luy a parlé, qu'elle a conſenty à
ſon alliance , qu'elle eſt entrée en ſon
logis , qu'elle a mangé auec luy , &
fait le reſte des deuoirs du Mariage.
N'eſt-ce pas veritablement eſtre dans
vn enfer continuel que de viure de la
ſorte.
§ II.
Vn homme mal marié , eſt
dans vn faſcheux Purgatoire, quoy
qu'il faſſe.
Ie ne le mets qu'en Purgatoire,
dautant qu'il eſt le maiſtre du logis, &
qu'il en ſort lors qu'il luy plaiſt, pour
ſe diuertir dans le trafic & dans d'au-
tres affaires. Mais la femme eſt obli-
gée de gemir continuellement dans ſa
maiſon, ſans aucun pouuoir de donner
de l'air à ſa douleur , lors qu'elle eſt
tombée entre les mains d'vn mauuais
mary qui eſt ſon Maiſtre , & à qui elle
dautant qu'il eſt le maiſtre du logis, &
qu'il en ſort lors qu'il luy plaiſt, pour
ſe diuertir dans le trafic & dans d'au-
tres affaires. Mais la femme eſt obli-
gée de gemir continuellement dans ſa
maiſon, ſans aucun pouuoir de donner
de l'air à ſa douleur , lors qu'elle eſt
tombée entre les mains d'vn mauuais
mary qui eſt ſon Maiſtre , & à qui elle
35
des perſonnes Mariées.
eſt obligée d'obeïr.Si neantmoins vous voulez, vous
pouuez auec raiſon mettre auſſi dans
les Enfers vn homme qui eſt mal ma-
rié. Car , comme Dieu meſme aſſeu-
re. Il eſt meilleur de demeurer auec les
Lions , auec les Serpens , & auec les
dragons , qu'auec vne méchante fem-
me. D'où il eſt facile de tirer vne con-
ſequence, qui concluë qu'elle eſt vne
furie d'enfer. Parce que n'y ayant rien
au monde, qui ſoit pire que la cruauté
des Lions , & le venin des Serpens &
des dragons : celle qui eſt plus à crain-
dre doit eſtre de la nature des diables,
rien ne ſe trouuant ſur la terre égal à ſa
malice.
pouuez auec raiſon mettre auſſi dans
les Enfers vn homme qui eſt mal ma-
rié. Car , comme Dieu meſme aſſeu-
re. Il eſt meilleur de demeurer auec les
Lions , auec les Serpens , & auec les
dragons , qu'auec vne méchante fem-
me. D'où il eſt facile de tirer vne con-
ſequence, qui concluë qu'elle eſt vne
furie d'enfer. Parce que n'y ayant rien
au monde, qui ſoit pire que la cruauté
des Lions , & le venin des Serpens &
des dragons : celle qui eſt plus à crain-
dre doit eſtre de la nature des diables,
rien ne ſe trouuant ſur la terre égal à ſa
malice.
Ie n'oſerois dire ce que les anciens
Autheurs & les Saincts Peres en ont
marqué dans leurs eſcrits. Laiſſons les
parler ſans rien y adjouſter : Nous ver-
rons en ſon lieu les loüanges des fem-
mes vertueuſes.
Autheurs & les Saincts Peres en ont
marqué dans leurs eſcrits. Laiſſons les
parler ſans rien y adjouſter : Nous ver-
rons en ſon lieu les loüanges des fem-
mes vertueuſes.
I. Le Philoſophe Secundus eſtant
Max.
ſer.92 prié de dépeindre vne femme mauuai-
ſe.
de De-Max.
ſer.92 prié de dépeindre vne femme mauuai-
ſe.
C'eſt,dit-il,
le naufrage du mary,
la tempeſte du logis, l'empeſchement du
B vi 36 La Direction & la Conſolation repos , la captiuité de la vie , vn dom-
mage iournalier , vne bataille volontai-
re & ſans relaſche , vne guerre qui ſe
fait à grands frais , vne beſte farouche,
auec qui l'on eſt forcé de boire & de
manger tous les iours , vn ſoin plein
d'anxieté , à qui neantmoins il faut
montrer de la confiance , vne Lionne
qui embraſſe, vn gouffre qui paroiſt beau
& aimable , vn animal malicieux, &
vn mal neceſſaire.
coll: S.
Ioan.20
II. Sainct Chryſoſtome, traictant
de la meſchanceté d'Herodias parle en
ces termes.
de la meſchanceté d'Herodias parle en
ces termes.
Les Lions reſpecterent le
Prophete Daniel dans la foſſe où il
fut ietté par ſes ennemis : & l'impie Ie-
zabel tua le iuſte Naboth. La Balene
conſerua Ionas dans ſon ventre : & la
perfide Dalila mit entre les mains des
Philiſthins le valeureux Samſon , apres
l'auoir trompé par ſes artifices , & luy
auoir coupé ſes cheueux par ſa déloyau-
té. Les dragons & les aſpics ont reue-
ré ſainct Iean Baptiſte au deſert , &
ont depoſé leur ferocité à ſes pieds, &
voicy qu'Herodias luy coupe la teſte,
& la demande pour le prix de ſa dan-
37 des perſonnes Mariées. ce. O le pernicieux & le cruel dard
du demon qu'vne méchante femme.
Adam fut chaſſé du Paradis de deli-
ces par vne femme. David fit maſſa-
crer malheureuſement Vrie vaillant Ca-
pitaine , eſtant incité par vne femme.
Les femmes precipiterent Salomon , le
plus ſage des hommes, dans le ſacrilege
& dans l'Idolatrie. Vne femme lia le
chaſte Ioſeph , & le confina dans vne
priſon.
Que m'arreſtay-je au dommage quiVoi-
en arrive aux hommes , veu qu'vne
femme a fait tomber les Anges du Ciel,
& a jetté au plus profond des abyſmes
ceux qui par leur ſaincteté eſtoient eſ-
gaux aux Seraphins. La malice de la
femme renuerſe tout , elle tuë tout , &
reduit tout au neant. Elle ne pardonne
à perſonne. Elle ne reſpecte ny les Dia-
cres , ny les Preſtres , ny les Prophetes.
O le mal , qui ſurpaſſe tous les maux,
qu'vne femme vicieuſe, ſoit qu'elle abon-
de en richeſſes , ou qu'elle ſoit pauure!
Si elle a le pouuoir de nuire ſelon ſes
deſirs ! O le mal intolerable , & la vi-
pere, qui a du poiſon ſans remede,
38 La Direction & la Conſolation qu'vne femme meſchante & impudente!
Si on luy fait quelque tort, elle entre en
des rages inexplicables , & qui luy font
perdre l'eſprit. Si on l'honore, elle de-
uient orgueilleuſe & inſupportable. Si
ſon mary eſt puiſſant, elle ne ceſſe iour
& nuict de le porter à des crimes.
Elle le careſſe auec malignité , & le
pouſſe auec violence à l'execution de
ſes deſſeins. Si ſon mary eſt pauure,
elle l'incite ſans ceſſe à la colere & aux
debats auec ſes voiſins. La crainte de
Dieu ne donne aucune retenuë à ſa
langue : & dans ſes furies, elle ne pen-
ſe nullement au iour du Iugement , &
ne leue iamais ſon cœur21 à Dieu.
là vne partie de ce que ſainct Chryſo-
ſtome écrit de la malice de cette Me-
gere.
Ie ne rapporteray point icy d'au-
tres authoritez , tous les ſaincts Peres
entrans dans la penſée de ſainct Chry-
ſoſtome , & tous les Philoſophes Pa-
yens , dans celle de Secundus.
tres authoritez , tous les ſaincts Peres
entrans dans la penſée de ſainct Chry-
ſoſtome , & tous les Philoſophes Pa-
yens , dans celle de Secundus.
Vous voyez euidemment , quels
tourmens reſſentent ceux qui ſont
obligez de viure & de mourir entre les
grand eſt leur Purgatoire , ou leur
Enfer.
tourmens reſſentent ceux qui ſont
obligez de viure & de mourir entre les
39
des perſonnes Mariées.
mains de ces monſtres : & combiengrand eſt leur Purgatoire , ou leur
Enfer.
Nous verrons amplement au troi-
ſieſme Liure , le profit qu'ils en peu-
uent faire. Diſons en maintenant vn
mot : & donnons auſſi quelque conſo-
lation aux femmes, qui ont rencontré
vn mauuais mary.
ſieſme Liure , le profit qu'ils en peu-
uent faire. Diſons en maintenant vn
mot : & donnons auſſi quelque conſo-
lation aux femmes, qui ont rencontré
vn mauuais mary.
filet décoratif
CHAPITRE V.
§. I. Vne Femme mal Mariée,
§. II.
Vn homme mal marié peut
neas
Sylu.
l.2.de
geſtis
Alph.28
CHAPITRE V.
Ceux qui ſont mal Mariez , ſe peu-
uent faire de grands Saincts.
TOute noſtre vie eſt vn chemin à
l'Eternité : & par conſequent , le
meilleur Eſtat eſt celuy qui nous offre
des ſentiers plus aſſeurez pour arriuer
à vne ſublime perfection , quoy qu'ils
ſoient bordez de ronces & d'eſpines.
Tel eſt l'eſtat d'vne femme mal mariée,
il ſemble qu'elle ne marche que ſur des
precipices : mais ſi elle veut bien agir
dans le chemin de la Croix, elle y ren-
contrera de tres illuſtres couronnes.
l'Eternité : & par conſequent , le
meilleur Eſtat eſt celuy qui nous offre
des ſentiers plus aſſeurez pour arriuer
à vne ſublime perfection , quoy qu'ils
ſoient bordez de ronces & d'eſpines.
Tel eſt l'eſtat d'vne femme mal mariée,
il ſemble qu'elle ne marche que ſur des
precipices : mais ſi elle veut bien agir
dans le chemin de la Croix, elle y ren-
contrera de tres illuſtres couronnes.
40
La Direction & la Conſolation
§. I. Vne Femme mal Mariée,
peut eſtre vne glorieuſe Martyre de
Ieſus-Chriſt.
S.Tho.
22. qu.
124.
art.1.22 Le Martyre eſt vn acte de quatre
vertus : qui ſont, la Force, la Patien-
ce, la Charité & la Foy. La Force exer-
ce cét acte, comme la premiere & la
principale cauſe : la Patience vient en
ſuite : la Charité le commande , & la
Foy en eſt la fin.
22. qu.
124.
art.1.22 Le Martyre eſt vn acte de quatre
vertus : qui ſont, la Force, la Patien-
ce, la Charité & la Foy. La Force exer-
ce cét acte, comme la premiere & la
principale cauſe : la Patience vient en
ſuite : la Charité le commande , & la
Foy en eſt la fin.
La Mort eſt de l'eſſence du Marty-
re , comme enſeigne ſainct Thomas,
& ſi elle ne s'enſuit, on ne tient point
le Martyre parfait & accomply.
re , comme enſeigne ſainct Thomas,
& ſi elle ne s'enſuit, on ne tient point
le Martyre parfait & accomply.
Les tourmens & la mort meſme
ne manquent point à vn Mariage mal
fait : & vn mary cruel , auaricieux,
yurogne, farouche , arrogant , brutal,
colere, luxurieux, & corrompu par de
ſemblables vices, eſt vn bourreau im-
pitoyable , qui fait mourir tous les
iours vne pauure femme ; laquelle
deſſeche ſur ſes pieds , & noye ſans
ceſſe ſa vie dans vn torrent de lar-
mes.
ne manquent point à vn Mariage mal
fait : & vn mary cruel , auaricieux,
yurogne, farouche , arrogant , brutal,
colere, luxurieux, & corrompu par de
ſemblables vices, eſt vn bourreau im-
pitoyable , qui fait mourir tous les
iours vne pauure femme ; laquelle
deſſeche ſur ſes pieds , & noye ſans
ceſſe ſa vie dans vn torrent de lar-
mes.
Son affliction eſt extreme : mais ſa
recompenſe eſt eminente, Dieu la pla-
qui viuent dans les opprobres & dans
In
Hom.
les afflictions.
goire,
recompenſe eſt eminente, Dieu la pla-
41
des perſonnes Mariées.
plaçant entre les Martyrs , auec ceuxqui viuent dans les opprobres & dans
In
Hom.
les afflictions.
Celuy, dit ſainct Gre-
goire,
que le Tyran fait maſſacrer , eſt.
euidemment Martyr , à cauſe de l'a-
ction qui eſt connuë d'vn chacun. Mais
celuy qui ſouffre des contumelies23, &
quaime ſes ennemis , eſt Martyr par
ſes ſainctes affections, qui ne ſont con-
nuës que de Dieu ſeul
Ne vous eſt-ce pas vne tres-ſenſi-
ble conſolation d'auoir cette certitu-
de : que toutes vos eſpines ſe change-
ront en roſes , & toutes les pierres qui
vous accablent , deuiendront les per-
les & les diamans de voſtre Guirlande24?
Et que ſi Dieu ne vous met pas preſen-
tement à couuert des violences de vô-
tre Mary , ſous l'abry d'vne viſible pro-
tection , il vous reſerue des threſors &
des honneurs eternels ?
ble conſolation d'auoir cette certitu-
de : que toutes vos eſpines ſe change-
ront en roſes , & toutes les pierres qui
vous accablent , deuiendront les per-
les & les diamans de voſtre Guirlande24?
Et que ſi Dieu ne vous met pas preſen-
tement à couuert des violences de vô-
tre Mary , ſous l'abry d'vne viſible pro-
tection , il vous reſerue des threſors &
des honneurs eternels ?
Il eſt neceſſaire que d'auoir tout
vôtre recours à Dieu,& deverſer toutes
vos larmes à ſes pieds : il a vn cœur ſi
tendre & ſi paternel, qu'il ne vous re-
butera iamais. Il vous donnera la
Force , la Patience , la Charité & la
vne Martyre.
vôtre recours à Dieu,& deverſer toutes
vos larmes à ſes pieds : il a vn cœur ſi
tendre & ſi paternel, qu'il ne vous re-
butera iamais. Il vous donnera la
Force , la Patience , la Charité & la
42
La Direction & la Conſolation
Foy , pour vous faire vne Saincte &vne Martyre.
A cela vous aideront pluſieurs
moyens que ie vous propoſeray dans
le Chapitre ſuiuant ; & diuers motifs
que ie déduiray particulierement au
deuxieſme Liure de ce Traicté.
moyens que ie vous propoſeray dans
le Chapitre ſuiuant ; & diuers motifs
que ie déduiray particulierement au
deuxieſme Liure de ce Traicté.
Ie ne vous mettray maintenant de-
uant les yeux que quelques Martyrs
pour animer voſtre conſtance. Conſi-
derez auec attention leurs tortures
& leur generoſité. Et demandez-vous
de temps en temps, & deuant le com-
bat, & au plus fort de vos ſouffrances: Acta
Mart.
uant les yeux que quelques Martyrs
pour animer voſtre conſtance. Conſi-
derez auec attention leurs tortures
& leur generoſité. Et demandez-vous
de temps en temps, & deuant le com-
bat, & au plus fort de vos ſouffrances: Acta
Mart.
Quoy me fuſtige t'on auec des verges
armées de fer & de plomb , & faites
en forme de ſcorpions, pour me deſchi-
rer iuſques aux os , comme les ſaincts
Saturnin & Siſinnie. Me rompt-on
les os à coups de baſtons, comme aux
ſaincts Anaſtaſe , Perſan , Valentin &
Genulphe? Suis-je eſcraſée ſous vne greſle
de pierres comme ſainct Eſtienne ? Me
couronne-t'on la teſte d'eſpines de fer,
comme à ſainct Frontaiſe , & à ſes com-
pagnons. M'arrache-t'on les ongles
comme à ſainct Leuce? Me met-on des
43 des perſonnes Mariées. aleines toutes rouges entre les doigts,
pour les faire paſſer iuſques aux cou-
des : comme aux ſaincts Celement Eueſ-
que d'Ancyre , & à ſainct Agathange.
Me fend-on le ventre comme à ſainct
Leon Eueſque de Nicée en Thrace ?
M'arrache t'on les mammelles comme à
ſaincte Agathe ? Où ſont les flambeaux
pour me bruſler tout le corps comme à
ſainct Valerien ? Qui m'a ietté de la
poix fonduë ſur la teſte comme à ſainct
Cyriaque ? M'a-t'on eſtendu & bruſlé
ſur vn lict de fer tout enflammé comme
ſainct Thyrſe : ou ſur vn gril comme
ſainct Laurent ? M'a-t'on ietté dans la
bouche du plomb fondu ? Sainct Carte-
rie a ſouffert ce tourment auec patien-
ce. Qui m'a deſchiré auec des ongles
de fer , comme les Saincts Vincent ,
Ananle , & Eugene ? Me bruſle-t'on
par tout le corps auec des flambeaux
ardens : comme les Saincts Valerien,
Candide & Felicien : ou comme ſainct
Cyre & ſainct Iean , que l'on ſaupou-
dra de ſel & de vinaigre , apres ce
tourment ſi cruel ?
La veuë de la generoſité des Mar-
radis , & de l'atrocité de leurs tour-
mens dont ils ſe mocquent, vous ren-
forcent le cœur25, & vous prouueront
euidemment , qu'auec la grace de
Dieu vous pouuez ſouffrir conſtam-
ment toutes les faſcheries qui vous
arriuent par la cruauté de voſtre
mary , de vos enfans , & de vos do-
meſtiques.
44
La Direction & la Conſolation
tyrs, du ſecours qui leur vient de Pa-radis , & de l'atrocité de leurs tour-
mens dont ils ſe mocquent, vous ren-
forcent le cœur25, & vous prouueront
euidemment , qu'auec la grace de
Dieu vous pouuez ſouffrir conſtam-
ment toutes les faſcheries qui vous
arriuent par la cruauté de voſtre
mary , de vos enfans , & de vos do-
meſtiques.
Si vous experimentez, que cette
conſideration des Martyrs vous forti-
fie , liſez leurs vies entieres : Priez vô-
tre Confeſſeur de vous en ramaſſer des
Impr.
Lugd.26 exemples illuſtres. Il en trouuera vne
grande quantité d'aſſez remarqua-
bles en mon Commentaire ſur les
Pſeaumes27, & particulierement ſur le
quarante-troiſieme , que i'ay entiere-
ment expliqué des Martyrs , partie
montrant l'atrocité de leurs tour-
mens , partie le ſecours merueilleux
du Ciel , partie leur inuincible & con-
ſtante perſeuerance.
conſideration des Martyrs vous forti-
fie , liſez leurs vies entieres : Priez vô-
tre Confeſſeur de vous en ramaſſer des
Impr.
Lugd.26 exemples illuſtres. Il en trouuera vne
grande quantité d'aſſez remarqua-
bles en mon Commentaire ſur les
Pſeaumes27, & particulierement ſur le
quarante-troiſieme , que i'ay entiere-
ment expliqué des Martyrs , partie
montrant l'atrocité de leurs tour-
mens , partie le ſecours merueilleux
du Ciel , partie leur inuincible & con-
ſtante perſeuerance.
§. II.
Vn homme mal marié peut
deuenir vn parfait Confeſſeur de
Iesus-Chriſt.
45
des perſonnes Mariées.
Les Martyrs confeſſent & ſouſtien-
nent la Foy au milieu des glaïues , des
feux, des huiles boüillantes,& de diuers
autres tourmens , ſans branler à la
veuë de la mort la plus cruelle. Les
Confeſſeurs profeſſent la meſme Foy
dans leurs Oraiſons , dans leurs con-
uerſations , & dans toutes les actions
de pieté, & de toutes les vertus qu'ils
exercent auec ferueur & auec perſeue-
rance, iuſques au dernier periode de
leur vie.
nent la Foy au milieu des glaïues , des
feux, des huiles boüillantes,& de diuers
autres tourmens , ſans branler à la
veuë de la mort la plus cruelle. Les
Confeſſeurs profeſſent la meſme Foy
dans leurs Oraiſons , dans leurs con-
uerſations , & dans toutes les actions
de pieté, & de toutes les vertus qu'ils
exercent auec ferueur & auec perſeue-
rance, iuſques au dernier periode de
leur vie.
Cette profeſſion de Foy eſt tres-
neceſſaire à vn mary, qui a eſté ſi mal-
heureux, ſelon le monde, que de trou-
uer vne femme , laquelle choque ſes
inclinations , & qui agit contre ſes
volontez.
neceſſaire à vn mary, qui a eſté ſi mal-
heureux, ſelon le monde, que de trou-
uer vne femme , laquelle choque ſes
inclinations , & qui agit contre ſes
volontez.
A peine trouuerez-vous vne ſeule
vertu , dont il ne rencontre de ſigna-
lées occaſions tous les iours, ſans ſor-
tir du logis. Pour cette cauſe, le Phi-
loſophe Socrate conſeruoit ſa femme
Xantippe , qui eſtoit d'vne tres-faſ-
cheuſe humeur: afin d'auoir le moyen
d'eſtre continuellement dans la reſer-
les vertus.
vertu , dont il ne rencontre de ſigna-
lées occaſions tous les iours, ſans ſor-
tir du logis. Pour cette cauſe, le Phi-
loſophe Socrate conſeruoit ſa femme
Xantippe , qui eſtoit d'vne tres-faſ-
cheuſe humeur: afin d'auoir le moyen
d'eſtre continuellement dans la reſer-
46
La Direction & la Conſolation
ue, & dans la practique des plus maſ-les vertus.
Dieu nous dit en l'Eccleſiaſtique,
Eccli.
25. 17.
bonté,pour ſe premunir contre ſes ſur-
priſes : & pour n'eſtre point abbatu par
ſes attaques.
Æ-25. 17.
Que toute la malice eſt en la malice. Il faut donc toute la
de la femme
bonté,pour ſe premunir contre ſes ſur-
priſes : & pour n'eſtre point abbatu par
ſes attaques.
neas
Sylu.
l.2.de
geſtis
Alph.28
Gregoire de Haimberg, homme
tres-excellent en l'Eloquence & aux
belles Lettres , retournant d'vn long
voyage demanda ſur ſon chemin com-
ment on ſe portoit dans ſa famille ? &
ayant appris que ſa femme eſtoit en
bonne ſanté. Ah ! dit-il , ſi elle eſt en
vie ie ſuis mort : pour declarer , qu'il
eſtimoit ſes mauuaiſes mœurs auſſi
faſcheuſes que la mort meſme.
tres-excellent en l'Eloquence & aux
belles Lettres , retournant d'vn long
voyage demanda ſur ſon chemin com-
ment on ſe portoit dans ſa famille ? &
ayant appris que ſa femme eſtoit en
bonne ſanté. Ah ! dit-il , ſi elle eſt en
vie ie ſuis mort : pour declarer , qu'il
eſtimoit ſes mauuaiſes mœurs auſſi
faſcheuſes que la mort meſme.
Cteſias , au rapport de Photius,
nous raconte , Que la Martichore eſt
vne beſte farouche qui a le viſage de
femme. Elle eſt grande comme vn
Lion , de couleur rouge, & a triples
rangs de dents. Elle a vne queuë lon-
gue d'vne coudée, & heriſſée de tres-
piquantes eſpines. Elle ſe ſert de cette
queuë comme d'vn arc pour tirer ſes
gueur d'vn arpent de terre: Elle tuë
tout ce qu'elle rencontre, excepté l'E-
lephant. Solin adjouſte , qu'elle à la
queuë comme vn Scorpion , & vne
voix ſi raiſonnante , qu'elle imite les
fluſtes & les trompettes. Elle deuore
les hommes auec auidité, & eſt ſi le-
gere à la courſe , qu'on ne la peut
euiter.
nous raconte , Que la Martichore eſt
vne beſte farouche qui a le viſage de
femme. Elle eſt grande comme vn
Lion , de couleur rouge, & a triples
rangs de dents. Elle a vne queuë lon-
gue d'vne coudée, & heriſſée de tres-
piquantes eſpines. Elle ſe ſert de cette
queuë comme d'vn arc pour tirer ſes
47
des perſonnes Mariées.
picquerons , qu'elle iette de la lon-gueur d'vn arpent de terre: Elle tuë
tout ce qu'elle rencontre, excepté l'E-
lephant. Solin adjouſte , qu'elle à la
queuë comme vn Scorpion , & vne
voix ſi raiſonnante , qu'elle imite les
fluſtes & les trompettes. Elle deuore
les hommes auec auidité, & eſt ſi le-
gere à la courſe , qu'on ne la peut
euiter.
Vne femme meſchante eſt vne
beſte furieuſe, qui a la rage des Lions
par ſes coleres: triple rang de dents par
ſes detractions , n'épargnant ny ſes
Superieurs, ny ſes égaux, ny ſes infe-
rieurs. Elle eſt heriſſée d'eſpines dans
ſa conuerſation, & à le venin des Scor-
pions , par ſes maledictions & impre-
cations ſecrettes. Elle a vne voix plus
perçante que les trompettes, & allume
le combat à toutes occaſions qui ſe
preſentent. Enfin , ſi elle peut , elle
atterre & deuore ſon mary , le ruinant
en ſes biens, & en ſa renommée.
beſte furieuſe, qui a la rage des Lions
par ſes coleres: triple rang de dents par
ſes detractions , n'épargnant ny ſes
Superieurs, ny ſes égaux, ny ſes infe-
rieurs. Elle eſt heriſſée d'eſpines dans
ſa conuerſation, & à le venin des Scor-
pions , par ſes maledictions & impre-
cations ſecrettes. Elle a vne voix plus
perçante que les trompettes, & allume
le combat à toutes occaſions qui ſe
preſentent. Enfin , ſi elle peut , elle
atterre & deuore ſon mary , le ruinant
en ſes biens, & en ſa renommée.
InMu
lier.
Im-
prob.29 Sainct Ephrem en dit bien dauan-
tage.
Ephrem.
lier.
Im-
prob.29 Sainct Ephrem en dit bien dauan-
tage.
O qu'vne mauuaiſe femme eſt. Iuſques icy ſainct
vn mal extreme ! Elle eſt vn lacet orné,
48 La Direction & la Conſolation vn naufrage ſur la terre, vn viſage ma-
lin , vn threſor d'immondice , vne con-
uerſation qui cauſe la mort , le rauage
des yeux , la perte des ames , vn dard
qui perce les cœurs30, le ſceptre des en-
fers, vne conuoitiſe precipitee, la conſo-
lation du diable , le repos du ſerpent,
vne douleur inconſolable , vn four al-
lumé , l'achoppement de ceux qui tra-
uaillent à leur ſalut , vne malice incu-
rable, la boutique des furies, vne amour
criminelle , vne beſte impudente , vne
impetuoſité, qui n'admet aucune bride:
vne bouche effrenée qui reuele les ſe-
crets, le triomphe des tenebres, la guide
des pechez , la maistreſſe des plaiſirs,
vn deſir de meſchanceté, la cauſe d'vne
eternelle damnation, vne prudence ter-
reſtre, la pareſſe & l'engourdiſſement des
hommes , vne vipere bien habillée , vn
combat volontaire , vn malheur de tous
les iours , vne tempeſte domeſtique , la
ruine de ſon mary, vne beſte cruelle, vn
rendez-vous des adulteres, les armes
de l'enfer, vne rage ſouhaitée, vne mort
deguiſée & ornée
Ephrem.
Combien
49
des perſonnes Mariées.
Combien de vertus doit profeſſer ce-
lui qui entre tous les iours en lice auec
vn monſtre ſi dénaturé , s'il ne veut à
chaque heure perdre la victoire , &
tomber auec cette furie dans des abyſ-
mes ſans reſſource.
lui qui entre tous les iours en lice auec
vn monſtre ſi dénaturé , s'il ne veut à
chaque heure perdre la victoire , &
tomber auec cette furie dans des abyſ-
mes ſans reſſource.
Celuy-là donc , qui ſort victo-
rieux de ces combats , ne merite-il
pas d'eſtre appellé vn veritable Con-
feſſeur de Ieſus-Chriſt , pour l'amour
duquel il ſurmonte tant de difficultez
qui ſe preſentent à luy , & qui le
veulent retarder dans le chemin du
Ciel.
rieux de ces combats , ne merite-il
pas d'eſtre appellé vn veritable Con-
feſſeur de Ieſus-Chriſt , pour l'amour
duquel il ſurmonte tant de difficultez
qui ſe preſentent à luy , & qui le
veulent retarder dans le chemin du
Ciel.
filet décoratif
CHAPITRE VI.
§ I. La Patience oſte l'amertume
lib.2.34
lib.2.36
19 11.
§. II.
La memoire de la Paſſion
§. III.
L'exercice de la preſence de
penſées, toutes les paroles, & toutes
les moindres actions de voſtre mary,
de voſtre femme, de vos enfans, & de
tous ceux qui vous affligent ; il peut
les empeſcher de vous inquieter. Que
s'il ne iuge pas que ce ſoit voſtre bien:
voudriez-vous reſiſter & combattre
contre ſa diuine Prouidence. Rendez-
vous executeur de ſa Loy , & non pas
juge & controlleur de ſes volontez.
Mart.
§. IV. L'Oraiſon obtient les forces
nidés.
CHAPITRE VI.
Quatre moyens generaux pour viure
content & ioyeux, eſtant mal
marié.
VN Soldat bien armé depuis les
pieds iuſques à la teſte , ne
craint point les coups de fleſches : ſi
principalemẽt elles ſont tirées par vne
perſonne foible. Vn homme genereux,
des paroles & des actions malignes
d'vne mauuaiſe femme.
pieds iuſques à la teſte , ne
craint point les coups de fleſches : ſi
principalemẽt elles ſont tirées par vne
perſonne foible. Vn homme genereux,
C
50
La Direction & la Conſolation
renforcé par la ſeule nature , ſe moquedes paroles & des actions malignes
d'vne mauuaiſe femme.
Mais la grace luy donne encore
des armes , qui ſont de meilleure
trempe & plus impenetrables. I. La
Patience. II. Le ſouuenir de la Paſ-
ſion de Ieſus-Chriſt. III. L'Exercice
de la Preſence de Dieu. IV. L'O-
raiſon.
des armes , qui ſont de meilleure
trempe & plus impenetrables. I. La
Patience. II. Le ſouuenir de la Paſ-
ſion de Ieſus-Chriſt. III. L'Exercice
de la Preſence de Dieu. IV. L'O-
raiſon.
§ I. La Patience oſte l'amertume
des choſes douloureuſes qui arriuent
dans le meſnage.
I. Dieu donne du miel à ſes ſerui-
teurs , mais de la bouche des Lions,
comme au valeureux Samſon chef de
ſon peuple. Il tire le vin de la grappe
des raiſins : l'huile des oliues : le grain
de froment de l'écorce qui le renferme.
Mais toute cette douceur & cette
commodité ne ſe donnent point, que
ſous le preſſoir & ſous le fleau.
teurs , mais de la bouche des Lions,
comme au valeureux Samſon chef de
ſon peuple. Il tire le vin de la grappe
des raiſins : l'huile des oliues : le grain
de froment de l'écorce qui le renferme.
Mais toute cette douceur & cette
commodité ne ſe donnent point, que
ſous le preſſoir & ſous le fleau.
II. Tous les biens & tous les
contentemens de ce monde, ſont les
fruicts de la Croix de Ieſus-Christ. Il
y faut monter auec luy , ſi nous vou-
lons les cueillir.
contentemens de ce monde, ſont les
fruicts de la Croix de Ieſus-Christ. Il
y faut monter auec luy , ſi nous vou-
lons les cueillir.
51
des perſonnes Mariées.
III. Cherchons nos aiſes tant qu'il
nous plaira ; il nous faut porter noſtre
Croix. Chacun a la ſienne , & perſon-
ne ne s'en peut exempter. De quel-
que coſté que nous nous tournions,
nous l'aurons touſiours à la rencontre.
Quelques Chreſtiens de la Syrie font
Trig. le ſigne de la Croix , commençant de
la droite à la gauche : nous commen-
çons de la gauche à la droite. Les
Chreſtiens du Iapon ſe l'imprimoient
ſur le front : le Bien heureux Henry
Suſo , ſur ſon cœur & ſur ſon dos.
Pluſieurs Cheualiers la portent ſur
leur ſein , les autres ſur leurs bras:
quelques vns ſur leurs manteaux &
ſur leurs caſques. Les vnes ſont rou-
ges, les autres ſont blanches, jaunes,
noires, argentées, & de diuerſes ma-
tieres. Mais toutes ſont Croix. Nous
ne ſommes point meilleurs que noſtre
Maiſtre , qui a porté la ſienne iuſques
à la mort.
nous plaira ; il nous faut porter noſtre
Croix. Chacun a la ſienne , & perſon-
ne ne s'en peut exempter. De quel-
que coſté que nous nous tournions,
nous l'aurons touſiours à la rencontre.
Quelques Chreſtiens de la Syrie font
Trig. le ſigne de la Croix , commençant de
la droite à la gauche : nous commen-
çons de la gauche à la droite. Les
Chreſtiens du Iapon ſe l'imprimoient
ſur le front : le Bien heureux Henry
Suſo , ſur ſon cœur & ſur ſon dos.
Pluſieurs Cheualiers la portent ſur
leur ſein , les autres ſur leurs bras:
quelques vns ſur leurs manteaux &
ſur leurs caſques. Les vnes ſont rou-
ges, les autres ſont blanches, jaunes,
noires, argentées, & de diuerſes ma-
tieres. Mais toutes ſont Croix. Nous
ne ſommes point meilleurs que noſtre
Maiſtre , qui a porté la ſienne iuſques
à la mort.
IV. Dans les Cours meſme des
Rois , on paſſe ſa vie en receuant des
affronts & des diſgraces , & en remer-
ciant ceux qui les font , ſi l'on veut
fin dans vn beau iour.
Rois , on paſſe ſa vie en receuant des
affronts & des diſgraces , & en remer-
ciant ceux qui les font , ſi l'on veut
C ij
52
La Direction & la Conſolation
auancer ſa fortune , & paroiſtre à lafin dans vn beau iour.
V. Vn homme patient & coura-
geux tourne tout en bien : comme
vn bon eſtomach tire vn bon ſuc d'vne
Oſorias
lib. 2.
de Em-
man. mauuaiſe viande. La Patience tire le
miel de la pierre, & vne bonne nour-
riture du poiſon-meſme. Vous pou-
uez emprunter des Braſiliens vn ex-
cellent ſymbole de cela. Ils ne ſement
point de bled pour auoir du pain. Ils
ont vne racine grande comme la pour-
celaine. Elle a vn venin ſi pernicieux,
que ceux qui en mangent ſans la cuire
meurent ſur le champ. Pour euiter ce
peril ils la battent , & en font ſortir le
ſuc veneneux : ils la ſechent au Soleil,
la broyent ſous vne meule & en font
de la farine. Les pains qu'on en fait
ſont bons , & d'vn gouſt ſauoureux.
geux tourne tout en bien : comme
vn bon eſtomach tire vn bon ſuc d'vne
Oſorias
lib. 2.
de Em-
man. mauuaiſe viande. La Patience tire le
miel de la pierre, & vne bonne nour-
riture du poiſon-meſme. Vous pou-
uez emprunter des Braſiliens vn ex-
cellent ſymbole de cela. Ils ne ſement
point de bled pour auoir du pain. Ils
ont vne racine grande comme la pour-
celaine. Elle a vn venin ſi pernicieux,
que ceux qui en mangent ſans la cuire
meurent ſur le champ. Pour euiter ce
peril ils la battent , & en font ſortir le
ſuc veneneux : ils la ſechent au Soleil,
la broyent ſous vne meule & en font
de la farine. Les pains qu'on en fait
ſont bons , & d'vn gouſt ſauoureux.
VI. Iamais vous n'euiterez les pe-
chez dans voſtre maiſon, ſi vous n'af-
fermiſſez voſtre eſprit par la patience.
Tous les iours vous ferez quelque
naufrage, ſi vous n'affermiſſez voſtre
cœur31 par cette anchre de ſalut.
Socrate diſoit, qu'vn Nauire ne ſe doit
qu'vne ſeule eſperance n'eſt point ca-
Max
ſer de
ſpe. pable d'aſſeurer noſtre eſprit. Mais ie
ſuis certain que la Patience toute ſeule
ſuffit, pour aſſeurer au milieu des plus
furieuſes tempeſtes vn homme vraye-
ment Chreſtien. Vn cœur32 patient eſt
vn Rocher inébranlable , que les flots
courroucez de la fortune ne font que
lauer & endurcir.
chez dans voſtre maiſon, ſi vous n'af-
fermiſſez voſtre eſprit par la patience.
Tous les iours vous ferez quelque
naufrage, ſi vous n'affermiſſez voſtre
cœur31 par cette anchre de ſalut.
Socrate diſoit, qu'vn Nauire ne ſe doit
53
des perſonnes Mariées.
pas contenter d'vne ſeule anchre , &qu'vne ſeule eſperance n'eſt point ca-
Max
ſer de
ſpe. pable d'aſſeurer noſtre eſprit. Mais ie
ſuis certain que la Patience toute ſeule
ſuffit, pour aſſeurer au milieu des plus
furieuſes tempeſtes vn homme vraye-
ment Chreſtien. Vn cœur32 patient eſt
vn Rocher inébranlable , que les flots
courroucez de la fortune ne font que
lauer & endurcir.
VII. Si l'on n'euite point les pe-
chez ſans la vertu de Patience, beau-
coup moins acquiert-on les vertus. Il
faut tailler les pierres auant que d'en
baſtir la Ieruſalem Celeſte. Les vertus
compoſent l'edifice ſpirituel de l'ame: Lib.31
de
clauſt.
animæ.33
Et Hugues de ſainct Victor dit.
chez ſans la vertu de Patience, beau-
coup moins acquiert-on les vertus. Il
faut tailler les pierres auant que d'en
baſtir la Ieruſalem Celeſte. Les vertus
compoſent l'edifice ſpirituel de l'ame: Lib.31
de
clauſt.
animæ.33
Et Hugues de ſainct Victor dit.
Que.
l'Humilité en eſt le fondement , & y
tient la profondeur : que la Charité en
eſt la largeur : que les bonnes œuures
eſleuent les murailles , & obtiennent la
protection qui les couure & qu'enfin la
longueur s'acheve, auec la fermeté d'v-
ne conſtante & ſolide Patience
VIII. Mais ce qui vous cauſe vne plus
ſenſible douleur, c'eſt que le mal vous
vient par voſtre femme , laquelle de-
ſoulagement. Pour vous parler auec
franchiſe , ie vois bien que voſtre mal
eſt extreme : & d'autant plus qu'il eſt
ineuitable. Mais quand vous entre-
rez dans des fougues peu raiſonna-
ble & peu Chreſtiennes , vous aug-
menterez vos douleurs, & ne mettrez
aucun remede à voſtre infortune.
ſenſible douleur, c'eſt que le mal vous
vient par voſtre femme , laquelle de-
C iij
54
La Direction & la Conſolation
uroit eſtre voſtre conſolation & voſtreſoulagement. Pour vous parler auec
franchiſe , ie vois bien que voſtre mal
eſt extreme : & d'autant plus qu'il eſt
ineuitable. Mais quand vous entre-
rez dans des fougues peu raiſonna-
ble & peu Chreſtiennes , vous aug-
menterez vos douleurs, & ne mettrez
aucun remede à voſtre infortune.
Conſiderez pluſtoſt , que vous-
meſme auez choiſi cette femme. Qu'il
eſt iuſte d'accomoder vos humeurs
à celle à qui vous auez donné voſtre
cœur. Si voſtre choix a eſté precipité
dans les boüillons de voſtre paſſion, ac-
ceptez-en la penitence que la Iuſtice
diuine vous enuoye.
Laert.meſme auez choiſi cette femme. Qu'il
eſt iuſte d'accomoder vos humeurs
à celle à qui vous auez donné voſtre
cœur. Si voſtre choix a eſté precipité
dans les boüillons de voſtre paſſion, ac-
ceptez-en la penitence que la Iuſtice
diuine vous enuoye.
lib.2.34
Antiſthenes
reprenoit35 les hommes
de ce qu'ils mettent beaucoup de con-
ſideration à l'achapt d'vn vaſe qui ſe
vent à l'encant de peur d'y eſtre trom-
pez : & qu'ils ne conſiderent point la
vie de ceux , en l'amitié deſquels ils
s'engagent. Auec combien plus de
raiſon doiuent eſtre repris ceux qui ſe
lient pour toute leur vie à vne femme
ſans vne meure deliberation,ſans auoir
la volonté de leurs parens ?
Laert.de ce qu'ils mettent beaucoup de con-
ſideration à l'achapt d'vn vaſe qui ſe
vent à l'encant de peur d'y eſtre trom-
pez : & qu'ils ne conſiderent point la
vie de ceux , en l'amitié deſquels ils
s'engagent. Auec combien plus de
raiſon doiuent eſtre repris ceux qui ſe
lient pour toute leur vie à vne femme
ſans vne meure deliberation,ſans auoir
55
des perſonnes Mariées.
long temps conſulté l'Oracle diuin, &la volonté de leurs parens ?
lib.2.36
IX. Si vous voulez, vous vous ac-
couſtumerez au bruit dans peu de
temps. Le Philoſophe Socrate voyant
qu'Alcibiade admiroit comme il rete-
noit ſa femme Xantippe, qui ne faiſoit
que criailler & le quereller : il l'aſſeu-
ra, Que toutes ces crieries ne l'offen-
ſoient non plus , que le bruit de la
rouë qui tiroit l'eau de ſon puits.
Prom.couſtumerez au bruit dans peu de
temps. Le Philoſophe Socrate voyant
qu'Alcibiade admiroit comme il rete-
noit ſa femme Xantippe, qui ne faiſoit
que criailler & le quereller : il l'aſſeu-
ra, Que toutes ces crieries ne l'offen-
ſoient non plus , que le bruit de la
rouë qui tiroit l'eau de ſon puits.
19 11.
Vn homme ſage eſt plus fort , que
tout le tintamarre d'vne babillarde : &
tout le tintamarre d'vne babillarde : &
la Sageſſe, dit Salomon,
ſe montre dans.
la Patience
X. Tout ſeroit tolerable , dites-
vous , s'il duroit peu : mais vne fem-
me par ſa malice afflige tout le cours
de la vie. Pour moderer cette affliction,
il faut ietter la veuë ſur la briéueté de
vos iours , & ſur la longueur de l'eter-
nité. Cette veuë appaiſera voſtre eſprit
par l'eſpoir d'vne prompte déliurance,
& d'vne recompenſe qui ne finira
iamais.
vous , s'il duroit peu : mais vne fem-
me par ſa malice afflige tout le cours
de la vie. Pour moderer cette affliction,
il faut ietter la veuë ſur la briéueté de
vos iours , & ſur la longueur de l'eter-
nité. Cette veuë appaiſera voſtre eſprit
par l'eſpoir d'vne prompte déliurance,
& d'vne recompenſe qui ne finira
iamais.
Le Philoſophe Simonidés diſoit,
Pſal.
69.4.38auoit enſeigné deuant luy ,
courage aſſez maſle pour ſouffrir vn
ſeul iour , ou pluſtoſt vn ſeul poinct
de temps qui s'écoule?
Mille ans & cent mille ans comparez. Le Prophete Royal37
C iiij 56 La Direction & la Conſolation à l'éternité ne ſont qu'vn moment vo-
lant & paſſager
Pſal.
69.4.38auoit enſeigné deuant luy ,
Que mille. Quoy donc n'aurez-vous point vn
années ne ſont non plus deuant les yeux
de Dieu ; que le iour d'hier qui eſt paſ-
sé
courage aſſez maſle pour ſouffrir vn
ſeul iour , ou pluſtoſt vn ſeul poinct
de temps qui s'écoule?
XI. Roidiſſez-vous contre le tor-
rent , & demandez ſouuent à Dieu la
Perſeuerance dans vos bonnes reſolu-
tions d'eſtre patient. Les autres ver-
tus voyent la couronne & courent
apres: mais la ſeule perſeuerance l'ob-
Epiſt.
129.39 tient.
nard,
donc ferme, & toutes les difficultez
s'applaniront, auec le temps & auec la
Patience.
rent , & demandez ſouuent à Dieu la
Perſeuerance dans vos bonnes reſolu-
tions d'eſtre patient. Les autres ver-
tus voyent la couronne & courent
apres: mais la ſeule perſeuerance l'ob-
Epiſt.
129.39 tient.
La Perſeuerance, dit ſainct Ber-
nard,
eſt la nourriſſe du merite, la me-. Ainſi parle S. Bernard. Tenez
diatrice du prix, la ſœur de la Patien-
ce , la fille de la conſtance , l'amie de
la paix , le nœud des amitiez , le lien
de l'vnion des cœurs, le bouleuart de la
ſaincteté. Oſtez la Perſeuerance , le
ſeruice n'a recompenſe aucune , ny le
bien-fait aucune grace, ny la force au-
cune loüange. L'Eternité ne ſe donne
qu'à elle ſeule, où pluſtoſt elle ſeule por-
te l'homme à l'eternité : veu que noſtre
57 des perſonnes Mariées. Seigneur dit. Celuy qui perſeuerera ſera
ſauué
donc ferme, & toutes les difficultez
s'applaniront, auec le temps & auec la
Patience.
§. II.
La memoire de la Paſſion
de noſtre Sauueur Ieſus-Chriſt, donne
de la douceur dans l'amertume du
meſnage.
Exod.
15.40 I. Au ſortir de l'Egypte , Moïſe en-
tra auec le peuple de Dieu dans le de-
ſert de l'Arabie , & trouua d'abord vne
eau fort amere , auſſi l'appella-t'il
Mara , qui ſignifie , Amere , ou Amer-
tume. Le peuple ſe mit incontinent41 à
murmurer : mais Dieu y pourueut, en-
ſeignant vn bois ſi doux & ſi efficace,
qu'eſtant ietté dans cette eau il la ren-
dit douce , partie par ſa vertu naturel-
le, partie par la force particuliere qu'il
luy communiqua, dans l'extremité du
beſoin de ſes ſeruiteurs.
15.40 I. Au ſortir de l'Egypte , Moïſe en-
tra auec le peuple de Dieu dans le de-
ſert de l'Arabie , & trouua d'abord vne
eau fort amere , auſſi l'appella-t'il
Mara , qui ſignifie , Amere , ou Amer-
tume. Le peuple ſe mit incontinent41 à
murmurer : mais Dieu y pourueut, en-
ſeignant vn bois ſi doux & ſi efficace,
qu'eſtant ietté dans cette eau il la ren-
dit douce , partie par ſa vertu naturel-
le, partie par la force particuliere qu'il
luy communiqua, dans l'extremité du
beſoin de ſes ſeruiteurs.
II. Noſtre vie eſt vn deſert, plein
d'vne infinité d'amertumes. Il faut
prendre le bois de la Croix de noſtre
Seigneur, & le ietter dans nos angoiſ-
ſes, ſans aucun doute il les adoucira.
il n'eſt rien de ſi faſcheux, que l'on ne
ſupporte auec gayeté de cœur , ſi l'on
ſe remet en la memoire la Paſſion du
Redempteur de nos ames.
d'vne infinité d'amertumes. Il faut
prendre le bois de la Croix de noſtre
Seigneur, & le ietter dans nos angoiſ-
ſes, ſans aucun doute il les adoucira.
C v
58
La Direction & la Conſolation
Car, comme aduertit ſainct Gregoire,il n'eſt rien de ſi faſcheux, que l'on ne
ſupporte auec gayeté de cœur , ſi l'on
ſe remet en la memoire la Paſſion du
Redempteur de nos ames.
III. Comment ſeroit-il poſſible,
qu'vn homme chargé de pechez , di-
gne de la colere de Dieu pour ſes offen-
ſes paſſées : mépriſable à cauſe de la
baſſeſſe de ſon corps, & de l'ignorance
de ſon ame , ſe plaigniſt de ce qu'il en-
dure , voyant Dieu meſme cloüé ſur
vne Croix , déchiré depuis les pieds
iuſqu'à la teſte , & couronné d'eſpi-
nes, mourir entre deux voleurs pour
l'amour de luy ?
qu'vn homme chargé de pechez , di-
gne de la colere de Dieu pour ſes offen-
ſes paſſées : mépriſable à cauſe de la
baſſeſſe de ſon corps, & de l'ignorance
de ſon ame , ſe plaigniſt de ce qu'il en-
dure , voyant Dieu meſme cloüé ſur
vne Croix , déchiré depuis les pieds
iuſqu'à la teſte , & couronné d'eſpi-
nes, mourir entre deux voleurs pour
l'amour de luy ?
Sainct Bernard ſe paſme dans cette
conſideration.
il ,
conſideration.
Le chef de Ieſus, dit-
il ,
qui eſt redoutable à tous les Anges,.
eſt percé d'vne multitude d'eſpines. Son
viſage qui eſt le plus beau d'entre tous
ceux des hommes, eſt ſoüillé par les cra-
chats des Iuifs. Ses yeux plus luiſans
que le Soleil, ſont obſcurcis en ſa mort.
Ses oreilles qui oyent la muſique des
Eſprits celeſtes, entendent les brocards
& les iniures des impies. Sa bouche
59 des perſonnes Mariées. qui enſeigne les Seraphins, eſt abreuuée
de vinaigre. Ses pieds dont on adore
l'eſcabeau, ſont cloüez en la Croix. Ses
mains qui ont formé les Cieux , ſont
eſtendues ſur la meſme Croix, & percées
de gros cloux. Son corps eſt deſchiré par
les foüets, & meurtry de coups de pieds,
de poings, & de baſtons. Son coſté eſt
transſpercé d'vne lance. Il ne luy reſte que
la langue libre , afin de prier ſon Pere
Eternel pour les pecheurs
IV. Si la Croix de ſainct Thomai-
ſe , Patriarche de Conſtantinople , &
celle de ſainct Xauier , trempées dans
des mers courroucées , en ont appaiſé
les flots qui menaçoient du naufrage :
qui pourra douter que la Croix du Sau-
ueur de l'Vniuers , ne mette le calme
dans vn cœur42, pour flottant & agité
qu'il puiſſe eſtre.
ſe , Patriarche de Conſtantinople , &
celle de ſainct Xauier , trempées dans
des mers courroucées , en ont appaiſé
les flots qui menaçoient du naufrage :
qui pourra douter que la Croix du Sau-
ueur de l'Vniuers , ne mette le calme
dans vn cœur42, pour flottant & agité
qu'il puiſſe eſtre.
V. L'experience a montré cette for-
En ſa
Vie. ce de la Croix. Sainct Elzear Comte
d'Arien , fut vn iour interrogé par
ſaincte Dalphine ſa femme: Comment
il ſe pouuoit faire , qu'eſtant ſi ſou-
uent offenſé par diuerſes perſonnes, il
n'en montraſt aucun ſigne d'indigna-
mouuemens de la colere, à toutes les
attaques qui me ſuruiennent. Mais
i'ay recours incontinent43 aux playes de
mon Ieſus. Auſſi toſt que ie ſuis entré
dans cét azile , toutes les injures me
ſont tres-douces , & toutes les dou-
leurs ſe changent en ioye, conſiderant
que i'ay alors quelque petite reſſem-
blance à mon Redempteur.
En ſa
Vie. ce de la Croix. Sainct Elzear Comte
d'Arien , fut vn iour interrogé par
ſaincte Dalphine ſa femme: Comment
il ſe pouuoit faire , qu'eſtant ſi ſou-
uent offenſé par diuerſes perſonnes, il
n'en montraſt aucun ſigne d'indigna-
C vj
60
La Direction & la Conſolation
tion , il répondit. Ie ſens au vif lesmouuemens de la colere, à toutes les
attaques qui me ſuruiennent. Mais
i'ay recours incontinent43 aux playes de
mon Ieſus. Auſſi toſt que ie ſuis entré
dans cét azile , toutes les injures me
ſont tres-douces , & toutes les dou-
leurs ſe changent en ioye, conſiderant
que i'ay alors quelque petite reſſem-
blance à mon Redempteur.
VI. Vn Lion rauageant tout vn
païs , ſainct Chryſoſtome ordonna
qu'on plantaſt vne Croix ſur le chemin
où il paſſoit. Dés le lendemain on
trouua ce furieux eſtendu mort , au
pied de cét arbre de vie. Ne craignez
rien, ſi vous poſez dans voſtre cœur44 la
Croix du Fils de Dieu , & ſi vous y ver-
ſez vos larmes & vos douleurs.
païs , ſainct Chryſoſtome ordonna
qu'on plantaſt vne Croix ſur le chemin
où il paſſoit. Dés le lendemain on
trouua ce furieux eſtendu mort , au
pied de cét arbre de vie. Ne craignez
rien, ſi vous poſez dans voſtre cœur44 la
Croix du Fils de Dieu , & ſi vous y ver-
ſez vos larmes & vos douleurs.
VII. Les Serpens , leſquels de-
meurent auprés des arbriſſeaux, qui
diſtillent le baume y perdent leur ve-
nin. Et toutes les afflictions iettées
au pied du bois de ſalut, & arroſées du
Sang de Ieſus , deuiennent douces &
bien-faiſantes.
meurent auprés des arbriſſeaux, qui
diſtillent le baume y perdent leur ve-
nin. Et toutes les afflictions iettées
au pied du bois de ſalut, & arroſées du
Sang de Ieſus , deuiennent douces &
bien-faiſantes.
VIII. Vn Religieux eſtant abyſ-
Ludol-
ph. de
vita
Chriſti. larmes, ne pouuoit ny lire ny prier, ny
faire aucune action de pieté. Ieſus-
Chriſt luy apparut dans cette détreſſe:
luy dit. Pourquoy demeures-tu oiſif
& glacé dans tes penſées melancholi-
ques , & à quel ſujet te ronges tu ainſi
le cœur45? leue toy : & medite ſerieuſe-
ment ma Paſſion , & ta douleur ſe per-
dra dans l'amertume de mes tour-
mens. Il obeït , & fut parfaitement
guery de ce chagrin aſſommant.
61
des perſonnes Mariées.
mé dans ſes triſteſſes, & noyé dans ſesLudol-
ph. de
vita
Chriſti. larmes, ne pouuoit ny lire ny prier, ny
faire aucune action de pieté. Ieſus-
Chriſt luy apparut dans cette détreſſe:
luy dit. Pourquoy demeures-tu oiſif
& glacé dans tes penſées melancholi-
ques , & à quel ſujet te ronges tu ainſi
le cœur45? leue toy : & medite ſerieuſe-
ment ma Paſſion , & ta douleur ſe per-
dra dans l'amertume de mes tour-
mens. Il obeït , & fut parfaitement
guery de ce chagrin aſſommant.
IX. Sainct Antonin , Arche-
ueſque de Florence , priant vn iour
deuant vn Crucifix, & eſtant extaſié
en la contemplation des douleurs
de ſon Redempteur , fut eſleué en
l'air tout rayonnant de clarté. Il
porta ſa bouche au coſté de ce Dieu de
bonté & d'amour , & en tira vne ſi
douce liqueur , que depuis ce temps-
là ſes diſcours en reſterent comme em-
miellez , & plus agreables qu'à l'ordi-
naire. Tout eſt doux dans celuy qui a
gouſté du Sang de Ieſus.
ueſque de Florence , priant vn iour
deuant vn Crucifix, & eſtant extaſié
en la contemplation des douleurs
de ſon Redempteur , fut eſleué en
l'air tout rayonnant de clarté. Il
porta ſa bouche au coſté de ce Dieu de
bonté & d'amour , & en tira vne ſi
douce liqueur , que depuis ce temps-
là ſes diſcours en reſterent comme em-
miellez , & plus agreables qu'à l'ordi-
naire. Tout eſt doux dans celuy qui a
gouſté du Sang de Ieſus.
S.Brig.
Reuel.46 X. Ce Dieu de charité aſſeura
ſaincte Brigide , Qu'il eſtoit encore
meſmes ſupplices & la meſme mort
pour chaque pecheur en particulier,
qu'il endura pour tous les hommes
lors qu'il viuoit ſur terre. Pourroit-il
arriuer que nous fuſſions ſi laſches,
que de reculer dans les occaſions qu'il
nous offre pour l'imiter ? Toute ſa vie
n'a eſté autre choſe qu'vn martyre con-
tinuel. Comment donc voudrions-
nous chercher du repos & de l'alle-
greſſe , dans ce lieu de combat & de
ſouffrance ?
Reuel.46 X. Ce Dieu de charité aſſeura
ſaincte Brigide , Qu'il eſtoit encore
62
La Direction & la Conſolation
aujourd'huy tout preſt, d'endurer lesmeſmes ſupplices & la meſme mort
pour chaque pecheur en particulier,
qu'il endura pour tous les hommes
lors qu'il viuoit ſur terre. Pourroit-il
arriuer que nous fuſſions ſi laſches,
que de reculer dans les occaſions qu'il
nous offre pour l'imiter ? Toute ſa vie
n'a eſté autre choſe qu'vn martyre con-
tinuel. Comment donc voudrions-
nous chercher du repos & de l'alle-
greſſe , dans ce lieu de combat & de
ſouffrance ?
XI. Les Saincts ſe ſont efforcez de
ſuiure leur Sauueur ſur le Caluaire , &
de ne iamais perdre de veuë ſa Croix &
ſa Patience. L'Abbé Eſtienne47 diſoit. Moſ-
chus c.
64.48
poit d'vne telle ſorte , que ſouuent il
n'oyoit pas ceux qui parloient d'autres
choſes.
ſuiure leur Sauueur ſur le Caluaire , &
de ne iamais perdre de veuë ſa Croix &
ſa Patience. L'Abbé Eſtienne47 diſoit. Moſ-
chus c.
64.48
Iour & nuict ie n'ay autre choſe deuant. Et cette penſée l'occu-
les yeux que mon Redempteur eſtendu
ſur la Croix
poit d'vne telle ſorte , que ſouuent il
n'oyoit pas ceux qui parloient d'autres
choſes.
XII. Saincte Claire de Montefal-
Bozius
l.15.c.
9. co , auoit la Paſſion de Ieſus ſi fort im-
primée dans ſon ame, qu'apres ſa mort
on l'apperçeut grauée ſur ſon cœur. Et
ce cœur les foüets , auec quoy Ieſus
auoit eſté flagellé ; la colomne où il
auoit eſté lié, & tous les autres inſtru-
mens de ſa Paſſion.
Bozius
l.15.c.
9. co , auoit la Paſſion de Ieſus ſi fort im-
primée dans ſon ame, qu'apres ſa mort
on l'apperçeut grauée ſur ſon cœur. Et
63
des perſonnes Mariées.
Bozius aſſeure, auoir veu marquez ſurce cœur les foüets , auec quoy Ieſus
auoit eſté flagellé ; la colomne où il
auoit eſté lié, & tous les autres inſtru-
mens de ſa Paſſion.
XIII. Imitez ces ames d'élite , &
ayant Ieſus dans voſtre cœur49, vous
ſerez imperturable à tous les acci-
dens qui vous ſuruiendront au de-
hors.
ayant Ieſus dans voſtre cœur49, vous
ſerez imperturable à tous les acci-
dens qui vous ſuruiendront au de-
hors.
§. III.
L'exercice de la preſence de
Dieu cauſe de la joye , au milieu des
plus rudes attaques.
Edoüard , Roy d'Angleterre , prit
pour ſon ſymbole le globe de la terre,
enchaiſné & ſuſpendu en l'air, par vne
main celeſte qui paroiſſoit dans vne
nuë. Il y adjouſta ces paroles ,
pour ſon ſymbole le globe de la terre,
enchaiſné & ſuſpendu en l'air, par vne
main celeſte qui paroiſſoit dans vne
nuë. Il y adjouſta ces paroles ,
Nil.
ſine Deo, Rien ne ſe fait en ce monde,
ſans vne speciale Prouidence de Dieu
Il n'eſt nulle puiſſance ſur la terre,
qui ait les forces de vous oſter vn che-
ueu de la teſte ſi Dieu ne les luy dõne.
Il vous enuironne de toutes parts , &
perſonne ne peut vous attaquer ſans
ſa volonté.
qui ait les forces de vous oſter vn che-
ueu de la teſte ſi Dieu ne les luy dõne.
Il vous enuironne de toutes parts , &
perſonne ne peut vous attaquer ſans
ſa volonté.
Que craignez-vous donc ? & dequoy
teur , voſtre conſeruateur , voſtre Pere
nourriſſier , voſtre Paſteur , voſtre Me-
decin , voſtre vie , voſtre joye , voſtre
tout. Si vous l'auez vous auez tout,
s'il vous conſerue vous eſtes aſſeuré, &
s'il vous afflige c'eſt pour vous cou-
ronner. Quelle choſe pourroit eſtre
capable de vous troubler , ſi vous
vous mettiez ſouuent en la preſence
d'vn Dieu ſi bon , ſi ſage , & ſi puiſ-
ſant? Sur.
26. Iu-
nij. Ba-
ron.
ann.
5,o.50 Gallican, General de l'armée Ro-
maine , apres la perte d'vne ſanglante
bataille , eſtoit preſque reduit au de-
ſeſpoir, ne pouuant humainement eſ-
chapper de la main des Scythes victo-
rieux. Dans cette extremité il implo-
ra le ſecours du Ciel , & à l'improuiſte
il apperceut à l'entour de ſoy vne ar-
mée d'Anges habillez en ſoldats qui
luy donnoient courage : & l'exhor-
toient à ſe ruer ſur les ennemis. Ani-
mé par leur preſence , il enfonce les
bataillons des Scythes, prend leur Roy
priſonnier, & met tout à l'eſpée ou en
fuite.
64
La Direction & la Conſolation
vous attriſtez-vous ? C'eſt voſtre Crea-teur , voſtre conſeruateur , voſtre Pere
nourriſſier , voſtre Paſteur , voſtre Me-
decin , voſtre vie , voſtre joye , voſtre
tout. Si vous l'auez vous auez tout,
s'il vous conſerue vous eſtes aſſeuré, &
s'il vous afflige c'eſt pour vous cou-
ronner. Quelle choſe pourroit eſtre
capable de vous troubler , ſi vous
vous mettiez ſouuent en la preſence
d'vn Dieu ſi bon , ſi ſage , & ſi puiſ-
ſant? Sur.
26. Iu-
nij. Ba-
ron.
ann.
5,o.50 Gallican, General de l'armée Ro-
maine , apres la perte d'vne ſanglante
bataille , eſtoit preſque reduit au de-
ſeſpoir, ne pouuant humainement eſ-
chapper de la main des Scythes victo-
rieux. Dans cette extremité il implo-
ra le ſecours du Ciel , & à l'improuiſte
il apperceut à l'entour de ſoy vne ar-
mée d'Anges habillez en ſoldats qui
luy donnoient courage : & l'exhor-
toient à ſe ruer ſur les ennemis. Ani-
mé par leur preſence , il enfonce les
bataillons des Scythes, prend leur Roy
priſonnier, & met tout à l'eſpée ou en
fuite.
65
des perſonnes Mariées.
Si le meſme vous arriuoit , vous
releueriez ſans doute vos eſperances,
dans vos pertes & dans vos abaiſſe-
mens. N'eſt-il pas veritable ? Quoy
dõc? Dieu n'eſt-il pas plus puiſſant, que
tous les Anges du Paradis : qui n'ont
nulle force que celle qu'il leur com-
munique ? Vn ſeul paſſereau ne tombe
point en terre ſans ſes ordres. Vne
ſeule feüille d'arbre ne ſe détache point
de ſes branches s'il ne le veut. Et vous
vous perſuaderiez que iamais il vous
puſt ou vouluſt abandonner ? Ne vous
laiſſez nullement entrer dans l'eſprit
cette erreur, laquelle ſeroit capable de
vous troubler & de vous perdre.
releueriez ſans doute vos eſperances,
dans vos pertes & dans vos abaiſſe-
mens. N'eſt-il pas veritable ? Quoy
dõc? Dieu n'eſt-il pas plus puiſſant, que
tous les Anges du Paradis : qui n'ont
nulle force que celle qu'il leur com-
munique ? Vn ſeul paſſereau ne tombe
point en terre ſans ſes ordres. Vne
ſeule feüille d'arbre ne ſe détache point
de ſes branches s'il ne le veut. Et vous
vous perſuaderiez que iamais il vous
puſt ou vouluſt abandonner ? Ne vous
laiſſez nullement entrer dans l'eſprit
cette erreur, laquelle ſeroit capable de
vous troubler & de vous perdre.
Le Soleil ne ſouhaite point tant de
communiquer ſa lumiere à la terre
que Dieu deſire de ſe donner aux
hommes , & de leur eſlargir ſes
Ad
Pau-
lin. bien-faits.
ſius,
communiquer ſa lumiere à la terre
que Dieu deſire de ſe donner aux
hommes , & de leur eſlargir ſes
Ad
Pau-
lin. bien-faits.
Ce qu'eſt la lumiere aux, dit Thalaſ-
yeux & aux choſes viſibles
ſius,
Dieu l'eſt à l'entendement & aux.
choſes qu'il connoiſt
Le Soleil obſcurcit les eſtoilles par
ſa clarté : & Dieu fait diſparoiſtre par
ſes ſplendeurs tout le luſtre de la terre.
tes les grandeurs du monde ne ſont
que baiſſeſſe , ſon eſclat que tenebres,
ſon abondance que pauureté.
ſa clarté : & Dieu fait diſparoiſtre par
ſes ſplendeurs tout le luſtre de la terre.
66
La Direction & la Conſolation
L'ame qui le contemple, voit que tou-tes les grandeurs du monde ne ſont
que baiſſeſſe , ſon eſclat que tenebres,
ſon abondance que pauureté.
Si le Soleil, dit ſainct Ambroiſe, Ambr.
espand ſes rayons ſur tout l'Vniuers, &? Que ſi Dieu voit toutes les
penetre dans les lieux les plus fermez
par le moyen de ſes influences, ſans que
les portes ny les verroüils de fer l'en
empeſchent. Comment la splendeur de
Dieu ne penetrera-t'elle pas les penſées
& les cœurs51 des hommes, & quelle puiſ-
ſance pourra ſe ſouſtraire à ſa veuë ſi
perçante
penſées, toutes les paroles, & toutes
les moindres actions de voſtre mary,
de voſtre femme, de vos enfans, & de
tous ceux qui vous affligent ; il peut
les empeſcher de vous inquieter. Que
s'il ne iuge pas que ce ſoit voſtre bien:
voudriez-vous reſiſter & combattre
contre ſa diuine Prouidence. Rendez-
vous executeur de ſa Loy , & non pas
juge & controlleur de ſes volontez.
Rien ne vous pourra nuire , ſi vous
vous affermiſſez en Dieu,qui ne ſe retire
iamais de vous : mais qui vous eſt ſans
Greg.
in E-
zech.
hom.1752 ſaint Gregoire,
vous affermiſſez en Dieu,qui ne ſe retire
iamais de vous : mais qui vous eſt ſans
67
des perſonnes Mariées.
ceſſe infiniment vny. Dieu, enſeigne
Greg.
in E-
zech.
hom.1752 ſaint Gregoire,
eſt dans toutes ſes crea-.
tures , au dehors , au deſſus, & au deſ-
ſous d'elles toutes. Il eſt au deſſus par
ſon pouuoir , exerçant ſur elles vn ſou-
uerain domaine. Il eſt au deſſous par
ſa bonté en les ſouſtenant. Il eſt au de-
hors par ſon immenſité en les enuiron-
nant. Il eſt au dedans par ſa ſubtilité,
les rempliſſant de ſes graces. Il les gou-
uerne eſtant au deſſus d'elles. Il les tient
dans ſes mains eſtant au deſſous. Il les
enuironne à l'exterieur , les defendant
de leurs contraires , & les penetre iuſ-
qu'à la moüelle des os , & aux parties
les plus cachées en les perfectionnant
Si vous vous laiſſez penetrer &
remplir de Dieu, vous ſerez tel qu'vne
eſponge au milieu de la mer, qui a de
l'eau au dedans, au deſſus, au deſſous,
& de tous les coſtez. Et vous demeu-
rerez touſiours égal à vous-meſme,
ſoit en la proſperité , ſoit en l'ad-
uerſité.
remplir de Dieu, vous ſerez tel qu'vne
eſponge au milieu de la mer, qui a de
l'eau au dedans, au deſſus, au deſſous,
& de tous les coſtez. Et vous demeu-
rerez touſiours égal à vous-meſme,
ſoit en la proſperité , ſoit en l'ad-
uerſité.
Premierement, lors que vous ſe-
rez en proſperité, conſiderez que Dieu
vous voit, qu'il vous aime, qu'il vous
qu'il occupera ſainctement toutes vos
penſées & toutes vos affections ſi
vous le voulez. Cette conſideration
vous remplira de ioye , & vous fera
mener vne vie heureuſe ſelon Dieu, &
ſelon ceux auec qui vous viurez.
Na-
zianz. Sainct Gregoire de Nazianze explique
cela par vne excellente comparaiſon.
rez en proſperité, conſiderez que Dieu
vous voit, qu'il vous aime, qu'il vous
68
La Direction & la Conſolation
éclaire , qu'il vous offre ſes graces,qu'il occupera ſainctement toutes vos
penſées & toutes vos affections ſi
vous le voulez. Cette conſideration
vous remplira de ioye , & vous fera
mener vne vie heureuſe ſelon Dieu, &
ſelon ceux auec qui vous viurez.
Na-
zianz. Sainct Gregoire de Nazianze explique
cela par vne excellente comparaiſon.
Comme, dit-il,
celuy qui oit vn excel-.
lent joüeur de Luth, prend vn tel plai-
ſir à cette melodie , que ſon eſprit s'y
attache entierement , & ne penſe à
autre choſe , encore qu'il ne le voye
point des yeux corporels. De meſme
ſorte , celuy qui a fait le Ciel & la
terre, & tout ce qu'ils contiennent, ſe
manifeſte à nous, nous conſerue, nous
fait agir , & retient tout noſtre eſprit,
bien que la foibleſſe de noſtre entende-
ment ne le puiſſe comprendre
Secondement , lors que les affli-
ctions vous attaqueront , & voudront
vous abattre & accabler de triſteſſe : ſi
vous penſez que Dieu vous eſt preſent
& vous offre ſon ſecours , voſtre cœur
ſentira vne celeſte joye qui diſſipera
76.4.
Actactions vous attaqueront , & voudront
vous abattre & accabler de triſteſſe : ſi
vous penſez que Dieu vous eſt preſent
& vous offre ſon ſecours , voſtre cœur
ſentira vne celeſte joye qui diſſipera
69
des perſonnes Mariées.
tous ces nuages. Dans mes aduerſi-Pſal.
76.4.
tez, dit Dauid,
ie me ſuis ſouuenu de.
mon Createur , & i'ay ſenty vne alle-
greſſe qui m'a entierement réjoüy
Mart.
Les bourreaux ayant preſenté à
ſainct Gordias53des rouës,des cheualets,
des grils de fer, & tous les inſtrumens
avec leſquels on tourmentoit les Chre-
ſtiens , il jetta les yeux au Ciel pour y
contempler ſon Dieu qui le ſecouroit.
Et apres auoir témoigné d'vne voix
maſle & joyeuſe que Dieu l'aideroit ,
il ſe precipita luy-meſme dans le feu,
auec vne promptitude qui étonna tous
les Payens, & réjoüit tous les ſerui-
teurs de Dieu.
ſainct Gordias53des rouës,des cheualets,
des grils de fer, & tous les inſtrumens
avec leſquels on tourmentoit les Chre-
ſtiens , il jetta les yeux au Ciel pour y
contempler ſon Dieu qui le ſecouroit.
Et apres auoir témoigné d'vne voix
maſle & joyeuſe que Dieu l'aideroit ,
il ſe precipita luy-meſme dans le feu,
auec vne promptitude qui étonna tous
les Payens, & réjoüit tous les ſerui-
teurs de Dieu.
Vne voix celeſte anima dans la pri-
ſon ſaincte Archelaa54, & les ſaincts
Genite & Genulphe : dans le lieu du
ſupplice ſainct Polycarpe, & au milieu
des tourmens ſainct Thyrſe , ſaincte
Priſque , & ſainct Theodore : Et tous
fortifiez du ſecours diuin , ſe porte-
rent genereuſement dans le combat.
Rien n'eſt difficile à vn courageux ſol-
dat , à la veuë de ſon Capitaine & de
ſon Roy.
ſon ſaincte Archelaa54, & les ſaincts
Genite & Genulphe : dans le lieu du
ſupplice ſainct Polycarpe, & au milieu
des tourmens ſainct Thyrſe , ſaincte
Priſque , & ſainct Theodore : Et tous
fortifiez du ſecours diuin , ſe porte-
rent genereuſement dans le combat.
Rien n'eſt difficile à vn courageux ſol-
dat , à la veuë de ſon Capitaine & de
ſon Roy.
70
La Direction & la Conſolation
Lors donc que vous vous trouue-
rez dans voſtre meſnage, accablé de
douleurs & d'anxietez: jettez les yeux
ſur Dieu , qui eſt voſtre amy & voſtre
Pere : Il vous eſt vny intimement , &
vous enferme dans ſoy-meſme. Ce
bouclier eſt impenetrable à tous les
malheurs de ce monde. Adjouſtez-y
la priere, elle augmentera voſtre con-
fiance : & vous obtiendra des graces
plus fortes & plus victorieuſes. Con-
ſiderons cette verité.
rez dans voſtre meſnage, accablé de
douleurs & d'anxietez: jettez les yeux
ſur Dieu , qui eſt voſtre amy & voſtre
Pere : Il vous eſt vny intimement , &
vous enferme dans ſoy-meſme. Ce
bouclier eſt impenetrable à tous les
malheurs de ce monde. Adjouſtez-y
la priere, elle augmentera voſtre con-
fiance : & vous obtiendra des graces
plus fortes & plus victorieuſes. Con-
ſiderons cette verité.
§. IV. L'Oraiſon obtient les forces
neceſſaires , & vne louable Perſe-
uerance, dans les afflictions domeſ-
tiques.
On admiroit anciennement vne
Pau-
ſan. in
Attic.55 pierre en la ville de Megare, où l'on
diſoit qu'Apollon auoit autrefois poſé
ſon luth. Si on la touchoit auec
vne autre pierre, elle rendoit vn ſon
agreable, tel que celuy d'vn luth.
Pau-
ſan. in
Attic.55 pierre en la ville de Megare, où l'on
diſoit qu'Apollon auoit autrefois poſé
ſon luth. Si on la touchoit auec
vne autre pierre, elle rendoit vn ſon
agreable, tel que celuy d'vn luth.
Vous la pouuez prendre pour le
ſymbole d'vn homme vertueux, qui
loüe Dieu dans ſes afflictions. Si
la fortune , ſi les maladies , ſi les
parens , ſi le mary , ſi la femme, ſi
dens le frappent , il reſonne ſi melo-
dieuſement , que Dieu , les Anges &
les hommes en reçoiuent vn ſingulier
contentement.
ſymbole d'vn homme vertueux, qui
loüe Dieu dans ſes afflictions. Si
la fortune , ſi les maladies , ſi les
parens , ſi le mary , ſi la femme, ſi
71
des perſonnes Mariées.
les amis, ſi les ennemis, ſi diuers acci-dens le frappent , il reſonne ſi melo-
dieuſement , que Dieu , les Anges &
les hommes en reçoiuent vn ſingulier
contentement.
Iob fut fortement frappé de Dieu
par les mains du Demon : & il s'écria,
par les mains du Demon : & il s'écria,
Dominus dedit, Dominus abſtulit : Sit.
nomen Domini benedictum. Mon Sei-
gneur m'auoit donné mes biens: Mon
Seigneur me les a oſtez: que ſon ſainct
Nom ſoit beny
Le vieux Tobie deuint aueugle :
[S]ara, qui fut la femme du jeune To-
[b]ie fut calomniée : Anne , la mere de
[S]amuël,fut bafoüée par Phenenna. Ils
ouurirent tous leur cœur au Ciel , & ſe
[t]ournerent vers Dieu, dont ils receu-
ent du ſecours.
Kira-[S]ara, qui fut la femme du jeune To-
[b]ie fut calomniée : Anne , la mere de
[S]amuël,fut bafoüée par Phenenna. Ils
ouurirent tous leur cœur au Ciel , & ſe
[t]ournerent vers Dieu, dont ils receu-
ent du ſecours.
nidés.
Les Indiens auoient vn Oiſeau ;
lequel dés ſa naiſſance ſe tournoit vers
[l]e Soleil Orient, qu'il ſuiuoit en ſon
[M]idy & en ſon Couchant , courant
[ſ]ans ceſſe vers ce Pere des lumieres.
[P]our cette raiſon ils l'appelloient He-
liodrome, comme nous appellons He-
liotrope, l'herbe qui regarde touſiours
nuellement les rayons & les in-
fluences.
lequel dés ſa naiſſance ſe tournoit vers
[l]e Soleil Orient, qu'il ſuiuoit en ſon
[M]idy & en ſon Couchant , courant
[ſ]ans ceſſe vers ce Pere des lumieres.
[P]our cette raiſon ils l'appelloient He-
liodrome, comme nous appellons He-
liotrope, l'herbe qui regarde touſiours
72
La Direction & la Conſolation
ce Roy des Aſtres, dont il reçoit conti-nuellement les rayons & les in-
fluences.
Vne ame ſaincte a perpetuelle-
ment Dieu deuant les yeux , dans la
premiere naiſſance de ſes eſperances,
dans le midy de ſes proſperitez , &
dans le couchant de ſes diſgraces &
infortunes.
ment Dieu deuant les yeux , dans la
premiere naiſſance de ſes eſperances,
dans le midy de ſes proſperitez , &
dans le couchant de ſes diſgraces &
infortunes.
Noſtre Seigneur nous a donné
l'exemple. Dés la premiere Aurore de
ſa Conception, il leua ſes yeux vers le
Pere Eternel, pour ne les en détour-
ner iamais. Il le regarda dans la gloi-
re de ſa Predication & de ſes miracles.
Et dans ſa Paſſion , il verſa en ſon ſein
toutes les douleurs qui luy ſuruinrent,
& par l'oraiſon, luy mit ſon ame entre
les mains.
l'exemple. Dés la premiere Aurore de
ſa Conception, il leua ſes yeux vers le
Pere Eternel, pour ne les en détour-
ner iamais. Il le regarda dans la gloi-
re de ſa Predication & de ſes miracles.
Et dans ſa Paſſion , il verſa en ſon ſein
toutes les douleurs qui luy ſuruinrent,
& par l'oraiſon, luy mit ſon ame entre
les mains.
Ayant traicté fort amplement de
l'Oraiſon Vocale, & de l'Oraiſon Men-
tale, dans vn Liure que i'ay intitulé
le Sainct trauail des mains56 (qui con-
tient toute la perfection Chreſtienne
& Religieuſe ) il ne me reſte icy que
de dire vn mot de ſon pouuoir, dans
les trauerſes de la vie.
l'Oraiſon Vocale, & de l'Oraiſon Men-
tale, dans vn Liure que i'ay intitulé
le Sainct trauail des mains56 (qui con-
tient toute la perfection Chreſtienne
& Religieuſe ) il ne me reſte icy que
de dire vn mot de ſon pouuoir, dans
les trauerſes de la vie.
L'Oraiſon
73
des perſonnes Mariées.
L'Oraiſon y a vne telle efficacité :
que non ſeulement elle empeſche les
triſteſſes dans l'affliction : mais qu'elle
oſte toute l'affliction , & ne luy donne
aucune priſe ſur la perſonne qui en eſt
armée. Cela s'eſt veu ſouuent dans les
combats des ſaincts Martyrs , qui par
leurs oraiſons ont arreſté l'effect des
fleſches , des lances , des eſpées, des
cailloux , des ſcies , des beſtes farou-
ches, des dragons, des feux, & de tous
les inſtrumens de la cruauté. Appor-
tons-en quelques exemples.
que non ſeulement elle empeſche les
triſteſſes dans l'affliction : mais qu'elle
oſte toute l'affliction , & ne luy donne
aucune priſe ſur la perſonne qui en eſt
armée. Cela s'eſt veu ſouuent dans les
combats des ſaincts Martyrs , qui par
leurs oraiſons ont arreſté l'effect des
fleſches , des lances , des eſpées, des
cailloux , des ſcies , des beſtes farou-
ches, des dragons, des feux, & de tous
les inſtrumens de la cruauté. Appor-
tons-en quelques exemples.
I. Sainct Philemon & ſainct Sabi-
In A-
ctis eo-
rum. nien ne pûrent eſtre bleſſez par les fleſ-
ches que les bourreaux tiroient contre
eux. II. Les lances n'offenſerent
point ſainct Thierry. III. Sainct
Thyrſe ne fut nullement bleſſé par des
eſpées tres-affilées. IV. Ceux qui
voulurent lapider les Saincts Euchaire,
Valere & Materne , furent rendus im-
mobiles par leurs prieres : & ne pûrent
iamais recouurer le mouuemẽt de leurs
corps que par les prieres des meſmes
Saincts Martyrs. V. Sainct Thyrſe &
ſainct Sarbelie ne pûrent eſtre diuiſez
ches ne nuiſirent point, ny aux ſaincts
Neophyte & Emilien , ny aux Sainctes
Agnés & Typhene57. Sainct Aſterie les
appriuoiſa meſmes par vn ſigne de
Croix. VII. Sainct Honorat chaſſa
par ſes prieres vn dragon de l'Iſle où il
habita : & pluſieurs Saincts Martyrs
n'en n'ont nullement eſté endomma-
gez. VIII. Sainct Polycarpe retient
par ſon oraiſon , l'actiuité du feu où
l'on vouloit le bruſler : & en eſt enui-
ronné auec l'admiration de tout le
peuple. Sainct Valerien, ſainct Aqui-
la, & ſainct Candide, demeurent dans
vne fournaiſe ardente ſans en eſtre in-
commodez : & ſainct Sabinien ſur vn
banc de fer embrazé. Sainct Tiburce
& ſainct Conſtance Eueſque de Pe-
rouſe , marchent ſans crainte & ſans
lezion ſur des charbons ardens.
In A-
ctis eo-
rum. nien ne pûrent eſtre bleſſez par les fleſ-
ches que les bourreaux tiroient contre
eux. II. Les lances n'offenſerent
point ſainct Thierry. III. Sainct
Thyrſe ne fut nullement bleſſé par des
eſpées tres-affilées. IV. Ceux qui
voulurent lapider les Saincts Euchaire,
Valere & Materne , furent rendus im-
mobiles par leurs prieres : & ne pûrent
iamais recouurer le mouuemẽt de leurs
corps que par les prieres des meſmes
Saincts Martyrs. V. Sainct Thyrſe &
ſainct Sarbelie ne pûrent eſtre diuiſez
D
74
La Direction & la Conſolation
par vne ſcie. VI. Les beſtes farou-ches ne nuiſirent point, ny aux ſaincts
Neophyte & Emilien , ny aux Sainctes
Agnés & Typhene57. Sainct Aſterie les
appriuoiſa meſmes par vn ſigne de
Croix. VII. Sainct Honorat chaſſa
par ſes prieres vn dragon de l'Iſle où il
habita : & pluſieurs Saincts Martyrs
n'en n'ont nullement eſté endomma-
gez. VIII. Sainct Polycarpe retient
par ſon oraiſon , l'actiuité du feu où
l'on vouloit le bruſler : & en eſt enui-
ronné auec l'admiration de tout le
peuple. Sainct Valerien, ſainct Aqui-
la, & ſainct Candide, demeurent dans
vne fournaiſe ardente ſans en eſtre in-
commodez : & ſainct Sabinien ſur vn
banc de fer embrazé. Sainct Tiburce
& ſainct Conſtance Eueſque de Pe-
rouſe , marchent ſans crainte & ſans
lezion ſur des charbons ardens.
L'Oraiſon opere toutes ces mer-
ueilles, & pluſieurs autres que vous
ſçauez. Dieu eſt le Pere des miſeri-
cords & des bontez. Il accourt à l'ai-
de de ſes enfans auſſi-toſt qu'ils luy
ouurent leurs cœurs & leurs bou-
ceſſitez.
ueilles, & pluſieurs autres que vous
ſçauez. Dieu eſt le Pere des miſeri-
cords & des bontez. Il accourt à l'ai-
de de ſes enfans auſſi-toſt qu'ils luy
ouurent leurs cœurs & leurs bou-
75
des perſonnes Mariées.
ches , & luy manifeſtent leurs ne-ceſſitez.
Confiez-vous donc en ſa bonté,
& reclamez ſon aide dans vos plus cui-
ſantes douleurs , & ſoyez certain qu'il
vous ſecourera , & adoucira vos pei-
Matth
11. 28. nes.
& reclamez ſon aide dans vos plus cui-
ſantes douleurs , & ſoyez certain qu'il
vous ſecourera , & adoucira vos pei-
Matth
11. 28. nes.
Venez, dit-il,
vous tous qui tra-.
uaillez & qui eſtes chargez, & ie vous
ſoulageray
La Tortuë marine, eſchauſſée &
Plin.l.
9.c.10 deſſeichée par le Soleil ne peut point
eſtre ſubmergée , & ſurnage touſiours
au deſſus de l'eau. Quiconque dans
ſes oraiſons reçoit les rayons & les
ardeurs de Ieſus-Chriſt Soleil de juſti-
ce, ne doit pas craindre aucun nau-
frage.
Plin.l.
9.c.10 deſſeichée par le Soleil ne peut point
eſtre ſubmergée , & ſurnage touſiours
au deſſus de l'eau. Quiconque dans
ſes oraiſons reçoit les rayons & les
ardeurs de Ieſus-Chriſt Soleil de juſti-
ce, ne doit pas craindre aucun nau-
frage.
D iij
76
La Direction & la Conſolation
bandeau fleuri
LA
DIRECTION
ET LA
CONSOLATION
DES PERSONNES
MARIEES.
LIVRE DEVXIESME.
filet maigre
CHAPITRE PREMIER.
La Conſolation & la Direction d'vne
femme, qui n'eſt point aimée de
ſon mary.
Lettrine I entourée de feuilles.
LE plus grand malheur qui
puiſſe arriuer à vne famille,
c'eſt que le mary & la fem-
me perdent l'amour qui les a vnis par
tenir enſemble toute leur vie , ſans
eſpoir d'aucune ſeparation. Car ſi S.
Iean Chryſoſtome dit auec raiſon, Qu'il
ſeroit plus expedient de perdre la lu-
miere du Soleil, que d'eſtre priué de la
familiarité de ſes amis : d'autant que
pluſieurs qui voyent le Soleil meurent
de triſteſſe, dans les tenebres des dou-
leurs & des afflictions, manquant de
cette conſolation : & que ceux qui
ont de bons amis ne ſentent nulle tri-
ſteſſe,dans le fort de leurs plus faſcheu-
ſes calamitez. Que diroit-il de l'a-
mitié, laquelle doit ſe retrouuer entre
le mary & la femme, qui ne ſont qu'v-
ne meſme chair , & qui ne peuuent
eſtre diuiſez, ſans des angoiſſes tres-
ſenſibles ?
puiſſe arriuer à vne famille,
c'eſt que le mary & la fem-
me perdent l'amour qui les a vnis par
77
des perſonnes Mariées.
vn lien indiſſoluble , & qui les doittenir enſemble toute leur vie , ſans
eſpoir d'aucune ſeparation. Car ſi S.
Iean Chryſoſtome dit auec raiſon, Qu'il
ſeroit plus expedient de perdre la lu-
miere du Soleil, que d'eſtre priué de la
familiarité de ſes amis : d'autant que
pluſieurs qui voyent le Soleil meurent
de triſteſſe, dans les tenebres des dou-
leurs & des afflictions, manquant de
cette conſolation : & que ceux qui
ont de bons amis ne ſentent nulle tri-
ſteſſe,dans le fort de leurs plus faſcheu-
ſes calamitez. Que diroit-il de l'a-
mitié, laquelle doit ſe retrouuer entre
le mary & la femme, qui ne ſont qu'v-
ne meſme chair , & qui ne peuuent
eſtre diuiſez, ſans des angoiſſes tres-
ſenſibles ?
Si le Soleil eſtoit ſouſtrait de cét
Vniuers , tous les Aſtres ſeroient ſans
lumiere, comme la pluſpart des Aſtro-
nomes croyent. La Lune ſeroit certai-
nement dans vne triſte Eclipſe & ob-
ſcurité , & la terre ne produiroit rien
faute de chaleur. Si le maiſtre du logis
ſe laiſſe glacer & obſcurcir par la haine,
& les enfants, les ſeruiteurs, & les ſer-
uantes , ſans aucune action vtile &
agreable.
Vniuers , tous les Aſtres ſeroient ſans
lumiere, comme la pluſpart des Aſtro-
nomes croyent. La Lune ſeroit certai-
nement dans vne triſte Eclipſe & ob-
ſcurité , & la terre ne produiroit rien
faute de chaleur. Si le maiſtre du logis
ſe laiſſe glacer & obſcurcir par la haine,
D iij
78
La Direction & la Conſolation
la femme eſt abſolument ſans clarté,& les enfants, les ſeruiteurs, & les ſer-
uantes , ſans aucune action vtile &
agreable.
Vn luth a diuerſes chordes & di-
In
cap.18
Act.58 uerſes voix : mais il ne rend qu'vne
harmonie, & vn ſeul Muſicien le pin-
ſe.
Chryſoſtome,
In
cap.18
Act.58 uerſes voix : mais il ne rend qu'vne
harmonie, & vn ſeul Muſicien le pin-
ſe.
Le Luth eſt la Charité, dit ſainct
Chryſoſtome,
les voix ſont les paroles.
qui la fomentent. Elles font toutes vne
ſeule melodie , qui réjoüit Dieu & ſes
Anges, & eſt vn joyeux ſpectacle à tous
les Citoyens du Ciel. Elle reprime la
fureur des demons & l'impetuoſité des
paſſions , & leur impoſe vn eternel ſi-
lence , comme lors qu'vn Muſicien ex-
cellent touche vn inſtrument de Muſi-
que, il n'eſt perſonne ſi inſolent qui ne
ſe taiſe
L'Amour eſt l'Ame du Mariage: la-
quelle doit animer le mari & la fem-
me, afin qu'ils n'ayent qu'vne ame en
deux corps, & qu'ils viuent d'vne meſ-
me vie. De là s'enſuit ce que diſoit
Licurgue, Qu'vne femme qui eſt pri-
uée de l'amour de ſon mary, n'a point
vne veritable vie. Elle eſt telle qu'vn
ſans ſentiment. Tout ce qu'elle void,
tout ce qu'elle entend , tout ce
qu'elle s'imagine, tout ce qu'elle paſſe
par ſon eſprit, eſt vne continuelle ter-
reur & anxieté , qui luy cauſe des
douleurs , pires que la mort meſme.
quelle doit animer le mari & la fem-
me, afin qu'ils n'ayent qu'vne ame en
deux corps, & qu'ils viuent d'vne meſ-
me vie. De là s'enſuit ce que diſoit
Licurgue, Qu'vne femme qui eſt pri-
uée de l'amour de ſon mary, n'a point
vne veritable vie. Elle eſt telle qu'vn
79
des perſonnes Mariées.
corps mort , ſans couleur , ſans joye,ſans ſentiment. Tout ce qu'elle void,
tout ce qu'elle entend , tout ce
qu'elle s'imagine, tout ce qu'elle paſſe
par ſon eſprit, eſt vne continuelle ter-
reur & anxieté , qui luy cauſe des
douleurs , pires que la mort meſme.
Sainct Auguſtin eſtoit dans la meſ-
me penſée lors qu'il diſoit. Que l'A-
mour eſt vne certaine vie : laquelle
conioint , ou veut conjoindre deux
perſonnes.
me penſée lors qu'il diſoit. Que l'A-
mour eſt vne certaine vie : laquelle
conioint , ou veut conjoindre deux
perſonnes.
Taſchons de faire de deux mira-
cles l'vn , ou de reſſuſciter les morts,
faiſant rentrer dans leurs cœurs59 l'A-
mour, qui eſt l'Ame de l'ame : ou fai-
ſant que ceux qui ſont morts dans la
vie ciuile , en viuent d'autant plus vi-
goureux , en la vie ſurnaturelle & di-
uine.
cles l'vn , ou de reſſuſciter les morts,
faiſant rentrer dans leurs cœurs59 l'A-
mour, qui eſt l'Ame de l'ame : ou fai-
ſant que ceux qui ſont morts dans la
vie ciuile , en viuent d'autant plus vi-
goureux , en la vie ſurnaturelle & di-
uine.
§. I. Remedes du coſté de la femme,
qui croid n'eſtre point aimée par
ſon mary.
I. Conſiderez que ſouuent vos
frayeurs ne ſont qu'vne imagination
mal fondée, ſur quelque rapport im-
pertinent, ou ſur quelque ſigne leger,
terre eſt ſtable & immobile, à vn œil
qui eſt ſain : & tremble à vne teſte
mal faite , & qui eſt malade. Inter-
pretez tout en bien. Il y a des natu-
rels qui ſont peu complaiſans en paro-
les : mais qui aiment d'autant plus
ardemment dans le cœur60, que moins
ils éuaporent de leurs flammes par la
bouche.
frayeurs ne ſont qu'vne imagination
mal fondée, ſur quelque rapport im-
pertinent, ou ſur quelque ſigne leger,
D iiij
80
La Direction & la Conſolation
& ſiniſtrement interpreté. La meſmeterre eſt ſtable & immobile, à vn œil
qui eſt ſain : & tremble à vne teſte
mal faite , & qui eſt malade. Inter-
pretez tout en bien. Il y a des natu-
rels qui ſont peu complaiſans en paro-
les : mais qui aiment d'autant plus
ardemment dans le cœur60, que moins
ils éuaporent de leurs flammes par la
bouche.
Le veritable Amour ne conſiſte
point en de vaines cajolleries , ny
en des témoignages exterieurs d'affe-
ction : mais en de bonnes actions,
qui pouruoyent à vos beſoins, à ceux
de vos enfans & de voſtre famille. Vne
humeur guerriere, vn naturel peu ci-
uiliſé, vn homme embaraſſé dans de
grandes affaires, ou publiques, ou do-
meſtiques , ne peut faire le petit mu-
guet , & des actions enfantines, pour
faire voir l'amour veritable & ſincere
qu'il a au fonds du cœur61. Et cepen-
dant vne femme doüillette & eſleuée
dans la molleſſe, exigeroit volontiers
ces baſſeſſes en ſon mary. Montrez
que vous auez vne ame noble, & qui
à ces impertinences.
point en de vaines cajolleries , ny
en des témoignages exterieurs d'affe-
ction : mais en de bonnes actions,
qui pouruoyent à vos beſoins, à ceux
de vos enfans & de voſtre famille. Vne
humeur guerriere, vn naturel peu ci-
uiliſé, vn homme embaraſſé dans de
grandes affaires, ou publiques, ou do-
meſtiques , ne peut faire le petit mu-
guet , & des actions enfantines, pour
faire voir l'amour veritable & ſincere
qu'il a au fonds du cœur61. Et cepen-
dant vne femme doüillette & eſleuée
dans la molleſſe, exigeroit volontiers
ces baſſeſſes en ſon mary. Montrez
que vous auez vne ame noble, & qui
81
des perſonnes Mariées.
ne s'amuſe nullement à ces fatrats, &à ces impertinences.
II. Voulez-vous eſtre aimée , ai-
mez la premiere. L'Amour eſt l'ai-
mãt des cœurs62 . Iamais vous n'aimerez
parfaitemẽt & conſtãmẽt vne persõne,
pour barbare qu'elle ſoit, en luy bien-
faiſant, en épiant tout ce qui luy agrée
au boire, au manger, au veſtement, au
coucher, & en tout le reſte de la vie
humaine : qu'enfin vous n'emportiez
par vne douce violence , ſon cœur &
ſon amour. On a veu des Lions dans
les Amphitheatres , careſſer ceux qui
leur auoient oſté vne eſpine du pied.
On a admiré des Dragõs qui au milieu
des bois ont ſauué la vie à ceux qui les
auoient nourris en leur jeuneſſe. Il
n'eſt nulle barbarie & brutalité , qui
ne ſe laiſſe vaincre à l'Amour.
mez la premiere. L'Amour eſt l'ai-
mãt des cœurs62 . Iamais vous n'aimerez
parfaitemẽt & conſtãmẽt vne persõne,
pour barbare qu'elle ſoit, en luy bien-
faiſant, en épiant tout ce qui luy agrée
au boire, au manger, au veſtement, au
coucher, & en tout le reſte de la vie
humaine : qu'enfin vous n'emportiez
par vne douce violence , ſon cœur &
ſon amour. On a veu des Lions dans
les Amphitheatres , careſſer ceux qui
leur auoient oſté vne eſpine du pied.
On a admiré des Dragõs qui au milieu
des bois ont ſauué la vie à ceux qui les
auoient nourris en leur jeuneſſe. Il
n'eſt nulle barbarie & brutalité , qui
ne ſe laiſſe vaincre à l'Amour.
Vous gagnerez plus par la ten-
dreſſe & par l'ardeur de vos affections,
que par des crieries importunes , ny
par des injures outrageuſes. Le Vent
de Biſe & le Soleil gagerent vn iour , &
mirent vn prix à celuy d'eux deux, qui
feroit plus promptement jetter bas le
chemin. Le Vent comme aſſeuré de la
victoire , & ſe fiant ſur ſon impetuoſi-
té, commence le premier à ſouffler de
toutes ſes forces contre ce voyageur,
pour luy enleuer de deſſus les eſpaules
ce manteau. Le voyageur le reſſerre
incontinent63, & le tient ferme & ar-
reſté. Et plus ce Vent furieux menoit
de bruit & renforçoit ſon attaque, plus
le voyageur s'enueloppoit dans ſon
manteau , & le preſſoit ſur ſon corps.
Le tour du Soleil eſtant venu pour
agir, il ne fit que darder à plomb ſes
rayons ſur le dos de cét homme tout
glacé & morfondu de froid , inconti-
nent il s'arreſta, prenant plaiſir à eſtre
réchauffé : en ſuite la chaleur s'aug-
mentant il déueloppe ſon manteau ,
commence à ſuer & à gemir ſous le
poids : enfin dans peu de temps il le
jetta par terre, ne pouuant plus reſiſter
à ce Roy des lumieres & des ardeurs
celeſtes.
dreſſe & par l'ardeur de vos affections,
que par des crieries importunes , ny
par des injures outrageuſes. Le Vent
de Biſe & le Soleil gagerent vn iour , &
mirent vn prix à celuy d'eux deux, qui
feroit plus promptement jetter bas le
D v
82
La Direction & la Conſolation
manteau à vn homme qui paſſoit ſonchemin. Le Vent comme aſſeuré de la
victoire , & ſe fiant ſur ſon impetuoſi-
té, commence le premier à ſouffler de
toutes ſes forces contre ce voyageur,
pour luy enleuer de deſſus les eſpaules
ce manteau. Le voyageur le reſſerre
incontinent63, & le tient ferme & ar-
reſté. Et plus ce Vent furieux menoit
de bruit & renforçoit ſon attaque, plus
le voyageur s'enueloppoit dans ſon
manteau , & le preſſoit ſur ſon corps.
Le tour du Soleil eſtant venu pour
agir, il ne fit que darder à plomb ſes
rayons ſur le dos de cét homme tout
glacé & morfondu de froid , inconti-
nent il s'arreſta, prenant plaiſir à eſtre
réchauffé : en ſuite la chaleur s'aug-
mentant il déueloppe ſon manteau ,
commence à ſuer & à gemir ſous le
poids : enfin dans peu de temps il le
jetta par terre, ne pouuant plus reſiſter
à ce Roy des lumieres & des ardeurs
celeſtes.
Lib. de
morib.
Eccl.
lib. de
doctr.64 La Charité eſt la Reine des cœurs65
les plus dénaturez,
& ad
Mar-
tian. guſtin ,
morib.
Eccl.
lib. de
doctr.64 La Charité eſt la Reine des cœurs65
les plus dénaturez,
Il n'eſt rien de ſi, dit ſainct Au-
dur , ny de ſi obſtiné
83
des perſonnes Mariées.
Chriſt.& ad
Mar-
tian. guſtin ,
qui ne ſe ſurmonte & ſe li-.
quefie dans le feu de l'Amour
Et ailleurs ,
la ſeule Charité ſur-.
monte toutes choſes, & ſans la Charité
tout ne vaut rien. En tout lieu qu'elle
ſe rencontre , elle tire tout à ſoy. La
Charité eſt la ſource de la paix, la ro-
ſée de la grace, la ſemence de la con-
corde, & le fruict de l'amour
On nous conte , que deux luths
parfaitement accordez reſonnent au
temps de l'hyuer, encore qu'on n'en
touche qu'vn. Parlez touſiours bien
de voſtre Mary, & faites-luy touſiours
du bien : il vous répondra par des
loüanges de voſtre prudence & de
votre charité, & vous aidera de tout
ſon pouuoir , & aimera de tout ſon
cœur.
parfaitement accordez reſonnent au
temps de l'hyuer, encore qu'on n'en
touche qu'vn. Parlez touſiours bien
de voſtre Mary, & faites-luy touſiours
du bien : il vous répondra par des
loüanges de voſtre prudence & de
votre charité, & vous aidera de tout
ſon pouuoir , & aimera de tout ſon
cœur.
Trauaillez pour luy, & montrez-
vous reconnoiſſante des biens qu'il
vous fait, quoy qu'ils n'égalent point
vos deſirs ?66 & aſſeurez-vous que l'a-
mour qui prouiendra de voſtre vertu,
le pouſſera à vous donner vn entier
contentement.
vous reconnoiſſante des biens qu'il
vous fait, quoy qu'ils n'égalent point
vos deſirs ?66 & aſſeurez-vous que l'a-
mour qui prouiendra de voſtre vertu,
le pouſſera à vous donner vn entier
contentement.
Vn certain dépeignit dans ſon
noit vn Rameau de Meurte67, l'autre vne
Roſe, & la troiſieſme des Dez : voulant
dire, que les bien faits doiuent eſtre
doux & agreables , & que meſmes ils
deuoient eſtre reciproques, comme les
Dez paſſent de main en main.
D vj
84
La Direction & la Conſolation
Symbole les trois Graces: dõt l'vne te-noit vn Rameau de Meurte67, l'autre vne
Roſe, & la troiſieſme des Dez : voulant
dire, que les bien faits doiuent eſtre
doux & agreables , & que meſmes ils
deuoient eſtre reciproques, comme les
Dez paſſent de main en main.
III. Conſiderez l'occaſion de la
haine, & du refroidiſſemẽt ſuruenu en-
tre vous & voſtre mary. Si vous trou-
uez qu'elle ſoit en vous , oſtez la
promptement. Retirez la matiere
vous eſteindrez le feu. Eſloignez l'oc-
caſion de la colere, vous guerirez l'a-
lienation de l'eſprit.
haine, & du refroidiſſemẽt ſuruenu en-
tre vous & voſtre mary. Si vous trou-
uez qu'elle ſoit en vous , oſtez la
promptement. Retirez la matiere
vous eſteindrez le feu. Eſloignez l'oc-
caſion de la colere, vous guerirez l'a-
lienation de l'eſprit.
Il arriue ſouuent aux inimitiez &
aux auerſions domeſtiques,cõme à ces
Iſles qui ſe forment au milieu des ri-
uieres. Elles commencent par vn peu
de ſable ou de quelque autre choſe,
qui arreſte peu à peu ce qui y aborde
& s'y joint. Enfin , il ſe fait vn mon-
ceau conſiderable , qui empeſche le
cours de la riuiere & la commodité des
baſteaux.
aux auerſions domeſtiques,cõme à ces
Iſles qui ſe forment au milieu des ri-
uieres. Elles commencent par vn peu
de ſable ou de quelque autre choſe,
qui arreſte peu à peu ce qui y aborde
& s'y joint. Enfin , il ſe fait vn mon-
ceau conſiderable , qui empeſche le
cours de la riuiere & la commodité des
baſteaux.
IV. Sur tout , taſchez de découurir
ſi quelqu'vn ne ſeme point de la ziza-
vous tous ces ſeditieux, & ne leur con-
fiez iamais vos ſecrets. Ce ſont des
ſuppoſts du diable , qui ſouuent ſouf-
flent chaud & froid, & aliennent l'vne
& l'autre partie , par leurs menſonges
& par leurs calomnies.
ſi quelqu'vn ne ſeme point de la ziza-
85
des perſonnes Mariées.
nie par de faux rapports. Eſloignez devous tous ces ſeditieux, & ne leur con-
fiez iamais vos ſecrets. Ce ſont des
ſuppoſts du diable , qui ſouuent ſouf-
flent chaud & froid, & aliennent l'vne
& l'autre partie , par leurs menſonges
& par leurs calomnies.
In Pa-
ſtor.68 Sainct Gregoire ſe met en colere
contre ces malheureux eſprits, qui ſer-
uent de meſſagers à l'ennemy du genre
humain.
ſtor.68 Sainct Gregoire ſe met en colere
contre ces malheureux eſprits, qui ſer-
uent de meſſagers à l'ennemy du genre
humain.
Il n'eſt, dit-il,
rien de plus.
parfait que la Charité, ny de plus agrea-
ble au demon que la perte de cette ſaincte
vertu. Quiconque donc tuë la Charité
en ſon Prochain, eſt vn des plus fami-
liers ſeruiteurs du demon
V. Soyez vertueuſe : & voſtre ver-
tu ſi elle eſt conſtante, ſe fera paroiſtre
dans vn tel éclat , qu'enfin les tene-
bres ſe diſſiperont , & vous laiſſeront
vn iour d'autant plus beau , plus re-
creatif, & plus étincelant de lumiere,
que les nuages auront eſté obſcurs &
faſcheux. Le Soleil ne peut iamais eſtre
ſi caché qu'il ne iette quelque rayon :
qui faſſe cõnoiſtre, admirer & aimer ſon
effects. Lib.
22.c.
8.69 Pline , eſcrit , que ceux qui
portoient l'herbe Hecatoncephalon
eſtoient aimez d'vn chacun. La Vertu
eſt vne fleur celeſte : qui ne peut eſtre
apperceuë , ſans tirer à ſoy les cœurs
de ceux qui la contemplent.
tu ſi elle eſt conſtante, ſe fera paroiſtre
dans vn tel éclat , qu'enfin les tene-
bres ſe diſſiperont , & vous laiſſeront
vn iour d'autant plus beau , plus re-
creatif, & plus étincelant de lumiere,
que les nuages auront eſté obſcurs &
faſcheux. Le Soleil ne peut iamais eſtre
ſi caché qu'il ne iette quelque rayon :
qui faſſe cõnoiſtre, admirer & aimer ſon
86
La Direction & la Conſolation
excellente beauté, & ſes merueilleuxeffects. Lib.
22.c.
8.69 Pline , eſcrit , que ceux qui
portoient l'herbe Hecatoncephalon
eſtoient aimez d'vn chacun. La Vertu
eſt vne fleur celeſte : qui ne peut eſtre
apperceuë , ſans tirer à ſoy les cœurs
de ceux qui la contemplent.
VI. Ayez particulierement vn ar-
dent Amour de Dieu , & il vous ga-
gnera l'amour des hommes. Vn Ai-
mant attire ſi puiſſamment vn anneau
de fer , & luy communique ſi charita-
blement ſa vertu , que cét anneau en
attire pluſieurs autres , & fait vne
chaiſne comme de nouueaux Aimans,
qui ne ſe peuuent ſeparer les vns des
autres ſans violence.
dent Amour de Dieu , & il vous ga-
gnera l'amour des hommes. Vn Ai-
mant attire ſi puiſſamment vn anneau
de fer , & luy communique ſi charita-
blement ſa vertu , que cét anneau en
attire pluſieurs autres , & fait vne
chaiſne comme de nouueaux Aimans,
qui ne ſe peuuent ſeparer les vns des
autres ſans violence.
Ieſus-Chriſt eſt l'Eſpoux de l'Egli-
ſe, & des ſainctes ames. Il le faut ai-
mer, & il vous rendra aimable. Il eſt
le fondement de l'Egliſe , & il faut
mettre ſur ce fondement, de l'or, de
l'argent , & des pierres precieuſes.
ſon , & Ieſus fera proſperer la voſtre &
celle de vos enfans.
ſe, & des ſainctes ames. Il le faut ai-
mer, & il vous rendra aimable. Il eſt
le fondement de l'Egliſe , & il faut
mettre ſur ce fondement, de l'or, de
l'argent , & des pierres precieuſes.
L'or, dit ſainct Thomas,
eſt la Chari-. Baſtiſſez bien cette mai-
té: l'argent eſt l'Oraiſon & la Contem-
87 des perſonnes Mariées. plation , les pierres precieuſes ſont les
autres vertus
ſon , & Ieſus fera proſperer la voſtre &
celle de vos enfans.
VII. Efforcez-vous par vos vertus
d'eſtre aimée de Dieu; & vous ne vous
affligerez pas beaucoup, de vous voir
peu affectionné des creatures. L'Eſ-
pouſe ſacrée dit à Ieſus-Chriſt dans les
Canti
I.v.i. Cantiques.
dit Clement Alexandrin , c'eſt Ieſus-
Chriſt. Les Mammeles de Ieſus-Chriſt
ſont les enſeignemens de la doctrine
Euangelique , ſelon l'aduis de ſainct
Thomas ; ou pluſtoſt les delices de la
vie ſpirituelle , comme l'explique S.
Bernard.
d'eſtre aimée de Dieu; & vous ne vous
affligerez pas beaucoup, de vous voir
peu affectionné des creatures. L'Eſ-
pouſe ſacrée dit à Ieſus-Chriſt dans les
Canti
I.v.i. Cantiques.
Mon Bien-aimé, donnez-. La Mammelle du Pere Eternel,
moy vn baiſer de voſtre bouche : Car
vos mammelles ſont meilleures que le
vin
dit Clement Alexandrin , c'eſt Ieſus-
Chriſt. Les Mammeles de Ieſus-Chriſt
ſont les enſeignemens de la doctrine
Euangelique , ſelon l'aduis de ſainct
Thomas ; ou pluſtoſt les delices de la
vie ſpirituelle , comme l'explique S.
Bernard.
Ces delices, dit le Prophete Royal70,
ſont plus douces que le lait & le miel,
Partant , ſi vous les obtenez de Dieu,
vous ne vous mettrez en peine de rien,
& quelquefois voſtre cœur ſera ſi rem-
ply de ce vin celeſte, que vous vous ré-
joüirez d'eſtre rebuté de voſtre mary,
ment & plus inſeparablement à la ſour-
ce de toutes les bontez & de toutes les
douceurs.
ſont plus douces que le lait & le miel,
Partant , ſi vous les obtenez de Dieu,
vous ne vous mettrez en peine de rien,
& quelquefois voſtre cœur ſera ſi rem-
ply de ce vin celeſte, que vous vous ré-
joüirez d'eſtre rebuté de voſtre mary,
88
La Direction & la Conſolation
afin que vous vous attachiez plus forte-ment & plus inſeparablement à la ſour-
ce de toutes les bontez & de toutes les
douceurs.
VIII. Taſchez que voſtre mary
aime Dieu , & infailliblement il vous
aimera , encore que vous ſoyez rem-
plie d'imperfections : Car l'Amour de
Dieu & l'Amour du Prochain proce-
dent d'vne meſme racine de Charité,
& ont vn meſme motif formel. On
aime Dieu pour l'amour de luy-meſ-
me , & le Prochain pour l'amour de
Dieu.
aime Dieu , & infailliblement il vous
aimera , encore que vous ſoyez rem-
plie d'imperfections : Car l'Amour de
Dieu & l'Amour du Prochain proce-
dent d'vne meſme racine de Charité,
& ont vn meſme motif formel. On
aime Dieu pour l'amour de luy-meſ-
me , & le Prochain pour l'amour de
Dieu.
De plus, lors que deux choſes ſont
vnies à vne troiſieſme, elles ſont vnies
entre'elles-meſmes. Nous le voyons
aux lignes d'vn cercle, qui aboutiſſent
toutes à vn meſme centre : & y ſont
toutes vnies enſemble. Si voſtre mary
aime Dieu , & que vous aimiez auſſi
Dieu , vous vous trouuerez vne meſ-
me choſe & vn meſme cœur71 en Dieu,
& entre vous deux, & ce lien ſera plus
ferme & plus indiſſoluble que tout au-
tre. Dieu eſt touſiours le meſme , &
ne varie point. Il verſera auſſi dans
comme vn tronc donne la meſme ſe-
ve à deux branches, qui luy ſont an-
tées & incorporées.
vnies à vne troiſieſme, elles ſont vnies
entre'elles-meſmes. Nous le voyons
aux lignes d'vn cercle, qui aboutiſſent
toutes à vn meſme centre : & y ſont
toutes vnies enſemble. Si voſtre mary
aime Dieu , & que vous aimiez auſſi
Dieu , vous vous trouuerez vne meſ-
me choſe & vn meſme cœur71 en Dieu,
& entre vous deux, & ce lien ſera plus
ferme & plus indiſſoluble que tout au-
tre. Dieu eſt touſiours le meſme , &
ne varie point. Il verſera auſſi dans
89
des perſonnes Mariées.
vos ames le meſme ſuc de Charité,comme vn tronc donne la meſme ſe-
ve à deux branches, qui luy ſont an-
tées & incorporées.
Lors que le ſainct Eſprit deſcen-
dit ſur vn chacun des Apoſtres, & le
remplit de ſon feu celeſte : il les vnit
tous en Charité & à ſoy-meſme , &
entr'eux. Si vous & voſtre mary auez
vn meſme Eſprit, & bruſlez du meſme
feu diuin, vous ne perdrez iamais les
ardeurs neceſſaires pour vn parfait
amour humain.
dit ſur vn chacun des Apoſtres, & le
remplit de ſon feu celeſte : il les vnit
tous en Charité & à ſoy-meſme , &
entr'eux. Si vous & voſtre mary auez
vn meſme Eſprit, & bruſlez du meſme
feu diuin, vous ne perdrez iamais les
ardeurs neceſſaires pour vn parfait
amour humain.
Le Roy des Ethiopiens Vopha-
Oſor.
lib.4. lenſes, enuoyoit tous les ans vn de ſes
Gentilshommes par tout ſon Empire,
pour porter du feu nouueau aux Prin-
ces & aux Rois qui eſtoiẽt ſous ſon do-
maine , & à tous ſes ſubjets. Lors que
l'Ambaſſadeur eſtoit arriué au Palais
d'vn de ces Princes , l'on y eſteignoit
tout le feu, & l'Ambaſſadeur en faiſoit
de nouueau. Alors tous les ſubjets du
Prince venoient à ſon logis & rempor-
toient du feu en toutes leurs maiſons.
Si quelqu'vn refuſoit d'en prendre , il
eſtoit cenſé vn traiſtre , & eſtoit puny
de leze Majeſté. Si meſmes il eſtoit
beſoin , on menoit vne armée contre
luy.
Oſor.
lib.4. lenſes, enuoyoit tous les ans vn de ſes
Gentilshommes par tout ſon Empire,
pour porter du feu nouueau aux Prin-
ces & aux Rois qui eſtoiẽt ſous ſon do-
maine , & à tous ſes ſubjets. Lors que
l'Ambaſſadeur eſtoit arriué au Palais
d'vn de ces Princes , l'on y eſteignoit
tout le feu, & l'Ambaſſadeur en faiſoit
de nouueau. Alors tous les ſubjets du
Prince venoient à ſon logis & rempor-
toient du feu en toutes leurs maiſons.
Si quelqu'vn refuſoit d'en prendre , il
eſtoit cenſé vn traiſtre , & eſtoit puny
90
La Direction & la Conſolation
du dernier ſupplice, comme criminelde leze Majeſté. Si meſmes il eſtoit
beſoin , on menoit vne armée contre
luy.
Cette inuention vous peut ſeruir.
Il faut de temps en temps faire du feu
nouueau dans voſtre logis, par des ex-
traordinaires actions de charité enuers
voſtre mary & enuers vos enfans : ſi
vous voulez que l'Amour y viue & y
agiſſe dans ſa vigueur & dans ſa perfe-
ction. Cét Amour eſt le fruict de tou-
tes les vertus.
ſainct Bernard ,
l'Amour de Dieu , ou l'Amour Dieu
( qui eſt le ſainct Eſprit ) ſe meſlant
auec l'amour de l'homme,ſe l'affection-
ne , & le rend vne meſme choſe auec
luy & auec ſon amour. Cét Amour de
Dieu engendré par la Grace , eſt allaité
par la lecture des Liures Saincts, nour-
ry par la meditation , renforcé & éclai-
ré par l'Oraiſon.
Il faut de temps en temps faire du feu
nouueau dans voſtre logis, par des ex-
traordinaires actions de charité enuers
voſtre mary & enuers vos enfans : ſi
vous voulez que l'Amour y viue & y
agiſſe dans ſa vigueur & dans ſa perfe-
ction. Cét Amour eſt le fruict de tou-
tes les vertus.
La vie de l'homme, dit
ſainct Bernard ,
eſt l'Amour de Dieu.. Car
La Foy le conçoit, l'Eſperance l'enfante,
la Charite le forme & le viuifie
l'Amour de Dieu , ou l'Amour Dieu
( qui eſt le ſainct Eſprit ) ſe meſlant
auec l'amour de l'homme,ſe l'affection-
ne , & le rend vne meſme choſe auec
luy & auec ſon amour. Cét Amour de
Dieu engendré par la Grace , eſt allaité
par la lecture des Liures Saincts, nour-
ry par la meditation , renforcé & éclai-
ré par l'Oraiſon.
Si vous auez ce Diuin Amour du
ſainct Eſprit , cét Eſprit qui n'eſt
voſtre mary, & vous le rendra tel que
vous deſirez. Et s'il y trouue trop de
reſiſtance il vous redoublera ſes gra-
ces , & vous fera vn cœur de dia-
mant, qui ſera precieux aux yeux de
Dieu , lumineux aux yeux des An-
ges , & imperturable aux attaques
des hommes.
ſainct Eſprit , cét Eſprit qui n'eſt
91
des perſonnes Mariées.
qu'Amour , entrera dans le cœur72
devoſtre mary, & vous le rendra tel que
vous deſirez. Et s'il y trouue trop de
reſiſtance il vous redoublera ſes gra-
ces , & vous fera vn cœur de dia-
mant, qui ſera precieux aux yeux de
Dieu , lumineux aux yeux des An-
ges , & imperturable aux attaques
des hommes.
IX. Enfin ne vous perſuadez nul-
lement , que le mauuais viſage que
vous fait voſtre mary , & les paroles
aigres qu'il laiſſe échapper de ſa bou-
che , ſoient vne haine formée dans
ſon cœur : C'eſt ſouuent vne antipa-
thie d'humeurs, qu'il doit ſouffrir &
vous auſſi, & qui peut-eſtre le faſche
plus que vous.
lement , que le mauuais viſage que
vous fait voſtre mary , & les paroles
aigres qu'il laiſſe échapper de ſa bou-
che , ſoient vne haine formée dans
ſon cœur : C'eſt ſouuent vne antipa-
thie d'humeurs, qu'il doit ſouffrir &
vous auſſi, & qui peut-eſtre le faſche
plus que vous.
Nous voyons , comme i'ay déja
marqué , des diſcordes & des antipa-
thies entre diuers animaux, ſans qu'il
en paroiſſe aucune cauſe. Cela ſe voit
tous les iours , entre l'aragnée & le
ſerpent, entre les ſouris & les fourmis,
entre le Trochile73 & l'Aigle, & entre
pluſieurs autres.
marqué , des diſcordes & des antipa-
thies entre diuers animaux, ſans qu'il
en paroiſſe aucune cauſe. Cela ſe voit
tous les iours , entre l'aragnée & le
ſerpent, entre les ſouris & les fourmis,
entre le Trochile73 & l'Aigle, & entre
pluſieurs autres.
Ce qui eſt plus admirable, c'eſt
certains arbres on trouue des auerſions
ſenſibles , en ſorte que les vns meu-
rent , ou ne profitent point aupres des
autres. La Vigne embraſſe toutes les
plantes & tous les arbres, & refuit74 les
choux. Le Cheſne ne vient pas bien
auprés de l'Oliuier, & beaucoup moins
auprés du Noyer. Eſtant mis dans la
foſſe de l'vn de ces deux arbres il
meurt. Nous voyons auec eſtonne-
ment les alienations d'eſprit dans des
peuples voiſins , & qui habitent le
meſme climat.
92
La Direction & la Conſolation
qu'entre certaines plantes , & entrecertains arbres on trouue des auerſions
ſenſibles , en ſorte que les vns meu-
rent , ou ne profitent point aupres des
autres. La Vigne embraſſe toutes les
plantes & tous les arbres, & refuit74 les
choux. Le Cheſne ne vient pas bien
auprés de l'Oliuier, & beaucoup moins
auprés du Noyer. Eſtant mis dans la
foſſe de l'vn de ces deux arbres il
meurt. Nous voyons auec eſtonne-
ment les alienations d'eſprit dans des
peuples voiſins , & qui habitent le
meſme climat.
Ne rejettez dõc point ſur vne haine
formelle, mais ſur l'humeur de voſtre
mary, ce qui vous déplaiſt en ſes pa-
roles & en ſes actions: Eſperez que le
temps, voſtre patience, & principale-
ment le ſecours diuin, apporteront du
remede à voſtre malheur.
formelle, mais ſur l'humeur de voſtre
mary, ce qui vous déplaiſt en ſes pa-
roles & en ſes actions: Eſperez que le
temps, voſtre patience, & principale-
ment le ſecours diuin, apporteront du
remede à voſtre malheur.
En attendant , nourriſſez - vous
de la roſée du Ciel : viuifiez - vous
par le feu du ſainct Eſprit , con-
ſolez-vous dans les exercices de pieté,
& rendez-vous par vos vertus aimable
aux Saincts, aux Anges , à la Vierge
Saincte Trinité75. Vous ne perdrez rien
au change, & vous paſſerez doucement
voſtre vie, auec vne compagnie ſi ſou-
haitable & ſi agreable.
de la roſée du Ciel : viuifiez - vous
par le feu du ſainct Eſprit , con-
ſolez-vous dans les exercices de pieté,
& rendez-vous par vos vertus aimable
aux Saincts, aux Anges , à la Vierge
93
des perſonnes Mariées.
Marie , à Ieſus-Chriſt , & à toute laSaincte Trinité75. Vous ne perdrez rien
au change, & vous paſſerez doucement
voſtre vie, auec vne compagnie ſi ſou-
haitable & ſi agreable.
§. II.
Conſiderations pour le mary
qui n'aime point ſa femme.
I. Vous deſirez d'eſtre aimé, & vous
paſſeriez dans voſtre propre eſprit pour
vn homme dénaturé , ſi vous vous
plaiſiez à eſtre hay des autres, & ſi vous
mépriſiez leur amour. Or il eſt im-
poſſible d'auoir parfaitement l'amour
d'autruy ſi on ne luy donne le ſien.
paſſeriez dans voſtre propre eſprit pour
vn homme dénaturé , ſi vous vous
plaiſiez à eſtre hay des autres, & ſi vous
mépriſiez leur amour. Or il eſt im-
poſſible d'auoir parfaitement l'amour
d'autruy ſi on ne luy donne le ſien.
Les yeux ſont les premiers meſſa-
gers des Mariages, & ils ont vn nota-
ble rapport à l'amour du mary & de la
femme , en ce qui eſt de la mutuelle
correſpondance de l'vn à l'autre. Si
vn œil ſe leue vers le Ciel, l'autre œil
s'y leue incontinent76. Si l'vn s'incline
vers la terre, l'autre s'abaiſſe dans la
meſme proportion. Et l'vn ne ſe tour-
ne iamais d'vn coſté, que ſon compa-
gnon ne le ſuiue à pas égal. Le meſme
ſe rencontre aux amours, qui poſſe-
femme.
gers des Mariages, & ils ont vn nota-
ble rapport à l'amour du mary & de la
femme , en ce qui eſt de la mutuelle
correſpondance de l'vn à l'autre. Si
vn œil ſe leue vers le Ciel, l'autre œil
s'y leue incontinent76. Si l'vn s'incline
vers la terre, l'autre s'abaiſſe dans la
meſme proportion. Et l'vn ne ſe tour-
ne iamais d'vn coſté, que ſon compa-
gnon ne le ſuiue à pas égal. Le meſme
ſe rencontre aux amours, qui poſſe-
94
La Direction & la Conſolation
dent les cœurs d'vn homme & d'vnefemme.
Si donc vous aimez voſtre femme
elle vous aimera : Ne l'aimez pas : ſon
cœur ſera glacé pour vous. Tel que
vous ſerez enuers elle , telle vous la
trouuerez enuers vous.
elle vous aimera : Ne l'aimez pas : ſon
cœur ſera glacé pour vous. Tel que
vous ſerez enuers elle , telle vous la
trouuerez enuers vous.
II. Voudriez-vous paſſer dans l'e-
ſtime de vos parens & de vos conci-
toyens pour vn inconſtant , pour vn
volage , & pour vn perfide ? Or dites-
moy en verité, qu'auez-vous promis
à voſtre femme? Metttez-vous deuant
les yeux le temps de voſtre recherche.
Que ne luy auez-vous point dit? Com-
bien de témoignages d'amitié luy
auez-vous montrez? Combien de pro-
meſſes luy auez-vous reïtereées ? Ne
l'auez-vous pas cent & cent fois aſſeu-
rée, que voſtre bonne affection enuers
elle ſeroit inuiolable , & ne ſe dimi-
nueroit iamais iuſqu'à la mort ?
ſtime de vos parens & de vos conci-
toyens pour vn inconſtant , pour vn
volage , & pour vn perfide ? Or dites-
moy en verité, qu'auez-vous promis
à voſtre femme? Metttez-vous deuant
les yeux le temps de voſtre recherche.
Que ne luy auez-vous point dit? Com-
bien de témoignages d'amitié luy
auez-vous montrez? Combien de pro-
meſſes luy auez-vous reïtereées ? Ne
l'auez-vous pas cent & cent fois aſſeu-
rée, que voſtre bonne affection enuers
elle ſeroit inuiolable , & ne ſe dimi-
nueroit iamais iuſqu'à la mort ?
Reſſouuenez-vous auſſi du iour
de vos nopces. N'auez-vous pas mis
ou fait mettre ſur la teſte de voſtre Eſ-
pouſe vne Couronne ? C'eſt , dit Paſ-
de ca-
ron. c.
16. &
17. chal , vn ſigne d'amour , de joye , de
congratulation , & de victoire , rem-
portée iuſques à ce temps-là ſur la con-
cupiſcence , & ſur les Paſſions. Ne
luy auez-vous pas donné le baiſer de
paix & d'amour à la face de l'Egliſe, &
en preſence de toute voſtre parenté &
de la ſienne. Ne luy auez-vous pas mis
vn anneau au doigt , en ſigne de la du-
rée de cét amour , que vous diſiez ne
deuoir non plus trouuer de fin , que
cét anneau n'en auoit point.
de vos nopces. N'auez-vous pas mis
ou fait mettre ſur la teſte de voſtre Eſ-
pouſe vne Couronne ? C'eſt , dit Paſ-
95
des perſonnes Mariées.
Lib. 2.de ca-
ron. c.
16. &
17. chal , vn ſigne d'amour , de joye , de
congratulation , & de victoire , rem-
portée iuſques à ce temps-là ſur la con-
cupiſcence , & ſur les Paſſions. Ne
luy auez-vous pas donné le baiſer de
paix & d'amour à la face de l'Egliſe, &
en preſence de toute voſtre parenté &
de la ſienne. Ne luy auez-vous pas mis
vn anneau au doigt , en ſigne de la du-
rée de cét amour , que vous diſiez ne
deuoir non plus trouuer de fin , que
cét anneau n'en auoit point.
N'auez-vous pas declaré cét
amour par diuers ſignes d'allegreſſe,
conduiſant voſtre Eſpouſe en voſtre
maiſon ? Toutes les Nations ont cer-
taines ceremonies à cét effect. Ie me
contenteray icy de celle qui ſe practi-
Ioſeph
Beſſon
in Sy-
ria
ſancta.77 quent en Syrie. Le ſoir des nopces, le
Fiancé va ſur le ſoir au logis de ſon Eſ-
pouſe, auec les flambeaux de toute la
Ville. Il marche ſeul entre deux hom-
mes , qui portent chacun vne eſpée
nuë : L'vn le precede , l'autre le ſuit.
Les haut-bois, les tambours , & d'au-
tres inſtrumens de Muſique n'y man-
quent pas, & d'autres marques d'vne
mes & pluſieurs femmes leur tiennent
compagnie. Le Fiancé fait tous ces
frais , & n'y manque iamais , encore
qu'il ſoit pauure : Et il conſumera
pluſtoſt tout ſon bien , que d'ob-
mettre cette ceremonie , en quoy il
témoigne ſon affection enuers ſon Eſ-
pouſe.
amour par diuers ſignes d'allegreſſe,
conduiſant voſtre Eſpouſe en voſtre
maiſon ? Toutes les Nations ont cer-
taines ceremonies à cét effect. Ie me
contenteray icy de celle qui ſe practi-
Ioſeph
Beſſon
in Sy-
ria
ſancta.77 quent en Syrie. Le ſoir des nopces, le
Fiancé va ſur le ſoir au logis de ſon Eſ-
pouſe, auec les flambeaux de toute la
Ville. Il marche ſeul entre deux hom-
mes , qui portent chacun vne eſpée
nuë : L'vn le precede , l'autre le ſuit.
Les haut-bois, les tambours , & d'au-
tres inſtrumens de Muſique n'y man-
quent pas, & d'autres marques d'vne
96
La Direction & la Conſolation
ſignalée réjouïſſance. Pluſieurs hom-mes & pluſieurs femmes leur tiennent
compagnie. Le Fiancé fait tous ces
frais , & n'y manque iamais , encore
qu'il ſoit pauure : Et il conſumera
pluſtoſt tout ſon bien , que d'ob-
mettre cette ceremonie , en quoy il
témoigne ſon affection enuers ſon Eſ-
pouſe.
Vous auez fait dans ce iour de joye
tous les frais , que la couſtume & vô-
tre fortune vous ont permis. Cela
vous a reuſſi auec ſuccez , & auec l'a-
gréement de tous les alliez. Voudriez-
vous maintenant eſteindre vn ſi beau
feu , qui vous a donné tant de luſtre ?
Caton diſoit , qu'vn homme eſt plus
digne de loüange d'eſtre bon mary,que
d'eſtre illuſtre parmy les Senateurs.
Vous auez bien commencé, ne finiſſez
point mal : Mais s'il y a eu quelque in-
terruption , remettez-vous dans vos
premieres ardeurs.
tous les frais , que la couſtume & vô-
tre fortune vous ont permis. Cela
vous a reuſſi auec ſuccez , & auec l'a-
gréement de tous les alliez. Voudriez-
vous maintenant eſteindre vn ſi beau
feu , qui vous a donné tant de luſtre ?
Caton diſoit , qu'vn homme eſt plus
digne de loüange d'eſtre bon mary,que
d'eſtre illuſtre parmy les Senateurs.
Vous auez bien commencé, ne finiſſez
point mal : Mais s'il y a eu quelque in-
terruption , remettez-vous dans vos
premieres ardeurs.
III. La ſocieté de pluſieurs actions
demande cét amour reciproque. Quand
il n'y auroit que l'aſſiduité de boire &
de manger enſemble , vous ſeriez
Grecs preſentoient à leurs hoſtes , de-
uant tous les autres mets vn peu de ſel,
pour leur témoigner qu'ils conſerue-
roient leur amitié incorruptible, com-
me le ſel preſerue de corruption toutes
les viandes.
demande cét amour reciproque. Quand
il n'y auroit que l'aſſiduité de boire &
de manger enſemble , vous ſeriez
obligé
97
des perſonnes Mariées.
obligé à vne cordiale affection. LesGrecs preſentoient à leurs hoſtes , de-
uant tous les autres mets vn peu de ſel,
pour leur témoigner qu'ils conſerue-
roient leur amitié incorruptible, com-
me le ſel preſerue de corruption toutes
les viandes.
On renuoyeroit aux Aſnes ceux,
qui au lieu de laituës, offriroient des
chardons pour ſalade:comme faiſoient
les anciens Romains , au rapport de
Capitolin. Vous ferez bien pis : ſi au
lieu de viandes, vous offrez du venin
& des eſpines à voſtre Eſpouſe.
qui au lieu de laituës, offriroient des
chardons pour ſalade:comme faiſoient
les anciens Romains , au rapport de
Capitolin. Vous ferez bien pis : ſi au
lieu de viandes, vous offrez du venin
& des eſpines à voſtre Eſpouſe.
IV. L'Amour vous eſt abſolument
neceſſaire, ſi vous voulez tirer de bons
ſeruices de voſtre femme, & la main-
tenir en ſanté. Si elle conçoit vne
haine contre vous elle luy glacera
le cœur78, & par conſequent , luy re-
froidira les eſprits vitaux , luy trou-
blera l'imagination , & rompra les
bras qui ſeront languiſſans & inutiles
dans le trauail.
neceſſaire, ſi vous voulez tirer de bons
ſeruices de voſtre femme, & la main-
tenir en ſanté. Si elle conçoit vne
haine contre vous elle luy glacera
le cœur78, & par conſequent , luy re-
froidira les eſprits vitaux , luy trou-
blera l'imagination , & rompra les
bras qui ſeront languiſſans & inutiles
dans le trauail.
Au contraire , ſi l'Amour luy eſ-
chauffe le cœur , il le luy dilatera, il
en viuifiera & purifiera les eſprits, il
la rendra vne bonne ouuriere dans
toute voſtre famille , & elle ſera vô-
tre plus ſeur & plus agreable refuge.
chauffe le cœur , il le luy dilatera, il
en viuifiera & purifiera les eſprits, il
E
98
La Direction & la Conſolation
les épandra par tous les membres, &la rendra vne bonne ouuriere dans
toute voſtre famille , & elle ſera vô-
tre plus ſeur & plus agreable refuge.
Calius
l. 9. c.
22. Les Thebains79 auoient vn Regi-
ment de ſoldats,en qui eſtoit leur prin-
cipale eſperance. Elle eſtoit compoſée
de perſonnes qui s'eſtoient voüez vne
particuliere & inuiolable amitié.
l. 9. c.
22. Les Thebains79 auoient vn Regi-
ment de ſoldats,en qui eſtoit leur prin-
cipale eſperance. Elle eſtoit compoſée
de perſonnes qui s'eſtoient voüez vne
particuliere & inuiolable amitié.
Charles Frideric, Duc de Iuliers,
de Cleues, & de Monts, prit pour ſon
Symbole quantité de cœurs , mis ſur
vn bouclier auec cette inſcription.
Voicy vne muraille d'or , & tout à fait
impenetrable.
de Cleues, & de Monts, prit pour ſon
Symbole quantité de cœurs , mis ſur
vn bouclier auec cette inſcription.
Hic. Il euſt dit plus veritablement.
murus aheneus eſto. Voicy vne muraille
d'airain
Voicy vne muraille d'or , & tout à fait
impenetrable.
Le cœur eſt la ſource de la vie. Il
vit le premier & meurt le dernier : S'il
meurt tout meurt : S'il eſt malade tout
eſt languiſſant : S'il eſt vif & actif, tout
demeure , & tout paroiſt dans ſa
vigueur.
vit le premier & meurt le dernier : S'il
meurt tout meurt : S'il eſt malade tout
eſt languiſſant : S'il eſt vif & actif, tout
demeure , & tout paroiſt dans ſa
vigueur.
V. Vne femme qui aime, a mille
inuentions pour conſeruer la ſanté &
la vie à ſon mary par de bons offices,
heroïques & non attenduës. La fille
de Clearque, ayant eu permiſſion de
viſiter ſon mary dans la priſon, chan-
gea d'habits auec luy, & le déliura au
peril de ſa propre vie. L'Amour eſt in-
uentif & preſt de tout ſouffrir pour
celuy à qui il s'eſt donné. I'ay raconté
Impri-
mé chez
Gran-
gier à
Dijon. de tres-rares exemples de l'Amour ef-
fectif des femmes enuers leurs maris,
dans vn Traicté intitulé, Le bon Vi-
gneron , le bon Laboureur , & le bon
Artiſan.
inuentions pour conſeruer la ſanté &
la vie à ſon mary par de bons offices,
99
des perſonnes Mariées.
par ſes ſoings,& meſme par des actionsheroïques & non attenduës. La fille
de Clearque, ayant eu permiſſion de
viſiter ſon mary dans la priſon, chan-
gea d'habits auec luy, & le déliura au
peril de ſa propre vie. L'Amour eſt in-
uentif & preſt de tout ſouffrir pour
celuy à qui il s'eſt donné. I'ay raconté
Impri-
mé chez
Gran-
gier à
Dijon. de tres-rares exemples de l'Amour ef-
fectif des femmes enuers leurs maris,
dans vn Traicté intitulé, Le bon Vi-
gneron , le bon Laboureur , & le bon
Artiſan.
VI. Ie vous diray vn mot qui vous
doit penetrer le cœur80. Voulez vous
viure en ſeureté, aimez voſtre femme,
& témoignez-luy voſtre amour par de
bons effects. Alphonſe, Roy d'Arra-
gon diſoit ſagement : Que l'Amour eſt
ſans armes , & neantmoins dort toû-
jours armé. Au contraire, il eſt peril-
leux de tenir touſiours dans ſon ſein
vne vipere pleine de venin. Vous rem-
pliſſez d'vne haine mortelle le cœur de
voſtre femme : Cette haine eſt vn poi-
son , tiré du plus creux de l'abyſme, &
careſſiez,auec toutes les tendreſſes que
vous luy deuez , & que vous luy auez
promiſes.
doit penetrer le cœur80. Voulez vous
viure en ſeureté, aimez voſtre femme,
& témoignez-luy voſtre amour par de
bons effects. Alphonſe, Roy d'Arra-
gon diſoit ſagement : Que l'Amour eſt
ſans armes , & neantmoins dort toû-
jours armé. Au contraire, il eſt peril-
leux de tenir touſiours dans ſon ſein
vne vipere pleine de venin. Vous rem-
pliſſez d'vne haine mortelle le cœur de
voſtre femme : Cette haine eſt vn poi-
son , tiré du plus creux de l'abyſme, &
E ij
100
La Direction & la Conſolation
vous viuez auec elle comme ſi vous lacareſſiez,auec toutes les tendreſſes que
vous luy deuez , & que vous luy auez
promiſes.
Si j'oſois charger ce papier de di-
uerſes tragedies arriuées en tous les
ſiecles , ie vous ferois dreſſer les che-
ueux en teſte , & glacer le ſang dans
les veines. Mais ie n'ay garde de re-
mettre dans la memoire des hommes,
ce qui doit eſtre enterré dans vn eter-
nel oubly.
uerſes tragedies arriuées en tous les
ſiecles , ie vous ferois dreſſer les che-
ueux en teſte , & glacer le ſang dans
les veines. Mais ie n'ay garde de re-
mettre dans la memoire des hommes,
ce qui doit eſtre enterré dans vn eter-
nel oubly.
Concluez , & ſoyez ſage & mo-
deré. Viuez joyeux, au milieu des ca-
reſſes & des diuertiſſemens d'vne hon-
neſte & chaſte Amour. Ne viuez
point vne vie de Hibou , qui n'ai-
me que les tenebres & la ſolitude, &
qui ſe fait la haine & l'opprobre de
tous les oyſeaux.
deré. Viuez joyeux, au milieu des ca-
reſſes & des diuertiſſemens d'vne hon-
neſte & chaſte Amour. Ne viuez
point vne vie de Hibou , qui n'ai-
me que les tenebres & la ſolitude, &
qui ſe fait la haine & l'opprobre de
tous les oyſeaux.
101
des perſonnes Mariées.
bandeau décoratif
CHAPITRE II.
La Conſolation & la Direction d'vne
Femme, qui eſt battuë par ſon
Mary.
LEs paroles volent en l'air, & ne
bleſſent perſonne. Vne haine
couuerte ſe cache dans les replis du
cœur , & ne fait mal qu'à ceux qui
ſont trop curieux. Mais les ſoufflets,
les coups de poings, les coups de pieds
& de baſtons meinent vn tel bruit, &
portent vn ſi notable dommage au
corps, & vne ſi faſcheuſe infamie à la
perſonne, qu'ils ſont inſupportables à
vne femme bien née , & qui ſe ſent
innocente.
bleſſent perſonne. Vne haine
couuerte ſe cache dans les replis du
cœur , & ne fait mal qu'à ceux qui
ſont trop curieux. Mais les ſoufflets,
les coups de poings, les coups de pieds
& de baſtons meinent vn tel bruit, &
portent vn ſi notable dommage au
corps, & vne ſi faſcheuſe infamie à la
perſonne, qu'ils ſont inſupportables à
vne femme bien née , & qui ſe ſent
innocente.
Il eſt vray que cét eſtat eſt tres-
lamentable, lors que la paſſion poſſe-
de tellement vn mary, qu'il n'eſcoute
point la raiſon , & qu'il ſe laiſſe em-
porter à vne furieuſe impetuoſité, qui
le met hors de ſoy-meſme. Au lieu
d'vn homme raiſonnable , à qui l'on
ſoulagement & de la joye : on trouue
vn Lion & vn Tigre enragé , qui rugit
continuellement dans ſa cauerne , &
en ſuite, déchire & deuore ceux qui y
ſont.
lamentable, lors que la paſſion poſſe-
de tellement vn mary, qu'il n'eſcoute
point la raiſon , & qu'il ſe laiſſe em-
porter à vne furieuſe impetuoſité, qui
le met hors de ſoy-meſme. Au lieu
d'vn homme raiſonnable , à qui l'on
E iij
102
La Direction & la Conſolation
s'eſt confié & donné , pour en tirer duſoulagement & de la joye : on trouue
vn Lion & vn Tigre enragé , qui rugit
continuellement dans ſa cauerne , &
en ſuite, déchire & deuore ceux qui y
ſont.
Mais il n'eſt point de mal ſi grand
qui ne ſe puiſſe tourner à profit, ſi nous
y prenons garde , & qui ne ſe puiſſe
tout à fait empeſcher ou diminuër , ſi
nous y apportons vne bonne volonté,
& vne ſage conduite.
qui ne ſe puiſſe tourner à profit, ſi nous
y prenons garde , & qui ne ſe puiſſe
tout à fait empeſcher ou diminuër , ſi
nous y apportons vne bonne volonté,
& vne ſage conduite.
§. I. Aduis à la femme , qui eſt
battuë par ſon mary.
I. Prenez garde quel eſt le naturel
de voſtre mary , & qu'eſt-ce qui le
choque en vous : Accommodez-vous
à ſes humeurs, & vous l'appriuoiſerez,
encore qu'il fut plus farouche qu'vn
Loup & qu'vn Lion. Sainct Emerius
appriuoiſa vn Lion par vne douce pa-
role : & ſainct Seuerin , Eueſque de
Septempeda , par vn ſeul ſigne de
Croix , rendit vn Loup doux & do-
meſtique.
de voſtre mary , & qu'eſt-ce qui le
choque en vous : Accommodez-vous
à ſes humeurs, & vous l'appriuoiſerez,
encore qu'il fut plus farouche qu'vn
Loup & qu'vn Lion. Sainct Emerius
appriuoiſa vn Lion par vne douce pa-
role : & ſainct Seuerin , Eueſque de
Septempeda , par vn ſeul ſigne de
Croix , rendit vn Loup doux & do-
meſtique.
Voyez attentiuement s'il n'y a
rien en vous qui luy donne vne iuſte
vous frapper & moleſter. Si vous ren-
contrez quelque imperfection cho-
quante , corrigez-là , & Dieu benira
voſtre vertu , & le deſir que vous au-
rez,de viure en ſorte qu'il ne ſoit point
offenſé dans voſtre maiſon.
rien en vous qui luy donne vne iuſte
103
des perſonnes Mariées.
occaſion, ou vn ſpecieux pretexte devous frapper & moleſter. Si vous ren-
contrez quelque imperfection cho-
quante , corrigez-là , & Dieu benira
voſtre vertu , & le deſir que vous au-
rez,de viure en ſorte qu'il ne ſoit point
offenſé dans voſtre maiſon.
II. Ne croyez point que les coups
que voſtre mary vous donne , proce-
dent d'vne haine interieure : Car cette
penſée aigriroit voſtre mal. Souuent
vne ſimple legereté, ou vne ſurpriſe de
vin , ou l'âge plein de feu luy empor-
tent la main.
que voſtre mary vous donne , proce-
dent d'vne haine interieure : Car cette
penſée aigriroit voſtre mal. Souuent
vne ſimple legereté, ou vne ſurpriſe de
vin , ou l'âge plein de feu luy empor-
tent la main.
Il pourroit arriuer que ce ſeroit vn
excez d'affection , laquelle ne peut
rien ſouffrir en vous qui offenſe ſes
yeux. Vous voyez par voſtre propre
experience, que vous puniſſez vos en-
fans pour certaines fautes , dont vous
ne daignez pas ſeulement reprendre81 vn
de vos valets : Car voſtre amour veut
voſtre fils parfait , & l'indifference
que vous auez pour le bien de voſtre
valet , vous fait negliger & tolerer ſes
ruſticitez & imperfections.
excez d'affection , laquelle ne peut
rien ſouffrir en vous qui offenſe ſes
yeux. Vous voyez par voſtre propre
experience, que vous puniſſez vos en-
fans pour certaines fautes , dont vous
ne daignez pas ſeulement reprendre81 vn
de vos valets : Car voſtre amour veut
voſtre fils parfait , & l'indifference
que vous auez pour le bien de voſtre
valet , vous fait negliger & tolerer ſes
ruſticitez & imperfections.
E iiij
104
La Direction & la Conſolation
Les femmes des Moſcouites82 ſont
Auity. admirables en ce poinct. Si elles font
vne faute vn peu remarquable , elles
n'eſtiment point eſtre aimées de leurs
maris, s'ils ne les battent ſelon que la
faute le merite. Qui a payé eſt quitte :
Autrement on peut craindre , qu'vne
indignation couuée ne demeure plus
long temps ſur le cœur83, & n'en cor-
rompe entierement l'affection.
Auity. admirables en ce poinct. Si elles font
vne faute vn peu remarquable , elles
n'eſtiment point eſtre aimées de leurs
maris, s'ils ne les battent ſelon que la
faute le merite. Qui a payé eſt quitte :
Autrement on peut craindre , qu'vne
indignation couuée ne demeure plus
long temps ſur le cœur83, & n'en cor-
rompe entierement l'affection.
III. Si voſtre mary vous frappe,
meſmes mal à propos, taiſez-vous, &
ne luy donnez point d'imprecations.
Ne criez point de telle ſorte , que les
voiſins en ſoient allarmez , ſi ce n'eſt
qu'il y ait du peril pour voſtre vie, ou
pour voſtre ſanté : & qu'il faille les
appeller au ſecours.
Bonmeſmes mal à propos, taiſez-vous, &
ne luy donnez point d'imprecations.
Ne criez point de telle ſorte , que les
voiſins en ſoient allarmez , ſi ce n'eſt
qu'il y ait du peril pour voſtre vie, ou
pour voſtre ſanté : & qu'il faille les
appeller au ſecours.
Vigner
lib. 3.
c. I. 84
I'ay prouué ailleurs, que le ſilence
empeſche que les maris ne frappent
leurs femmes. Ie dis maintenant, qu'il
fait au moins qu'ils ne les frappent
point ſi rudement ny ſi ſouuent. Car
qui ſeroit le deſnaturé, qui voulut tou-
cher ſur vne pauure brebis laquelle ne
luy dit rien , & qui luy donne ſa laine
& ſa ſubſtance ? Si la precipitation , la
uenté à quelque eſcapade, & qu'on ne
luy reſiſte point dans ſa fureur , lors
que ſon feu eſt paſſé il reſte honteux &
humilié. Il rentre en ſoy-meſme , il
admire la vertu & la generoſité de cel-
le qui a tant d'amour pour luy , & tant
de reſpect pour Dieu. Il propoſe alors
de ne plus tomber dans vne faute ſi cri-
minelle & ſi eſloignée de la raiſon.
Chacun a le remords de ſa conſcience,
lequel eſt vn Pedagogue inuiſible, qui
ne manque iamais à ſon deuoir. Dieu
le fait agir puiſſamment , lors que la
perſonne offenſée s'en rend digne , &
implore ſon aide.
empeſche que les maris ne frappent
leurs femmes. Ie dis maintenant, qu'il
fait au moins qu'ils ne les frappent
point ſi rudement ny ſi ſouuent. Car
qui ſeroit le deſnaturé, qui voulut tou-
cher ſur vne pauure brebis laquelle ne
luy dit rien , & qui luy donne ſa laine
& ſa ſubſtance ? Si la precipitation , la
105
des perſonnes Mariées.
colere ou l'yureſſe, pouſſe vn ieune eſ-uenté à quelque eſcapade, & qu'on ne
luy reſiſte point dans ſa fureur , lors
que ſon feu eſt paſſé il reſte honteux &
humilié. Il rentre en ſoy-meſme , il
admire la vertu & la generoſité de cel-
le qui a tant d'amour pour luy , & tant
de reſpect pour Dieu. Il propoſe alors
de ne plus tomber dans vne faute ſi cri-
minelle & ſi eſloignée de la raiſon.
Chacun a le remords de ſa conſcience,
lequel eſt vn Pedagogue inuiſible, qui
ne manque iamais à ſon deuoir. Dieu
le fait agir puiſſamment , lors que la
perſonne offenſée s'en rend digne , &
implore ſon aide.
Imitez le Lierre coupé , il ne laiſſe
pas de s'attacher plus fortement à l'ar-
bre qui l'appuyoit , & d'en tirer tout
le ſuc qu'il peut. Par ce moyen il re-
pouſſe ſes rejettons , & montre enfin
auſſi haut qu'il eſtoit.
pas de s'attacher plus fortement à l'ar-
bre qui l'appuyoit , & d'en tirer tout
le ſuc qu'il peut. Par ce moyen il re-
pouſſe ſes rejettons , & montre enfin
auſſi haut qu'il eſtoit.
IV. Conſderez que cette ſouf-
france eſt vne ſatisfaction pour vos pe-
chez , vn grand merite deuant Dieu,
& vn moyen de rendre toutes vos ver-
tus plus heroïques & plus ſolides. On
deuient plus genereux.
france eſt vne ſatisfaction pour vos pe-
chez , vn grand merite deuant Dieu,
& vn moyen de rendre toutes vos ver-
tus plus heroïques & plus ſolides. On
E v
106
La Direction & la Conſolation
dit qu'vn Cheual mordu d'vn Loup, endeuient plus genereux.
V. Dieu changera vos amertumes
en douceurs, & vos playes en des ſour-
ces de benedictions. Il ſortit des
playes de ſaincte Martine martyre,
vne ſoüeue odeur , qui embaumoit
tout l'air voiſin , & rejoüiſſoit les aſ-
ſiſtans.
Colloq.en douceurs, & vos playes en des ſour-
ces de benedictions. Il ſortit des
playes de ſaincte Martine martyre,
vne ſoüeue odeur , qui embaumoit
tout l'air voiſin , & rejoüiſſoit les aſ-
ſiſtans.
[?]1.85
Le Baume ne couleroit point ſi
abondamment, ſi l'on ne donnoit de
petites taillades au tronc de l'arbriſ-
ſeau. Majole rapporte qu'au nouueau
Monde on trouue vn arbre, qui eſtant
inciſé , diſtille vne goutte ſemblable
au Baume en odeur, laquelle guerit de
toutes playes, & referme entierement
les cicatrices : de ſorte qu'il n'y paroiſt
plus aucune marque de la bleſſure.
abondamment, ſi l'on ne donnoit de
petites taillades au tronc de l'arbriſ-
ſeau. Majole rapporte qu'au nouueau
Monde on trouue vn arbre, qui eſtant
inciſé , diſtille vne goutte ſemblable
au Baume en odeur, laquelle guerit de
toutes playes, & referme entierement
les cicatrices : de ſorte qu'il n'y paroiſt
plus aucune marque de la bleſſure.
V.86 Meditez les tourmens & les
douleurs des ſaincts Martyrs , & les
voſtres vous ſembleront vn jeu d'en-
fant. Saincte Marcionille fut tour-
mentée , & enfin maſſacrée par ſon
propre mary , auec ſainct Celſe ſon
fils.
douleurs des ſaincts Martyrs , & les
voſtres vous ſembleront vn jeu d'en-
fant. Saincte Marcionille fut tour-
mentée , & enfin maſſacrée par ſon
propre mary , auec ſainct Celſe ſon
fils.
Pluſieurs Martyrs ont eſté ſouffle-
roſtiſ ſur des grils ardens, & ont ſouf-
fert tous ces ſupplices, & pluſieurs au-
tres auec des joyes incomparables.
107
des perſonnes Mariées.
tez , baſtonnez , bruſlez , eſcorchez,roſtiſ ſur des grils ardens, & ont ſouf-
fert tous ces ſupplices, & pluſieurs au-
tres auec des joyes incomparables.
Lors, dit ſainct Chryſoſtome,
que les.
S. Chri-
de ſan-
ctis
Mar-
tyrib.87 Saincts Martyrs eſtoient enuironnez de
flammes qui entroient dans leurs playes,
& qui les conſumoient iuſques aux os,
ils ſouffroient ces douleurs comme s'ils
euſſent eſté de diamant , & comme s'ils
euſſent enduré dans des corps emprun-
tez
Et ailleurs parlant de l'Apoſtre
ſainct Paul , il dit.
Actaſainct Paul , il dit.
Sainct Paul eſtant.
orné de la Charité de Dieu, ne crai-
gnoit point dauantage Neron , & les
autres Tyrans & bourreaux, qu'vn pe-
tit mouſcheron qui vole en l'air. Par
cette Charité, il eſtimoit toutes les tor-
tures & la mort meſme vn ieu d'en-
fant. Il eſtoit plus joyeux & plus glo-
rieux dans ſes liens, que s'il euſt eſté
couronné d'vn diademe. Eſtant dans
la priſon il demeuroit au Ciel. Il re-
ceuoit plus volontiers les playes que les
autres ne reçoiuent les recompenſes.
Cette Charité luy rendoit les trauaux
E vj 108 La Direction & la Conſolation plus doux, que le repos ne ſembloit aux
autres , & les douleurs plus agreables,
que les couronnes, que les triomphes &
les trophées
Mart.
Sainct Hermile ſe réjouïſſoit , lors
qu'on luy frappoit le viſage auec des
inſtrumens d'airain. Saincte Seconde
ſe faſchoit contre le Tyran, de ce qu'il
honoroit ſa ſœur Rufine en la ſouffle-
tant , & qu'il ne la faiſoit point ſouf-
frir pour imiter ſon Sauueur.
qu'on luy frappoit le viſage auec des
inſtrumens d'airain. Saincte Seconde
ſe faſchoit contre le Tyran, de ce qu'il
honoroit ſa ſœur Rufine en la ſouffle-
tant , & qu'il ne la faiſoit point ſouf-
frir pour imiter ſon Sauueur.
Sainct Marc & Sainct Marcellien,
eſtant attachez à vn poſteau par des
cloux qui luer perçoient les pieds aſ-
ſeuroient : Que iamais ils n'auoient
eſté à vn meilleur feſtin.
eſtant attachez à vn poſteau par des
cloux qui luer perçoient les pieds aſ-
ſeuroient : Que iamais ils n'auoient
eſté à vn meilleur feſtin.
Sainct Arcadius loüoit Dieu , &
chantoit d'allegreſſe , lors qu'on luy
coupoit tous les membres de ſon corps
les vns apres les autres.
chantoit d'allegreſſe , lors qu'on luy
coupoit tous les membres de ſon corps
les vns apres les autres.
Voſtre mal eſt tres-grand, & tres-
difficile à ſupporter , ie ne croy pas
neantmoins qu'il ſoit égal à celuy de
ces genereux ſoldats de Ieſus-Chriſt.
rez la force de la grace de Dieu en eux:
loüez leur valeur , implorez leur aſſi-
ſtance , & aſſeurez-vous que vous en
receurez vn grand ſoulagement , &
que voſtre patience en deuiendra plus
genereuſe.
difficile à ſupporter , ie ne croy pas
neantmoins qu'il ſoit égal à celuy de
ces genereux ſoldats de Ieſus-Chriſt.
109
des perſonnes Mariées.
Conſiderez leurs ſouffrances , admi-rez la force de la grace de Dieu en eux:
loüez leur valeur , implorez leur aſſi-
ſtance , & aſſeurez-vous que vous en
receurez vn grand ſoulagement , &
que voſtre patience en deuiendra plus
genereuſe.
VI. La Patience rend le mal plus
leger , & l'Oraiſon l'oſte quelquefois
entierement, & fait que Dieu renforce
tellement le cœur88 de ſon ſecours, qu'il
ne ſent aucune douleur.
Hiſt.leger , & l'Oraiſon l'oſte quelquefois
entierement, & fait que Dieu renforce
tellement le cœur88 de ſon ſecours, qu'il
ne ſent aucune douleur.
ipſor.
Sainct Clement d'Ancyre , &
ſainct Agathange, eſtans mis ſur des
grils de fer tout embraſez , n'en fu-
rent nullement endommagez, quoy
que le Tyran fiſt jetter ſur eux de
l'huile , de la poix , & du ſouffre
boüillant.
ſainct Agathange, eſtans mis ſur des
grils de fer tout embraſez , n'en fu-
rent nullement endommagez, quoy
que le Tyran fiſt jetter ſur eux de
l'huile , de la poix , & du ſouffre
boüillant.
Le meſme ſainct Clement receut
cent cinquante coups ſur la teſte , &
vn Ange le guerit incontinent89.
cent cinquante coups ſur la teſte , &
vn Ange le guerit incontinent89.
Sainct Theodore chante au mi-
lieu de ſes tourmens , & vn Ange
eſſuye auec vne merueilleuſe allegreſ-
ſe , la ſueur qui couloit de ſon viſage.
Vn autre Ange guerit ſainct Conſtan-
lieu de ſes tourmens , & vn Ange
eſſuye auec vne merueilleuſe allegreſ-
ſe , la ſueur qui couloit de ſon viſage.
Vn autre Ange guerit ſainct Conſtan-
110
La Direction & la Conſolation
ce de toutes ſes playes.Ayez donc confiance en Dieu :
Iettez dans ſon ſein voſtre cœur90 & vos
douleurs : Inuoquez-le auec ardeur,
& il vous aſſiſtera & conſolera. Peut-
eſtre conuertira-t'il voſtre mary par
vos prieres & par voſtre patience ,
comme il conuertit les bourreaux de
ſaincte Martine , elle ayant prié pour
eux. Et quoy qu'il en arriue, vos dou-
leurs ſe tourneront en joye , & vos
tourmens en allegreſſe. Les pieces des
pots caſſez dont on tourmentoit ſainct
Vincent , ſe changerent en des fleurs
tres-belles & tres-odoriferantes. Dieu
ne permet iamais que ſes ſeruiteurs
ſoient accablez du fardeau qu'il met
ſur leurs eſpaules, s'ils ont recours à
ſa bonté.
Iettez dans ſon ſein voſtre cœur90 & vos
douleurs : Inuoquez-le auec ardeur,
& il vous aſſiſtera & conſolera. Peut-
eſtre conuertira-t'il voſtre mary par
vos prieres & par voſtre patience ,
comme il conuertit les bourreaux de
ſaincte Martine , elle ayant prié pour
eux. Et quoy qu'il en arriue, vos dou-
leurs ſe tourneront en joye , & vos
tourmens en allegreſſe. Les pieces des
pots caſſez dont on tourmentoit ſainct
Vincent , ſe changerent en des fleurs
tres-belles & tres-odoriferantes. Dieu
ne permet iamais que ſes ſeruiteurs
ſoient accablez du fardeau qu'il met
ſur leurs eſpaules, s'ils ont recours à
ſa bonté.
VIII.91 Continuez touſiours les bons
ſeruices que vous rendez à voſtre mary,
& à toute voſtre famille. Rendez le
bien pour le mal, & voſtre merite ſera
tres-grand deuant Dieu. Les Saincts
ont exercé cette Charité enuers leurs
plus cruels perſecuteurs. Sainct Mein-
rad fit bonne chere aux voleurs , qu'il
Les Saincts Martyrs Phocas & Melas,
traicterent le plus ciuilement qu'ils
pûrent, & nourrirent auec joye & cha-
rité les bourreaux qui les cherchoient
pour les maſſacrer, & qui en effect les
tuerent.
ſeruices que vous rendez à voſtre mary,
& à toute voſtre famille. Rendez le
bien pour le mal, & voſtre merite ſera
tres-grand deuant Dieu. Les Saincts
ont exercé cette Charité enuers leurs
plus cruels perſecuteurs. Sainct Mein-
rad fit bonne chere aux voleurs , qu'il
111
des perſonnes Mariées.
ſçauoit eſtre venus pour l'aſſaſſiner.Les Saincts Martyrs Phocas & Melas,
traicterent le plus ciuilement qu'ils
pûrent, & nourrirent auec joye & cha-
rité les bourreaux qui les cherchoient
pour les maſſacrer, & qui en effect les
tuerent.
Dieu a tourné leurs ſupplices en
plaiſirs , & leur mort d'vn moment en
vne eternelle vie. Lors qu'on picque
certaines Huitres il en ſort vne liqueur
qui ſe change en pierres precieuſes.
Toutes vos larmes, toutes vos ſueurs,
& toutes vos douleurs ſeront trans-
formées en des fleurs, en des perles,
& en des couronnes.
plaiſirs , & leur mort d'vn moment en
vne eternelle vie. Lors qu'on picque
certaines Huitres il en ſort vne liqueur
qui ſe change en pierres precieuſes.
Toutes vos larmes, toutes vos ſueurs,
& toutes vos douleurs ſeront trans-
formées en des fleurs, en des perles,
& en des couronnes.
§. II.
Aduis pour le mari qui
bat ſa femme.
I. L'homme qui frappe ſa femme
mal à propos , fait vne profeſſion pu-
blique qu'il n'a point d'eſprit, ne pou-
uant gagner par dexterité & par bien-
faits, l'affection d'vne perſonne qui a
eu tant d'inclination pour luy, que de
s'y donner entierement, & de s'y aſſu-
jettir iuſques à la mort, auec laquelle
il eſt en communauté de corps & de
la maiſon, à la table, au lict, à la ville,
aux champs , & dans toutes les ren-
contres de la vie.
mal à propos , fait vne profeſſion pu-
blique qu'il n'a point d'eſprit, ne pou-
uant gagner par dexterité & par bien-
faits, l'affection d'vne perſonne qui a
eu tant d'inclination pour luy, que de
s'y donner entierement, & de s'y aſſu-
jettir iuſques à la mort, auec laquelle
il eſt en communauté de corps & de
112
La Direction & la Conſolation
biens, & conuerſe continuellement enla maiſon, à la table, au lict, à la ville,
aux champs , & dans toutes les ren-
contres de la vie.
Ceux qui ne ſont pas bons Caua-
liers, tourmentent vn cheual à coups
d'eſperons & à coups d'eſcourgées92, en-
core n'en peuuent-ils tirer le ſeruice
qu'ils deſirent. Mais vn Caualier in-
duſtrieux en fait ce qu'il veut, auec le
moindre coup de houſſine93, & ſouuent
par vne ſeule parole, ou vn ſeul mou-
uement de la bride.
liers, tourmentent vn cheual à coups
d'eſperons & à coups d'eſcourgées92, en-
core n'en peuuent-ils tirer le ſeruice
qu'ils deſirent. Mais vn Caualier in-
duſtrieux en fait ce qu'il veut, auec le
moindre coup de houſſine93, & ſouuent
par vne ſeule parole, ou vn ſeul mou-
uement de la bride.
II. Perſonne ne reuoque en doute,
que celuy qui ſe bat ſoy-meſme , qui
s'arrache les cheueux, qui ſe meurtrit
le viſage à coups de poings, & les bras
ou les jambes à coups de baſtõs ne ſoit
vn inſenſé , qui n'a plus de jugement.
Or perſonne ne doute , que l'homme
& la femme ne ſoient vne meſme cho-
Matth.
19.5. ſe.
Seigneur. Iugez donc vous-meſme
quel nom vous meritez, ſi vous frap-
pez voſtre femme qui eſt vne meſme
choſe auec vous.
que celuy qui ſe bat ſoy-meſme , qui
s'arrache les cheueux, qui ſe meurtrit
le viſage à coups de poings, & les bras
ou les jambes à coups de baſtõs ne ſoit
vn inſenſé , qui n'a plus de jugement.
Or perſonne ne doute , que l'homme
& la femme ne ſoient vne meſme cho-
Matth.
19.5. ſe.
Erunt duo in carne vna. Ils ſont, dit noſtre
deux en vne meſme chair
Seigneur. Iugez donc vous-meſme
quel nom vous meritez, ſi vous frap-
pez voſtre femme qui eſt vne meſme
choſe auec vous.
113
des perſonnes Mariées.
III. Le contrecoup en retombe ſur
vous, & plus dangereuſement que ſur
elle. Comme les coups qu'on donne
ſur le coſté gauche incommodent auſſi
le coſté droict , & pour l'ordinaire,
le contre-coup eſt pire que le coup
meſme.
vous, & plus dangereuſement que ſur
elle. Comme les coups qu'on donne
ſur le coſté gauche incommodent auſſi
le coſté droict , & pour l'ordinaire,
le contre-coup eſt pire que le coup
meſme.
IV. Celuy qui frappe ſa femme eſt
vn barbare ou vn yurogne. S'il eſt
d'vne condition riche & noble, il eſt
barbare, s'il eſt de baſſe naiſſance, il
Solin. eſt brutal ou yurogne. Les Neuriens,
peuple de Scythie, ſe transformoient
en Loups durant l'eſté , & exerçoient
pluſieurs cruautez ſous cette figure
puis retournoient à leur premiere fi-
gure. Les yurognes ſont preſque tou-
te l'année transformez en de cruelles
beſtes. Ces Neuriens adoroient Mars
pour leur Dieu; ils adoroient auſſi leurs
eſpées , & leur immoloient des hom-
mes. Ils faiſoient meſme leur feu do-
meſtique auec des os d'hommes & de
femmes. Ce Hieroglyphe peut nous
figurer ceux qui eſtans remplis de vin,
ne penſent qu'à toucher , qu'à crier,
& qu'à mettre toute leur maiſon en
vn barbare ou vn yurogne. S'il eſt
d'vne condition riche & noble, il eſt
barbare, s'il eſt de baſſe naiſſance, il
Solin. eſt brutal ou yurogne. Les Neuriens,
peuple de Scythie, ſe transformoient
en Loups durant l'eſté , & exerçoient
pluſieurs cruautez ſous cette figure
puis retournoient à leur premiere fi-
gure. Les yurognes ſont preſque tou-
te l'année transformez en de cruelles
beſtes. Ces Neuriens adoroient Mars
pour leur Dieu; ils adoroient auſſi leurs
eſpées , & leur immoloient des hom-
mes. Ils faiſoient meſme leur feu do-
meſtique auec des os d'hommes & de
femmes. Ce Hieroglyphe peut nous
figurer ceux qui eſtans remplis de vin,
ne penſent qu'à toucher , qu'à crier,
& qu'à mettre toute leur maiſon en
114
La Direction & la Conſolation
feu & en flammes.V. Ceux qui battent leurs fem-
mes ſont des ames laſches, qui s'at-
taquent à de plus foibles qu'eux , &
tremblent deuant leurs égaux. Les
anciens Hetruriens ont eſté blaſmez,
de ce qu'ils faiſoient fuſtiger leurs eſ-
claues au ſon de la fluſte , pour auoir
du plaiſir & du diuertiſſement, meſme
dans les larmes & les gemiſſemens de
ces pauures miſerables victimes, qui
ne leur pouuoient reſiſter.
mes ſont des ames laſches, qui s'at-
taquent à de plus foibles qu'eux , &
tremblent deuant leurs égaux. Les
anciens Hetruriens ont eſté blaſmez,
de ce qu'ils faiſoient fuſtiger leurs eſ-
claues au ſon de la fluſte , pour auoir
du plaiſir & du diuertiſſement, meſme
dans les larmes & les gemiſſemens de
ces pauures miſerables victimes, qui
ne leur pouuoient reſiſter.
Les ames genereuſes aiment la
paix & la doucuer , & mépriſent tou-
tes les violences precipitées. L'Empe-
reur Maximilien le montroit dans vn
tel Embleme. Il peignit vne Aigle,
qui fouloit aux pieds la foudre: & te-
noit vn rameau d'Oliuier.
paix & la doucuer , & mépriſent tou-
tes les violences precipitées. L'Empe-
reur Maximilien le montroit dans vn
tel Embleme. Il peignit vne Aigle,
qui fouloit aux pieds la foudre: & te-
noit vn rameau d'Oliuier.
VI. Celuy qui bat ſa femme , ſe
met en danger d'eſtre ridicule & infa-
me dans tout ſon voiſinage. Le droict
naturel de ſa conſeruation , le tran-
ſport de la colere , les tentations du
demon, peuuent tellement échauffer
& animer la plus foible des creatures,
qu'elle ſe mettra en defenſe , qu'elle
marquera les joües auec ſes ongles,
le défigurera , & le bleſſera notable-
ment.
met en danger d'eſtre ridicule & infa-
me dans tout ſon voiſinage. Le droict
naturel de ſa conſeruation , le tran-
ſport de la colere , les tentations du
demon, peuuent tellement échauffer
& animer la plus foible des creatures,
qu'elle ſe mettra en defenſe , qu'elle
115
des perſonnes Mariées.
luy ſautera aux yeux , qu'elle luymarquera les joües auec ſes ongles,
le défigurera , & le bleſſera notable-
ment.
Les moindres ſouris montrent les
dents ſi on les attaque. Et les plus
chetifs animaux domptent quelque-
fois les plus orgueilleux & les plus in-
uincibles. Richeome rapporte, qu'v-
ne vieille Caualle tua vn Lion par vn
coup de pied , le Lion s'approchant
d'elle pour la deuorer. Il n'eſt point
de foible ennemy , lors qu'il s'agiſt
de la ſanté , de l'honneur , & de la
vie.
dents ſi on les attaque. Et les plus
chetifs animaux domptent quelque-
fois les plus orgueilleux & les plus in-
uincibles. Richeome rapporte, qu'v-
ne vieille Caualle tua vn Lion par vn
coup de pied , le Lion s'approchant
d'elle pour la deuorer. Il n'eſt point
de foible ennemy , lors qu'il s'agiſt
de la ſanté , de l'honneur , & de la
vie.
Ie veux que vous ſortiez victo-
rieux du combat. Ce vous ſera vne
grande gloire, de vous eſtre battu en
duel auec vne femme.
rieux du combat. Ce vous ſera vne
grande gloire, de vous eſtre battu en
duel auec vne femme.
VII. Celuy qui bat ſa femme la
rend farouche & indocile, ſi elle a vn
cœur94 genereux, il la fait puſillanime,
ſi elle eſt craintiue , la douceur l'ap-
priuoiſera mieux , ſi ſon humeur eſt
reueſche ; & l'on en tirerera plus de
ſeruice.Cela ſe voit meſmes en la pluſ-
part des beſtes.
rend farouche & indocile, ſi elle a vn
cœur94 genereux, il la fait puſillanime,
ſi elle eſt craintiue , la douceur l'ap-
priuoiſera mieux , ſi ſon humeur eſt
reueſche ; & l'on en tirerera plus de
ſeruice.Cela ſe voit meſmes en la pluſ-
part des beſtes.
116
La Direction & la Conſolation
L'Elephant de l'Inde , au rapport
De ani-
mal 12
c. 44.95 d'Elien , eſtant pris lors qu'il eſt déja
robuſte, eſt fort difficile à appriuoiſer,
& par vn deſir de liberté eſt tres-fa-
rouche , taſchant de tuer ceux qui le
tiennent. Si on le lie, il entre dans de
plus grandes fougues, rejette les vian-
des les plus delicates, & ſe laiſſe mou-
rir. Les Indiens pour le rendre docile
luy chantent vne chanſon , & joüent
d'vn inſtrument de Muſique. L'Ele-
phant commence à l'écouter, leue les
oreilles , pour oüir plus commode-
ment cette melodie , montre qu'il y
prend plaiſir, & ſe rend doux & trai-
table par cét agreable concert, en ſui-
te il mange peu à peu, & quoy que dé-
lié, ne retourne plus à ſa ferocité na-
turelle.
De ani-
mal 12
c. 44.95 d'Elien , eſtant pris lors qu'il eſt déja
robuſte, eſt fort difficile à appriuoiſer,
& par vn deſir de liberté eſt tres-fa-
rouche , taſchant de tuer ceux qui le
tiennent. Si on le lie, il entre dans de
plus grandes fougues, rejette les vian-
des les plus delicates, & ſe laiſſe mou-
rir. Les Indiens pour le rendre docile
luy chantent vne chanſon , & joüent
d'vn inſtrument de Muſique. L'Ele-
phant commence à l'écouter, leue les
oreilles , pour oüir plus commode-
ment cette melodie , montre qu'il y
prend plaiſir, & ſe rend doux & trai-
table par cét agreable concert, en ſui-
te il mange peu à peu, & quoy que dé-
lié, ne retourne plus à ſa ferocité na-
turelle.
Vous auez mené voſtre Eſpouſe
en voſtre maiſon auec les violons, &
auec d'autres inſtrumens de Muſique.
Retenez y toute voſtre vie vne bonne
conſonance , & elle y demeurera vo-
lontiers , & vous y rendra de bons
ſeruices.
en voſtre maiſon auec les violons, &
auec d'autres inſtrumens de Muſique.
Retenez y toute voſtre vie vne bonne
conſonance , & elle y demeurera vo-
lontiers , & vous y rendra de bons
ſeruices.
VIII. La ſocieté de la vie de
vn amour parfait , & à vne douceur &
des careſſes reciproques. Elle doit ap-
paiſer les plus furieux , & eſteindre
leurs flammes. L'Empereur Antonin
auoit mis dans ſon Symbole vn Fou-
dre pacifique ſur vn lict. Vn lict de
plume reſiſte aux boulets de Canon,
en ne leur reſiſtant pas.
117
des perſonnes Mariées.
l'homme & de la femme, les oblige àvn amour parfait , & à vne douceur &
des careſſes reciproques. Elle doit ap-
paiſer les plus furieux , & eſteindre
leurs flammes. L'Empereur Antonin
auoit mis dans ſon Symbole vn Fou-
dre pacifique ſur vn lict. Vn lict de
plume reſiſte aux boulets de Canon,
en ne leur reſiſtant pas.
Combien de ſeruices rend vne
femme à ſon mary ? Ils meritent ſon
amitié , & doiuent empeſcher ſa
cruauté. Le Crocodile, quoy que tres-
cruel, ne nuit iamais à vn petit oiſeau
qui ſe nomme Trochile96: à cauſe que
cét oiſeau luy nettoye les dents , y
cherchant ſa nourriture. Il entre auec
aſſeurance dans la bouche de ce mon-
ſtre , & en ſort auec liberté. Qui eſt-
ce qui vous prepare vos viandes, & qui
a ſoin de tous vos domeſtiques , ſinon
voſtre femme? Ne payez point par vne
laſche & ingrate cruauté , les ſeruices
charitables de ſa bonté.
femme à ſon mary ? Ils meritent ſon
amitié , & doiuent empeſcher ſa
cruauté. Le Crocodile, quoy que tres-
cruel, ne nuit iamais à vn petit oiſeau
qui ſe nomme Trochile96: à cauſe que
cét oiſeau luy nettoye les dents , y
cherchant ſa nourriture. Il entre auec
aſſeurance dans la bouche de ce mon-
ſtre , & en ſort auec liberté. Qui eſt-
ce qui vous prepare vos viandes, & qui
a ſoin de tous vos domeſtiques , ſinon
voſtre femme? Ne payez point par vne
laſche & ingrate cruauté , les ſeruices
charitables de ſa bonté.
IX. Celuy qui bat ſa femme , nuit
beaucoup à ces enfans & à toute ſa fa-
mille. Car il eſt preſque neceſſaire
vn brutal , ou la femme comme vne
teſte dure & mal faite : & quelquefois
les accidens qui ſuruiennent dans ce
chamaillis, rend l'vn & l'autre abſolu-
ment ridicule. Ainſi le gouuernement
eſt enerué, & l'eſprit des enfans & des
ſeruiteurs ſe rebute , & vit dans vne
noire melancholie , de ce qu'ils n'en-
tendent, que des crieries, des plaintes,
des blaſphemes , des maledictions &
des imprecations.
beaucoup à ces enfans & à toute ſa fa-
mille. Car il eſt preſque neceſſaire
118
La Direction & la Conſolation
qu'ils mépriſent, ou le mary commevn brutal , ou la femme comme vne
teſte dure & mal faite : & quelquefois
les accidens qui ſuruiennent dans ce
chamaillis, rend l'vn & l'autre abſolu-
ment ridicule. Ainſi le gouuernement
eſt enerué, & l'eſprit des enfans & des
ſeruiteurs ſe rebute , & vit dans vne
noire melancholie , de ce qu'ils n'en-
tendent, que des crieries, des plaintes,
des blaſphemes , des maledictions &
des imprecations.
X. Celuy qui bat ſa Femme , ren-
uerſe toute l'education de ſes enfans :
& leur donne vn exemple, qui les ren-
dra de petits Tigres, en leur temps, &
des Diables toute leur vie. Leur ima-
gination ſe remplit de colere , & de
blaſphemes: qui font puis apres de fu-
rieux effets dans les occaſions.
uerſe toute l'education de ſes enfans :
& leur donne vn exemple, qui les ren-
dra de petits Tigres, en leur temps, &
des Diables toute leur vie. Leur ima-
gination ſe remplit de colere , & de
blaſphemes: qui font puis apres de fu-
rieux effets dans les occaſions.
XI. Celuy qui bat ſa Femme, ſans
vne abſoluë neceſſité , ſurpaſſe ſon
pouuoir. Le domaine du Mary ſur la
Femme, n'eſt pas ſemblable à celuy
qu'il a ſur ſon or, ſur ſon argent , &
ſur ce qu'il poſſede: mais il eſt ciuil, &
fort limité. Eue fut tirée de la coſte
pieds : pour monſtrer, comme elle ne
doit point dominer ſur ſon mari; auſſi
n'en doit elle point eſtre mépriſée &
bafoüée: mais eſtre ſa compagne bien-
aimée : ayant eſté priſe d'auprés du
cœur97.
vne abſoluë neceſſité , ſurpaſſe ſon
pouuoir. Le domaine du Mary ſur la
Femme, n'eſt pas ſemblable à celuy
qu'il a ſur ſon or, ſur ſon argent , &
ſur ce qu'il poſſede: mais il eſt ciuil, &
fort limité. Eue fut tirée de la coſte
119
des perſonnes Mariées.
d'Adam , & non pas de la teſte ny despieds : pour monſtrer, comme elle ne
doit point dominer ſur ſon mari; auſſi
n'en doit elle point eſtre mépriſée &
bafoüée: mais eſtre ſa compagne bien-
aimée : ayant eſté priſe d'auprés du
cœur97.
XII. Dieu defend aux hommes, par
la bouche de l'Apoſtre, de tourmenter
Coloſſ.
3. 19.98 leurs femmes,
la bouche de l'Apoſtre, de tourmenter
Coloſſ.
3. 19.98 leurs femmes,
Maris, dit-il ,
aimez.
vos femmes, & ne leur témoignez point
d'amertumes
Si l'on n'obeït point à ce com-
mandement , la douleur retombera
pour l'ordinaire ſur celuy qui frappe.
C'eſt ce que meritent ces bourreaux
domeſtiques, comme anciennement
le meritoient & le ſouffroient les
In A-
ctus. bourreaux des Saincts Martyrs. Ceux
qui martyriſoient ſaincte Martine ,
furent tourmentez viſiblement par les
Anges. Ceux qui foüettoient ſainct
Thyrſe auec des cordes, en furent eux-
meſmes foüettez , & en ſuite auec des
foüets embraſez : & ce qui eſt plus à
noſtre propos , ils ſe fuſtigerent eux-
meſmes. Vn mary ne peut frapper le
cœur99, par vn ſenſible remors de con-
ſcience , & par vne juſte crainte ,
d'eſtre dans le meſpris de toute ſa
parenté.
mandement , la douleur retombera
pour l'ordinaire ſur celuy qui frappe.
C'eſt ce que meritent ces bourreaux
domeſtiques, comme anciennement
le meritoient & le ſouffroient les
In A-
ctus. bourreaux des Saincts Martyrs. Ceux
qui martyriſoient ſaincte Martine ,
furent tourmentez viſiblement par les
Anges. Ceux qui foüettoient ſainct
Thyrſe auec des cordes, en furent eux-
meſmes foüettez , & en ſuite auec des
foüets embraſez : & ce qui eſt plus à
noſtre propos , ils ſe fuſtigerent eux-
meſmes. Vn mary ne peut frapper le
120
La Direction & la Conſolation
corps de ſa femme, qu'il ne ſe perce lecœur99, par vn ſenſible remors de con-
ſcience , & par vne juſte crainte ,
d'eſtre dans le meſpris de toute ſa
parenté.
Le cloud qu'on vouloit ficher
dans la teſte de ſainct Potite, rejaillit
ſur le Tyran, & ſe ficha profondement
dans la ſienne.
dans la teſte de ſainct Potite, rejaillit
ſur le Tyran, & ſe ficha profondement
dans la ſienne.
Concluez de tout cecy , qu'il
faut qu'vn homme ſoit entierement
hors de ſoy-meſme ; lors que ſans
vne extreme neceſſité , il vient à
cette barbarie de frapper ſa femme; ſi
particulierement cela arriue pluſieurs
fois. Il ſe nuit à ſoy-meſme , à ſa re-
putation , à ſes enfans à toute ſa fa-
mille, & fait vne action qui eſt brutale
& barbare.
faut qu'vn homme ſoit entierement
hors de ſoy-meſme ; lors que ſans
vne extreme neceſſité , il vient à
cette barbarie de frapper ſa femme; ſi
particulierement cela arriue pluſieurs
fois. Il ſe nuit à ſoy-meſme , à ſa re-
putation , à ſes enfans à toute ſa fa-
mille, & fait vne action qui eſt brutale
& barbare.
Chap.
121
des perſonnes Mariées.
bandeau décoratif
CHAPITRE III.
La Conſolation & la Direction d'vne
femme dont le mary eſt jaloux.
LA Ialouſie, dit Chryſippe, eſt vne
maladie de l'eſprit, laquelle pro-
cede d'vne crainte, que quelqu'autre
n'ait la joüiſſance d'vne choſe aimé
qu'on veut poſſeder tout ſeul.
maladie de l'eſprit, laquelle pro-
cede d'vne crainte, que quelqu'autre
n'ait la joüiſſance d'vne choſe aimé
qu'on veut poſſeder tout ſeul.
Vn Auaricieux eſt jaloux de ſon
or & de ſon argent. Vn Gentilhomme
eſt jaloux de ſon honneur: vn Roy de
ſa domination; & vn mary de ſa fem-
me. Tout ce qui donne le moindre
ombrage de les leur rauir les choque,
& les fait entrer dans de grandes in-
quietudes.
or & de ſon argent. Vn Gentilhomme
eſt jaloux de ſon honneur: vn Roy de
ſa domination; & vn mary de ſa fem-
me. Tout ce qui donne le moindre
ombrage de les leur rauir les choque,
& les fait entrer dans de grandes in-
quietudes.
Ce mal eſt l'vn des plus grands
qui puiſſent arriuer au Mariage. Car
il ne donne nul repos, ny iour ny nuict,
à vn eſprit ſoupçonneux , & qui ſe for-
me vne infinité de chimeres , croyant
qu'il eſt trahy & priué de ce qu'il a de
plus cher au monde, pour ſes delices
qui puiſſent arriuer au Mariage. Car
il ne donne nul repos, ny iour ny nuict,
à vn eſprit ſoupçonneux , & qui ſe for-
me vne infinité de chimeres , croyant
qu'il eſt trahy & priué de ce qu'il a de
plus cher au monde, pour ſes delices
F
122
La Direction & la Conſolation
& pour ſa reputation.Vne femme qui connoiſt ce mal-
heur , ſi elle ſe trouue innocente , ſe-
che ſur ſes pieds , & deſire mille fois
le tombeau , afin de couurir ſa honte
& eſtouffer ſes regrets. Donnons quel-
que ſoulagement à ſa douleur , &
queques aduis pour la diſſiper entie-
rement.
heur , ſi elle ſe trouue innocente , ſe-
che ſur ſes pieds , & deſire mille fois
le tombeau , afin de couurir ſa honte
& eſtouffer ſes regrets. Donnons quel-
que ſoulagement à ſa douleur , &
queques aduis pour la diſſiper entie-
rement.
§. I.
Aduis à la femme , dont le
mary eſt poſſedé de jalouſie.
I. Compatiſſez à voſtre mary com-
me à vn malade : & réjoüiſſez-vous
que ſon mal ne procede que d'vn ex-
cez de l'Amour qu'il vous porte, & de
l'eſtime qu'il fait de voſtre beauté, de
voſtre bonne grace , de vos paroles
charmantes, & de pluſieurs perfections
naturelles qu'il apperçoit en vous. Il
vous affectionne , & veut vous poſſe-
der tout ſeul , à deſſein de conſeruer
voſtre honneur, de ſauuer voſtre ame,
de maintenir le luſtre de voſtre famille,
& vos enfans dans leur heritage ; ſans
le diuiſer à d'autres qui ne ſeroient
point à luy.
me à vn malade : & réjoüiſſez-vous
que ſon mal ne procede que d'vn ex-
cez de l'Amour qu'il vous porte, & de
l'eſtime qu'il fait de voſtre beauté, de
voſtre bonne grace , de vos paroles
charmantes, & de pluſieurs perfections
naturelles qu'il apperçoit en vous. Il
vous affectionne , & veut vous poſſe-
der tout ſeul , à deſſein de conſeruer
voſtre honneur, de ſauuer voſtre ame,
de maintenir le luſtre de voſtre famille,
& vos enfans dans leur heritage ; ſans
le diuiſer à d'autres qui ne ſeroient
point à luy.
Ie vois bien , qu'eſtant certaine
ſoupçons vous ſont injurieux. Mais
conſolez-vous , puis que ſa jalouſie
vient pluſtoſt de foibleſſe que de ma-
lice , & que de grands Saincts en ont
eſté ſurpris, eſtant trompez par de faux
rapports.
123
des perſonnes Mariées.
de voſtre vertu, vous trouuez que ſesſoupçons vous ſont injurieux. Mais
conſolez-vous , puis que ſa jalouſie
vient pluſtoſt de foibleſſe que de ma-
lice , & que de grands Saincts en ont
eſté ſurpris, eſtant trompez par de faux
rapports.
Sainct Henry , Empereur d'Occi-
dent , prit vn faſcheux ombrage de
ſaincte Chunegonde ſa femme. Mais
Surius. la Saincte , pleine d'vne genereuſe
confiance en Dieu , ne s'en eſtonna
point. Elle s'offrit à marcher à pieds
nuds ſur des coutres100 de charruë tout
eſtincelans de feu. L'Empereur luy
permit, & elle y paſſa auec allegreſſe
& promptitude, ſans en eſtre aucune-
ment bleſſée.
dent , prit vn faſcheux ombrage de
ſaincte Chunegonde ſa femme. Mais
Surius. la Saincte , pleine d'vne genereuſe
confiance en Dieu , ne s'en eſtonna
point. Elle s'offrit à marcher à pieds
nuds ſur des coutres100 de charruë tout
eſtincelans de feu. L'Empereur luy
permit, & elle y paſſa auec allegreſſe
& promptitude, ſans en eſtre aucune-
ment bleſſée.
Sainct Ioſeph meſme euſt quelque
ſoupçon de la Vierge Marie Mere de
Dieu , & auoit déja reſolu de la quit-
ter. Mais Dieu luy enuoya vn Ange
pour l'inſtruire, afin de le mettre hors
de peine, & la Vierge hors de blâme.
Num.ſoupçon de la Vierge Marie Mere de
Dieu , & auoit déja reſolu de la quit-
ter. Mais Dieu luy enuoya vn Ange
pour l'inſtruire, afin de le mettre hors
de peine, & la Vierge hors de blâme.
6. 5.
II. Confiez-vous que Dieu diſſi-
pera ce broüillard , moyennant que
vous ayez vn peu de patience. Dieu
nite , qu'on nommoit l'Eau de Ialou-
ſie. Le mary qui auoit quelque ſoup-
ſon de ſa femme le menoit au Preſtre,
lequel auec de certaines prieres, pre-
ſentoit cette eau à l'accuſée. Si elle
eſtoit ſans crime , l'eau ne luy faiſoit
aucune incommodité : mais la ren-
doit feconde. Que ſi elle eſtoit cou-
pable ſes entrailles pourriſſoient , &
elle en mouroit.
pera ce broüillard , moyennant que
vous ayez vn peu de patience. Dieu
F ij
124
La Direction & la Conſolation
auoit ordonné aux Iuifs vne Eau-be-nite , qu'on nommoit l'Eau de Ialou-
ſie. Le mary qui auoit quelque ſoup-
ſon de ſa femme le menoit au Preſtre,
lequel auec de certaines prieres, pre-
ſentoit cette eau à l'accuſée. Si elle
eſtoit ſans crime , l'eau ne luy faiſoit
aucune incommodité : mais la ren-
doit feconde. Que ſi elle eſtoit cou-
pable ſes entrailles pourriſſoient , &
elle en mouroit.
Saincte Elizabeth101, Reine d'Hon-
grie, fut ſuſpecte au Roy ſon mary102: à
cauſe des particuliers témoignages
d'affection , que cette vertueuſe Prin-
ceſſe montroit à vn de ſes Pages , le-
Vita
& An.
Luſit. quel excelloit en pieté par deſſus tous
les autres. Le Roy piqué d'vne furieu-
ſe jalouſie , ſe reſolut de faire mourir
ce Page ; & à cét effect l'enuoye à vn
ouurier qui cuiſoit de la chaux, à qui
il auoit commandé de jetter dans ſon
fourneau ardent le premier qu'il luy
addreſſeroit. Comme ce Page y alloit
par l'ordre du Roy, il paſſa proche d'v-
ne Egliſe , & entẽdant qu'on ſonnoit à
l'éleuation du ſainct Sacremẽt à la Meſ-
Meſſe , & l'autre entiere qui ſui-
uoit. Le Roy ſouhaitant auec impa-
tience de ſçauoir le ſuccez de ſon meſ-
ſager, enuoye vn autre Page (qui eſtoit
l'accuſateur de la Reine & de ſon
compagnon ) à ce faiſeur de chaux,
pour luy demander s'il auoit executé
ſes ordres. Il n'y fut pas pluſtoſt
arriué que le Chaufournier l'empoi-
gne, & nonobſtant toutes reſiſtances
le jette dans ſon fourneau , ſur la
creance que c'eſtoit celuy dont le Roy
luy auoit parlé. Peu de temps apres le
Page vertueux qui eſtoit deſigné à ce
ſupplice vint à cét ouurier , & luy de-
mande s'il auoit obey au Roy. Il reſ-
pond , qu'il auoit fait auec fidelité ce
qui luy auoit eſté commandé , & que
le Page eſtoit reduit en cendres. Le
Roy ayant ouy ce rapport par celuy-
meſme qu'il vouloit perdre , admira
les iugemens de Dieu, & le ſoin qu'il
prend de la vie & de la reputation de
ſes ſeruiteurs & de ſes ſeruantes. Il
honora la Reine plus que iamais , &
careſſa ce Page, qui auoit eſté déliuré
rez les meſmes aſſiſtances du Ciel , ſi
vous auez la meſme vertu en terre.
grie, fut ſuſpecte au Roy ſon mary102: à
cauſe des particuliers témoignages
d'affection , que cette vertueuſe Prin-
ceſſe montroit à vn de ſes Pages , le-
Vita
& An.
Luſit. quel excelloit en pieté par deſſus tous
les autres. Le Roy piqué d'vne furieu-
ſe jalouſie , ſe reſolut de faire mourir
ce Page ; & à cét effect l'enuoye à vn
ouurier qui cuiſoit de la chaux, à qui
il auoit commandé de jetter dans ſon
fourneau ardent le premier qu'il luy
addreſſeroit. Comme ce Page y alloit
par l'ordre du Roy, il paſſa proche d'v-
ne Egliſe , & entẽdant qu'on ſonnoit à
l'éleuation du ſainct Sacremẽt à la Meſ-
125
des perſonnes Mariées.
ſe, il entra dedans, oüit le reſte de laMeſſe , & l'autre entiere qui ſui-
uoit. Le Roy ſouhaitant auec impa-
tience de ſçauoir le ſuccez de ſon meſ-
ſager, enuoye vn autre Page (qui eſtoit
l'accuſateur de la Reine & de ſon
compagnon ) à ce faiſeur de chaux,
pour luy demander s'il auoit executé
ſes ordres. Il n'y fut pas pluſtoſt
arriué que le Chaufournier l'empoi-
gne, & nonobſtant toutes reſiſtances
le jette dans ſon fourneau , ſur la
creance que c'eſtoit celuy dont le Roy
luy auoit parlé. Peu de temps apres le
Page vertueux qui eſtoit deſigné à ce
ſupplice vint à cét ouurier , & luy de-
mande s'il auoit obey au Roy. Il reſ-
pond , qu'il auoit fait auec fidelité ce
qui luy auoit eſté commandé , & que
le Page eſtoit reduit en cendres. Le
Roy ayant ouy ce rapport par celuy-
meſme qu'il vouloit perdre , admira
les iugemens de Dieu, & le ſoin qu'il
prend de la vie & de la reputation de
ſes ſeruiteurs & de ſes ſeruantes. Il
honora la Reine plus que iamais , &
careſſa ce Page, qui auoit eſté déliuré
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La Direction & la Conſolation
de cét extreme peril par ſa pieté. Eſpe-rez les meſmes aſſiſtances du Ciel , ſi
vous auez la meſme vertu en terre.
III. Conſiderez attentiuement
d'où voſtre mary prend occaſion de
vous tenir pour vne libertine, & vne
débauchée. Iettez vne œillade ſur
toutes les cauſes qui luy peuuent don-
ner quelque pretexte.
d'où voſtre mary prend occaſion de
vous tenir pour vne libertine, & vne
débauchée. Iettez vne œillade ſur
toutes les cauſes qui luy peuuent don-
ner quelque pretexte.
1. Si ce ſont de trop frequens en-
tretiens auec quelqu'vn de vos do-
meſtiques , de vos parens & de vos
voiſns, il faut neceſſairement les re-
trancher, pour innocens & pour vti-
les à la famille qu'ils puiſſent eſtre.
Rien ne vous doit eſtre plus cher que
voſtre repos & celuy de voſtre mary.
Cette maladie de Ialouſie ne peut ſe
guerir, tandis que les ſujets de l'om-
Plu-
tarch.
in Ar-
tax.103 brage demeurent.
tretiens auec quelqu'vn de vos do-
meſtiques , de vos parens & de vos
voiſns, il faut neceſſairement les re-
trancher, pour innocens & pour vti-
les à la famille qu'ils puiſſent eſtre.
Rien ne vous doit eſtre plus cher que
voſtre repos & celuy de voſtre mary.
Cette maladie de Ialouſie ne peut ſe
guerir, tandis que les ſujets de l'om-
Plu-
tarch.
in Ar-
tax.103 brage demeurent.
Les Perſans eſtoient ſi ſoupçon-
neux , qu'ils faiſoient mourir , non
ſeulement ceux qui touchoient & qui
careſſoient vne des Concubines du
Roy, mais auſſi ceux qui s'en appro-
choient lors qu'elle paſſoit par la ruë.
Vous voyez combien grande eſt la ma-
faut apporter pour l'euiter, & pour la
guerir.
neux , qu'ils faiſoient mourir , non
ſeulement ceux qui touchoient & qui
careſſoient vne des Concubines du
Roy, mais auſſi ceux qui s'en appro-
choient lors qu'elle paſſoit par la ruë.
Vous voyez combien grande eſt la ma-
127
des perſonnes Mariées.
ladie de la Ialouſie , & le ſoin qu'ilfaut apporter pour l'euiter, & pour la
guerir.
2. Ne permettez iamais aucune fa-
miliarité à perſonne, en ſe joüant au-
prés de vous, en raillant, en vous ma-
naint les mains, ou vſant d'autres pri-
uautez bien qu'innocentes.
Ruel-miliarité à perſonne, en ſe joüant au-
prés de vous, en raillant, en vous ma-
naint les mains, ou vſant d'autres pri-
uautez bien qu'innocentes.
lius l.
13.cap.
143.
L'herbe qu'on appelle Touſiours
viuante , eſt tres belle à voir, eſtant
touſiours verdoyante. Si quelqu'vn
la veut toucher, elle reſſerre incon-
tinent ſes feüilles , & les cache
ſous ſes petites branches : Que ſi on
la touche, elle ſe fleſtrit auſſi-toſt, &
paroiſt comme morte : Si l'on en
retire la main, elle reprend ſa nouuelle
vigueur.
viuante , eſt tres belle à voir, eſtant
touſiours verdoyante. Si quelqu'vn
la veut toucher, elle reſſerre incon-
tinent ſes feüilles , & les cache
ſous ſes petites branches : Que ſi on
la touche, elle ſe fleſtrit auſſi-toſt, &
paroiſt comme morte : Si l'on en
retire la main, elle reprend ſa nouuelle
vigueur.
Toutes les careſſes ſont perilleu-
ſes, & peuuent donner de iuſtes crain-
tes, que d'vne petite eſtincelle ne ſorte
vn grand incendie.
ſes, & peuuent donner de iuſtes crain-
tes, que d'vne petite eſtincelle ne ſorte
vn grand incendie.
3. Si voſtre mary ne trouue pas
bon , que vous ſortiez ſouuent du lo-
gis pour aller en compagnie, pour aſ-
ſiſter au bal, pour prendre d'autres re-
creations : réjoüiſſez-vous de cette
coup de ſujets de diſtractions & de diſ-
ſipations de voſtre deuotion.
bon , que vous ſortiez ſouuent du lo-
gis pour aller en compagnie, pour aſ-
ſiſter au bal, pour prendre d'autres re-
creations : réjoüiſſez-vous de cette
F iiij
128
La Direction & la Conſolation
contrainte, qui vous retranche beau-coup de ſujets de diſtractions & de diſ-
ſipations de voſtre deuotion.
Combien de Sainctes Martyres
ont eſté renfermées dans les priſons,
& y ont receu de ſignalées faueurs de
Dieu. Saincte Archelas & ſaincte Priſ-
que y furent viſitées par les Anges, &
y ſentirent de tres-grandes tendreſſes
de pieté. Saincte Barbe y fut reſſerrée
long-temps par ſon propre Pere , &
renforcée par les faueurs du Ciel. Dieu
ne vous manquera iamais , ſi vous
vous jettez entre ſes bras.
ont eſté renfermées dans les priſons,
& y ont receu de ſignalées faueurs de
Dieu. Saincte Archelas & ſaincte Priſ-
que y furent viſitées par les Anges, &
y ſentirent de tres-grandes tendreſſes
de pieté. Saincte Barbe y fut reſſerrée
long-temps par ſon propre Pere , &
renforcée par les faueurs du Ciel. Dieu
ne vous manquera iamais , ſi vous
vous jettez entre ſes bras.
4. Moderez la ſomptuoſité de vos
habits,paroiſſant moins vaine vous pa-
roiſtrez plus chaſte. Les habits ſom-
ptueux & mols , diſoit l'Empereur Au-
guſte, ſont l'eſtendart de l'orgueil , &
le nid de la luxure.
habits,paroiſſant moins vaine vous pa-
roiſtrez plus chaſte. Les habits ſom-
ptueux & mols , diſoit l'Empereur Au-
guſte, ſont l'eſtendart de l'orgueil , &
le nid de la luxure.
Les Hebreux ſe ſeruent du meſme
mot , Ada , pour ſignifier ornement ;
& pour ſignifier recherche des delices.
Il eſt difficile de tenir la mediocrité104
dans les ornemens, & de ne ſe point
laiſſer emporter à l'excez & au vice. S.
Chryſoſtome aſſeure, que de l'ornemẽt
4. in
Geneſ. des habits ſuit vne infinité de maux.
mot , Ada , pour ſignifier ornement ;
& pour ſignifier recherche des delices.
Il eſt difficile de tenir la mediocrité104
dans les ornemens, & de ne ſe point
laiſſer emporter à l'excez & au vice. S.
Chryſoſtome aſſeure, que de l'ornemẽt
129
des perſonnes Mariées.
Homil.4. in
Geneſ. des habits ſuit vne infinité de maux.
C'eſt, dit-il,
vne ſource d'arrogance, du.
mespris du Prochain, de la corruption
des ames, & l'allumette de la volupté
Sainct Cyprien eſt encore plus ri-
S. Cyp.
lib. de
habit.
Virg.105 goureux , & parle contre le luxe des
habits en ces termes.
icy ſainct Cyprien.
S. Cyp.
lib. de
habit.
Virg.105 goureux , & parle contre le luxe des
habits en ces termes.
L'eſclat des ha-. Iuſques
bits & de leurs ornemens, joint au fard
du viſage, ne conuient qu'à des femmes
proſtituées & impudiques , & nous
voyons que pas vne ne ſe pare auec
plus de ſoin que celles qui ont perdu la
honte. Celles qui s'habillent de ſoye &
de pourpre, au deſſus de leur condition,
ne peuuent ſe reueſtir de Ieſus-Chriſt.
Celles qui s'ornent d'or, de pierres pre-
cieuſes, & de carquans106, ont perdu l'or-
nement du cœur107 & du corps
icy ſainct Cyprien.
Vous voyez qu'il eſt neceſſaire d'ô-
ter à voſtre mary , qui a déja l'eſprit
bleſſé, cette occaſion de maintenir ſes
penſées contre vous.
ter à voſtre mary , qui a déja l'eſprit
bleſſé, cette occaſion de maintenir ſes
penſées contre vous.
5. Ne vous efforcez point de pa-
roiſtre belle dans les aſſemblées , en
vous fardant, de peur que voſtre mary
n'en fortifie ſes ombrages, & ne s'ima-
cœur108 de quelqu'vn par cette beauté re-
cherchée. Socrate diſoit, que la beauté
eſt vne tyrannie. Platon eſcrit, qu'elle
domine ſur la nature. Theophraſte l'ap-
pelle vne tromperie cachée. Theocrite,
vn dommage d'yuoire. Carneide, vn
Royaume ſans ſatellites.
roiſtre belle dans les aſſemblées , en
vous fardant, de peur que voſtre mary
n'en fortifie ſes ombrages, & ne s'ima-
F v
130
La Direction & la Conſolation
gine que vous voulez vous captiuer lecœur108 de quelqu'vn par cette beauté re-
cherchée. Socrate diſoit, que la beauté
eſt vne tyrannie. Platon eſcrit, qu'elle
domine ſur la nature. Theophraſte l'ap-
pelle vne tromperie cachée. Theocrite,
vn dommage d'yuoire. Carneide, vn
Royaume ſans ſatellites.
Pour cette raiſon , vn Ancien ne
conſeilloit pas à vn ieune homme de
ſe marier. Si, luy diſoit-il, ta femme
eſt laide , tu ſeras touſiours dans vn
dégouſt. Si elle eſt belle, elle ſera com-
mune à d'autres.
conſeilloit pas à vn ieune homme de
ſe marier. Si, luy diſoit-il, ta femme
eſt laide , tu ſeras touſiours dans vn
dégouſt. Si elle eſt belle, elle ſera com-
mune à d'autres.
Cela n'eſt point veritable vniuer-
ſellement. Mais voſtre mary ayant dé-
ja des penſées flottantes, ſera plus agi-
té , s'il voit que vous faſſiez la jolie &
la complaiſante.
ſellement. Mais voſtre mary ayant dé-
ja des penſées flottantes, ſera plus agi-
té , s'il voit que vous faſſiez la jolie &
la complaiſante.
6. Sur tout, qu'il n'y ait rien de
trop découuert en voſtre ſein, & en
voſtre coïffure. C. Supitius repudia
ſa femme dans Rome , parce qu'elle
eſtoit ſortie de ſa maiſon ayant la teſte
découuerte.
trop découuert en voſtre ſein, & en
voſtre coïffure. C. Supitius repudia
ſa femme dans Rome , parce qu'elle
eſtoit ſortie de ſa maiſon ayant la teſte
découuerte.
La loy, dit-il,
t'oblige de ne
t'orner que pour plaire à mes yeux.
Tu te deuois attifer ſeulement pour
131 des perſonnes Mariées. eux, & non pas pour les yeux d'au-
truy.
En Arabie & en Syrie , les fem-
Beſſon. mes marchent encore aujourd'huy par
la ruë ſi bien voilées, qu'elle ne ſe re-
ſeruent qu'vne ouuerture pour l'vn de
leurs yeux.
Iſaie.Beſſon. mes marchent encore aujourd'huy par
la ruë ſi bien voilées, qu'elle ne ſe re-
ſeruent qu'vne ouuerture pour l'vn de
leurs yeux.
3. 16.
Dieu ſe faſche, de ce que les filles
& les femmes de Ieruſalem mar-
choient ayant le ſein découuert. Et
pour cette raiſon, il les menace de les
faire tomber entre les mains des bar-
bares, qui les dépoüilleroient, les des-
honoreroient , & leur feroient ſouffrir
de tres-grandes indignitez & incom-
moditez.
& les femmes de Ieruſalem mar-
choient ayant le ſein découuert. Et
pour cette raiſon, il les menace de les
faire tomber entre les mains des bar-
bares, qui les dépoüilleroient, les des-
honoreroient , & leur feroient ſouffrir
de tres-grandes indignitez & incom-
moditez.
Il les compare aux Lamies , leſ-
quelles eſtoient des beſtes farouſches
dans l'Afrique , qui auoient des viſa-
ges de femmes, & des mammelles d'v-
ne ſi rauiſſante beauté, qu'en les mon-
trant elles en charmoient les moins
aduiſez des hommes , & les deuo-
roient. Le reſte de leurs corps eſtoit
chargé d'eſcailles fort dures. Elles ne
parloient point, mais jettoient vn ſif-
flement tel que les dragons.
quelles eſtoient des beſtes farouſches
dans l'Afrique , qui auoient des viſa-
ges de femmes, & des mammelles d'v-
ne ſi rauiſſante beauté, qu'en les mon-
trant elles en charmoient les moins
aduiſez des hommes , & les deuo-
roient. Le reſte de leurs corps eſtoit
chargé d'eſcailles fort dures. Elles ne
parloient point, mais jettoient vn ſif-
flement tel que les dragons.
F vj
132
La Direction & la Conſolation
7. Moderez vos œillades : & ne
ſouſriez iamais à des jeunes gens, qui
peuuent donner du ſoupçon. Les
yeux ſont les guides de l'amour, & la
porte par où elle entre au cœur. Iere-
mie, parlant en la perſonne des habi-
tans de Ieruſalem, que Dieu auoit pu-
nis pour leurs pechez, & ſpecialement
Threr.
3. 51.109 pour leur luxure , dit.
tre qu'vne ſeule œillade peut faire ce
larcin.
ſouſriez iamais à des jeunes gens, qui
peuuent donner du ſoupçon. Les
yeux ſont les guides de l'amour, & la
porte par où elle entre au cœur. Iere-
mie, parlant en la perſonne des habi-
tans de Ieruſalem, que Dieu auoit pu-
nis pour leurs pechez, & ſpecialement
Threr.
3. 51.109 pour leur luxure , dit.
Mon œil a. Il mon-
dérobé & pillé mon ame
tre qu'vne ſeule œillade peut faire ce
larcin.
Sainct Gregoire aſſeure , qu'il
In Job.
31. n'eſt nulle vertu ſi heroïque, à qui ne
nuiſe la liberté des œillades , & qui
n'en ſente des reuoltes en ſon Appetit
inferieur. C'eſt pourquoy Iob aſſeure,
qu'il auoit fait vn accord auec ſes
yeux, de ne point regarder les filles, de
peur que ces regards ne luy engendraſ-
ſent des penſées peu chaſtes.
In Job.
31. n'eſt nulle vertu ſi heroïque, à qui ne
nuiſe la liberté des œillades , & qui
n'en ſente des reuoltes en ſon Appetit
inferieur. C'eſt pourquoy Iob aſſeure,
qu'il auoit fait vn accord auec ſes
yeux, de ne point regarder les filles, de
peur que ces regards ne luy engendraſ-
ſent des penſées peu chaſtes.
Les yeux charment facilement le
cœur. Vn ieune homme fut telle-
ment pris par la beauté & l'eſclat des
yeux d'vne ſaincte Vierge , qu'il ne
ceſſoit de l'importuner & de la ſolliciter.
Mais cette ame noble & genereuſe ,
s'arracha les deux yeux & les luy en-
uoya dans vn plat , & par ſon ſang,
eſteignit le braſier qui conſumoit ce
ieune eſuenté, & le guerit de ſa folle
paſſion.
cœur. Vn ieune homme fut telle-
ment pris par la beauté & l'eſclat des
yeux d'vne ſaincte Vierge , qu'il ne
ceſſoit de l'importuner & de la ſolliciter.
Mais cette ame noble & genereuſe ,
133
des perſonnes Mariées.
ayant appris la cauſe de ſon amour,s'arracha les deux yeux & les luy en-
uoya dans vn plat , & par ſon ſang,
eſteignit le braſier qui conſumoit ce
ieune eſuenté, & le guerit de ſa folle
paſſion.
8. Ne vous ſeruez iamais de pou-
dre de ſenteur , ſi voſtre mary ne le
trouue pas bon. Cela peut donner pri-
ſe à vn eſprit qui eſt déja alteré. Vne
femme qui ſe parfume ſans raiſon, eſt
ſouuent vn pigeon muſqué , qui va à
la chaſſe, & attire les autres pour les
captiuer.
dre de ſenteur , ſi voſtre mary ne le
trouue pas bon. Cela peut donner pri-
ſe à vn eſprit qui eſt déja alteré. Vne
femme qui ſe parfume ſans raiſon, eſt
ſouuent vn pigeon muſqué , qui va à
la chaſſe, & attire les autres pour les
captiuer.
La Panthere eſt vn beau Symbole
Æliã
lib. 5.
c. 40.110 de ces affetées, qui ſe parent d'habits
recherchez , & qui s'embaume de
parfums. Cét animal attrape les au-
tres de cette ſorte. Il cache ſa teſte
dans quelque buiſſon de peur de les
eſpouuanter. Les beſtes ſauuages ſen-
tant la bonne odeur qui ſort de ſon
corps, s'en approchent & s'arreſtent,
afin de regarder à loiſir ſa belle peau.
La Panthere ſe leue alors de ſon em-
buſcade, en attrape quelques-vnes, &
les deuore.
Æliã
lib. 5.
c. 40.110 de ces affetées, qui ſe parent d'habits
recherchez , & qui s'embaume de
parfums. Cét animal attrape les au-
tres de cette ſorte. Il cache ſa teſte
dans quelque buiſſon de peur de les
eſpouuanter. Les beſtes ſauuages ſen-
tant la bonne odeur qui ſort de ſon
corps, s'en approchent & s'arreſtent,
afin de regarder à loiſir ſa belle peau.
La Panthere ſe leue alors de ſon em-
buſcade, en attrape quelques-vnes, &
les deuore.
134
La Direction & la Conſolation
Contentez-vous de l'odeur de vos
vertus, & elle vous rendra agreable au
Ciel, à vos domeſtiques, à vos parens,
& ſur tout à voſtre mary , dont vous
2. Cor.
2. 15. deuez preferer l'amour & le contente-
ment à tous les autres auantages, & à
toutes vos autres ſatisfactions.
dit ſainct Paul.
vertus, & elle vous rendra agreable au
Ciel, à vos domeſtiques, à vos parens,
& ſur tout à voſtre mary , dont vous
2. Cor.
2. 15. deuez preferer l'amour & le contente-
ment à tous les autres auantages, & à
toutes vos autres ſatisfactions.
Nous,
ſommes la bonne odeur de Ieſus-Chriſt
dit ſainct Paul.
Dieu a ſouuent fait, que les corps mé-
mes de ſes Saincts rendiſſent vne bõne
odeur , pour montrer combien leurs
ames luy plaiſoient. Les corps des
Sainctes Vierges Vlphie & Marguerite
d'Hongrie rendent vne tres - ſoüeue
odeur. Et ce qui eſt plus merueilleux,
celuy de ſaincte Aldegonde ſentoit
fort bon , huict cens ans apres ſa
mort.
mes de ſes Saincts rendiſſent vne bõne
odeur , pour montrer combien leurs
ames luy plaiſoient. Les corps des
Sainctes Vierges Vlphie & Marguerite
d'Hongrie rendent vne tres - ſoüeue
odeur. Et ce qui eſt plus merueilleux,
celuy de ſaincte Aldegonde ſentoit
fort bon , huict cens ans apres ſa
mort.
Concluez de tout ce diſcours , que
vous deuez vſer de quelque contrainte
dans voſtre conduite , iuſqu'à ce que
tous les nuages ſoient diſſipez , &
qu'vn beau iour eſclaire l'eſprit de vô-
tre mary. Si par vne molleſſe peu to-
lerable , vous ne voulez rien ceder de
vos droicts pretendus , ny de vos di-
vous jettez dans vn euident peril d'é-
galer voſtre miſere à voſtre vie.
vous deuez vſer de quelque contrainte
dans voſtre conduite , iuſqu'à ce que
tous les nuages ſoient diſſipez , &
qu'vn beau iour eſclaire l'eſprit de vô-
tre mary. Si par vne molleſſe peu to-
lerable , vous ne voulez rien ceder de
vos droicts pretendus , ny de vos di-
135
des perſonnes Mariées.
uertiſſemens qui choquent , vousvous jettez dans vn euident peril d'é-
galer voſtre miſere à voſtre vie.
§. II. Aduis au mary , qui eſt
poſſedé de Ialouſie.
I. Meſpriſez pour l'ordinaire les
Rapporteurs , s'il n'y a vn ſujet tres-
notable de ſoupçonner , & ſi leur rap-
port n'a des probabilitez fort ſenſibles.
Souuent le demon ſuſcite ces pertur-
bateurs du repos des familles, pour les
renuerſer entierement , ou au moins
pour les remplir de fiel & d'amertu-
me. Souuent vne ſecrette vengean-
ce, vn intereſt couuert, vne maligni-
té diſſimulée , vne legereté trop cre-
dule , vne precipitation temeraire &
peu Chreſtienne, ouurent la bouche à
ces boutefeux.
Rapporteurs , s'il n'y a vn ſujet tres-
notable de ſoupçonner , & ſi leur rap-
port n'a des probabilitez fort ſenſibles.
Souuent le demon ſuſcite ces pertur-
bateurs du repos des familles, pour les
renuerſer entierement , ou au moins
pour les remplir de fiel & d'amertu-
me. Souuent vne ſecrette vengean-
ce, vn intereſt couuert, vne maligni-
té diſſimulée , vne legereté trop cre-
dule , vne precipitation temeraire &
peu Chreſtienne, ouurent la bouche à
ces boutefeux.
II. S'il y a quelque ſujet raiſon-
nable , & que les aduis vous ſoient
donnez par diuerſes perſonnes deſin-
tereſſées, dignes de foy , & qui n'ont
eu nulle priſe auec voſtre femme : eſ-
clairciſſez - vous prudemment de la
verité. Ne precipitez rien dans vne
matiere de la derniere importance.
ſonne , qu'apres vne meure delibera-
tion. Alors ſi le mal vous oppreſſe
trop le cœur111, & que vous ayez vn amy
ou vn parent ſage, âgé & ſecret , vous
pourrez décharger dans ſon ſein voſtre
affliction. Cette ouuerture , & cette
décharge de penſées, ne ſeruiront pas
peu à voſtre gueriſon.
nable , & que les aduis vous ſoient
donnez par diuerſes perſonnes deſin-
tereſſées, dignes de foy , & qui n'ont
eu nulle priſe auec voſtre femme : eſ-
clairciſſez - vous prudemment de la
verité. Ne precipitez rien dans vne
matiere de la derniere importance.
136
La Direction & la Conſolation
Ne declarez pas vos craintes à per-ſonne , qu'apres vne meure delibera-
tion. Alors ſi le mal vous oppreſſe
trop le cœur111, & que vous ayez vn amy
ou vn parent ſage, âgé & ſecret , vous
pourrez décharger dans ſon ſein voſtre
affliction. Cette ouuerture , & cette
décharge de penſées, ne ſeruiront pas
peu à voſtre gueriſon.
III. Conſiderez vous comme vn
malade, & ne croyez point facilement
aux phantoſmes qui vous paſſent par
l'imagination. Tout paroiſt jaune à
des yeux qui ont la jauniſſe : & rouge
à ceux qui regardent par vn verre qui
eſt peint en rouge. Vne perſonne
craintiue qui marche la nuict, croid
ſouuent voir des eſprits & des ſoldats
ennemis , quoy qu'il n'y ait rien de
reel ſinon ſa frayeur.
malade, & ne croyez point facilement
aux phantoſmes qui vous paſſent par
l'imagination. Tout paroiſt jaune à
des yeux qui ont la jauniſſe : & rouge
à ceux qui regardent par vn verre qui
eſt peint en rouge. Vne perſonne
craintiue qui marche la nuict, croid
ſouuent voir des eſprits & des ſoldats
ennemis , quoy qu'il n'y ait rien de
reel ſinon ſa frayeur.
IV. Peſez ſerieuſement les grands
malheurs qui trauerſeront toute voſtre
famille : ſi vous vous laiſſez poſſeder &
gourmander par cette noire Paſſion,
qui augmente touſiours auec le temps;
qui fait tous les iours vne nuée plus
eſpaiſſe, & qui enfin éclate ſouuent
conſument & perdent tout. L'hiſtoi-
re de ſainct Iulien l'Hoſpitalier vous
doit tenir dans la reſerue, meſme aux
crimes, qui ſemblent tous euidens.
malheurs qui trauerſeront toute voſtre
famille : ſi vous vous laiſſez poſſeder &
gourmander par cette noire Paſſion,
qui augmente touſiours auec le temps;
qui fait tous les iours vne nuée plus
eſpaiſſe, & qui enfin éclate ſouuent
137
des perſonnes Mariées.
en tonnerres & en foudres , quiconſument & perdent tout. L'hiſtoi-
re de ſainct Iulien l'Hoſpitalier vous
doit tenir dans la reſerue, meſme aux
crimes, qui ſemblent tous euidens.
En ſon abſence, ſon pere & ſa me-
S. An-
ton.
Bollãd.
in I an.112 re vinrent en ſon logis pour le viſiter
par honneur. Sa femme leur témoi-
gna toute la charité poſſible, & par ci-
uilité les fit coucher dans ſon propre
lict. Le lendemain elle s'en va à l'E-
gliſe, laiſſant ces bonnes gens haraſſez
encore au lict. Iulien arriue ſur ces
entrefaites , & à l'entrée de ſa maiſon
court à ſon lict , pour donner le bon
iour à ſa femme. Il fut fort ſurpris d'y
voir vn homme & vne femme , & in-
continent,la chambre eſtant dans l'ob-
ſcurité , il ſe perſuade que c'eſtoit ſa
femme auec vn adultere. Piqué d'vne
furieuſe jalouſie , & tranſporté de co-
lere, il les tuë tous deux ſur le champ,
& ſort de ſon logs tout hors de ſoy. A
la ſortie il rencontre dans la ruë ſa
femme qui retournoit de ſes deuo-
tions. Iamais homme ne fut plus eſton-
né. Il s'informe de tout , & apprend
ſon pere & ſa mere. Ce malheur luy
cauſa des douleurs inconceuables :
mais elles ne rendirent point la vie aux
morts. Il ſe reſolut à vne tres-auſtere
penitence. A cét effect il fit baſtir vn
Hoſpital , & y ſeruit les pauures iuſ-
ques à la mort. Sa femme ne ſe vou-
lut point ſeparer de luy , & luy tint
touſiours compagnie dans ſes bonnes
œuures. Les auſteritez de Iulien fu-
rent ſi heroïques , & ſa Charité ſi em-
braſée , qu'vn Ange luy apparuſt , &
l'aſſeura que ſon peché luy eſtoit par-
donné.
S. An-
ton.
Bollãd.
in I an.112 re vinrent en ſon logis pour le viſiter
par honneur. Sa femme leur témoi-
gna toute la charité poſſible, & par ci-
uilité les fit coucher dans ſon propre
lict. Le lendemain elle s'en va à l'E-
gliſe, laiſſant ces bonnes gens haraſſez
encore au lict. Iulien arriue ſur ces
entrefaites , & à l'entrée de ſa maiſon
court à ſon lict , pour donner le bon
iour à ſa femme. Il fut fort ſurpris d'y
voir vn homme & vne femme , & in-
continent,la chambre eſtant dans l'ob-
ſcurité , il ſe perſuade que c'eſtoit ſa
femme auec vn adultere. Piqué d'vne
furieuſe jalouſie , & tranſporté de co-
lere, il les tuë tous deux ſur le champ,
& ſort de ſon logs tout hors de ſoy. A
la ſortie il rencontre dans la ruë ſa
femme qui retournoit de ſes deuo-
tions. Iamais homme ne fut plus eſton-
né. Il s'informe de tout , & apprend
138
La Direction & la Conſolation
qu'il auoit malheureuſement maſſacréſon pere & ſa mere. Ce malheur luy
cauſa des douleurs inconceuables :
mais elles ne rendirent point la vie aux
morts. Il ſe reſolut à vne tres-auſtere
penitence. A cét effect il fit baſtir vn
Hoſpital , & y ſeruit les pauures iuſ-
ques à la mort. Sa femme ne ſe vou-
lut point ſeparer de luy , & luy tint
touſiours compagnie dans ſes bonnes
œuures. Les auſteritez de Iulien fu-
rent ſi heroïques , & ſa Charité ſi em-
braſée , qu'vn Ange luy apparuſt , &
l'aſſeura que ſon peché luy eſtoit par-
donné.
Vous voyez dans quelles miſeres
precipite la trop grande credulité & la
precipitation. Neantmoins, qui n'au-
roit eſté ſurpris dans cét accident ſi
palpable, ou le crime ſembloit ſe tou-
cher au doigt. Sans doute tous y ſe-
roient trompez : ſinon ceux qui ſup-
poſent que pluſieurs choſes ſe trou-
uent fauſſes auec le temps, qui paroiſ-
ſoient à nos yeux malades, auſſi claires
que le Soleil dans ſon midy.
precipite la trop grande credulité & la
precipitation. Neantmoins, qui n'au-
roit eſté ſurpris dans cét accident ſi
palpable, ou le crime ſembloit ſe tou-
cher au doigt. Sans doute tous y ſe-
roient trompez : ſinon ceux qui ſup-
poſent que pluſieurs choſes ſe trou-
uent fauſſes auec le temps, qui paroiſ-
ſoient à nos yeux malades, auſſi claires
que le Soleil dans ſon midy.
I'adjouſteray vn aduis d'impor-
encore engagez dans le Mariage. S'ils
ſont déja auancez en âge , ils ne doi-
uent iamais prendre pour femme vne
jeune fille. La jeuneſſe ne peut s'em-
peſcher de certaines gaillardiſes , en-
tremeſlées de legereté, & cherche pour
l'ordinaire ſes ſemblables , pour vn
peu rire plus librement. Vn vieillard
qui eſt déja chagrin , & qui ſçait plu-
ſieurs cheutes des vnes & des autres
interprete tout en mal. Il croit facile-
ment qu'il eſt mépriſé , n'ayant pas
tous les attraits & toutes les mignardi-
ſes qu'vne ieune femme deſireroit.
Que s'il vient à faire éclater ſes ſoup-
çons, toute la maiſon ſe renuerſe, &
ſe change en vne continuelle priſon,
remplie de pleurs, de querelles, & de
maledictions.
139
des perſonnes Mariées.
tance , pour ceux qui ne ſont pointencore engagez dans le Mariage. S'ils
ſont déja auancez en âge , ils ne doi-
uent iamais prendre pour femme vne
jeune fille. La jeuneſſe ne peut s'em-
peſcher de certaines gaillardiſes , en-
tremeſlées de legereté, & cherche pour
l'ordinaire ſes ſemblables , pour vn
peu rire plus librement. Vn vieillard
qui eſt déja chagrin , & qui ſçait plu-
ſieurs cheutes des vnes & des autres
interprete tout en mal. Il croit facile-
ment qu'il eſt mépriſé , n'ayant pas
tous les attraits & toutes les mignardi-
ſes qu'vne ieune femme deſireroit.
Que s'il vient à faire éclater ſes ſoup-
çons, toute la maiſon ſe renuerſe, &
ſe change en vne continuelle priſon,
remplie de pleurs, de querelles, & de
maledictions.
Il n'y a toutefois aucune Regle ſi
generale qui n'ait ſes exceptions. On
trouue de vertueuſes filles qui ont la
maturité de la vieilleſſe : & des vieil-
lards, qui par l'excellence de leur na-
turel, de leur accortiſe, & de leur ver-
tu, trouuent plus de joye & de diuer-
feroit vn ieune mary. C'eſt donc à la
prudence de ne rien precipiter, & de
bien conſierer le choix d'vn bien ou
d'vn mal, qui doit durer toute la vie.
generale qui n'ait ſes exceptions. On
trouue de vertueuſes filles qui ont la
maturité de la vieilleſſe : & des vieil-
lards, qui par l'excellence de leur na-
turel, de leur accortiſe, & de leur ver-
tu, trouuent plus de joye & de diuer-
140
La Direction & la Conſolation
tiſſement à vne jeune femme, que neferoit vn ieune mary. C'eſt donc à la
prudence de ne rien precipiter, & de
bien conſierer le choix d'vn bien ou
d'vn mal, qui doit durer toute la vie.
bandeau décoratif
CHAPITRE IV.
§. I. Aduis pour la Femme, à qui
§. II.
Aduis au mary desbauché,
De ſin-
gular.
Cleric.
phor. l.
I.c.37.
CHAPITRE IV.
La Conſolation & la Direction d'vne
Femme, qui a vn Mary débauché
& peu chaſte.
LA plus ſenſible douleur que puiſ-
ſe auoir vne femme genereuſe &
vertueuſe, c'eſt de voir ſon mary dans
le deſordre de l'impudicité, qui perd
ſon corps & ſon ame, qui le rend inu-
tile aux affaires ; qui le fait prodigue
& diſſipateur du bien de ſes enfans, le
joüet d'vne ville, & le valet d'vne per-
duë ; pour en ſuite, rapporter dans ſa
maiſon des maladies honteuſes & con-
tagieuſes , & les communiquer aux
perſonnes innocentes.
ſe auoir vne femme genereuſe &
vertueuſe, c'eſt de voir ſon mary dans
le deſordre de l'impudicité, qui perd
ſon corps & ſon ame, qui le rend inu-
tile aux affaires ; qui le fait prodigue
& diſſipateur du bien de ſes enfans, le
joüet d'vne ville, & le valet d'vne per-
duë ; pour en ſuite, rapporter dans ſa
maiſon des maladies honteuſes & con-
tagieuſes , & les communiquer aux
perſonnes innocentes.
I'aduoüe qu'il eſt tres difficile de
conſoler & de diriger vne femme qui
neantmoins ce que nous pourrons.
conſoler & de diriger vne femme qui
141
des perſonnes Mariées.
eſt tombée dans ce malheur. Faiſonsneantmoins ce que nous pourrons.
§. I. Aduis pour la Femme, à qui
ſon Mary manque de fidelité, en
ce qui touche le Mariage.
I. Conſiderez auec attention quel-
le eſt la veritable cauſe de la licence ef-
frenée que ſe donne voſtre mary. S'il
eſt celuy qui ſollicite , ou s'il eſt pouſ-
ſé par quelques effrontées. Si la com-
pagnie de quelque éuenté l'emporte,
ou s'il eſt le premier à exciter les au-
tres. Si l'ardeur de l'âge le precipite :
ou ſi vne habitude inueterée le gour-
mande. Si particulierement vous n'e-
ſtes point l'occaſion de cette liberté,
en luy refuſant ce que vous luy deuez;
en le rebutãt par vos diſcours: en vous
plaignant trop de ſa conduite; ne vous
accommodant point à ſes humeurs ;
vous mettant ſouuent en colere contre
luy, & faiſant d'autres choſes deſagrea-
bles ; qui, comme parle Dieu-meſme
en l'Eſcriture , le chaſſent de voſtre lo-
gis , ainſi que feroit la fumée. Oſtez
la cauſe vous oſterez l'effect. Trauail-
lez-y par vous-meſme, par vos parens,
ſieur voſtre Curé , ou par quelques
bons Religieux.
le eſt la veritable cauſe de la licence ef-
frenée que ſe donne voſtre mary. S'il
eſt celuy qui ſollicite , ou s'il eſt pouſ-
ſé par quelques effrontées. Si la com-
pagnie de quelque éuenté l'emporte,
ou s'il eſt le premier à exciter les au-
tres. Si l'ardeur de l'âge le precipite :
ou ſi vne habitude inueterée le gour-
mande. Si particulierement vous n'e-
ſtes point l'occaſion de cette liberté,
en luy refuſant ce que vous luy deuez;
en le rebutãt par vos diſcours: en vous
plaignant trop de ſa conduite; ne vous
accommodant point à ſes humeurs ;
vous mettant ſouuent en colere contre
luy, & faiſant d'autres choſes deſagrea-
bles ; qui, comme parle Dieu-meſme
en l'Eſcriture , le chaſſent de voſtre lo-
gis , ainſi que feroit la fumée. Oſtez
la cauſe vous oſterez l'effect. Trauail-
lez-y par vous-meſme, par vos parens,
142
La Direction & la Conſolation
par vos voiſins, par vos amis, par mon-ſieur voſtre Curé , ou par quelques
bons Religieux.
II. Interpoſez-y le ſecours du Ciel.
Car perſonne ne peut eſtre chaſte ſans
vne particuliere grace de Dieu. Sans
la pluye, la terre ne peut produire au-
cun bon fruict, ny l'homme ſans la
grace.
Car perſonne ne peut eſtre chaſte ſans
vne particuliere grace de Dieu. Sans
la pluye, la terre ne peut produire au-
cun bon fruict, ny l'homme ſans la
grace.
Caſſien en la Conference de Moï-
ſe Abbé113, dit. Qu'il eſt neceſſaire que
l'ame ſoit attaquée par l'eſprit de for-
nication : iuſques à ce qu'elle recon-
noiſſe, que ces batailles-là ſont au-deſ-
ſus de ſes forces : & qu'elle ne peut
obtenir la victoire par aucun ſoin , ny
par aucun trauail humain : ſi Dieu ne
l'aſſiſte d'vn ſecours tres-ſingulier &
tres-efficace.
ſe Abbé113, dit. Qu'il eſt neceſſaire que
l'ame ſoit attaquée par l'eſprit de for-
nication : iuſques à ce qu'elle recon-
noiſſe, que ces batailles-là ſont au-deſ-
ſus de ſes forces : & qu'elle ne peut
obtenir la victoire par aucun ſoin , ny
par aucun trauail humain : ſi Dieu ne
l'aſſiſte d'vn ſecours tres-ſingulier &
tres-efficace.
III. Compatiſſez à la violence
d'vne paſſion, qui dompte les plus va-
leureux ſoldats de Ieſus-Chriſt , s'ils
ne ſont continuellement ſur leurs gar-
des & ſous les armes, comme on a veu
auec horreur en ſainct Victorin , en
ſainct Iacques l'Hermite , & en plu-
ſieurs autres.
d'vne paſſion, qui dompte les plus va-
leureux ſoldats de Ieſus-Chriſt , s'ils
ne ſont continuellement ſur leurs gar-
des & ſous les armes, comme on a veu
auec horreur en ſainct Victorin , en
ſainct Iacques l'Hermite , & en plu-
ſieurs autres.
143
des perſonnes Mariées.
Sainct Hieroſme eſcrit, Que la lu-
xure ploye meſmes les eſprits , qui
ſont plus forts que le fer , & qui
ſemblent plus impenetrables à ſes
attaques.
xure ploye meſmes les eſprits , qui
ſont plus forts que le fer , & qui
ſemblent plus impenetrables à ſes
attaques.
Sainct Auguſtin ſe lamente à la
De ſin-
gularet
Cler. veuë de cheutes deplorables.
De ſin-
gularet
Cler. veuë de cheutes deplorables.
Com-s'eſcrie-t'il ,
bien d'Eueſques,
& com-.
bien de Preſtres d'vne ſaincte & tres-
eminente, apres des victoires tres-ſigna-
lees pour la confeſſion de la Foy, apres
auoir fait des miracles admirables, ont
fait naufrage dans ce gouffre; lors qu'ils
ſe ſont expoſez aux perils des flots dans
vn nauire ſi freſle qu'eſt le corps hu-
main ! Combien de Lions , & combien
inuincibles a ſurmonté vne delicate foi-
bleſſe. Ie veux dire l'impudicité , qui
eſtant vile & miſerable , fait ſa proye
des plus grandes Sainctes, & des hom-
mes les plus renommez
Samſon , Dauid & Salomon en
Eccli.
19.2. ſont de funeſtes exemples.
3. Reg.
11.3.114 auoit plus de ſageſſe que tous les Prin-
ces de la terre, a eſté ſi fort abruti par
cens femmes , & trois cens Concubi-
nes , qui le gourmanderent ſi impe-
rieuſement, quelles le firent ſacrifier à
leur idoles , & leur baſtir des autels &
des temples.
Eccli.
19.2. ſont de funeſtes exemples.
Le vin &, dit Dieu,
les femmes
font tomber les. Salomon, qui
ſages dans l' Apoſtaſie
3. Reg.
11.3.114 auoit plus de ſageſſe que tous les Prin-
ces de la terre, a eſté ſi fort abruti par
144
La Direction & la Conſolation
cette violente Paſſion, qu'il a eu ſeptcens femmes , & trois cens Concubi-
nes , qui le gourmanderent ſi impe-
rieuſement, quelles le firent ſacrifier à
leur idoles , & leur baſtir des autels &
des temples.
Il ſort du feu des os du Lion ſi on
les entrechoque. Et Portius Licinius
dit , Que l'homme & l'amour ne ſont
point enflammez : mais qu'ils ſont le
feu & la flamme meſme. Adonis , le
Dieu des voluptueux , eſtoit appellé
par les anciens Hebreux, Thammuz,
qui ſignifie , incendie , embraſe-
ment.
les entrechoque. Et Portius Licinius
dit , Que l'homme & l'amour ne ſont
point enflammez : mais qu'ils ſont le
feu & la flamme meſme. Adonis , le
Dieu des voluptueux , eſtoit appellé
par les anciens Hebreux, Thammuz,
qui ſignifie , incendie , embraſe-
ment.
Vn certain Duc de Veniſe prit
pour ſon Symbole vne Aigle , qui
eſtoit morduë à la poitrine par vn ſer-
pent. Il y adjouſta ce mot, Semper ar-
dentius , pour declarer que l'Amour,
dont vne femmelette l'auoit bleſſé,
gliſſoit touſiours de plus en plus le
venin dans ſes veines , & les em-
brazoit.
pour ſon Symbole vne Aigle , qui
eſtoit morduë à la poitrine par vn ſer-
pent. Il y adjouſta ce mot, Semper ar-
dentius , pour declarer que l'Amour,
dont vne femmelette l'auoit bleſſé,
gliſſoit touſiours de plus en plus le
venin dans ſes veines , & les em-
brazoit.
Et de fait , ſainct Gregoire dit,
In Mo-
ral. qu'auſſi-toſt que le ſerpent infernal
de la luxure a ietté ſa teſte dans vne
bonne penſée.
In Mo-
ral. qu'auſſi-toſt que le ſerpent infernal
de la luxure a ietté ſa teſte dans vne
ame,
145
des perſonnes Mariées.
ame, à peine luy permet-il d'auoir vnebonne penſée.
Ce vice a des deſirs.
viſqueux & attachans : Car de la ſug-
geſtion ſuit la penſée, de la penſée ſuit
l'affection, de l'affection, la delectation,
de la delectation le conſentement , du
conſentement l'action , de l'action la
couſtume, de la couſtume, le deſeſpoir,
du deſeſpoir la defenſe du peché , de
cette defenſe la vanterie de ſon crime,
de la vanterie la damnation
IV. Ne deſeſperez iamais de l'a-
mendement de voſtre mary. Conti-
nuez vos prieres, faites dire des Meſſes,
augmentez vos aumoſnes , ſpeciale-
ment aux priſonniers , afin que Dieu
rompe les chaiſnes qui l'attachent. Il
n'eſt nulle chaiſne de fer ſi forte ,
que le temps & l'induſtrie115 ne rom-
pent.
mendement de voſtre mary. Conti-
nuez vos prieres, faites dire des Meſſes,
augmentez vos aumoſnes , ſpeciale-
ment aux priſonniers , afin que Dieu
rompe les chaiſnes qui l'attachent. Il
n'eſt nulle chaiſne de fer ſi forte ,
que le temps & l'induſtrie115 ne rom-
pent.
Sainct Auguſtin a eſté engagé
dans ce malheur , peut-eſtre plus
long-temps que celuy dont vous dé-
plorez la captiuité ; & aujourd'huy il
eſt l'vn des plus purs & des plus eſtin-
Lib.
Confeſ-
8.c.5. celans Aſtres du Firmament.
dans ce malheur , peut-eſtre plus
long-temps que celuy dont vous dé-
plorez la captiuité ; & aujourd'huy il
eſt l'vn des plus purs & des plus eſtin-
Lib.
Confeſ-
8.c.5. celans Aſtres du Firmament.
Ie ſouſpi-, dit-il,
rois
lié non par le fer d'autruy,.
G 146 La Direction & la Conſolation mais par ma propre volonté, qui eſtoit
plus dure que le fer. Mon ennemy
tenoit ma volonté , & m'auoit fait vne
chaiſne dont il m'auoit lié. Car de la
volonté peruerſe ſe forme vn deſir dére-
glé , & de ce deſir déreglé ſe forme vne
couſtume , & ne reſiſtant point à la
couſtume , on tombe quaſi dans la ne-
ceſſité de mal faire
Ce Sainct perſonnage s'eſt neant-
moins retiré heureuſement de cét em-
baras. Vous pouuez donc raiſonna-
blement eſperer que par vos prieres,
par les aduis de vos amis & de vos pa-
rens , & ſur tout par vn puiſſant ſe-
cours du Ciel , voſtre mary ſe recon-
noiſtra , & la fougue de l'âge eſtant
paſſée, vous contentera d'autant plus,
que plus il vous deſoblige.
moins retiré heureuſement de cét em-
baras. Vous pouuez donc raiſonna-
blement eſperer que par vos prieres,
par les aduis de vos amis & de vos pa-
rens , & ſur tout par vn puiſſant ſe-
cours du Ciel , voſtre mary ſe recon-
noiſtra , & la fougue de l'âge eſtant
paſſée, vous contentera d'autant plus,
que plus il vous deſoblige.
V. Ne le tourmentez point auec
importunité pour ce ſujet, quoy que
tres-juſte. Prenez voſtre temps lors
qu'il eſt en bonne humeur. Voſtre
prudence & voſtre patience ſurmon-
teront enfin ſon obſtination. Saincte
Elizabeth, Reine de Portugal , con-
uertit le Roy ſon mary par ſa charité
meſme les baſtards qu'il auoit eu par
ſes amourettes. A la fin cette bonté ſi
aimable & ſi aimante , toucha le cœur
du Prince , qui ſe laiſſa vaincre par la
vertu de ſa femme.
importunité pour ce ſujet, quoy que
tres-juſte. Prenez voſtre temps lors
qu'il eſt en bonne humeur. Voſtre
prudence & voſtre patience ſurmon-
teront enfin ſon obſtination. Saincte
Elizabeth, Reine de Portugal , con-
uertit le Roy ſon mary par ſa charité
147
des perſonnes Mariées.
& par ſa longanimité. Elle careſſoitmeſme les baſtards qu'il auoit eu par
ſes amourettes. A la fin cette bonté ſi
aimable & ſi aimante , toucha le cœur
du Prince , qui ſe laiſſa vaincre par la
vertu de ſa femme.
Zonar.
Liuia, femme de l'Empereur Au-
guſte, eſtant interrogée par quelle in-
duſtrie elle auoit gagné le cœur de ce
puiſſant Monarque : Elle répondit. En
m'eſtudiant de connoiſtre tout ce qui
luy pouuoit donner de la complaiſan-
ce, le faiſant auec promptitude & auec
allegreſſe , & diſſimulant ſes amours
eſtrangeres, comme ſi j'euſſe eſté aueu-
gle , ſans auoir aucune curioſité ſur
ſes actions, pour en apprendre les par-
ticularitez.
guſte, eſtant interrogée par quelle in-
duſtrie elle auoit gagné le cœur de ce
puiſſant Monarque : Elle répondit. En
m'eſtudiant de connoiſtre tout ce qui
luy pouuoit donner de la complaiſan-
ce, le faiſant auec promptitude & auec
allegreſſe , & diſſimulant ſes amours
eſtrangeres, comme ſi j'euſſe eſté aueu-
gle , ſans auoir aucune curioſité ſur
ſes actions, pour en apprendre les par-
ticularitez.
Ce conſeil eſt tres-difficile: mais de
deux maux il faut touſiours choiſir le
moindre , ſpecialement s'il ſe peut
tourner en bien.
deux maux il faut touſiours choiſir le
moindre , ſpecialement s'il ſe peut
tourner en bien.
VI. Meditez qu'anciennement ,
lors que la pluralité des femmes eſtoit
permiſe , & qu'vn homme en auoit
trois ou quatre , & quelquefois dix &
vingt , & beaucoup davantage : La
les ménages bien reglez, eſtoit pire
que la voſtre.
lors que la pluralité des femmes eſtoit
permiſe , & qu'vn homme en auoit
trois ou quatre , & quelquefois dix &
vingt , & beaucoup davantage : La
G ij
148
La Direction & la Conſolation
condition des femmes, meſme dansles ménages bien reglez, eſtoit pire
que la voſtre.
Il eſt veritable que l'offenſe de
Dieu vous doit eſtre plus ſenſible.
Mais ſondez voſtre cœur116, & voyez ſi
la gloire de Dieu eſt ſon motif, ou vos
propres intereſts. Dieu attend auec
patience la conuerſion de voſtre mary,
& ſouffre les injures qu'il luy fait, at-
tendant ſon temps pour le tirer abſo-
lument à luy. Ne vous rendez point
plus difficile , que le Createur & le
ſouuerain Seigneur du Ciel & de la
Terre.
Dieu vous doit eſtre plus ſenſible.
Mais ſondez voſtre cœur116, & voyez ſi
la gloire de Dieu eſt ſon motif, ou vos
propres intereſts. Dieu attend auec
patience la conuerſion de voſtre mary,
& ſouffre les injures qu'il luy fait, at-
tendant ſon temps pour le tirer abſo-
lument à luy. Ne vous rendez point
plus difficile , que le Createur & le
ſouuerain Seigneur du Ciel & de la
Terre.
§. II.
Aduis au mary desbauché,
& peu chaſte.
I. N'allumez point vn braſier que
vous ne pourrez eſteindre. La luxure
eſt vn feu allumé par les furies , qui
ne peut eſtre eſteint par toutes les eaux
de la terre, ny par toutes les forces hu-
maines.
vous ne pourrez eſteindre. La luxure
eſt vn feu allumé par les furies , qui
ne peut eſtre eſteint par toutes les eaux
de la terre, ny par toutes les forces hu-
maines.
Sainct Hieroſme le déplore en ces
termes.
termes.
O luxure, dit-il,
feu des en-.
fers, dont la matiere eſt la gourman-
diſe : les flammes, la colere, les eſtin-
149 des perſonnes Mariées. celles, les diſcours déprauez, la fumée,
l'infamie, les cendres, l'impureté, & la
fin la torture
De là vient que le demon a de la
puiſſance ſur ceux qui bruſlent de ſon
Tob.6
17. feu. L'Archange Raphaël dit ,
maris de Sara femme vertueuſe , &
fille de Raguel homme craignant
Dieu.
puiſſance ſur ceux qui bruſlent de ſon
Tob.6
17. feu. L'Archange Raphaël dit ,
Que. Et de fait, il eſtouffa les ſept
cét eſprit tenebreux a vn grand pou-
uoir ſur ceux qui ne cherchent que
leur plaiſir, comme les Mulets & les
Cheuaux qui n'ont point d'entende-
ment
maris de Sara femme vertueuſe , &
fille de Raguel homme craignant
Dieu.
Vn autre diable fit mourir vn ieu-
ne homme , qui vouloit abuſer de
ſaincte Agnés , mais la Saincte le
reſſuſcita : & le conuertit à Ieſus-
Chriſt.
ne homme , qui vouloit abuſer de
ſaincte Agnés , mais la Saincte le
reſſuſcita : & le conuertit à Ieſus-
Chriſt.
II. Craignez que la femme que
vous voyez, & qui vous prouoque au
peché, paroiſſant dans vne beauté qui
vous enchante , ne ſoit vn demon qui
vous trompe ſous cette illuſion. Ils
ſe ſont preſentez ſouuent ſous cette
forme charmante, meſme à des Saincts
tres-purs & tres eſleuez en vertu :
Vvolſtan , & quelquefois en ont fait
tomber dans des abominations preſ-
que incroyables : Comme ſainct Vi-
ctorin , lequel s'abandonna à vn dia-
ble qu'il croyoit eſtre vne femme, dont
il auoit pris la figure. Il tomba paſ-
mé & comme mort ; lors que cét en-
nemy de toute ſaincteté s'éclatant
de rire, ſe fit paroiſtre pour ce qu'il
eſtoit.
vous voyez, & qui vous prouoque au
peché, paroiſſant dans vne beauté qui
vous enchante , ne ſoit vn demon qui
vous trompe ſous cette illuſion. Ils
ſe ſont preſentez ſouuent ſous cette
forme charmante, meſme à des Saincts
tres-purs & tres eſleuez en vertu :
G iij
150
La Direction & la Conſolation
Vita.
comme à ſainct Antoine & à ſainctVvolſtan , & quelquefois en ont fait
tomber dans des abominations preſ-
que incroyables : Comme ſainct Vi-
ctorin , lequel s'abandonna à vn dia-
ble qu'il croyoit eſtre vne femme, dont
il auoit pris la figure. Il tomba paſ-
mé & comme mort ; lors que cét en-
nemy de toute ſaincteté s'éclatant
de rire, ſe fit paroiſtre pour ce qu'il
eſtoit.
III. Souuenez-vous que l'œil de
Dieu veille ſur vous en tout lieu & en
tout temps, & qu'il tien en main ſes
foudres pour vous punir.
Dieu veille ſur vous en tout lieu & en
tout temps, & qu'il tien en main ſes
foudres pour vous punir.
Orphée appelle le Soleil, l'Oeil de
la Iuſtice. Car il découure les actions
des hommes durant le iour. Dieu les
voit, depuis l'Aurore iuſques au ſoir,
& dans les plus eſpaiſſes tenebres de
la nuict.
Lacleſ.
23.28. ſiaſtique,
la Iuſtice. Car il découure les actions
des hommes durant le iour. Dieu les
voit, depuis l'Aurore iuſques au ſoir,
& dans les plus eſpaiſſes tenebres de
la nuict.
Auſſi ſes yeux, dit l'Eccle-
Lacleſ.
23.28. ſiaſtique,
ſont beaucoup plus brillans.
que ceux du Soleil
Ce Dieu de lumiere & de pureté
eſtant vn pur eſprit , & incapable de
toute ſoüilleure, il a vne extreme hor-
reur de la luxure.
De
Doctr.
Chriſt.
eſtant vn pur eſprit , & incapable de
toute ſoüilleure, il a vne extreme hor-
reur de la luxure.
Ce vice, eſcrit ſainct
151
des perſonnes Mariées.
Auguſtin, eſt ennemy de Dieu, & en-
De
Doctr.
Chriſt.
nemy de toutes les vertus. Il perd.
toute la ſubſtance de l'homme, & cha-
toüillant preſentement par vn execra-
ble plaiſir, ne permet point qu'on iette
les yeux ſur la pauureté future
Dieu témoigne l'horreur qu'il a
de cette brutalité par des punitions
exemplaires , qui ſont capables de
faire glacer le ſang dans les veines à vn
eſprit bien-fait ; & à refroidir les
boüillons des Paſſions les plus allu-
mées.
de cette brutalité par des punitions
exemplaires , qui ſont capables de
faire glacer le ſang dans les veines à vn
eſprit bien-fait ; & à refroidir les
boüillons des Paſſions les plus allu-
mées.
Apres quarante ans d'vn penible
exil dans le deſert, les Iſraëlites, peu-
ple choiſi de Dieu entre tous ceux de
l'Vniuers , eſtoient arriuez fort pro-
ches de la terre promiſe, qui eſtoit la
Figure du Paradis. Balac , Roy des
Moabites117, incité par le faux Prophete
Balaan , fit richement orner les plus
belles filles de ſon Royaume , auec
celles du Royaume de Madian, & les
expoſa à leur volonté. Ce peuple char-
nel ſe laiſſa ſurprendre en ces filets, &
offenſa ſon Createur.
exil dans le deſert, les Iſraëlites, peu-
ple choiſi de Dieu entre tous ceux de
l'Vniuers , eſtoient arriuez fort pro-
ches de la terre promiſe, qui eſtoit la
Figure du Paradis. Balac , Roy des
Moabites117, incité par le faux Prophete
Balaan , fit richement orner les plus
belles filles de ſon Royaume , auec
celles du Royaume de Madian, & les
expoſa à leur volonté. Ce peuple char-
nel ſe laiſſa ſurprendre en ces filets, &
offenſa ſon Createur.
Quelle punition en attendez-
des plus remarquables de ſon peuple,
& en tua vingt-quatre mille , & en
ſuite ordonna que l'on mit au fil de
l'eſpée tous les hommes & tous les en-
fans maſles des Madianites , & toutes
les femmes qui auoient eu commerce
auec les hommes , ſans rien du tout
reſeruer que les filles vierges. Que
dites-vous à ce regard ? l'effroy ne
vous ſurprend-il point dans la penſée
de vos crimes ? Soyez certain, ou que
vous vous amanderez bien toſt ou que
vous ſerez grieuement118 chaſſé par la
toute-puiſſante main de Dieu.
G iiij
152
La Direction & la Conſolation
vous. Dieu fit pendre vne quantitédes plus remarquables de ſon peuple,
& en tua vingt-quatre mille , & en
ſuite ordonna que l'on mit au fil de
l'eſpée tous les hommes & tous les en-
fans maſles des Madianites , & toutes
les femmes qui auoient eu commerce
auec les hommes , ſans rien du tout
reſeruer que les filles vierges. Que
dites-vous à ce regard ? l'effroy ne
vous ſurprend-il point dans la penſée
de vos crimes ? Soyez certain, ou que
vous vous amanderez bien toſt ou que
vous ſerez grieuement118 chaſſé par la
toute-puiſſante main de Dieu.
IV. Souuenez-vous de la Foy que
vous auez iurée au pied des Autels, &
à la face de toute l'Egliſe. Vous ſça-
uez que les parjures ſont l'execration
de toutes les nations de la terre , &
que le Ciel les a foudroyez ſouuente-
Impri-
mé au
Pont à
Mouſ-
ſon ,
chez
Guille-
ré. fois , les puniſſant dans vne extreme
ſeuerité. Vous en auez pluſieurs exemp-
ples , dans vn Traicté que i'ay compo-
ſé contre les blaſphemateurs & contre
les jureurs. Ie l'ay inſcript :
vous auez iurée au pied des Autels, &
à la face de toute l'Egliſe. Vous ſça-
uez que les parjures ſont l'execration
de toutes les nations de la terre , &
que le Ciel les a foudroyez ſouuente-
Impri-
mé au
Pont à
Mouſ-
ſon ,
chez
Guille-
ré. fois , les puniſſant dans vne extreme
ſeuerité. Vous en auez pluſieurs exemp-
ples , dans vn Traicté que i'ay compo-
ſé contre les blaſphemateurs & contre
les jureurs. Ie l'ay inſcript :
Dieu ven-.
geur & ennemy des Blaſphemes , des
153 des perſonnes Mariées. Iuremens , des Maledictions , & des
Imprecations
V. Meditez , que l'Adultere eſt vn
peché beaucoup plus notable qu'vne
ſimple fornication , que tous les Roy-
aumes & toutes les Republiques en
ont eu vne tres-grande auerſion , &
que pluſieurs ont condamné à mort
ceux qui ſe ſont ſalis de ce crime abo-
minable qui trouble les familles , les
Soldat
gene-
reux ,
impri-
mé au
Pont. Villes & les Royaumes. Liſez ce que
i'en rapporte au Liure que i'ay fait
pour les Soldats.
peché beaucoup plus notable qu'vne
ſimple fornication , que tous les Roy-
aumes & toutes les Republiques en
ont eu vne tres-grande auerſion , &
que pluſieurs ont condamné à mort
ceux qui ſe ſont ſalis de ce crime abo-
minable qui trouble les familles , les
Soldat
gene-
reux ,
impri-
mé au
Pont. Villes & les Royaumes. Liſez ce que
i'en rapporte au Liure que i'ay fait
pour les Soldats.
VI. Penſez qu'apres vn peu de miel
acheté bien cherement , vous trouu-
erez beaucoup de fiel dans vos delices
Eccleſ.
7.27. pretenduës.
en pouuoit parler comme ſçauant , en
ayant eſprouué toutes les mignardiſes
& toutes les delices.
acheté bien cherement , vous trouu-
erez beaucoup de fiel dans vos delices
Eccleſ.
7.27. pretenduës.
I'ay trouué, dit Salomon,
la femme plus amere que la mort. Elle. Ce Prince
eſt vn lacet des chaſſeurs , & ſon cœur119
eſt vne naſſe de peſcheurs
en pouuoit parler comme ſçauant , en
ayant eſprouué toutes les mignardiſes
& toutes les delices.
In
epiſt.120 O ! s'eſcrie ſainct Hieroſme , que
le fruict de la luxure eſt amer , & dé-
gouſtant. Il a plus d'amertume que
le fiel, & eſt plus cruel que le glaiue.
epiſt.120 O ! s'eſcrie ſainct Hieroſme , que
le fruict de la luxure eſt amer , & dé-
gouſtant. Il a plus d'amertume que
le fiel, & eſt plus cruel que le glaiue.
G v
154
La Direction & la Conſolation
La luxure, dit ſainct Ambroiſe, eſt
De
Abel et
Cain. vn cruel aiguillon des vices , qui ne
donne aucun repos à l'eſprit. Il boult
la nuict , & eſt touſiours aux recher-
ches douloureuſes durant le iour.
De
Abel et
Cain. vn cruel aiguillon des vices , qui ne
donne aucun repos à l'eſprit. Il boult
la nuict , & eſt touſiours aux recher-
ches douloureuſes durant le iour.
Boëce eſcrit, que l'aiguillon de la
De
Schol.
diſcipl. luxure d'vne femme débauchée eſt l'ai-
guillon d'vn Scorpion. Il pique à
l'improuiſte , & cauſe la mort , lors
qu'on y penſe le moins.
De
Schol.
diſcipl. luxure d'vne femme débauchée eſt l'ai-
guillon d'vn Scorpion. Il pique à
l'improuiſte , & cauſe la mort , lors
qu'on y penſe le moins.
VII. Iettez les yeux ſur voſtre
femme , ſur vos enfans , ſur vos ſer-
uiteurs, ſur vos ſeruantes, ſur vos pa-
rens, & ſur toute voſtre famille , que
vous affligez & que vous ruinez.
femme , ſur vos enfans , ſur vos ſer-
uiteurs, ſur vos ſeruantes, ſur vos pa-
rens, & ſur toute voſtre famille , que
vous affligez & que vous ruinez.
Les Docteurs des Hebreux diſent:
Que lors que le Roy Salomon s'aban-
donna à l'impudicité, il fut depoſſedé
de ſon Throſne par Aſmodée. Et que
ce demon qui preſide à l'impureté ſe
portoit pour Roy , & paſſoit pour tel
dans l'eſprit du peuple , trompé par
l'illuſion de ſes ornemens. Il donnoit
tous les ordres, & ſe faiſoit obeïr exa-
ctement & ponctuellement.
Que lors que le Roy Salomon s'aban-
donna à l'impudicité, il fut depoſſedé
de ſon Throſne par Aſmodée. Et que
ce demon qui preſide à l'impureté ſe
portoit pour Roy , & paſſoit pour tel
dans l'eſprit du peuple , trompé par
l'illuſion de ſes ornemens. Il donnoit
tous les ordres, & ſe faiſoit obeïr exa-
ctement & ponctuellement.
Si ces Rabins ne parlent que par
Symbole , il faut renuoyer leur hiſtoi-
veritable , qu'où ſe rencontre la lu-
bricité , le diable domine & fait d'é-
tranges rauages.
Symbole , il faut renuoyer leur hiſtoi-
155
des perſonnes Mariées.
re au nombre des fables. Mais il eſtveritable , qu'où ſe rencontre la lu-
bricité , le diable domine & fait d'é-
tranges rauages.
Philopator Roy d'Egypte, paſſoit
Iuſtin.
l. 29.
& 30 les nuicts entieres dans ſes ordures
auec vne vilaine , nommée Agatho-
clée, & les iours en des feſtins dére-
glez. Auſſi tua t'il ſon pere, ſa mere,
ſa ſœur, & ſa femme.
Iuſtin.
l. 29.
& 30 les nuicts entieres dans ſes ordures
auec vne vilaine , nommée Agatho-
clée, & les iours en des feſtins dére-
glez. Auſſi tua t'il ſon pere, ſa mere,
ſa ſœur, & ſa femme.
VIII. Ne craignez - vous point
que voſtre femme vous imite , & que
vos enfans ſuiuent vos pas? leur con-
ſeilleriez-vous , & leur permettriez-
vous ce que vous faites ?
que voſtre femme vous imite , & que
vos enfans ſuiuent vos pas? leur con-
ſeilleriez-vous , & leur permettriez-
vous ce que vous faites ?
Mais auec quelle raiſon pourriez-
vous les punir, en ce que vous leur en-
ſeignez , & à quoy vous les pouſſez,
par vos deſordres & déreglemens.
vous les punir, en ce que vous leur en-
ſeignez , & à quoy vous les pouſſez,
par vos deſordres & déreglemens.
Comme vn Roy qui ſe plaiſt aux
ſciences, ou à la Muſique, ou à quel-
que art particulier, fait pluſieurs hom-
mes doctes , excellens Muſiciens , &
bons Artiſans : & vn qui eſt addonné
au jeu & à l'auarice , les fait joüeurs
& concuſſionnaires. De meſme vn
mary voluptueux , rend vne femme
lupté. Et vn qui eſt ſobre & chaſte,
leur perſuade la ſobrieté & la cha-
ſteté.
ſciences, ou à la Muſique, ou à quel-
que art particulier, fait pluſieurs hom-
mes doctes , excellens Muſiciens , &
bons Artiſans : & vn qui eſt addonné
au jeu & à l'auarice , les fait joüeurs
& concuſſionnaires. De meſme vn
mary voluptueux , rend vne femme
G vj
156
La Direction & la Conſolation
& des enfans amateurs de la vo-lupté. Et vn qui eſt ſobre & chaſte,
leur perſuade la ſobrieté & la cha-
ſteté.
IX. Ouurez les yeux , & con-
templez la ſplendeur des ames pures
& chaſtes.
Cyprien,
De bo-
no vi-
duit. 121
templez la ſplendeur des ames pures
& chaſtes.
La Chaſteté, dit ſainct
Cyprien,
eſt l'honneur des corps, l'or-
De bo-
no vi-
duit. 121
nement des mœurs , la ſaincteté des.
ſexes, le lieu de la pudeur , la paix
de la maiſon , & la ſource de la
concorde
X. Si vous ne vous amendez, la lu-
xure vous aueuglera & rendra inutile
à tout bien : & meſme aux affaires de
voſtre meſnage. Le Roy Sedecias fut
Hier.
in E-
zech. aueuglé en Reblata , ou Deblata , ce
que ſainct Hieroſme accommode à
noſtre propos.122 Deblata ſignifie vn ca-
bat123 de figues.
xure vous aueuglera & rendra inutile
à tout bien : & meſme aux affaires de
voſtre meſnage. Le Roy Sedecias fut
Hier.
in E-
zech. aueuglé en Reblata , ou Deblata , ce
que ſainct Hieroſme accommode à
noſtre propos.122 Deblata ſignifie vn ca-
bat123 de figues.
Apres vne feinte dou-, eſcrit ce Sainct,
ceur
les luxurieux.
ſentent l'amertume hors de la terre de
promeſſe. Le Miel coule des levres de
la femme débordée : Il contente & rem-
plit pour vn temps la bouche de ceux
qui en gouſtent. Mais en ſuite , il ſe
trouue plus amer que le fiel, & que les
157 des perſonnes Mariées. figues ameres que le Prophete Ezechiel
apperceut
XI. Ne voyez-vous pas que par
vos débauches, vous vous rendez ridi-
cule à vne ville entiere , qui vous void
traiſner par vne coquine , & faire à ſon
gré des actions baſſes & indignes de la
nobleſſe de voſtre eſprit & de voſtre
Prou.
7. 12. naiſſance.
ſage des hommes124,
vos débauches, vous vous rendez ridi-
cule à vne ville entiere , qui vous void
traiſner par vne coquine , & faire à ſon
gré des actions baſſes & indignes de la
nobleſſe de voſtre eſprit & de voſtre
Prou.
7. 12. naiſſance.
Le jeune Fripon, dit le plus
ſage des hommes124,
ſuit vne femme per-.
duë, comme vn bœuf qui eſt mené à la
boucherie , & comme vn agneau , qui
ſaute follement, dans l'ignorance qu'on
le meine aux liens & à la mort
Pour fort , pour genereux , pour
victorieux , pour ſçauant que vous
ſoyez , vous ne laiſſerez pas d'eſtre
d'autant plus expoſé à la riſée , que
vous abaiſſerez plus voſtre grandeur, &
que vous vous laiſſerez maiſtriſer par
vne perſonne de neant, & ennemie de
Dieu.
victorieux , pour ſçauant que vous
ſoyez , vous ne laiſſerez pas d'eſtre
d'autant plus expoſé à la riſée , que
vous abaiſſerez plus voſtre grandeur, &
que vous vous laiſſerez maiſtriſer par
vne perſonne de neant, & ennemie de
Dieu.
Sainct Chryſoſtome compare ces
aueugles à vn Lion deſarmé.
aueugles à vn Lion deſarmé.
Si quel-, dit-il,
qu'vn
oſtoit les dents & les on-.
gles à vn Lion grand & genereux , il
le rendroit difforme, mépriſable, & vn
158 La Direction & la Conſolation digne objet de la riſée des enfans qui
le pourroient dompter , encore qu'au
parauant il eſtonnaſt vn chacun par
ſon rugiſſement. De meſme les femmes
libertines ſoumettent au pouuoir des de-
mons tous ceux qu'elles ont captiuez,
& les rendent mols , temeraires , impu-
dens, inſenſez, audacieux , importuns,
faineants , effrenez , leur donnent vne
ame baſſe & ſeruile ; les font inciuils
& obſtinez : eux qui auparauant ex-
celloient en force d'eſprit, en douceur &
en toutes les autres vertus
XI.125 Quittez cette infame captiui-
té : Iettez bas vos liens, & ſortez de la
priſon qui vous tient dans les fers,
dãs les tenebres, & dans l'ombre de la
mort. La grace de Dieu ne vous man-
quera iamais ; il n'y faut adjouſter que
voſtre volonté & voſtre conſentement.
Vous auez fait vos chaiſnes, vous les
pouuez rompre.
té : Iettez bas vos liens, & ſortez de la
priſon qui vous tient dans les fers,
dãs les tenebres, & dans l'ombre de la
mort. La grace de Dieu ne vous man-
quera iamais ; il n'y faut adjouſter que
voſtre volonté & voſtre conſentement.
Vous auez fait vos chaiſnes, vous les
pouuez rompre.
Iean Baptiſte à Porta , prit pour
ſon Symbole vn Ver à ſoye, qui ſor-
toit de ſa coquille auec cette inſcri-
ption.
rendu captif par des liens de ſoye que
aiſles prends ma liberté. Il vouloit di-
re , qu'il quittoit les amourettes où il
s'eſtoit embaraſſé.
ſon Symbole vn Ver à ſoye, qui ſor-
toit de ſa coquille auec cette inſcri-
ption.
Et feci , & fregi. Ie me ſuis
rendu captif par des liens de ſoye que
159
des perſonnes Mariées.
i'ay faits , & ie les rompts, & auec desaiſles prends ma liberté. Il vouloit di-
re , qu'il quittoit les amourettes où il
s'eſtoit embaraſſé.
XII. Il n'eſt point queſtion de
ſe tourmenter dans le combat , la vi-
ctoire ſe donne aux fuyards. Pour
I. Cor.
6. 18. cette raiſon, l'Apoſtre126 dit aux Corin-
thiens127,
ſe tourmenter dans le combat , la vi-
ctoire ſe donne aux fuyards. Pour
I. Cor.
6. 18. cette raiſon, l'Apoſtre126 dit aux Corin-
thiens127,
Fugite fornicationem. Fuyez.
la fornication
Salomon aduertit dans les Prouer-
bes. Prou.
5.
lomon.
37.bes. Prou.
5.
Ne vous amuſez point aux paro-. Iuſques icy le ſage Sa-
les trompeuſes d'vne femme abandon-
née. Le Miel decoule de ſes leures,
& ſa bouche paroiſt nette comme de
l'huile : mais ſa fin eſt amere comme
l'abſynthe, & ſa langue eſt aiguë com-
me vn glaiue à deux trenchans , ses
pieds courent à la mort , & elle va
droict aux enfers. Elle ne marche point
par les ſentiers de la vie: ſa marche eſt
vague & inconnuë. Retirez - vous
d'elle, & ne vous apporchez iamais de
ſa maiſon
lomon.
De ſin-
gular.
Cleric.
Sainct Auguſtin en parle d'vne
maniere eſtonnante.
maniere eſtonnante.
Le feu, dit-il,
160
La Direction & la Conſolation
ſort de ſon corps, le fer contracte la roüille,.
les Aſpics cauſent la mort. Et la fem-
me iette dans l'ame des hommes la peſte
de la concupiſcence. Elle s'epanche en
riſée, elle amollit le cœur128 par ſes mi-
gnardiſes ; & ce qui eſt le plus perni-
cieux & le plus peſtilentiel, elle ſe plaiſt
aux chants deſordonnez. Il ſeroit moins
dangereux d'oüir le ſifflement des Baſi-
lics , que d'ouurir les oreilles au chant
de ces Sirenes , qui ne delectent que
pour deuorer
Les Saincts ont montré par leurs
actions , la crainte & l'horreur qu'ils
ont eu de la conuerſation des femmes,
non ſeulement débordées , mais auſſi
vertueuſes. Sainct Antoine eſtant prié
d'aller voir vne femme , quoy que de
bonne vie, afin de luy rendre la ſanté, il
le refuſa, & la guerit ſans ſe tranſpor-
ter en ſon logis.
actions , la crainte & l'horreur qu'ils
ont eu de la conuerſation des femmes,
non ſeulement débordées , mais auſſi
vertueuſes. Sainct Antoine eſtant prié
d'aller voir vne femme , quoy que de
bonne vie, afin de luy rendre la ſanté, il
le refuſa, & la guerit ſans ſe tranſpor-
ter en ſon logis.
Sainct Arſene tança ſi ſeuerement
vne Dame Romaine , qui eſtoit venuë
dans le deſert pour le voir, qu'elle en
tomba malade, comme i'ay dit.
Nice-vne Dame Romaine , qui eſtoit venuë
dans le deſert pour le voir, qu'elle en
tomba malade, comme i'ay dit.
phor. l.
I.c.37.
Pior, Religieux de grande vertu,
eſtant commandé d'aller viſiter ſa
extreme affection , y alla. Mais il
ferma ſes yeux tandis qu'il fut auec
elle, & ne la vid point.
eſtant commandé d'aller viſiter ſa
161
des perſonnes Mariées.
ſœur, laquelle le demandoit auec vneextreme affection , y alla. Mais il
ferma ſes yeux tandis qu'il fut auec
elle, & ne la vid point.
Ie ne vous pouſſe point à ces ex-
cez, & voſtre condition ne le permet
pas. Mais ſi ces Saincts ont eu tant de
reſerue , vous deuez iuger que voſtre
foibleſſe ſe doit tenir ſur ſes gardes, &
fuïr prudemment & genereuſement
les occaſions du mal.
cez, & voſtre condition ne le permet
pas. Mais ſi ces Saincts ont eu tant de
reſerue , vous deuez iuger que voſtre
foibleſſe ſe doit tenir ſur ſes gardes, &
fuïr prudemment & genereuſement
les occaſions du mal.
Dans la guerre, meſme corporelle,
il eſt ſouuent plus honorable de faire
vne honneſte retraite , que de liurer
vne bataille temeraire : Beaucoup plus
cela eſt-il veritable , en cette guerre
ſpirituelle, où les ennemis ſont tres-
forts , tres experimentez & preſque
touſiours victorieux en quelque cho-
ſe, ſi l'on ne ſe defend par vne prompte
& prudente fuite.
il eſt ſouuent plus honorable de faire
vne honneſte retraite , que de liurer
vne bataille temeraire : Beaucoup plus
cela eſt-il veritable , en cette guerre
ſpirituelle, où les ennemis ſont tres-
forts , tres experimentez & preſque
touſiours victorieux en quelque cho-
ſe, ſi l'on ne ſe defend par vne prompte
& prudente fuite.
162
La Direction & la Conſolation
bandeau décoratif
CHAPITRE V.
La Conſolation & la Direction d'vne
femme, qui eſt mal obeïe par ſes en-
fans & par ſes ſeruiteurs, ſans
que ſon mary les maintienne
dans leur deuoir.
C'Eſt vn grand malheur, que le
mary haïſſe ou traite mal ſa
femme. Mais il eſt notablement plus
grand & plus inſupportable, lors que
les enfans, les ſeruiteurs & les ſeruan-
tes ſe joignent à luy , & ne font nul
eſtat de ce qu'elle leur commande.
Voyons ſi nous pourrons tirer du miel
de la pierre , & du bon heur de cét
eſtat douloureux.
mary haïſſe ou traite mal ſa
femme. Mais il eſt notablement plus
grand & plus inſupportable, lors que
les enfans, les ſeruiteurs & les ſeruan-
tes ſe joignent à luy , & ne font nul
eſtat de ce qu'elle leur commande.
Voyons ſi nous pourrons tirer du miel
de la pierre , & du bon heur de cét
eſtat douloureux.
§. I.
Aduis pour la femme bafoüée
par ſes enfans, & par ſes ſeruiteurs.
I. Plus vous vous trouuez re-
butée de ces creatures, plus vous de-
uez eſleuer voſtre ame en Dieu. Lors
qu'on jette auec violence vn balon
receuoir , il ſe leue d'autant plus vers
le Ciel , qu'il en eſt repouſſé auec vn
plus grand rebut.
butée de ces creatures, plus vous de-
uez eſleuer voſtre ame en Dieu. Lors
qu'on jette auec violence vn balon
163
des perſonnes Mariées.
contre vn marbre qui ne le veut pointreceuoir , il ſe leue d'autant plus vers
le Ciel , qu'il en eſt repouſſé auec vn
plus grand rebut.
Entrez dans le Ciel, & conuerſez-
y comme ſainct Paul , ou faites deſ-
cendre le Ciel dans voſtre cœur129 com-
me ſaincte Catherine de Sienne. Elle
y faiſoit vn Autel à noſtre Seigneur, à
la Vierge, aux Anges & aux Saincts, à
qui elle auoit plus de deuotion. Et ſe
voyant rebutée de ſon Pere, de ſa Me-
re, des ſeruiteurs & des ſeruantes du
logis, elle viuoit plus joyeuſe qu'à l'or-
dinaire.
y comme ſainct Paul , ou faites deſ-
cendre le Ciel dans voſtre cœur129 com-
me ſaincte Catherine de Sienne. Elle
y faiſoit vn Autel à noſtre Seigneur, à
la Vierge, aux Anges & aux Saincts, à
qui elle auoit plus de deuotion. Et ſe
voyant rebutée de ſon Pere, de ſa Me-
re, des ſeruiteurs & des ſeruantes du
logis, elle viuoit plus joyeuſe qu'à l'or-
dinaire.
Vn Ancien diſoit qu'il n'eſtoit
iamais moins ſeul, que lors qu'il eſtoit
ſeul. Lors que vous conuerſez auec
les Cherubins , auec les Seraphins , &
auec Dieu meſme : que vous importe
d'auoir les Creatures pour compagnes
ou pour amies ? Tout ce qui eſt en ce
monde n'eſt qu'vn atome & vn pur
neant , en comparaiſon du Createur.
Qui a Dieu pour ſoy , ne doit rien re-
chercher dauantage.
iamais moins ſeul, que lors qu'il eſtoit
ſeul. Lors que vous conuerſez auec
les Cherubins , auec les Seraphins , &
auec Dieu meſme : que vous importe
d'auoir les Creatures pour compagnes
ou pour amies ? Tout ce qui eſt en ce
monde n'eſt qu'vn atome & vn pur
neant , en comparaiſon du Createur.
Qui a Dieu pour ſoy , ne doit rien re-
chercher dauantage.
II. Rien ne vous nuira , ſi vous
Prophete Daniel eſtoit au milieu des
Lions auec vn extreme plaiſir, n'en re-
ceuant que des careſſes.
In
164
La Direction & la Conſolation
jettez voſtre confiance en Dieu. LeProphete Daniel eſtoit au milieu des
Lions auec vn extreme plaiſir, n'en re-
ceuant que des careſſes.
epiſt.
Sainct Ignace le Martyr ne deſi-
roit rien plus ardemment, que d'eſtre
expoſé aux Lions dans l'Amphitheatre
Romain , non pas pour en eſtre ca-
reſſé, mais pour en eſtre déchiré & de-
uoré. Par ce moyen , diſoit-il, ie ſe-
ray vn pain digne d'eſtre preſenté à la
table de mon Dieu. Il proteſtoit hau-
tement, que ſi ces animaux cruels ne
ſe ruoient ſur luy, il les agaceroit, afin
d'exciter leur rage.
roit rien plus ardemment, que d'eſtre
expoſé aux Lions dans l'Amphitheatre
Romain , non pas pour en eſtre ca-
reſſé, mais pour en eſtre déchiré & de-
uoré. Par ce moyen , diſoit-il, ie ſe-
ray vn pain digne d'eſtre preſenté à la
table de mon Dieu. Il proteſtoit hau-
tement, que ſi ces animaux cruels ne
ſe ruoient ſur luy, il les agaceroit, afin
d'exciter leur rage.
Ne donnez point de ſujet à vos
enfans, ny à vos ſeruiteurs & ſeruan-
tes de vous offenſer, car vous ſeriez
cauſe qu'ils pecheroient auſſi contre
Dieu. Mais s'ils pouuoient vous de-
ſobliger ſans aucun peché, leurs fautes
vous ſeroient tres-ſouhaitables , &
vous mettroient dans vn eſtat, ou vô-
tre vertu ſeroit plus maſle & plus ac-
complie, par la force de cœur130, que
Dieu ne manquera point de vous don-
ner, ſi vous la luy demandez.
enfans, ny à vos ſeruiteurs & ſeruan-
tes de vous offenſer, car vous ſeriez
cauſe qu'ils pecheroient auſſi contre
Dieu. Mais s'ils pouuoient vous de-
ſobliger ſans aucun peché, leurs fautes
vous ſeroient tres-ſouhaitables , &
vous mettroient dans vn eſtat, ou vô-
tre vertu ſeroit plus maſle & plus ac-
complie, par la force de cœur130, que
Dieu ne manquera point de vous don-
ner, ſi vous la luy demandez.
165
des perſonnes Mariées.
La Palme ſe leue en haut , lors
qu'on la charge de quelque poids. Et
vne ame courageuſe ſe guinde vers ſon
principe qui eſt Dieu , lors qu'on la
veut plus accabler.
qu'on la charge de quelque poids. Et
vne ame courageuſe ſe guinde vers ſon
principe qui eſt Dieu , lors qu'on la
veut plus accabler.
Si toute voſtre maiſon eſt dans le
deſordre, efforcez-vous de recompen-
ſer ce defaut par vos vertus , & de re-
ceuoir en voſtre ame ſeule toutes les
graces que les autres perdent par leur
faute. Strabon eſcrit , qu'vne certaine
Lib.13.131 Region n'auoit aucun arbre : & que
toute la campagne n'eſtoit que cen-
dres, que montagne, & que pierre de
couleur noire : comme ſi elle auoit eſté
bruſlée du foudre. Il n'y auoit qu'vne
vigne, qui eſtendoit ces branches tres-
vertes : & portoit de beaux & d'excel-
lens raiſins.
deſordre, efforcez-vous de recompen-
ſer ce defaut par vos vertus , & de re-
ceuoir en voſtre ame ſeule toutes les
graces que les autres perdent par leur
faute. Strabon eſcrit , qu'vne certaine
Lib.13.131 Region n'auoit aucun arbre : & que
toute la campagne n'eſtoit que cen-
dres, que montagne, & que pierre de
couleur noire : comme ſi elle auoit eſté
bruſlée du foudre. Il n'y auoit qu'vne
vigne, qui eſtendoit ces branches tres-
vertes : & portoit de beaux & d'excel-
lens raiſins.
Lors qu'vn œil ne reçoit les eſprits
vitaux, l'autre en reçoit dauantage: &
voit plus clair qu'auparauant, s'il s'eſt
conſerué ſain & entier.
vitaux, l'autre en reçoit dauantage: &
voit plus clair qu'auparauant, s'il s'eſt
conſerué ſain & entier.
III. De plus, ſoyez tres certaine; que
ſi vous auez du courage & de la pati-
ence, voſtre vertu rendra vne ſi bonne
& vous honoreront.
ſi vous auez du courage & de la pati-
ence, voſtre vertu rendra vne ſi bonne
166
La Direction & la Conſolation
odeur; que tous, enfin vous aimeront& vous honoreront.
Si l'on plante la Roſe, au milieu des
Petra
Sãcta. aulx & des oignõs,elle a vne plus douce
odeur & vne plus viue & plus agreable
couleur. Pour cette raiſon, le Comte
Hieroſme Fallette la dépeignit de la
ſorte dans ſon Symbole : afin de mon-
ſtrer que ſa renommée ſeroit d'autant
plus odoriferante ; que ſes enuieux le
calomnieroient , auec plus de mali-
gnité.
Petra
Sãcta. aulx & des oignõs,elle a vne plus douce
odeur & vne plus viue & plus agreable
couleur. Pour cette raiſon, le Comte
Hieroſme Fallette la dépeignit de la
ſorte dans ſon Symbole : afin de mon-
ſtrer que ſa renommée ſeroit d'autant
plus odoriferante ; que ſes enuieux le
calomnieroient , auec plus de mali-
gnité.
IV. Conſiderez, s'il n'y a point de
voſtre faute à cauſe, de voſtre mau-
uaiſe humeur ; de vos paroles ai-
gres & faſcheuſes : de voſtre auarice,
qui nourrit mal vos domeſtiques: des
rapports trop frequens , dont voſtre
Mary ſe laſſe: de voſtre delicateſſe, qui
ſe choque à la moindre choſe : de vo-
ſtre mauuaiſe conduite , qui ne ſçait
gagner le cœur à perſonne. Si vous re-
tranchez ce qui eſt de vicieux en vous;
vous aurez bien-toſt des autres ce que
vous deſirez en eux.
voſtre faute à cauſe, de voſtre mau-
uaiſe humeur ; de vos paroles ai-
gres & faſcheuſes : de voſtre auarice,
qui nourrit mal vos domeſtiques: des
rapports trop frequens , dont voſtre
Mary ſe laſſe: de voſtre delicateſſe, qui
ſe choque à la moindre choſe : de vo-
ſtre mauuaiſe conduite , qui ne ſçait
gagner le cœur à perſonne. Si vous re-
tranchez ce qui eſt de vicieux en vous;
vous aurez bien-toſt des autres ce que
vous deſirez en eux.
C'eſt vn grand deſordre dit Saint
ſtreſſes veüillent auoir toutes choſes
bonnes, dans leurs logis, excepté eux.
Si vous demandez de bons enfans &
de bons ſeruiteurs, ils vous demandent
vne bonne Mere & vne bonne Mai-
ſtreſſe. Les voulez-vous obeïſſans ?
obeïſſez bien à Dieu, & à voſtre Mary.
Voulez vous qu'ils ſoient patiens ?
ſouffrez quelque choſe de leur âge, &
de leur inciuilité. Deſirez vous qu'ils
ne iurent point? moderez vous de telle
ſorte, que iamais ils n'entendent ſor-
tir de voſtre bouche aucune impreca-
tion ny aucune malediction.
167
des perſonnes Mariées.
Auguſtin, que les Maiſtres & les Mai-ſtreſſes veüillent auoir toutes choſes
bonnes, dans leurs logis, excepté eux.
Si vous demandez de bons enfans &
de bons ſeruiteurs, ils vous demandent
vne bonne Mere & vne bonne Mai-
ſtreſſe. Les voulez-vous obeïſſans ?
obeïſſez bien à Dieu, & à voſtre Mary.
Voulez vous qu'ils ſoient patiens ?
ſouffrez quelque choſe de leur âge, &
de leur inciuilité. Deſirez vous qu'ils
ne iurent point? moderez vous de telle
ſorte, que iamais ils n'entendent ſor-
tir de voſtre bouche aucune impreca-
tion ny aucune malediction.
V. Aymez vos enfans, vos ſeruiteurs
& vos ſeruãtes : & tout ce qu'ils feront
vous ſera doux & agreable : ou au
moins , ſupportable & peu faſcheux.
& vos ſeruãtes : & tout ce qu'ils feront
vous ſera doux & agreable : ou au
moins , ſupportable & peu faſcheux.
Hector Boëce en ſon Hiſtoire d'E-
coſſe, fait mention d'vne certaine pier-
re ſpongieuſe : dans laquelle ſi l'on
verſoit de l'eau ſalée , elle paſſoit au
trauers: & perdant ſon amertume, de-
uenoit douce.
coſſe, fait mention d'vne certaine pier-
re ſpongieuſe : dans laquelle ſi l'on
verſoit de l'eau ſalée , elle paſſoit au
trauers: & perdant ſon amertume, de-
uenoit douce.
Vn cœur qui aime trouue tout beau
& tout bon , & excuſe facilement les
& n'ont pas la prudence d'vn âge meur
& aduancé. Demandez-vous des fruits
à vn petit arbre, qui à peine a bien pris
racine ? Vos ſeruiteurs ſont des garçons
de village , ou de baſſe naiſſance. Ils
ont eu vne mauuaiſe education : & ne
peuuent ſi toſt s'aſſuiettir aux loix de
la raiſon, & de la vertu. Voudriez-vous
tirer d'vn arbre ſauuage des fruits auſſi
doux : que s'il auoit eu vne ſoigneuſe
culture dans le parterre d'vn Roy.
& tout bon , & excuſe facilement les
168
La Direction & la Conſolation
defauts. Les enfans ſont des enfans :& n'ont pas la prudence d'vn âge meur
& aduancé. Demandez-vous des fruits
à vn petit arbre, qui à peine a bien pris
racine ? Vos ſeruiteurs ſont des garçons
de village , ou de baſſe naiſſance. Ils
ont eu vne mauuaiſe education : & ne
peuuent ſi toſt s'aſſuiettir aux loix de
la raiſon, & de la vertu. Voudriez-vous
tirer d'vn arbre ſauuage des fruits auſſi
doux : que s'il auoit eu vne ſoigneuſe
culture dans le parterre d'vn Roy.
VI. Voſtre Mary conſidere, que la
douceur attire plus puiſſamment les
cœurs132 que la ſeuerité : & fait rendre
des ſeruices, qui ſont d'vne plus lon-
gue durée.
douceur attire plus puiſſamment les
cœurs132 que la ſeuerité : & fait rendre
des ſeruices, qui ſont d'vne plus lon-
gue durée.
François Marcion, excellent Iuriſ-
Iuſti-
nian
Ge-
nuenſ.
lib. 6. conſulte & Ambaſſadeur de la Re-
publique de Genes aupres d'vn Duc de
Milan, ſe voiant rebuté de ce Prince
(qui ne vouloit pas garder les articles
accordez à ſa patrie) luy preſenta vne
plante d'ocyman qui eſt la dragée aux
cheuaux. Le Duc admirant ce preſent
& à quel deſſein il ſe faiſoit , luy en
demanda l'explication. L'Ambaſſadeur
niée doucement a vne bonne odeur:
mais ſi on la traitte rudement, elle
ſent tres-mauuais , & produit des
ſcorpions. Il adiouſta, que ſes com-
patriotes eſtoient de meſme nature.
Le Duc prit tant de plaiſir à cette in-
uention, qu'il luy accorda ſes deman-
des : & le renuoia auec honneur.
Iuſti-
nian
Ge-
nuenſ.
lib. 6. conſulte & Ambaſſadeur de la Re-
publique de Genes aupres d'vn Duc de
Milan, ſe voiant rebuté de ce Prince
(qui ne vouloit pas garder les articles
accordez à ſa patrie) luy preſenta vne
plante d'ocyman qui eſt la dragée aux
cheuaux. Le Duc admirant ce preſent
& à quel deſſein il ſe faiſoit , luy en
demanda l'explication. L'Ambaſſadeur
luy
169
des perſonnes Mariées.
luy reſpondit , cette herbe eſtant ma-niée doucement a vne bonne odeur:
mais ſi on la traitte rudement, elle
ſent tres-mauuais , & produit des
ſcorpions. Il adiouſta, que ſes com-
patriotes eſtoient de meſme nature.
Le Duc prit tant de plaiſir à cette in-
uention, qu'il luy accorda ſes deman-
des : & le renuoia auec honneur.
Voſtre Mary voudroit bien auoir ſes
enfans, & ſes ſeruiteurs tres-parfaits.
C'eſt ſon bien , autant & plus que le
voſtre. Mais il a peur d'arracher le bon
grain, s'il arrache trop precipitamment
l'yvroie.133 La difficulté de trouuer des
ſeruiteurs laborieux & fidelles le rend
plus craintif. Car il arriue ſouuent
qu'en perdant vn ſeruiteur qui n'a
qu'vn vice: on ouure ſa maiſon, à ceux
qui en ont pluſieurs.
enfans, & ſes ſeruiteurs tres-parfaits.
C'eſt ſon bien , autant & plus que le
voſtre. Mais il a peur d'arracher le bon
grain, s'il arrache trop precipitamment
l'yvroie.133 La difficulté de trouuer des
ſeruiteurs laborieux & fidelles le rend
plus craintif. Car il arriue ſouuent
qu'en perdant vn ſeruiteur qui n'a
qu'vn vice: on ouure ſa maiſon, à ceux
qui en ont pluſieurs.
Math.
ii 29. Iesvus-Christ eſt l'Agneau , qui
porte les pechez du monde. Il ſe plaiſt
à la douceur, & a dit.
ii 29. Iesvus-Christ eſt l'Agneau , qui
porte les pechez du monde. Il ſe plaiſt
à la douceur, & a dit.
Apprenez de moy.
que ie ſuis debonnaire & humble de cœur.
& vous trouuerez le repos de vos ames
Q. Fabius Maximus remit les
affaires des Romains en bon eſtat, &
fuſt appellé Ouicula : c'eſt à dire, petite
brebis : à cauſe de ſa douceur & man-
ſuetude.
affaires des Romains en bon eſtat, &
H
170
La Direction & la Conſolation
ſurmonta Annibal par ſa patience. Ilfuſt appellé Ouicula : c'eſt à dire, petite
brebis : à cauſe de ſa douceur & man-
ſuetude.
VI. Si vous gagnez le cœur134 de
vos ſeruiteurs, & de vos enfans: vous
ferez vne famille heureuſe. Ils ſeront
tous vnis à vous, à voſtre Mary , &
entr'eux-meſme, par vn commun lien
de charité : & ne s'en diuiſeront
iamais.
vos ſeruiteurs, & de vos enfans: vous
ferez vne famille heureuſe. Ils ſeront
tous vnis à vous, à voſtre Mary , &
entr'eux-meſme, par vn commun lien
de charité : & ne s'en diuiſeront
iamais.
S. Auguſtin aſſeure, auoir veu vn
Lib. 2.
de ciui. Aimant, qui tiroit vn anneau de fer, &
le tenoit ſuſpendu en l'air : & que cet
anneau de fer, ayant receu l'influence
de l'Aimant, en tiroit vn ſecond. Ce
ſecond en tiroit vn troiſieſme ; le troi-
ſieſme, vn quatrieſme : & qu'enfin
il ſe fit vne chaiſne d'anneaux , qui
n'eſtoient ſouſtenus d'aucun appuy :
ſinon de la vertu interieure, qu'ils ſe
communiquoient l'vn à l'autre.
Lib. 2.
de ciui. Aimant, qui tiroit vn anneau de fer, &
le tenoit ſuſpendu en l'air : & que cet
anneau de fer, ayant receu l'influence
de l'Aimant, en tiroit vn ſecond. Ce
ſecond en tiroit vn troiſieſme ; le troi-
ſieſme, vn quatrieſme : & qu'enfin
il ſe fit vne chaiſne d'anneaux , qui
n'eſtoient ſouſtenus d'aucun appuy :
ſinon de la vertu interieure, qu'ils ſe
communiquoient l'vn à l'autre.
Vous ferez le meſme dans voſtre
famille , ſi voſtre charité eſt parfaite.
Elle ſe gliſſera, ſans bruit, dans le cœur
de vos domeſtiques: & les enchaiſnera
ſi puiſſamment, que leurs eſprits non
voſtre ruine: mais feront des merueil-
les, pour voſtre conſolation & aduan-
cement.
famille , ſi voſtre charité eſt parfaite.
Elle ſe gliſſera, ſans bruit, dans le cœur
de vos domeſtiques: & les enchaiſnera
ſi puiſſamment, que leurs eſprits non
171
des perſonnes Mariées.
ſeulement ne ſe partageront point àvoſtre ruine: mais feront des merueil-
les, pour voſtre conſolation & aduan-
cement.
P. Catienus Philotimus eſtoit ſi
Plin.l.
c. 36. fort aimé de ſon Maiſtre : qu'il en fuſt
fait heritier. Il euſt vn ſi exceſſif amour
enuers ſon meſme Maiſtre : qu'il ne
voulut point luy ſuruiure. A ce deſſein,
il ſe ietta dans le buſcher, où ſon corps
bruſloit : & s'y conſomma auec luy.
Valer.
l.6.c.8. Le ſeruiteur de Panopion fit mieux.
Sur l'aduis qu'il euſt; que l'on venoit
pour tuer ſon Maiſtre ; il le fit ſortir
ſecrettement par la porte de la baſſe-
cour : & s'habillant de ſes habits, ſe
laiſſa maſſacrer pour luy. Si les voſtres
vous aiment, ils vous rendront de ſi-
gnalez ſeruices.
Plin.l.
c. 36. fort aimé de ſon Maiſtre : qu'il en fuſt
fait heritier. Il euſt vn ſi exceſſif amour
enuers ſon meſme Maiſtre : qu'il ne
voulut point luy ſuruiure. A ce deſſein,
il ſe ietta dans le buſcher, où ſon corps
bruſloit : & s'y conſomma auec luy.
Valer.
l.6.c.8. Le ſeruiteur de Panopion fit mieux.
Sur l'aduis qu'il euſt; que l'on venoit
pour tuer ſon Maiſtre ; il le fit ſortir
ſecrettement par la porte de la baſſe-
cour : & s'habillant de ſes habits, ſe
laiſſa maſſacrer pour luy. Si les voſtres
vous aiment, ils vous rendront de ſi-
gnalez ſeruices.
VI.135 Le plus grand ſecret, pour vous
faire aimer & ſeruir par vos enfans, par
vos ſeruiteurs, & vos ſeruantes : c'eſt
d'auoir ſoin de leur vertu. Preſſez-les
doucement à frequenter les Sermons,
à ſe Confeſſer & Communier ſouuent,
à aſſiſter aux Meſſes de voſtre Paroiſſe,
& aux Veſpres : à faire quelque lecture
ſeront des Predicateurs iournaliers :
qui leur diront, pluſieurs fois, ce que
vous auriez peine de leur dire, vne
ſeule & qu'ils ne receuroient point
auec agrément.
faire aimer & ſeruir par vos enfans, par
vos ſeruiteurs, & vos ſeruantes : c'eſt
d'auoir ſoin de leur vertu. Preſſez-les
doucement à frequenter les Sermons,
à ſe Confeſſer & Communier ſouuent,
à aſſiſter aux Meſſes de voſtre Paroiſſe,
& aux Veſpres : à faire quelque lecture
H ij
172
La Direction & la Conſolation
de liures qui leur ſont propres. Ce leurſeront des Predicateurs iournaliers :
qui leur diront, pluſieurs fois, ce que
vous auriez peine de leur dire, vne
ſeule & qu'ils ne receuroient point
auec agrément.
Impr.
au Põt
chez
Guill.
Impr.
à Dijon
chez
Cha-
uanée,
&
Gran-
gier. I'ay compoſé vn liure exprez, pour
inſtruire les ſeruiteurs & les ſeruantes:
& l'ay inſcript, Le bon Seruiteur & la
bonne Seruante. I'en ay fait vn autre,
pour vos Filles : que i'appelle, Le Mi-
roir des Vierges. Enfin, i'en ay adiouſté
vn troiſieſme pour vos Garçons : &
l'ay nomé, Le bon Eſcolier. Vous trou-
uerez encore beaucoup de choſes, ſur
ce ſujet, au Traitté que i'ay fait pour le
menu peuple. Son nom eſt, Le bon Vi-
gneron , Le bon Laboureur , & le bon
Artiſan.
au Põt
chez
Guill.
Impr.
à Dijon
chez
Cha-
uanée,
&
Gran-
gier. I'ay compoſé vn liure exprez, pour
inſtruire les ſeruiteurs & les ſeruantes:
& l'ay inſcript, Le bon Seruiteur & la
bonne Seruante. I'en ay fait vn autre,
pour vos Filles : que i'appelle, Le Mi-
roir des Vierges. Enfin, i'en ay adiouſté
vn troiſieſme pour vos Garçons : &
l'ay nomé, Le bon Eſcolier. Vous trou-
uerez encore beaucoup de choſes, ſur
ce ſujet, au Traitté que i'ay fait pour le
menu peuple. Son nom eſt, Le bon Vi-
gneron , Le bon Laboureur , & le bon
Artiſan.
Faites lire ces liurets à vos enfans, à
vos ſeruiteurs, & à vos ſeruantes. Liſez-
les vous meſme , afin de les pouuoir
plus facilement & vtilement inſtruire.
Vous regaignerez bien-toſt auec vſure,
voſtre argent : ces liures n'eſtant point
de grand prix. Si vous ne voulez pas
debourſer cinq ſols, pour ſauuer voſtre
vous plaindre de la peine que vous y
ſouffrez.
vos ſeruiteurs, & à vos ſeruantes. Liſez-
les vous meſme , afin de les pouuoir
plus facilement & vtilement inſtruire.
Vous regaignerez bien-toſt auec vſure,
voſtre argent : ces liures n'eſtant point
de grand prix. Si vous ne voulez pas
debourſer cinq ſols, pour ſauuer voſtre
173
des perſonnes Mariées.
famille : n'auez vous pas grand tort devous plaindre de la peine que vous y
ſouffrez.
§. II. Aduis pour le Mary ; dont la
Femme eſt meſpriſée par ſes enfans,
& par ſes ſeruiteurs.
Quatre motifs vous obligent , de ne
ſouffrir nulle inſolence de vos dome-
ſtiques contre voſtre Femme.
ſouffrir nulle inſolence de vos dome-
ſtiques contre voſtre Femme.
I. La conſideration de voſtre Femme
eſt tres-puiſſante à cet effet : ſoit pour
maintenir vos enfans dans leur deuoir:
ſoit pour luy ſoûmettre vos ſeruiteurs
& vos ſeruantes.
eſt tres-puiſſante à cet effet : ſoit pour
maintenir vos enfans dans leur deuoir:
ſoit pour luy ſoûmettre vos ſeruiteurs
& vos ſeruantes.
Premierement elle vous a donné vos
enfans : elle les a allaitez : elle les a
nourris : elle les a inſtruits des leur
tendre ieuneſſe : elle en a ſupporté la
fatigue pluſieurs années. Seroit il
iuſte de l'affliger, par le don meſme
qu'elle vous a fait ?
enfans : elle les a allaitez : elle les a
nourris : elle les a inſtruits des leur
tendre ieuneſſe : elle en a ſupporté la
fatigue pluſieurs années. Seroit il
iuſte de l'affliger, par le don meſme
qu'elle vous a fait ?
Si vn arbre vous porte de beaux
fruits , & vous les met entre les
mains : eſtimerez - vous iuſte ,
froiſſer & pour les rompre ?
fruits , & vous les met entre les
mains : eſtimerez - vous iuſte ,
H iij
174
La Direction & la Conſolation
d'en ietter contre ſes branches, pour lesfroiſſer & pour les rompre ?
Secondement, Dieu veut, que vous
ſoûmettiez vos ſeruiteurs, & particu-
lierement vos ſeruantes , à voſtre
Gen.
24. Femme. Agar, qui eſtoit la ſeruante
de Sara Femme d'Abraham , voyant
qu'elle auoit vn fils, s'enorgueillit : &
meſpriſa ſa Maiſtreſſe. Sara s'en plai-
gnit à Abraham : & Abraham conſulta
Dieu, pour ſçauoir ce qu'il deuoit faire
dans cette conioncture. Dieu luy dit,
Gen.
16 ge auoit des-ja auerti Agar de s'humi-
lier ſoûs ſa Maiſtreſſe.
ſoûmettiez vos ſeruiteurs, & particu-
lierement vos ſeruantes , à voſtre
Gen.
24. Femme. Agar, qui eſtoit la ſeruante
de Sara Femme d'Abraham , voyant
qu'elle auoit vn fils, s'enorgueillit : &
meſpriſa ſa Maiſtreſſe. Sara s'en plai-
gnit à Abraham : & Abraham conſulta
Dieu, pour ſçauoir ce qu'il deuoit faire
dans cette conioncture. Dieu luy dit,
Chaſſe la ſeruante, & ſon fils. Vn An-
Gen.
16 ge auoit des-ja auerti Agar de s'humi-
lier ſoûs ſa Maiſtreſſe.
II. La conſideration de vos enfans
vous oblige de les ſoûmettre à voſtre
Femme : ſoit qu'elle ſoit leur Mere, ou
qu'elle ne le ſoit pas. Si vous les main-
tenez dans leur deſobeïſſance , vous
leur nuiſez : & vous contreuenez aux
ordres de Dieu. Il vous commande de
les chaſtier: afin de les faire ſages.
comme tourne l'Interprete Syriaque136,
fait enuoler le cœur de l'enfant )
vous oblige de les ſoûmettre à voſtre
Femme : ſoit qu'elle ſoit leur Mere, ou
qu'elle ne le ſoit pas. Si vous les main-
tenez dans leur deſobeïſſance , vous
leur nuiſez : & vous contreuenez aux
ordres de Dieu. Il vous commande de
les chaſtier: afin de les faire ſages.
La( ou
Prou.
22. folie eſt liée au col de l'enfant
comme tourne l'Interprete Syriaque136,
fait enuoler le cœur de l'enfant )
& la.
verge la diſſipe
175
des perſonnes Mariées.
cap.23
Et ailleurs.
cap.30
N'eſpargnez point la cor-.
rection à vos enfans. La verge ne les fera
point mourir. Chaſtiez-les : & vous ſau-
uerez leurs ames, de l'enfer
Ieſus Fils de Sirac dit, en l'Eccleſia-
ſtique.
ſtique.
Celuy qui ayme ſon fils, le cha-.
ſtie ſouuent : afin que puis apres il viue
en paix : & qu'il ne mandie pas ſon
pain de porte en porte
Chez les Lacedemoniens137, ſi vn en-
fant chaſtié par quelque autre, en fai-
ſoit plainte à ſon Pere ; ce Pere eſtoit
obligé par les loix de le chaſtier encore
vn coup : s'il ne vouloit paſſer dans
l'eſtime de ſes concitoiens , pour vn
homme laſche.
fant chaſtié par quelque autre, en fai-
ſoit plainte à ſon Pere ; ce Pere eſtoit
obligé par les loix de le chaſtier encore
vn coup : s'il ne vouloit paſſer dans
l'eſtime de ſes concitoiens , pour vn
homme laſche.
L'or a beſoin d'eſtre frappé , pour
porter la figure de ſon Roy, dit Ben-
Syra en ſes Prouerbes : & le ieune
homme pour eſtre fait vne belle Ima-
ge de Dieu.
porter la figure de ſon Roy, dit Ben-
Syra en ſes Prouerbes : & le ieune
homme pour eſtre fait vne belle Ima-
ge de Dieu.
Si vous careſſez trop vos enfans,
vous les eſtoufferez : comme le Singe
qui tuë ſes petits en les ſerrant trop
eſtroittement dans ſon ſein, par vn ex-
cez d'amour & de tendreſſe. Au moins,
vous les rẽdrez reueſches contre vous-
gmenté les forces & le pouuoir : com-
me il arriue aux poulains indomptez
qui renuerſent & bleſſent ceux qui
leur ont eſpargné l'eſcorgée138 & l'éperon.
vous les eſtoufferez : comme le Singe
qui tuë ſes petits en les ſerrant trop
eſtroittement dans ſon ſein, par vn ex-
cez d'amour & de tendreſſe. Au moins,
vous les rẽdrez reueſches contre vous-
H iiij
176
La Direction & la Conſolation
meſme : lors que l'âge leur aura au-gmenté les forces & le pouuoir : com-
me il arriue aux poulains indomptez
qui renuerſent & bleſſent ceux qui
leur ont eſpargné l'eſcorgée138 & l'éperon.
III. La conſideration de vos ſer-
uiteurs & de vos ſeruantes vous oblige
de les ſoûmettre à voſtre Femme : au-
trement, ils font pluſieurs pechez, la
meſpriſant, en detractant dans le logis
& dehors , negligeant leurs offices,
perdant la pluſpart du temps, s'amu-
ſant à des ieux illicites, à des conuer-
ſations dangereuſes, à des paroles in-
ſolentes, & à diuers autres deſordres.
uiteurs & de vos ſeruantes vous oblige
de les ſoûmettre à voſtre Femme : au-
trement, ils font pluſieurs pechez, la
meſpriſant, en detractant dans le logis
& dehors , negligeant leurs offices,
perdant la pluſpart du temps, s'amu-
ſant à des ieux illicites, à des conuer-
ſations dangereuſes, à des paroles in-
ſolentes, & à diuers autres deſordres.
Vous deuez pouruoir à leur ſalut,
ou par douceur , en les carreſſant &
leur faiſant du bien : ou par ſeuerité,
en vous faſchant contre eux, & en les
puniſſant.
S. Gregoire ,
l .5.
moral.
ou par douceur , en les carreſſant &
leur faiſant du bien : ou par ſeuerité,
en vous faſchant contre eux, & en les
puniſſant.
Si nous ſommes obligez, dit
S. Gregoire ,
d'aimer nos prochains,ib
comme nous meſmes : il s'enſuit, que
l .5.
moral.
nous deuons nous faſcher contre leurs.
vices : ainſi que contre les noſtres
Ne croyez point, que la colere ſoit
vicieuſe : moyennant, qu'elle ſoit bien
reglée : Au contraire, vne trop grande
en laſcheté : & ſeroit vne offenſe de
Pſal 4. Dieu.
Chryſ.
inMar
5. tierement la colere , eſcrit S. Chryſo-
ſtome, les enſeignemens ne profitent
de rien: la Iuſtice n'a point de vigueur:
& les vices ne ſont point reprimez.
vicieuſe : moyennant, qu'elle ſoit bien
reglée : Au contraire, vne trop grande
177
des perſonnes Mariées.
douceur degenereroit en molleſſe &en laſcheté : & ſeroit vne offenſe de
Pſal 4. Dieu.
Faſchez vous, dit Dauid,
de peur. Si vous oſtez en-
que vous ne pechiez
Chryſ.
inMar
5. tierement la colere , eſcrit S. Chryſo-
ſtome, les enſeignemens ne profitent
de rien: la Iuſtice n'a point de vigueur:
& les vices ne ſont point reprimez.
Celuy donc qui ne ſe faſche point,
lors qu'il eſt neceſſaire, offenſe Dieu.
Car vne douceur & vne patience deſ-
raiſonnable ſeme les vices : & les
nourrit par ſa negligence. De ſorte que
non ſeulement les meſchans : mais
auſſi les bons & vertueux ſont incitez
à mal faire.
lors qu'il eſt neceſſaire, offenſe Dieu.
Car vne douceur & vne patience deſ-
raiſonnable ſeme les vices : & les
nourrit par ſa negligence. De ſorte que
non ſeulement les meſchans : mais
auſſi les bons & vertueux ſont incitez
à mal faire.
IV. La conſideration donc de vo-
ſtre ſalut vous doit mettre la verge en
main, pour la correction de vos enfans
& vous faire roidir les bras , pour les
rendre ſouples & obeïſſans à voſtre
Femme. Le meſme ſe doit dire, à pro-
portion , pour la conduite de vos ſer-
uiteurs & de vos ſeruantes.
ſtre ſalut vous doit mettre la verge en
main, pour la correction de vos enfans
& vous faire roidir les bras , pour les
rendre ſouples & obeïſſans à voſtre
Femme. Le meſme ſe doit dire, à pro-
portion , pour la conduite de vos ſer-
uiteurs & de vos ſeruantes.
Si vous n'empeſchez efficacement
leurs imperfections, le pouuant faire,
vous les approuuez : & vous y parti-
leurs imperfections, le pouuant faire,
vous les approuuez : & vous y parti-
178
La Direction & la Conſolation
cipez. Les fautes auſquelles nous ne re-dit le Pape Innocent ,
ſiſtons pas ,
ont.
noſtre approbation. Car ne point punir
les meſchans, en ayant le pouuoir, n'eſt
autre choſe qu'en fomenter la ma-
lice. Et celuy la doit auoir vn grand
ſcrupule, d'eſtre participant des crimes
qui ne les empeſche point de toute ſa
puiſſance
Dieu chaſtie ſeuerement cette mol-
leſſe : meſme aux plus Illuſtres & aux
plus vertueux perſonnages. Heli, Sou-
I. Reg.
4. uerain Iuge & Souuerain Pontife des
Iuifs, eſtoit fort adonné à la pieté, mais
ſes enfans eſtoient impies. Il les repre-
noit trop mollement de leurs crimes,
& n'en interrompit pas le cours par
vne authorité abſoluë, & par des cha-
ſtimens exemplaires. Dieu permit, que
les Philiſthins ietterent vne armée
dans ſon païs. Heli enuoia des troupes
fort nombreuſes, pour les arreſter, &
pour les combattre. Ophni & Phinees
ſes deux enfans en furent les Gene-
raux. Ils liurent la bataille, & la per-
dent : ayant laiſſé ſur le champ du
combat, environ quatre mille ſoldats.
leſſe : meſme aux plus Illuſtres & aux
plus vertueux perſonnages. Heli, Sou-
I. Reg.
4. uerain Iuge & Souuerain Pontife des
Iuifs, eſtoit fort adonné à la pieté, mais
ſes enfans eſtoient impies. Il les repre-
noit trop mollement de leurs crimes,
& n'en interrompit pas le cours par
vne authorité abſoluë, & par des cha-
ſtimens exemplaires. Dieu permit, que
les Philiſthins ietterent vne armée
dans ſon païs. Heli enuoia des troupes
fort nombreuſes, pour les arreſter, &
pour les combattre. Ophni & Phinees
ſes deux enfans en furent les Gene-
raux. Ils liurent la bataille, & la per-
dent : ayant laiſſé ſur le champ du
combat, environ quatre mille ſoldats.
179
des perſonnes Mariées.
Ils ne perdent point cœur139 pour cela.
Ils enuoient querir l'Arche du Teſta-
ment : où Dieu reſidoit d'vne maniere
ſpeciale : & donnoit de merueilleux
ſecours à ſon peuple. L'abord de l'Ar-
che releua le courage aux Iſraëlites; &
eſtonna les Philiſthins. La deuxieſme
bataille ſe donne : le combat y eſt ſan-
glant de part & d'autre. Mais comme
la vengeance de Dieu pourſuiuoit
Ophni & Phinées, ils furent tuez tous
deux : Les Iſraëlites prirent la fuite :
l'Arche fuſt enleuée par les Barbares &
infidelles : & trente mille hommes du
peuple de Dieu reſterent ſur la place.
Ils enuoient querir l'Arche du Teſta-
ment : où Dieu reſidoit d'vne maniere
ſpeciale : & donnoit de merueilleux
ſecours à ſon peuple. L'abord de l'Ar-
che releua le courage aux Iſraëlites; &
eſtonna les Philiſthins. La deuxieſme
bataille ſe donne : le combat y eſt ſan-
glant de part & d'autre. Mais comme
la vengeance de Dieu pourſuiuoit
Ophni & Phinées, ils furent tuez tous
deux : Les Iſraëlites prirent la fuite :
l'Arche fuſt enleuée par les Barbares &
infidelles : & trente mille hommes du
peuple de Dieu reſterent ſur la place.
Ce n'eſt point aſſez : Heli, qui par
ſa trop grande indulgence, auoit laiſſé
viure licentieuſemẽt ſes enfans, oyant
la deſroute de l'armée, la mort de ſes
deux fils, la priſe de l'Arche, fuſt ſaiſi
d'vne telle douleur : qu'il tomba de
deſſus ſa chaiſe , & mourut ſoudaine-
ment s'eſtant rompu le col en cette
cheute. La Femme de Phinées, au recit
de toutes ſes funeſtes nouuelles ,
accoucha d'vn fils auant le temps, &
mourut de douleur.
ſa trop grande indulgence, auoit laiſſé
viure licentieuſemẽt ſes enfans, oyant
la deſroute de l'armée, la mort de ſes
deux fils, la priſe de l'Arche, fuſt ſaiſi
d'vne telle douleur : qu'il tomba de
deſſus ſa chaiſe , & mourut ſoudaine-
ment s'eſtant rompu le col en cette
cheute. La Femme de Phinées, au recit
de toutes ſes funeſtes nouuelles ,
accoucha d'vn fils auant le temps, &
mourut de douleur.
H vj
180
La Direction & la Conſolation
Exod.
22. 29. Dieu commandoit, que ſi vn bœuf
bleſſoit quelqu'vn, auec ſes cornes: &
que le Maiſtre en eſtant aduerti , ne
l'empeſchaſt point: il fuſt reſponſable
du tort qu'il faiſoit. S'il tuoit quel-
qu'vn , on faiſoit mourir non ſeule-
ment le bœuf , mais ſon Maiſtre-
meſme.
22. 29. Dieu commandoit, que ſi vn bœuf
bleſſoit quelqu'vn, auec ſes cornes: &
que le Maiſtre en eſtant aduerti , ne
l'empeſchaſt point: il fuſt reſponſable
du tort qu'il faiſoit. S'il tuoit quel-
qu'vn , on faiſoit mourir non ſeule-
ment le bœuf , mais ſon Maiſtre-
meſme.
Vous eſtes coupables de tous les
maux de vos enfans, ſi vous pouuez les
empeſcher. Et ne vous flattez point
ſur la douceur que la nature exige de
vous. Vous deuez exterminer le vice
en vos enfans, par vne ſeuerité neceſ-
ſaire. Que reſpondrez-vous à Dieu,
qui ordonnoit aux Iuifs, Que ſi vn en-
fant eſtoit ſi débauché, qu'ils ne peuſ-
ſent le corriger; les parens le menaſſent
eux-meſmes aux Iuges pour le faire
ſupplicier, & vouloi[en]t abſolument que
les Iuges le condamnaſſent à la mort,
Deut.
25. pource qu'il n'auoit point obey aux
commandemens de ſon Pere & de ſa
Mere.
maux de vos enfans, ſi vous pouuez les
empeſcher. Et ne vous flattez point
ſur la douceur que la nature exige de
vous. Vous deuez exterminer le vice
en vos enfans, par vne ſeuerité neceſ-
ſaire. Que reſpondrez-vous à Dieu,
qui ordonnoit aux Iuifs, Que ſi vn en-
fant eſtoit ſi débauché, qu'ils ne peuſ-
ſent le corriger; les parens le menaſſent
eux-meſmes aux Iuges pour le faire
ſupplicier, & vouloi[en]t abſolument que
les Iuges le condamnaſſent à la mort,
Deut.
25. pource qu'il n'auoit point obey aux
commandemens de ſon Pere & de ſa
Mere.
181
des perſonnes Mariées.
Tout le peuple l'aſſommoit à coups
de pierres: afin que ſa mort ſeruit d'e-
xemple aux autres. André de Gonza-
gue , Marquis de Guaſtalle , peignit
vn Scorpion en ſon Symbole, & y mit
cette Epigraphe ,
pion tué ſur la playe qu'il a faite, la
guerit.
de pierres: afin que ſa mort ſeruit d'e-
xemple aux autres. André de Gonza-
gue , Marquis de Guaſtalle , peignit
vn Scorpion en ſon Symbole, & y mit
cette Epigraphe ,
Qui viuens ladit,. Le Scor-
morte meditur. Celuy qui bleſſe en
ſa vie guerit par ſa mort
pion tué ſur la playe qu'il a faite, la
guerit.
Les punitions remedient aux
maux, que la meſchanceté des enfans
& des ſeruiteurs a cauſez dans la fa-
mille. Si Dieu s'eſt montré ſi ſeuere
enuuers les enfans refractaires : ne
ſoyez pas trop mol en l'education des
voſtres. Il vous en ſçauront mauuais
gré à la fin , & poſſible vous en mau-
diront , & en tireront vengeance.
Boëce rapporte140, qu'vn certain San-
De
Schol.
diſcipl. guin141, qui n'auoit point eſté corrigé
par ſon Pere, eſtant condamné a eſtre
pendu pour ſes crimes , demanda de
luy parler. Comme ſon Pere s'ap-
procha de luy , le fils ſe rua de furie
ſur ſon viſage , & luy coupa le nez
auec ſes dents, diſant.
maux, que la meſchanceté des enfans
& des ſeruiteurs a cauſez dans la fa-
mille. Si Dieu s'eſt montré ſi ſeuere
enuuers les enfans refractaires : ne
ſoyez pas trop mol en l'education des
voſtres. Il vous en ſçauront mauuais
gré à la fin , & poſſible vous en mau-
diront , & en tireront vengeance.
Boëce rapporte140, qu'vn certain San-
De
Schol.
diſcipl. guin141, qui n'auoit point eſté corrigé
par ſon Pere, eſtant condamné a eſtre
pendu pour ſes crimes , demanda de
luy parler. Comme ſon Pere s'ap-
procha de luy , le fils ſe rua de furie
ſur ſon viſage , & luy coupa le nez
auec ſes dents, diſant.
Si vous m'a-.
182 La Direction & la Conſolation uiez bien corrigé, ie ne ſerois pas où ie
ſuis
V. Ne vous laiſſez point toute-
fois aller temerairement à l'eſprit vo-
lage d'vne femme paſſionnée. Exami-
nez ſerieuſement tous ſes rapports, &
ne faites iamais par des paroles aigres,
& par des actions ſeueres ce que vous
pouuez faire par douceur.
dit S. Chryſoſtome,
vſer de moderation : autrement, on ſe
met en danger de tout perdre. Ro-
boam, par ſa colere inconſiderée, me-
naça d'vne rigoureuſe ſeuerité les dix
Tributs d'Iſraël : ce qui fut cauſe,
qu'elles ſe reuolterent contre luy : ſe
choiſirent vn autre Roy : & ne ſe re-
ünirent iamais au Royaume de Iuda.
fois aller temerairement à l'eſprit vo-
lage d'vne femme paſſionnée. Exami-
nez ſerieuſement tous ſes rapports, &
ne faites iamais par des paroles aigres,
& par des actions ſeueres ce que vous
pouuez faire par douceur.
Comme ce-,
luy qui eſt trop mol, & qui plaſtre tout
dit S. Chryſoſtome,
fait vn homme ne-. Il faut
gligent. Auſſi celuy qui ſe ſert touſiours
de reprehenſion, irrite les eſprits
vſer de moderation : autrement, on ſe
met en danger de tout perdre. Ro-
boam, par ſa colere inconſiderée, me-
naça d'vne rigoureuſe ſeuerité les dix
Tributs d'Iſraël : ce qui fut cauſe,
qu'elles ſe reuolterent contre luy : ſe
choiſirent vn autre Roy : & ne ſe re-
ünirent iamais au Royaume de Iuda.
La prudence prend ſon temps; & a
des effects admirables ſans aucun
peril. Alphonſe I. Duc de Ferare, s'eſtant
ſeruy le premier de la Grenade militaire,
la prit pour ſon Symbole, y ajouſtant ces
mots,
luy qui la veut ietter aux autres, ſi vous
l'allumez trop tard, elle ne nuit point
eux ẽnemis. Mais ſi vous y mettez le feu
à temps, elle fait de merueilleux effets.
des effects admirables ſans aucun
peril. Alphonſe I. Duc de Ferare, s'eſtant
ſeruy le premier de la Grenade militaire,
la prit pour ſon Symbole, y ajouſtant ces
mots,
Au lieu & au temps. Car ſi vous allu-
183
des perſonnes Mariées.
mez trop toſt la Grenade elle bleſſe ce-luy qui la veut ietter aux autres, ſi vous
l'allumez trop tard, elle ne nuit point
eux ẽnemis. Mais ſi vous y mettez le feu
à temps, elle fait de merueilleux effets.
VI. Enfin, ſi vous voulez ranger vos
enfans & vos ſeruiteurs & faire qu'ils
vous obeiſſent & à voſtre femme; vſez
dans les diuerſes rencontres, de recom-
penſes & de punitions. Les punitions
les tiendront dans la crainte: les recom-
penſes gagnerõt leur amour. Ainſi vous
euiterez les deux extremitez vicieuſes,
d'vne trop grande rigueur , & d'vne
exceſſiue douceur. C'eſt ce que declaroit
Pie III. Souuerain Pontife Il fit peindre
en ſon Symbole des branches d'Oli-
uier auec des verges : & y eſcrire ces
paroles.
vices : la recompenſe, pour les vertus.
Si vous puniſſez bien vos enfans &
vos ſeruiteurs, pour leurs fautes : re-
compenſez les encore mieux , pour
leurs loüables actions : & ſur tout,
pour l'obeiſſance & la ſoumiſſion ,
qu'ils rendent à voſtre femme.
enfans & vos ſeruiteurs & faire qu'ils
vous obeiſſent & à voſtre femme; vſez
dans les diuerſes rencontres, de recom-
penſes & de punitions. Les punitions
les tiendront dans la crainte: les recom-
penſes gagnerõt leur amour. Ainſi vous
euiterez les deux extremitez vicieuſes,
d'vne trop grande rigueur , & d'vne
exceſſiue douceur. C'eſt ce que declaroit
Pie III. Souuerain Pontife Il fit peindre
en ſon Symbole des branches d'Oli-
uier auec des verges : & y eſcrire ces
paroles.
Pœna & præmium. La peine. La peine, pour les
& la recompenſe
vices : la recompenſe, pour les vertus.
Si vous puniſſez bien vos enfans &
vos ſeruiteurs, pour leurs fautes : re-
compenſez les encore mieux , pour
leurs loüables actions : & ſur tout,
pour l'obeiſſance & la ſoumiſſion ,
qu'ils rendent à voſtre femme.
184
La Direction & la Conſolation
§. III.
Auis aux Enfans , qui
meſpriſent leur Mere.
I. Dieu vous ordonne l'amour &
reſpect enuers vos parens : & vous
promet en recompenſe vne longue vie.
Il a preſcrit la recompenſe à ce ſeul
commandement : afin que comme il
n'eſt nul deſir plus ardent que de con-
ſeruer ſa vie : auſſi il n'y ayt rien mieux
obſerué que l'honneur & l'amour en-
uers ceux de qui on l'a receuë.
reſpect enuers vos parens : & vous
promet en recompenſe vne longue vie.
Il a preſcrit la recompenſe à ce ſeul
commandement : afin que comme il
n'eſt nul deſir plus ardent que de con-
ſeruer ſa vie : auſſi il n'y ayt rien mieux
obſerué que l'honneur & l'amour en-
uers ceux de qui on l'a receuë.
Demetrius Phalereus enſeignoit ſa-
gement. Que les ieunes gens doiuent
ſe reſpecter eux-meſmes, dans la ſoli-
tude , les autres , à la rencontre : &
leurs parens, au logis.
gement. Que les ieunes gens doiuent
ſe reſpecter eux-meſmes, dans la ſoli-
tude , les autres , à la rencontre : &
leurs parens, au logis.
II. Tout voſtre bien vous vient
originairement de voſtre Pere & de
voſtre Mere : & ſans eux vous ne ſe-
riez point au nombre des Eſtres. Si
vous viuez : ſi vous voyez : ſi vous
marchez : ſi vous raiſonnez : ſi vous
eſperez le Paradis : tout cela tire ſon
origine , de ce que vous ont baillé
vos parens : ſans qui Dieu n'euſt
iamais crée voſtre ame, ny formé
voſtre corps.
originairement de voſtre Pere & de
voſtre Mere : & ſans eux vous ne ſe-
riez point au nombre des Eſtres. Si
vous viuez : ſi vous voyez : ſi vous
marchez : ſi vous raiſonnez : ſi vous
eſperez le Paradis : tout cela tire ſon
origine , de ce que vous ont baillé
vos parens : ſans qui Dieu n'euſt
iamais crée voſtre ame, ny formé
voſtre corps.
185
des perſonnes Mariées.
Herode le Sophiſte les met au nom-
bre des Dieux, à noſtre eſgard.
bre des Dieux, à noſtre eſgard.
Nos, diſoit il,
parens
ſont les viues images.
des Dieux : ou pluſtoſt, ils ſont des
Dieux domeſtiques, qui nous ont fait
beaucoup de biens. Ils ſont nos crean-
ciers, nos maiſtres, & nos amis
Que ſi voſtre eſtre, voſtre conſer-
uation , voſtre augmentation , tous
vos ornemens d'eſprit & de corps, ſont
des faueurs de vos parens , quel
honneur , quel reſpect , & quelle
ſoumiſſion ne leur deuez vous pas ?
S. Thomas a vne penſée, qui m'agrée
fort.
uation , voſtre augmentation , tous
vos ornemens d'eſprit & de corps, ſont
des faueurs de vos parens , quel
honneur , quel reſpect , & quelle
ſoumiſſion ne leur deuez vous pas ?
S. Thomas a vne penſée, qui m'agrée
fort.
Les enfans, dit-il ,
reçoiuent de.
leurs parens la vie, comme vn fief : à
condition, que s'ils ſont fidelles, ils la
retiennent : & s'ils ſont infidelles & de-
ſloyaux ils la perdent
III. Dieu ne promet pas ſeulement
Eccl.
5. 5. vne longue vie, aux enfans, qui hono-
reront leurs parens. Mais il les aſſeure,
dans l'Eccleſiaſtique : que par ce mo-
yen , ils amaſſent vn threſor : qu'ils
auront des enfans , dont ils rece-
uront de la ioye: qu'ils ſeront exaucez
en leurs prieres : qu'ils ſeront com-
mort : que Dieu les aydera, au temps
de la tribulation142: & que leurs pechez
leur ſeront pardonnez.
Eccl.
5. 5. vne longue vie, aux enfans, qui hono-
reront leurs parens. Mais il les aſſeure,
dans l'Eccleſiaſtique : que par ce mo-
yen , ils amaſſent vn threſor : qu'ils
auront des enfans , dont ils rece-
uront de la ioye: qu'ils ſeront exaucez
en leurs prieres : qu'ils ſeront com-
186
La Direction & la Conſolation
blez de benedictions iuſques à leurmort : que Dieu les aydera, au temps
de la tribulation142: & que leurs pechez
leur ſeront pardonnez.
IV. Au contraire Dieu nous de-
Eccle.
3. 18. clare : qu'il maudira celuy qui prouo-
que ſa Mere à vne iuſte colere, & qui
l'irrite.
In vit.143Eccle.
3. 18. clare : qu'il maudira celuy qui prouo-
que ſa Mere à vne iuſte colere, & qui
l'irrite.
S. Fro-
dobert.
Les Liures ſont pleins d'Hiſtoires
Tragiques , & de punitions tres ri-
goureuſes des enfans , qui ont mal
traité leurs Meres. Vn certain Robert
diſputa auec la ſienne , pour diuiſer
quelques gerbes : & l'ayant priſe par
les cheueux, la ietta par terre. La nuit
ſuiuante, il deuint borgne : & fut ſur-
pris d'vn tremblement ſi vehement,
& ſi douloureux au bras , qu'il le re-
muoit ſans ceſſe , le iettant derriere
ſon dos : & le reflechiſſant ſur ſon
eſtomac. Il perdit auſſi l'eſprit: ce qui
affligea tellement ſa Mere: qu'elle en
mourut, dans trois iours.
Tragiques , & de punitions tres ri-
goureuſes des enfans , qui ont mal
traité leurs Meres. Vn certain Robert
diſputa auec la ſienne , pour diuiſer
quelques gerbes : & l'ayant priſe par
les cheueux, la ietta par terre. La nuit
ſuiuante, il deuint borgne : & fut ſur-
pris d'vn tremblement ſi vehement,
& ſi douloureux au bras , qu'il le re-
muoit ſans ceſſe , le iettant derriere
ſon dos : & le reflechiſſant ſur ſon
eſtomac. Il perdit auſſi l'eſprit: ce qui
affligea tellement ſa Mere: qu'elle en
mourut, dans trois iours.
Euitez les petites deſobeiſſances, &
les petites querelles : & iamais vous
ne viendrez à ces excez.
les petites querelles : & iamais vous
ne viendrez à ces excez.
187
des perſonnes Mariées.
§. IV. Auiz aux Seruiteurs , qui
meſpriſent la Maiſtreſſe du logis.
I. Encore que voſtre Maiſtre
ſouffre vos inſolences contre ſa Fem-
me : par la crainte qu'il a de ſe priuer
de voſtre ſeruice : ne doutez pas, qu'il
vous haït, & deteſte en ſon cœur144: &
que s'il trouue d'autres ſeruiteurs, qui
luy ſoient vtiles , il vous chaſſera de
ſon logis, comme des perſonnes mal
auiſées & arrogantes.
ſouffre vos inſolences contre ſa Fem-
me : par la crainte qu'il a de ſe priuer
de voſtre ſeruice : ne doutez pas, qu'il
vous haït, & deteſte en ſon cœur144: &
que s'il trouue d'autres ſeruiteurs, qui
luy ſoient vtiles , il vous chaſſera de
ſon logis, comme des perſonnes mal
auiſées & arrogantes.
II. Si voſtre Maiſtre, irrité con-
tre ſa Femme, ſe plaiſt pour vn temps
aux vacarmes que vous faites : cela ne
durera gueres. Les coleres des Amants
font des amitiez plus fortes , & plus
ardentes.
tre ſa Femme, ſe plaiſt pour vn temps
aux vacarmes que vous faites : cela ne
durera gueres. Les coleres des Amants
font des amitiez plus fortes , & plus
ardentes.
L'amour s'eſteint quelquefois : mais
il ſe rallume. On trouue des fontaines,
qui eſteignent les flambeaux allumez :
& qui rallument les flambeaux eſteints.
Vn peu de paille embrazée, qu'on paſſe
au deſſus de l'eau, eſchaufe les vapeurs
& les exhalaiſons : & fait de la flamme.
il ſe rallume. On trouue des fontaines,
qui eſteignent les flambeaux allumez :
& qui rallument les flambeaux eſteints.
Vn peu de paille embrazée, qu'on paſſe
au deſſus de l'eau, eſchaufe les vapeurs
& les exhalaiſons : & fait de la flamme.
L'humeur bigearre145 d'vne femme a
glacé le cœur146 de ſon mary : vne ca-
reſſe, faite auec dexterité & prudence
uiendrez vous alors ? Qu'el fruit tire-
rez-vous de vos brauades ? Ne ſerez-
vous pas immolé la la iuſte colere de
l'vn & de l'autre.
glacé le cœur146 de ſon mary : vne ca-
reſſe, faite auec dexterité & prudence
188
La Direction & la Conſolation
l'enflammera plus que iamais. Que de-uiendrez vous alors ? Qu'el fruit tire-
rez-vous de vos brauades ? Ne ſerez-
vous pas immolé la la iuſte colere de
l'vn & de l'autre.
III. Voulez-vous eſtre vn excel-
Hebr.
I. 14. lent ſeruiteur ? Imitez les Anges.
excellent ſeruiteur. I. Ils ſont tres-
obeiſſans: courant où ils ſont enuoyez,
au moindre ſigne de la volonté de
Dieu. II. Ils ſont tres-humbles, ne
refuſant aucun ſeruice , pour vil &
meſpriſable qu'il ſoit : encore qu'ils
Ezech.
I. ſoient les Princes du Paradis. III. Ils
ſont tres-prompts à l'execution. Ils
egalent les eſclairs & les foudres par
leur viteſſe : comme l'aperceut le Pro-
phete Ezechiel. Pour ces raiſons, on
les depeint ſouuent n'ayant que la
teſte & les aiſles: pour declarer, qu'auſ-
ſi-toſt qu'ils ont veu & oüy ce qu'on
leur ordonne, ils volent pour le mettre
en execution.
Hebr.
I. 14. lent ſeruiteur ? Imitez les Anges.
Ils, dit S. Paul,
ſont tous
des Eſprits qui ſer-. Ils ont toutes les qualitez d'vn
uent à Dieu : & qu'il enuoie pour ſeruir
à ceux qui ſont les heritiers du ſalut
eternel
excellent ſeruiteur. I. Ils ſont tres-
obeiſſans: courant où ils ſont enuoyez,
au moindre ſigne de la volonté de
Dieu. II. Ils ſont tres-humbles, ne
refuſant aucun ſeruice , pour vil &
meſpriſable qu'il ſoit : encore qu'ils
Ezech.
I. ſoient les Princes du Paradis. III. Ils
ſont tres-prompts à l'execution. Ils
egalent les eſclairs & les foudres par
leur viteſſe : comme l'aperceut le Pro-
phete Ezechiel. Pour ces raiſons, on
les depeint ſouuent n'ayant que la
teſte & les aiſles: pour declarer, qu'auſ-
ſi-toſt qu'ils ont veu & oüy ce qu'on
leur ordonne, ils volent pour le mettre
en execution.
189
des perſonnes Mariées.
Chacun veut eſtre ſeruy prompte-
ment. Ælius Verus, Empereur Ro-
main147, donnoit des aiſles à ſes ſerui-
teurs, qu'il enuoyoit aux champs : afin
de les aduertir, d'apporter de la prom-
ptitude à l'execution de ſes ordres. Il
Iul
Ceſar
l. I. de
Imper.
Rom.148 les appelloit du nom des vens : Boreas,
Notus , Eurus , Auſter. De la vinrent
les Soldats, qui eſtoient appellez Pen-
nigeri : portans des aiſles. Ils eſtoient
deſtinez à porter les Lettres des Em-
pereurs. C'eſt pourquoy Ariſtide, au
Panegyrique de la Ville de Rome, dit.
Les Lettres nous viennent comme ap-
portées par des oyſeaux. Ils les eſti-
moient eſtre ſoubs la protection de
Mercure , & pour cette raiſon , ils
les depeignoient aiſlez.
ment. Ælius Verus, Empereur Ro-
main147, donnoit des aiſles à ſes ſerui-
teurs, qu'il enuoyoit aux champs : afin
de les aduertir, d'apporter de la prom-
ptitude à l'execution de ſes ordres. Il
Iul
Ceſar
l. I. de
Imper.
Rom.148 les appelloit du nom des vens : Boreas,
Notus , Eurus , Auſter. De la vinrent
les Soldats, qui eſtoient appellez Pen-
nigeri : portans des aiſles. Ils eſtoient
deſtinez à porter les Lettres des Em-
pereurs. C'eſt pourquoy Ariſtide, au
Panegyrique de la Ville de Rome, dit.
Les Lettres nous viennent comme ap-
portées par des oyſeaux. Ils les eſti-
moient eſtre ſoubs la protection de
Mercure , & pour cette raiſon , ils
les depeignoient aiſlez.
Vous eſtes ſoûs la protection du Dieu
Createur des hommes & des Anges.
Seruez luy , en la perſonne de voſtre
Maiſtre & de voſtre Maiſtreſſe, qu'il a
mis en place pour vous commander.
Si vous le regardez en eux : il vous re-
compenſera de vos moindres ſeruices,
comme ſi vous les luy rendiez. S. Paul
dit clairement, aux Epheſiens.149
Createur des hommes & des Anges.
Seruez luy , en la perſonne de voſtre
Maiſtre & de voſtre Maiſtreſſe, qu'il a
mis en place pour vous commander.
Si vous le regardez en eux : il vous re-
compenſera de vos moindres ſeruices,
comme ſi vous les luy rendiez. S. Paul
dit clairement, aux Epheſiens.149
Serui- 190 La Direction & la Conſolation Epheſ..
5. 6. teurs, obeiſſez à vos Maiſtres charnels,
auec crainte & reſpect, en la ſimplicité
de voſtre cœur, comme à Ieſus-Chriſt,
Ne ſeruant point à veuë d'œil, comme
pour plaire aux hommes : mais comme
ſeruiteurs de Ieſus-Chriſt , faiſant la
volonté de Dieu de bon cœur, ſeruant
de bonne volonté comme à N. Seigneur,
& non pas comme aux hommes. Sça-
chant certainement, qu'vn chacun rece-
ura la recompenſe de ſes bonnes œuures:
ſoit qu'il viue dans le ſeruice , ou qu'il
ſoit en pleine liberté
bandeau décoratif
CHAPITRE VI.
§. I.
Auis à la Femme, qui vit dans
§. II.
Auis pour le Mary qui laiſſe
27.18.
CHAPITRE VI.
La Conſolation & la Direction d'vne
Femme, laquelle a vn Mari Auari-
cieux; qui la laiſſe & ſes enfans
dans la neceſſité.
C'Eſt vn cruel ſupplice que de
mourir de faim. Mais ce ſupplice
eſt extraordinairement douloureux, ſi
l'on demeure affamé, dans vn feſtin,
où l'on voit manger les autres , ſans
mourir de faim. Mais ce ſupplice
eſt extraordinairement douloureux, ſi
l'on demeure affamé, dans vn feſtin,
où l'on voit manger les autres , ſans
191
des perſonnes Mariées.
en auoir la permiſſion.Les pauures ſont à plaindre à cau-
ſe de leur indigence. Mais vne femme
d'honneſte famille , qui ſe voit gour-
mandée par vn barbare Auaricieux : &
reduite à vne vie chetiue , qui l'oblige
à ſouffrir beaucoup de meſaiſes150 en ſes
habits , en ſon viure , & en diuers au-
beſoins de la vie , me ſemble encore
plus miſerable, & plus digne de com-
paſſion. Il faut faire vn effort , pour
trouuer quelque adouciſſement à ſa
douleur.
ſe de leur indigence. Mais vne femme
d'honneſte famille , qui ſe voit gour-
mandée par vn barbare Auaricieux : &
reduite à vne vie chetiue , qui l'oblige
à ſouffrir beaucoup de meſaiſes150 en ſes
habits , en ſon viure , & en diuers au-
beſoins de la vie , me ſemble encore
plus miſerable, & plus digne de com-
paſſion. Il faut faire vn effort , pour
trouuer quelque adouciſſement à ſa
douleur.
§. I.
Auis à la Femme, qui vit dans
l'indigence, par l'Auarice de ſon Mary.
I. C'eſt vne pure bonté de Dieu,
en voſtre endroit; que vous ſoyez née
dans l'Europe, & dans vne famille ri-
che & noble. Vous pouuiez naiſtre
dans les deſerts & dans les ſables de
l'Afrique, dans les foreſts de Canada,
dans les glaces & les neiges des Mers
qui ſont ſoubs les deux Poles. Qu'euſ-
ſiez - vous fait pour lors , eſtant à
demy nuë , couuerte d'vn meſchant
bout de peau, nourrie d'herbes & de
n'ayant qu'vn peu de chair mal cuite,
ſans pain & ſans ſaulce?
en voſtre endroit; que vous ſoyez née
dans l'Europe, & dans vne famille ri-
che & noble. Vous pouuiez naiſtre
dans les deſerts & dans les ſables de
l'Afrique, dans les foreſts de Canada,
dans les glaces & les neiges des Mers
qui ſont ſoubs les deux Poles. Qu'euſ-
ſiez - vous fait pour lors , eſtant à
demy nuë , couuerte d'vn meſchant
bout de peau, nourrie d'herbes & de
192
La Direction & la Conſolation
legumes mal appreſtées : ou au plus,n'ayant qu'vn peu de chair mal cuite,
ſans pain & ſans ſaulce?
Faites ſouuent cette reflexion. Et
vous trouuerez , que vous n'eſtes
point des plus infortunées de ce mõde.
vous trouuerez , que vous n'eſtes
point des plus infortunées de ce mõde.
S. Paul , parlant à S. Timothée,
1. Tim.
6.7. Eueſque d'Epheſe , luy dit
1. Tim.
6.7. Eueſque d'Epheſe , luy dit
Nous n'a-
uons rien apporté en ce monde. Il eſt
certain, que nous n'en emporterons rien.
Ayant noſtre viure & nos habits, ſoyons
contens.
II. Les Saincts ont eſté plus mal
In cor.
vitis. nourris , que vous : bien qu'ils meri-
taſſent vn meilleur traittement , que
vous ne deſireriez pour voſtre conten-
tement. S. Marcel Pape, eſtant reſſerré
par le Tyran dans vne eſtable, pour y
panſer les cheuaux : ne mangeoit que
du pain bien ſec , & ne beuuoit que
de l'eau.
In cor.
vitis. nourris , que vous : bien qu'ils meri-
taſſent vn meilleur traittement , que
vous ne deſireriez pour voſtre conten-
tement. S. Marcel Pape, eſtant reſſerré
par le Tyran dans vne eſtable, pour y
panſer les cheuaux : ne mangeoit que
du pain bien ſec , & ne beuuoit que
de l'eau.
2. Les Saincts Antoine, Hono-
rat, & pluſieurs autres ont fait long-
temps le meſme, de leur plein gré.
rat, & pluſieurs autres ont fait long-
temps le meſme, de leur plein gré.
4. Saincte Euſebie, ſurnommée
mangeoit que du pain, meſlé auec ſes
larmes, & auec de la cendre. Elle n'en
prenoit qu'vne fois , en deux , ou en
trois, ou meſme en quatre iours.
Xene
193
des perſonnes Mariées.
Xene ( c'eſt à dire Hoſpitaliere ) nemangeoit que du pain, meſlé auec ſes
larmes, & auec de la cendre. Elle n'en
prenoit qu'vne fois , en deux , ou en
trois, ou meſme en quatre iours.
5. Saincte Geneuiêue, depuis l'â-
ge de quinze ans iuſques à cinquante
ans, ne prenoit qu'vn peu de pain &
de feves, le Dimanche & le leudy. Et
ne faiſoit cuire ſes fêves, qu'enuiron
de quinze en quinze iours.
ge de quinze ans iuſques à cinquante
ans, ne prenoit qu'vn peu de pain &
de feves, le Dimanche & le leudy. Et
ne faiſoit cuire ſes fêves, qu'enuiron
de quinze en quinze iours.
III. La faim fait trouuer les viandes
groſſieres plus agreables , que ne ſe-
roiẽt les mets les plus exquis des Roys,
ſi l'on manque de cet aſſaiſonnement.
groſſieres plus agreables , que ne ſe-
roiẽt les mets les plus exquis des Roys,
ſi l'on manque de cet aſſaiſonnement.
Ptolomée, Roy d'Egypte, faiſant
voyage ne trouua que du pain tres-ſale
& tres-degouſtant. La faim neant-
moins, le contraignit d'en manger. Il
s'eſcria incontinant. Que iamais il
Diod.
l.2.c.1. n'auoit gouſté rien de plus ſauoureux.
voyage ne trouua que du pain tres-ſale
& tres-degouſtant. La faim neant-
moins, le contraignit d'en manger. Il
s'eſcria incontinant. Que iamais il
Diod.
l.2.c.1. n'auoit gouſté rien de plus ſauoureux.
Gnefactus, Roy du meſme Royau-
me, menant vne armée en Arabie, fut
contraint par la faim, de manger dans
le deſert, des viandes dont il n'euſt pas
ſouffert la veuë , en vn autre temps.
Il y prit tant de gouſt qu'il rejetta ab-
tres-ſobre, tout le reſte de ſa vie : &
fit deſcrire la cauſe de ſa frugalité,
dans le Temple de Iupiter, pour ſeruir
d'exemple aux autres Roys, & à tout
le peuple.
me, menant vne armée en Arabie, fut
contraint par la faim, de manger dans
le deſert, des viandes dont il n'euſt pas
ſouffert la veuë , en vn autre temps.
Il y prit tant de gouſt qu'il rejetta ab-
I
194
La Direction & la Conſolation
ſolument les delices de la Cour : futtres-ſobre, tout le reſte de ſa vie : &
fit deſcrire la cauſe de ſa frugalité,
dans le Temple de Iupiter, pour ſeruir
d'exemple aux autres Roys, & à tout
le peuple.
IV. Si vous recourez à Dieu, & luy
repreſentez vos beſoins, auec reſigna-
tion, auec conſtance, & auec perſeue-
rance : il vous fournira tout ce qui
vous ſera neceſſaire , & pour les ha-
bits, & pour l'argent, & pour la nour-
Bollã.
Surius
Metap
Baron riture.
repreſentez vos beſoins, auec reſigna-
tion, auec conſtance, & auec perſeue-
rance : il vous fournira tout ce qui
vous ſera neceſſaire , & pour les ha-
bits, & pour l'argent, & pour la nour-
Bollã.
Surius
Metap
Baron riture.
1. Les Anges ont donné à man-
ger à la B. Oringe , à Saincte Ide , à
Sainct Alexandre, à Sainct Iulien, &
à pluſieurs autres.
ger à la B. Oringe , à Saincte Ide , à
Sainct Alexandre, à Sainct Iulien, &
à pluſieurs autres.
Quatre ans durant , vn Ange ap-
portoit des viandes à la B. Veronique:
& quelquefois il les augmentoit au
double : afin qu'elle en fit part à ſa
compagne
portoit des viandes à la B. Veronique:
& quelquefois il les augmentoit au
double : afin qu'elle en fit part à ſa
compagne
Tous les iours, vn Ange apportoit
vn pain à S. Phoſterius : & luy pour-
uoyoit abondamment, ſelon le nom-
bre des hoſtes qu'il receuoit.
vn pain à S. Phoſterius : & luy pour-
uoyoit abondamment, ſelon le nom-
bre des hoſtes qu'il receuoit.
Vn Ange nourrit, douze iours du-
vne eſtroite priſon, où l'on vouloit le
faire mourir de faim.
195
des perſonnes Mariées.
rant , S. Pontien : qu'on tenoit dansvne eſtroite priſon, où l'on vouloit le
faire mourir de faim.
2. Dieu vous pouruoira d'habits,
qui vous ſeront neceſſaires & à vos en-
fans. Moïſe conduiſoit dans vn deſert
ſterile , trois millions de perſonnes.
Ce voyage dura quarante ans : & Dieu
conſerua en leur entier tous les
veſtemens des hommes & des femmes,
qui eſtoient dans vn âge auancé : &
fit croiſtre ceux des enfans, à propor-
tion que leur corps croiſſoit, en gran-
deur & en groſſeur.
qui vous ſeront neceſſaires & à vos en-
fans. Moïſe conduiſoit dans vn deſert
ſterile , trois millions de perſonnes.
Ce voyage dura quarante ans : & Dieu
conſerua en leur entier tous les
veſtemens des hommes & des femmes,
qui eſtoient dans vn âge auancé : &
fit croiſtre ceux des enfans, à propor-
tion que leur corps croiſſoit, en gran-
deur & en groſſeur.
Les Anges reueſtirent d'vne belle
Robbe Saincte Agnes : que les bour-
reaux tiroient toute nuë, dans vn lieu
infame : d'où elle ſortit victorieuſe &
innocente.
Robbe Saincte Agnes : que les bour-
reaux tiroient toute nuë, dans vn lieu
infame : d'où elle ſortit victorieuſe &
innocente.
3. Si l'argent vous eſt abſolument
neceſſaire, il ne vous manquera point:
ſi vous eſtes fidelle à Dieu ; & ſi vous
implorez ſon aſſiſtance. Il fit, que l'ar-
gent ne manqua iamais dans la bourſe
de Saincte Liduvine. Auſſitoſt qu'elle
en auoit tiré des petites pieces de
monnoye , qui y eſtoient ; elle y en
C'eſtoit comme vne ſource ineſpuiſa-
ble de la liberalité de Dieu.
neceſſaire, il ne vous manquera point:
ſi vous eſtes fidelle à Dieu ; & ſi vous
implorez ſon aſſiſtance. Il fit, que l'ar-
gent ne manqua iamais dans la bourſe
de Saincte Liduvine. Auſſitoſt qu'elle
en auoit tiré des petites pieces de
monnoye , qui y eſtoient ; elle y en
I ij
196
La Direction & la Conſolation
trouuoit d'autres , de meſme valeur.C'eſtoit comme vne ſource ineſpuiſa-
ble de la liberalité de Dieu.
Le B. Herman, ou Ioſeph, eſtant en-
Cachet
in vit. core enfant , la B. Vierge Marie luy
monſtra vne pierre, ſoubs laquelle il
trouua de l'argent , pour ſoulager la
neceſſité de ſes parens & la ſienne. Elle
l'auertit , de faire le meſme dans ſes
beſoins : Ainſi rien ne luy manqua,
qui luy fuſt entierrement neceſſaire.
Cachet
in vit. core enfant , la B. Vierge Marie luy
monſtra vne pierre, ſoubs laquelle il
trouua de l'argent , pour ſoulager la
neceſſité de ſes parens & la ſienne. Elle
l'auertit , de faire le meſme dans ſes
beſoins : Ainſi rien ne luy manqua,
qui luy fuſt entierrement neceſſaire.
Dieu changeroit pluſtoſt les pierres
en argent, que de vous laiſſer perir :
ſi vous l'inuocquez du fond du
cœur. Il peut releuer vos cheutes, &
enrichir voſtre pauureté. Il conuertit,
vne fois de l'eſtain en argent dans
l'Eſpagne : & par ce miracle, enrichit
vn Marchand, que S. Iean l'Aumoſnier
auoit aſſiſté, apres de grandes pertes.
en argent, que de vous laiſſer perir :
ſi vous l'inuocquez du fond du
cœur. Il peut releuer vos cheutes, &
enrichir voſtre pauureté. Il conuertit,
vne fois de l'eſtain en argent dans
l'Eſpagne : & par ce miracle, enrichit
vn Marchand, que S. Iean l'Aumoſnier
auoit aſſiſté, apres de grandes pertes.
V. Lors que le murmure ſe ſaiſit
de voſtre cœur151: & que vous com-
mencez de vous indigner contre vo-
ſtre mary, de ce qu'il ne vous fournit
pas ſuffiſamment d'argent pour vos
habits, pour voſtre entretien, & pour
voſtre famille : Conſiderez que poſſi-
debtes & tous les embaras de voſtre
meſnage , pour leſquels voſtre mary
eſpargne: ſans vous donner de la dou-
leur, pour ſes mauaiſes affaires.
de voſtre cœur151: & que vous com-
mencez de vous indigner contre vo-
ſtre mary, de ce qu'il ne vous fournit
pas ſuffiſamment d'argent pour vos
habits, pour voſtre entretien, & pour
voſtre famille : Conſiderez que poſſi-
197
des perſonnes Mariées.
ble vous ne ſçauez pas toutes lesdebtes & tous les embaras de voſtre
meſnage , pour leſquels voſtre mary
eſpargne: ſans vous donner de la dou-
leur, pour ſes mauaiſes affaires.
VI. Enfin, eſtimez que l'eſtat de
voſtre miſere eſt tres-propre, pour vous
enrichir de pluſieurs vertus : & vous
faire vne ſaincte.
voſtre miſere eſt tres-propre, pour vous
enrichir de pluſieurs vertus : & vous
faire vne ſaincte.
La Palme ſe plaiſt dans vn ſol, qui
ſoit ſalé. Elle ne veut point eſtre en-
graiſſée auec du fumier.
ſoit ſalé. Elle ne veut point eſtre en-
graiſſée auec du fumier.
Le Pouliot, dit Ciceron, fleurit en
lib. I.
de di-
uinat.152 hyuer , dans la plus grande rigueur
du froid.
lib. I.
de di-
uinat.152 hyuer , dans la plus grande rigueur
du froid.
La vertu fleurit, porte des fruits, &
ſe fortifie dans l'affliction & l'indi-
gence : & languit dans l'abondance,
où elle eſt touſiours en danger de
perir.
ſe fortifie dans l'affliction & l'indi-
gence : & languit dans l'abondance,
où elle eſt touſiours en danger de
perir.
VII. Vous ne deuez point vous te-
nir pauure & miſerable : ſi vous eſtes
riche, aux yeux de Dieu & de ſes An-
ges : l'or & l'argent, dit Euripide, ne
ſont nullement les veritables richeſſes:
mais les vertus.
nir pauure & miſerable : ſi vous eſtes
riche, aux yeux de Dieu & de ſes An-
ges : l'or & l'argent, dit Euripide, ne
ſont nullement les veritables richeſſes:
mais les vertus.
Pythagore diſoit,
Que les richeſſes: Iuſques icy ce Philoſophe.
I iij 198 La Direction & la Conſolation de la terre ſont vne Anchre fort foible :
que la gloire l'eſt encore plus : & que le
corps & le reſte ſont ſans force. Quelles
ſont donc les Anchres fortes & aſſurées?
La prudence, la force, la magnanimité
& les autres vertus. Elles ne ſont point
ébranlées par aucune tempeſte. Dieu a
mis cette Loy : que la ſeule vertu eſt
ſolide & puiſſante : & que tout le reſte
n'eſt qu'vne pure badinerie & ſottiſe
d'enfant
VIII. Meſpriſez donc tout ce que
vous deſirez, hors de Dieu : & vous
croirez auoir touſiours ſuffiſamment
des biens de la terre : & meſmes du
peu que vous aurez par voſtre mary,
vous prendrez plaiſir d'en retrancher
vne partie: afin de meriter dauantage.
vous deſirez, hors de Dieu : & vous
croirez auoir touſiours ſuffiſamment
des biens de la terre : & meſmes du
peu que vous aurez par voſtre mary,
vous prendrez plaiſir d'en retrancher
vne partie: afin de meriter dauantage.
§. II.
Auis pour le Mary qui laiſſe
ſa Femme & Enfans en neceſſité.
I. Voſtre eſpargne doit auoir vne
fin raiſonnable ? Pour qui amaſſez
vous, ſi ce n'eſt pour voſtre femme &
pour vos enfans ? Que ſi vous cher-
chez leur bien, & leur contentement:
ne vaut-il pas mieux les contenter dés
maintenant : que de les inquieter vn
15. long-temps , pour les mettre à leur
aiſe apres pluſieurs années? l'Auarice
eſt le trouble des familles : comme
Dieu meſme nous aſſeure. Ne vous
en laiſſez point gourmander.
fin raiſonnable ? Pour qui amaſſez
vous, ſi ce n'eſt pour voſtre femme &
pour vos enfans ? Que ſi vous cher-
chez leur bien, & leur contentement:
ne vaut-il pas mieux les contenter dés
maintenant : que de les inquieter vn
199
des perſonnes Mariées.
Prou15. long-temps , pour les mettre à leur
aiſe apres pluſieurs années? l'Auarice
eſt le trouble des familles : comme
Dieu meſme nous aſſeure. Ne vous
en laiſſez point gourmander.
II. Voſtre Auarice vous priue de
l'vtilité de vos richeſſes.
ſiaſtique,
l'vtilité de vos richeſſes.
Celuy qui, dit Dieu en l'Eccle-
aime les richeſſes
ſiaſtique,
n'en tirera aucun profit.
Il eſt ſemblable à ceux qui ſont
condamnez aux mines d'or & d'ar-
gent: Ils en manient beaucoup: mais
ils n'en ſont pas plus riches. Car rien
n'en reuient à leur profit. Ils demeu-
rent touſiours , dans leurs cachots &
dans leurs tenebres : tandis que les
Autels & les Palais des Roys reluiſent
par le brillant de ces metaux.
condamnez aux mines d'or & d'ar-
gent: Ils en manient beaucoup: mais
ils n'en ſont pas plus riches. Car rien
n'en reuient à leur profit. Ils demeu-
rent touſiours , dans leurs cachots &
dans leurs tenebres : tandis que les
Autels & les Palais des Roys reluiſent
par le brillant de ces metaux.
Non ſeulement l'Auaricieux ne
maintient point le luſtre de ſa naiſſance
par la ſplendeur de ſes habits , & par
le brillant des meubles de ſa maiſon :
mais il meurt de faim , au milieu de
l'abondance. La Femme de Pythius,
Roy de Bithinie, le declara par vne in-
genieuſe inuention. Ce Prince, pouſſé
par vne inſatiable conuoitiſe d'amaſſer
part de ſes ſujets dans les mines. Sa
femme luy fit de toutes ſortes de vian-
des, en or & en argent : & les luy pre-
ſenta , au temps du diſner. Pythius
prit d'abord vn grand plaiſir à ce ſer-
uice. Le deuxieſme & troiſieſme ſer-
uice ſe faiſant de la meſme ſorte, quoy
qu'il demandaſt à manger, il ſe mit en
colere. La Reine, qui eſtoit plus pru-
dente, luy dit alors. Sire , vous tuez
continuellement vos ſujets, pour vne
choſe que vous voyez ne pouuoir ſou-
ſtenir voſtre vie. Contẽtez vous de tant
de biens, que vous auez: & traittez vous
à la Royale. Faites cultiuer les champs
de voſtre Royaume : & viure voſtre
peuple en repos & en abondance. Il
crut ce ſage auis & fut depuis vn
excellent Prince; aimé de tous ſes ſu-
jets, & redouté de tous ſes voiſins.
maintient point le luſtre de ſa naiſſance
par la ſplendeur de ſes habits , & par
le brillant des meubles de ſa maiſon :
mais il meurt de faim , au milieu de
l'abondance. La Femme de Pythius,
Roy de Bithinie, le declara par vne in-
genieuſe inuention. Ce Prince, pouſſé
par vne inſatiable conuoitiſe d'amaſſer
I iiij
200
La Direction & la Conſolation
de l'or & de l'argent, fatiguoit la pluſ-part de ſes ſujets dans les mines. Sa
femme luy fit de toutes ſortes de vian-
des, en or & en argent : & les luy pre-
ſenta , au temps du diſner. Pythius
prit d'abord vn grand plaiſir à ce ſer-
uice. Le deuxieſme & troiſieſme ſer-
uice ſe faiſant de la meſme ſorte, quoy
qu'il demandaſt à manger, il ſe mit en
colere. La Reine, qui eſtoit plus pru-
dente, luy dit alors. Sire , vous tuez
continuellement vos ſujets, pour vne
choſe que vous voyez ne pouuoir ſou-
ſtenir voſtre vie. Contẽtez vous de tant
de biens, que vous auez: & traittez vous
à la Royale. Faites cultiuer les champs
de voſtre Royaume : & viure voſtre
peuple en repos & en abondance. Il
crut ce ſage auis & fut depuis vn
excellent Prince; aimé de tous ſes ſu-
jets, & redouté de tous ſes voiſins.
III. L'Auaricieux , comme vous
voyez, eſt dommageable aux autres.
Thomas Murs153 le compare à vn chien
farouche : qui eſt attaché à vn ratelier
où il y a du foin. Il n'en mange point
& empeſche les autres animaux d'en
voyez, eſt dommageable aux autres.
Thomas Murs153 le compare à vn chien
farouche : qui eſt attaché à vn ratelier
où il y a du foin. Il n'en mange point
& empeſche les autres animaux d'en
201
des perſonnes Mariées.
manger.IV. Les biens que vous amaſſerez
Ælian.
l. 6. c.
51. ne vous raſſaſieront iamais, tandis que
vous retiendrez l'Auarice dans vo-
ſtre cœur. Ceux qui ſont mordus du
ſerpent Dipſas ſont tellement emflam-
mez d'vne furieuſe ſoif : que plus ils
boiuent, plus ils ont ſoif.
Ælian.
l. 6. c.
51. ne vous raſſaſieront iamais, tandis que
vous retiendrez l'Auarice dans vo-
ſtre cœur. Ceux qui ſont mordus du
ſerpent Dipſas ſont tellement emflam-
mez d'vne furieuſe ſoif : que plus ils
boiuent, plus ils ont ſoif.
S. Auguſtin conſiderant l'auidité
inſatiable des Auaricieux, eſcrit qu'ils
De ver
Dom. ſont pires, que les beſtes brutes. Voi-
cy ſes paroles.
Iob.inſatiable des Auaricieux, eſcrit qu'ils
De ver
Dom. ſont pires, que les beſtes brutes. Voi-
cy ſes paroles.
Que veut dire cette inſa-.
tiable auidité de la concupiſcence. Les be-
ſtes irraiſonnables mettent des bornes à
deſirs. Elles ne rauiſſent, que preſſées
de la faim. Elles eſpargnent leur proye,
auſſitoſt qu'elles ſe ſont remplis ſuffi-
ſamment. La ſeule auarice des riches
eſt inſatiable. Elle rauit touſiours: & n'eſt
iamais contente. Elle ne craint point
Dieu : & ne reſpecte point les hommes.
Elle ne pardonne point à ſon Pere. Elle
ne connoiſt point ſa Mere. Elle n'obëit
point à ſes Freres : & ne garde point
la foy à ſes Amis. Elle opprime les
Veuues: attaque les Orphelins: iette en
eſclauage ceux qui ſont libres: & eſt tous-
202 La Direction & la Conſolation iours preſte à faire de faux ſermens
27.18.
V. Vous vous mettez en peril, de
renuerſer voſtre famille , en la ba-
tiſſant par vne Auarice meſquine &
ſordide. Iob dit, que l'Auaricieux ba-
ſtit ſa maiſon, comme la tigne154. Les
Septante tournent,
ſant : & la tigne156, en rongeant. Mais
enfin tout perit bien toſt : Dieu ren-
uerſant tout ce que l'auare auoit
amaſſé aux deſpens d'autruy : & en
fais cruellement ſouffrir ceux à qui il
deuoit donner du ſecours.
renuerſer voſtre famille , en la ba-
tiſſant par vne Auarice meſquine &
ſordide. Iob dit, que l'Auaricieux ba-
ſtit ſa maiſon, comme la tigne154. Les
Septante tournent,
Sa maiſon ſe fera,. L'aragnée fait ſa toile, en s'eſpui-
comme celle de la tigne155 & de l'ara-
gnée
ſant : & la tigne156, en rongeant. Mais
enfin tout perit bien toſt : Dieu ren-
uerſant tout ce que l'auare auoit
amaſſé aux deſpens d'autruy : & en
fais cruellement ſouffrir ceux à qui il
deuoit donner du ſecours.
Theop.
Baron
8. tom.
anne
602. L'Empereur Maurice ne voulut
point racheter, pour fort peut d'argent,
pluſieurs ſoldats, que Chaian Roy des
Auares auoit pris dans vne bataille.
C'eſt pourquoy ce Roy les fit tous
eſgorger, auant que de retourner en
ſon pays. Cette auarice de Maurice de-
plut ſi fort à Dieu & à tous les ſujets
de l'Empire, particulierement aux ſol-
dats : qu'vne ſedition s'eſtant eſleuée
dans l'armée , à raiſon des quartiers
d'hyuer , Phocas fut proclamé Em-
eſt receu par le Senat, & Couronné par
le Patriarche : Ce Tyran fit prendre
Maurice , ces cinq enfans maſles, ſa
femme & ſes filles, & les fit tous maſ-
ſacrer. Voila le fruit d'vne laſche
auarice.
Baron
8. tom.
anne
602. L'Empereur Maurice ne voulut
point racheter, pour fort peut d'argent,
pluſieurs ſoldats, que Chaian Roy des
Auares auoit pris dans vne bataille.
C'eſt pourquoy ce Roy les fit tous
eſgorger, auant que de retourner en
ſon pays. Cette auarice de Maurice de-
plut ſi fort à Dieu & à tous les ſujets
de l'Empire, particulierement aux ſol-
dats : qu'vne ſedition s'eſtant eſleuée
dans l'armée , à raiſon des quartiers
d'hyuer , Phocas fut proclamé Em-
203
des perſonnes Mariées.
pereur. Il accourt à Conſtantinople : yeſt receu par le Senat, & Couronné par
le Patriarche : Ce Tyran fit prendre
Maurice , ces cinq enfans maſles, ſa
femme & ſes filles, & les fit tous maſ-
ſacrer. Voila le fruit d'vne laſche
auarice.
Ce qui arriue aux Empires, arriue
aux familles particulieres : & ſi l'on
n'y perd pas la vie, par ce vice infame
d'auarice : on y diminue ſes biens. S.
lib. de
gloria
Conſ
c7.c.8. Gregoire de Tours raconte. Qu'vn
Nautonnier refuſant l'aumoſne à vn
pauure : & luy diſant que ſon Nauire
ne portoit que des pierres , fut bien
eſtonné, que tout le pain, tous les fruits
& toutes les viandes , qui eſtoient
dans ce Nauire , ſe conuertirent en
pierres. Et ce Sainct aſſure en auoir
veu des Oliues & des Dattes , plus
dures que du marbre.
aux familles particulieres : & ſi l'on
n'y perd pas la vie, par ce vice infame
d'auarice : on y diminue ſes biens. S.
lib. de
gloria
Conſ
c7.c.8. Gregoire de Tours raconte. Qu'vn
Nautonnier refuſant l'aumoſne à vn
pauure : & luy diſant que ſon Nauire
ne portoit que des pierres , fut bien
eſtonné, que tout le pain, tous les fruits
& toutes les viandes , qui eſtoient
dans ce Nauire , ſe conuertirent en
pierres. Et ce Sainct aſſure en auoir
veu des Oliues & des Dattes , plus
dures que du marbre.
VI. Quand l'auarice ſeroit vtile à
l'agrandiſſement de voſtre famille,
vous la deuriez fuir: parce qu'elle perd
voſtre ame : en comparaiſon de la-
quelle vous deuez meſpriſer tous les
biens de la terre, comme du limon &
Auguſtin ,
l'agrandiſſement de voſtre famille,
vous la deuriez fuir: parce qu'elle perd
voſtre ame : en comparaiſon de la-
quelle vous deuez meſpriſer tous les
biens de la terre, comme du limon &
204
La Direction & la Conſolation
du fumier. O hommes, s'eſcrie Sainct
Auguſtin ,
quelle folie vous renuerſe.
l'eſprit : Vous perdez la veritable vie.
vous tuez voſtre ame: vous acquerez de
l'or, qui n'eſt que de la boüe , & vous
perdez le Ciel, qui vous offre des thre-
ſors Eternels
S. Chryſologue entre dans la meſme
In ſer. penſée, & dans le meſme zele.
In ſer. penſée, & dans le meſme zele.
Celuy-, dit-il ,
la
eſt vn laſche, qui eſtant ap-.
pellé à vn Royaume, s'amuſe à vn petit
gain dans ſa maiſon. Il faut auoir vne
ame de plomb & de fer, pour estimer
dauantage vn eſcu, que les threſors d'vn
Roy. C'eſt auoir peu de ſens & de iu-
gement , de vouloir perdre des choſes
tres-grandes, pour de tres-viles & tres-
abjectes : & de ſe laiſſer eſchaper des
mains, des biens Eternels, pour ceux qui
ne font que couler auec le temps
Ne vous laiſſez point emporter à l'é-
C? lã
lib. 3.
de rer.
?
c. 56. clat de l'or & de l'argent : mais conſide-
rez, que la mort de vôtre ame eſt cachée
ſoubs ce brillant , qui n'eſt qu'vne
pure illuſion du demon , & vne in-
uention pour vous perdre ſans reſource.
Cela ſe peut expliquer , par la mali-
Roy d'Ecoſſe, ayant tué Deſſus parent
de cette Princeſſe , elle ſe reſolut à la
vengeance. Elle fit faire à ce deſſein,
vne belle ſtatuë, qui tenoit en ſa main
vne pomme d'or, ornée de riches pier-
Hector
Boet-
tius. l.
21.hiſt.
Scot. res precieuſes. L'Artifice eſtoit : que
lors qu'on la tiroit à ſoy: pluſieurs iaue-
lots ſortoient de la ſtatuë ; qui ſe lan-
çoient ſur celuy qui s'en approchoit.
Fenella fit poſer cette ſtatuë dans vn
Iardin de plaiſance : & inuita le Roy
de s'y venir diuertir. Ce Prince, ne
ſçachant rien du ſecret , fut raui à la
premiere veuë de cette ſtatuë : il s'en
approche auec ioye, & ſe ſaiſit de cette
pomme. Incontinent157, il fut percé de
ſes fleches cachées : & tomba roide
mort, au milieu de ſes Princes, de ſa
Nobleſſe & de ſes Gardes. Ce qui ar-
riua pour lors au corps de ce Roy, ar-
riue tous les iours en l'ame des auares.
Ils rauiſſent l'or : & il les tuë. Quel
profit leur en reſte-il: veu qu'il faut per-
dre meſmes cette meurtriere maſſe de
terre munie?
C? lã
lib. 3.
de rer.
?
c. 56. clat de l'or & de l'argent : mais conſide-
rez, que la mort de vôtre ame eſt cachée
ſoubs ce brillant , qui n'eſt qu'vne
pure illuſion du demon , & vne in-
uention pour vous perdre ſans reſource.
Cela ſe peut expliquer , par la mali-
205
des perſonnes Mariées.
cieuſe ſubtilité de Fenella. KennethusRoy d'Ecoſſe, ayant tué Deſſus parent
de cette Princeſſe , elle ſe reſolut à la
vengeance. Elle fit faire à ce deſſein,
vne belle ſtatuë, qui tenoit en ſa main
vne pomme d'or, ornée de riches pier-
Hector
Boet-
tius. l.
21.hiſt.
Scot. res precieuſes. L'Artifice eſtoit : que
lors qu'on la tiroit à ſoy: pluſieurs iaue-
lots ſortoient de la ſtatuë ; qui ſe lan-
çoient ſur celuy qui s'en approchoit.
Fenella fit poſer cette ſtatuë dans vn
Iardin de plaiſance : & inuita le Roy
de s'y venir diuertir. Ce Prince, ne
ſçachant rien du ſecret , fut raui à la
premiere veuë de cette ſtatuë : il s'en
approche auec ioye, & ſe ſaiſit de cette
pomme. Incontinent157, il fut percé de
ſes fleches cachées : & tomba roide
mort, au milieu de ſes Princes, de ſa
Nobleſſe & de ſes Gardes. Ce qui ar-
riua pour lors au corps de ce Roy, ar-
riue tous les iours en l'ame des auares.
Ils rauiſſent l'or : & il les tuë. Quel
profit leur en reſte-il: veu qu'il faut per-
dre meſmes cette meurtriere maſſe de
terre munie?
206
La Direction & la Conſolation
VII. C'eſt encore vne conſideration
qui doit moderer voſtre auidité. Vous
perdrez, enfin tous ces biens de terre:
& vous n'en emporterez rien en l'au-
Iob 20.
15. tre monde.
qui doit moderer voſtre auidité. Vous
perdrez, enfin tous ces biens de terre:
& vous n'en emporterez rien en l'au-
Iob 20.
15. tre monde.
L'impie vomira les richeſſes.
qu'il a deuorées : & Dieu les luy ar-
rachera du ventre
Cela ſe peut expliquer, par ce qui
arriue aux Corbeaux en la Chine, &
qui eſt arriué aux Chats d'Affrique
aux Iſles Balcares.
arriue aux Corbeaux en la Chine, &
qui eſt arriué aux Chats d'Affrique
aux Iſles Balcares.
1ff. Les Mandarins Chinois nourriſ-
Matt.
l.6. ſent de grands Corbeaux domeſtiques,
qui ſont duits158 à la peſche. Ils leur ſer-
rent le cou auec vn nœud, qui ne leur
oſte point la reſpiration : mais qui les
empeſche d'aualer ce qu'ils prennent.
Ces Corbeauxſe lançent auec vne ad-
mirable viſteſſe & adreſſe dans l'eau :
prennent de petits poiſſons dans leur
bouche, & de gros en leur bec: & les
reportent au logis, où l'on leur fait ren-
dre gorge, & laſcher toute leur proye.
Matt.
l.6. ſent de grands Corbeaux domeſtiques,
qui ſont duits158 à la peſche. Ils leur ſer-
rent le cou auec vn nœud, qui ne leur
oſte point la reſpiration : mais qui les
empeſche d'aualer ce qu'ils prennent.
Ces Corbeauxſe lançent auec vne ad-
mirable viſteſſe & adreſſe dans l'eau :
prennent de petits poiſſons dans leur
bouche, & de gros en leur bec: & les
reportent au logis, où l'on leur fait ren-
dre gorge, & laſcher toute leur proye.
2. Les Habitans des Iſles Major-
Stra-
bo. l. 3. que & Minorque eſtoient ſi moleſtez,
par vne multitude preſque infinie de
Lapins : qu'ils furent ſur le point de
me des Ambaſſadeurs, pour demander
vn autre pays. Enfin, ils s'auiſerent de
faire entrer dans les tanieres de ces
petits animaux, des Chats d'Affrique.
Mais ils leur lierent la gorge: afin que
pouuant chaſſer ou dechirer leur proye,
ils ne peuſſent la deuorer.
Stra-
bo. l. 3. que & Minorque eſtoient ſi moleſtez,
par vne multitude preſque infinie de
Lapins : qu'ils furent ſur le point de
207
des perſonnes Mariées.
quitter leurs Iſles , & d'enuoyer à Ro-me des Ambaſſadeurs, pour demander
vn autre pays. Enfin, ils s'auiſerent de
faire entrer dans les tanieres de ces
petits animaux, des Chats d'Affrique.
Mais ils leur lierent la gorge: afin que
pouuant chaſſer ou dechirer leur proye,
ils ne peuſſent la deuorer.
Vous n'emporterez auec vous en
l'autre monde, ny or ny argent, ny di-
gnitez, ny palais, ny prez, ny champs,
ny vignes, ny bois : pourquoy donc
allez-vous à la chaſſe de ces biens, auec
tant d'empreſſement. Ne faites point
miſerable voſtre famille, en luy cachant
des biens que vous ne pouuez long-
temps conſeruer.
l'autre monde, ny or ny argent, ny di-
gnitez, ny palais, ny prez, ny champs,
ny vignes, ny bois : pourquoy donc
allez-vous à la chaſſe de ces biens, auec
tant d'empreſſement. Ne faites point
miſerable voſtre famille, en luy cachant
des biens que vous ne pouuez long-
temps conſeruer.
VIII. Non ſeulement vous ſerez
bien-toſt obligé par la mort, & peut
eſtre auparauant par quelque reuers de
fortune, de laiſſer toutes vos richeſſes:
mais vous ſentirez de tres-cruelles
douleurs en cette perte , ſi vous atta-
chez trop voſtre affection à ces biens
periſſables.
bien-toſt obligé par la mort, & peut
eſtre auparauant par quelque reuers de
fortune, de laiſſer toutes vos richeſſes:
mais vous ſentirez de tres-cruelles
douleurs en cette perte , ſi vous atta-
chez trop voſtre affection à ces biens
periſſables.
Poggius aſſeure; que de ſon temps,
De a-
uarit. vn homme addonné à l'avarice, eſtant
baſſin plein d'eſcus d'or. Et qu'alors
il leur demanda inſtamment du ſe-
cours, leur alleguant. Qu'ils les auoit
gardez, comme ſon ame propre: & que
c'eſtoit en cette extremité , où ils
deuoient l'aſſiſter. Il repeta ſouuent
ces paroles. Ah! qui ſont ceux à qui ie
vous laiſſeray. Enfin, il mourut dans
ces regrets : & quitta auec larmes &
auec ſanglots, ce qu'il auoit ſi ardem-
ment cherché : ſi ſoigneuſement con-
ſerué : & ſi inutilement & ſottement
inuoqué.
De a-
uarit. vn homme addonné à l'avarice, eſtant
208
La Direction & la Conſolation
preſt de rendre l'ame ſe fit apporter vnbaſſin plein d'eſcus d'or. Et qu'alors
il leur demanda inſtamment du ſe-
cours, leur alleguant. Qu'ils les auoit
gardez, comme ſon ame propre: & que
c'eſtoit en cette extremité , où ils
deuoient l'aſſiſter. Il repeta ſouuent
ces paroles. Ah! qui ſont ceux à qui ie
vous laiſſeray. Enfin, il mourut dans
ces regrets : & quitta auec larmes &
auec ſanglots, ce qu'il auoit ſi ardem-
ment cherché : ſi ſoigneuſement con-
ſerué : & ſi inutilement & ſottement
inuoqué.
Concluez : & reſoluez vous de
n'eſtre plus ſi auide des richeſſes, qui
ſont volantes & paſſageres. Pouruoyez
honneſtement voſtre femme , & vos
enfans, & toute voſtre famille. Tout
ce que vous y emploierez, vous cauſera
du merite aupres de Dieu , & vous
comblera de ioye en l'ame. Tout ce
que vous reſeruerez mal à propos :
ne vous ſeruira que de tourment, en ſa
conſeruation & en ſa perte.
n'eſtre plus ſi auide des richeſſes, qui
ſont volantes & paſſageres. Pouruoyez
honneſtement voſtre femme , & vos
enfans, & toute voſtre famille. Tout
ce que vous y emploierez, vous cauſera
du merite aupres de Dieu , & vous
comblera de ioye en l'ame. Tout ce
que vous reſeruerez mal à propos :
ne vous ſeruira que de tourment, en ſa
conſeruation & en ſa perte.
209
des perſonnes Mariées.
CHAPITRE VII.
La Conſolation & la Direction d'vne
Femme, dont le mary eſt faſcheux à
ſon Pere, à ſa Mere, à ſes Enfans
d'vn autre lict, & aux Seruiteurs &
Seruantes qu'elle affectionne.
LA neceſſité des familles & des
affaires contraint quelquefois à
ſe remarier. Mais c'eſt vn miracle, ſi la
charité s'y trouue ſi parfaite : qu'il n'y
interuienne pluſieurs inconueniens &
pluſieurs deplaiſirs. Voyons briéue-
ment, comment on s'y doit compor-
ter, pour en tirer du profit.
affaires contraint quelquefois à
ſe remarier. Mais c'eſt vn miracle, ſi la
charité s'y trouue ſi parfaite : qu'il n'y
interuienne pluſieurs inconueniens &
pluſieurs deplaiſirs. Voyons briéue-
ment, comment on s'y doit compor-
ter, pour en tirer du profit.
§. I. Aduis à la Femme , dont les
parens, & les domeſtiques ſont mal
traitez.
I. Lors que vous vous eſtes reſoluë
à vn ſecond Mariage : vous vous eſtes
expoſée à toutes les difficultez & à
toutes les douleurs, qui ont couſtume
d'y arriuer. Publius Syrus dit inge-
nieuſement, à ce ſujet. Si celuy qui eſt
eſchapé d'vn naufrage ſe remet dere-
ſon d'accuſer Neptune , le Dieu des
flots, de ce qu'il permet aux vens de
ſouffler contre ſon vaiſſeau.
à vn ſecond Mariage : vous vous eſtes
expoſée à toutes les difficultez & à
toutes les douleurs, qui ont couſtume
d'y arriuer. Publius Syrus dit inge-
nieuſement, à ce ſujet. Si celuy qui eſt
eſchapé d'vn naufrage ſe remet dere-
210
La Direction & la Conſolation
chef ſur Mer : il n'a point de iuſte rai-ſon d'accuſer Neptune , le Dieu des
flots, de ce qu'il permet aux vens de
ſouffler contre ſon vaiſſeau.
Pour cette raiſon, pluſieurs femmes
prudentes ont rejetté les ſecondes
Nopces : qu'on leur offroit auec in-
ſtance. 1. Annia preſſée de ſe remarier
en la fleur de ſa ieuneſſe & de ſa beau-
té; le refuſa, diſant. Ie ne le ne le feray
iamais. Si i'auois vn bon Mary, i'au-
rois trop peur de ſa mort. Si i'en ren-
controis vn faſcheux : ie ſerois inſenſée
de le prendre, apres le mien qui eſtoit
d'vne tres-excellente bonté. 2. Vale-
ria eſtant interrogée, pourquoy apres
la mort de ſon Mary, elle n'en prenoit
pas vn autre. Parce que, dit-elle, en-
core que le mien ſoit mort aux autres
il eſt encore viuant, & viura touſiours
pour moy. 3. Martia, Fille de Caton,
repartit à la meſme demande. A peine
trouuerai-je vn Mary : qui me cherche
pluſtoſt que mes biens.
prudentes ont rejetté les ſecondes
Nopces : qu'on leur offroit auec in-
ſtance. 1. Annia preſſée de ſe remarier
en la fleur de ſa ieuneſſe & de ſa beau-
té; le refuſa, diſant. Ie ne le ne le feray
iamais. Si i'auois vn bon Mary, i'au-
rois trop peur de ſa mort. Si i'en ren-
controis vn faſcheux : ie ſerois inſenſée
de le prendre, apres le mien qui eſtoit
d'vne tres-excellente bonté. 2. Vale-
ria eſtant interrogée, pourquoy apres
la mort de ſon Mary, elle n'en prenoit
pas vn autre. Parce que, dit-elle, en-
core que le mien ſoit mort aux autres
il eſt encore viuant, & viura touſiours
pour moy. 3. Martia, Fille de Caton,
repartit à la meſme demande. A peine
trouuerai-je vn Mary : qui me cherche
pluſtoſt que mes biens.
II. Quand vous voyez, que voſtre
Mary fait eſclater ſa paſſion contre vo-
ſtre Pere, voſtre Mere & vos Enfans, &
tes: conſiderez qu'il vaut mieux, qu'il
la monſtre, que de la couuer dans ſon
cœur159. La flamme bruſle par ſon ardeur:
mais elle reſioüit, par ſa lumiere. La fu-
mée eſt intolerable ; & eſtouffe , ſans
qu'on y penſe.
Mary fait eſclater ſa paſſion contre vo-
ſtre Pere, voſtre Mere & vos Enfans, &
211
des perſonnes Mariées.
contre vos Seruiteurs & vos Seruan-tes: conſiderez qu'il vaut mieux, qu'il
la monſtre, que de la couuer dans ſon
cœur159. La flamme bruſle par ſon ardeur:
mais elle reſioüit, par ſa lumiere. La fu-
mée eſt intolerable ; & eſtouffe , ſans
qu'on y penſe.
III. Recompenſez par vos bons
ſeruices, & par voſtre tendreſſe, enuers
vos parens, & enuers vos domeſtiques,
les boutades & les excez de voſtre
Mary : Ne leur donnez neantmoins
rien à ſon inſceu, ſans l'aduis de voſtre
Confeſſeur , ou de quelque homme
ſçauant & experimenté. Voſtre Mary
eſt le Maiſtre & le Diſpenſateur des
biens de la famille.
ſeruices, & par voſtre tendreſſe, enuers
vos parens, & enuers vos domeſtiques,
les boutades & les excez de voſtre
Mary : Ne leur donnez neantmoins
rien à ſon inſceu, ſans l'aduis de voſtre
Confeſſeur , ou de quelque homme
ſçauant & experimenté. Voſtre Mary
eſt le Maiſtre & le Diſpenſateur des
biens de la famille.
IV. Ne precipitez rien: diſſimulez
pour vn temps , ſi l'indignation eſt
trop grande. Maintenez, auec plus de
ſoin, l'affection que vous porte voſtre
Mary. Si vous ne la perdez point: il ne
ſera pas bien difficile d'accommoder
tout en ſon temps. Lors que vous
le verrez en bonne humeur, teſmoi-
gnez luy que ce procedé trop auſtere
enuers vos parens, ou enuers vos ſer-
uiteurs, vous afflige, vous ſerre le cœur160
Si vous auez d'ailleurs , quelque in-
diſpoſition, ce moyen ſera tres-efficace.
pour vn temps , ſi l'indignation eſt
trop grande. Maintenez, auec plus de
ſoin, l'affection que vous porte voſtre
Mary. Si vous ne la perdez point: il ne
ſera pas bien difficile d'accommoder
tout en ſon temps. Lors que vous
le verrez en bonne humeur, teſmoi-
gnez luy que ce procedé trop auſtere
enuers vos parens, ou enuers vos ſer-
uiteurs, vous afflige, vous ſerre le cœur160
212
La Direction & la Conſolation
& vous met en peril de voſtre ſanté.Si vous auez d'ailleurs , quelque in-
diſpoſition, ce moyen ſera tres-efficace.
V. Si la prudence, ou la neceſſité,
vous contraint de ne point tant hanter
voſtre Pere & voſtre Mere : ne man-
quez pas, de leur faire ſçauoir la bonne
volonté que vous auez pour eux : & le
deſir, que vous conſeruez de trauailler
à vne bonne paix.
vous contraint de ne point tant hanter
voſtre Pere & voſtre Mere : ne man-
quez pas, de leur faire ſçauoir la bonne
volonté que vous auez pour eux : & le
deſir, que vous conſeruez de trauailler
à vne bonne paix.
VI. Pour ce qui concerne vos en-
fans; ne vous perſuadez pas facilement
Eccli.
7. que voſtre Mary leur ſoit trop ſeuere.
Dieu luy commande la grauité, en ces
termes.
fans; ne vous perſuadez pas facilement
Eccli.
7. que voſtre Mary leur ſoit trop ſeuere.
Dieu luy commande la grauité, en ces
termes.
Vous auez des Filles : gardez.
leurs corps: & ne leur monſtrez point vn
viſage riant
Eccli.
30. 9. Dieu ne veut pas moins de grauité
& de ſeuerité , enuers les maſles.
30. 9. Dieu ne veut pas moins de grauité
& de ſeuerité , enuers les maſles.
Traitez doucement voſtre fils, dit-il:
&.
il vous remplira de frayeurs. Si vous
iouez auec luy, il vous attriſtera : ne
luy ſouſriez point , & ne luy compa-
tiſſez point : autrement, il vous cauſera
beaucoup d'amertume. Faites luy baiſſer
la teſte, tandis qu'il eſt ieune. Chaſtiez-
le, dez ſa premiere enfance; de crainte
213 des perſonnes Mariées. qu'il ne s'endurciſſe , & ne vous croye
pas: & vous tranſpere le cœur de dou-
leur
VII. Ne vous gendarmez donc pas,
ſi voſtre Mary eſt ſerieux enuers vos
enfans : & ne leur permet point, en ſa
preſence, diuerſes libertez, dont vous
voudriez tirer voſtre diuertiſſement. Il
Strabo.
l.15. n'eſtoit point permis aux Eſcoliers des
Brachmanes , ny de parler , ny de cra-
cher , ny de ſe moucher , deuant eux.
Si cela leur arriuoit, ils eſtoient exclus
de la claſſe de ces Philoſophes Indiens,
Vin-
cent. l.
2. c.
74.
hiſt.
nat.
Baſil.
in Hex. comme n'ayant point vn ſuffiſant do-
maine ſur eux-meſmes.
ſi voſtre Mary eſt ſerieux enuers vos
enfans : & ne leur permet point, en ſa
preſence, diuerſes libertez, dont vous
voudriez tirer voſtre diuertiſſement. Il
Strabo.
l.15. n'eſtoit point permis aux Eſcoliers des
Brachmanes , ny de parler , ny de cra-
cher , ny de ſe moucher , deuant eux.
Si cela leur arriuoit, ils eſtoient exclus
de la claſſe de ces Philoſophes Indiens,
Vin-
cent. l.
2. c.
74.
hiſt.
nat.
Baſil.
in Hex. comme n'ayant point vn ſuffiſant do-
maine ſur eux-meſmes.
VIII. Ne vous fachez non plus, s'il
les chaſtie plus que voſtre tendreſſe
maternelle ne voudroit. Il les ne-
ſtoyera de leurs vices & leur donnera la
vie & la vigueur des vertus. Les bour-
dons meurent dans le miel : & viuent
dans le vinaigre. Le ſel d'Agrigentum
ſe durciſſoit en l'eau, & ſe liquifioit au
feu. Ce qui eſt vtile & neceſſaire à vos
enfans , ne vous doit point eſtre faſ-
cheux & deſagreable. Et beaucoup
moins deuez vous en teſmoigner vo-
a des-ja aſſez de peine à cette violence
qu'il ſe fait. Vous pourriez eſtre cauſe,
qu'il quitteroit tous ſes ſoins : & que
vos enfans mal eſleuez vous feroient
bien des maux : ſi particulierement, en
punition de cette laſcheté Dieu vous
oſtoit voſtre Mary.
les chaſtie plus que voſtre tendreſſe
maternelle ne voudroit. Il les ne-
ſtoyera de leurs vices & leur donnera la
vie & la vigueur des vertus. Les bour-
dons meurent dans le miel : & viuent
dans le vinaigre. Le ſel d'Agrigentum
ſe durciſſoit en l'eau, & ſe liquifioit au
feu. Ce qui eſt vtile & neceſſaire à vos
enfans , ne vous doit point eſtre faſ-
cheux & deſagreable. Et beaucoup
moins deuez vous en teſmoigner vo-
214
La Direction & la Conſolation
ſtre mécontentement à vôtre Mary: quia des-ja aſſez de peine à cette violence
qu'il ſe fait. Vous pourriez eſtre cauſe,
qu'il quitteroit tous ſes ſoins : & que
vos enfans mal eſleuez vous feroient
bien des maux : ſi particulierement, en
punition de cette laſcheté Dieu vous
oſtoit voſtre Mary.
IX. Il pourroit neantmoins arriuer,
que la ſeuerité ſeroit exceſſiue : & que
vous deuriez interpoſer voſtre credit.
Mais cela ſe doit faire, apres vne meure
deliberation ; & apres auoir bien prié
Dieu, qu'il vous inſpire & voſtre Mary
ce qui ſera le plus conuenable à ſa
gloire , au ſalut de vos enfans , & au
bien de voſtre famille.
que la ſeuerité ſeroit exceſſiue : & que
vous deuriez interpoſer voſtre credit.
Mais cela ſe doit faire, apres vne meure
deliberation ; & apres auoir bien prié
Dieu, qu'il vous inſpire & voſtre Mary
ce qui ſera le plus conuenable à ſa
gloire , au ſalut de vos enfans , & au
bien de voſtre famille.
§. II.
Aduis pour le Mary, en ce
qui concerne ſes enfans & ceux de
ſa Femme.
I. Loüez en vous meſme la ten-
dreſſe de voſtre Femme : tant pour ſes
parens, que pour ſes enfans, ſes ſerui-
teurs & ſes ſeruantes. Les femmes ont
plus de lait que les hommes : & la dou-
ceur leur eſt plus propre. La voſtre ſe-
roit blaſmable , ſi elle n'auoit point
meſme aux animaux.
dreſſe de voſtre Femme : tant pour ſes
parens, que pour ſes enfans, ſes ſerui-
teurs & ſes ſeruantes. Les femmes ont
plus de lait que les hommes : & la dou-
ceur leur eſt plus propre. La voſtre ſe-
roit blaſmable , ſi elle n'auoit point
215
des perſonnes Mariées.
cette affection : que Dieu a donnée,meſme aux animaux.
L'Aigle aime tant ſes petits, dit le
R. Sa-
lomon. Docteur Salomon ; que les voulant
garantir des fleches du chaſſeur; non
ſeulement elle les enleue en l'air auec
ſes griffes : mais elle les met ſur ſon
dos : afin qu'ils ſoient plus aſſeurez
qu'elle meſme : & qu'on ne puiſſe les
bleſſer, ſans l'offenſer la premiere.
R. Sa-
lomon. Docteur Salomon ; que les voulant
garantir des fleches du chaſſeur; non
ſeulement elle les enleue en l'air auec
ſes griffes : mais elle les met ſur ſon
dos : afin qu'ils ſoient plus aſſeurez
qu'elle meſme : & qu'on ne puiſſe les
bleſſer, ſans l'offenſer la premiere.
On blaſme l'Auſtruche, de ce qu'el-
le ne couue point ſes œufs: & ne prend
aucun ſoin de ſes petits.
le ne couue point ſes œufs: & ne prend
aucun ſoin de ſes petits.
II. Ne trouuez point mauuais que,
de temps en temps, voſtre Femme de-
mande la grace pour ſes enfans : cela
l'en fera aimer, & empeſchera qu'ils ne
luy faſſent tant de peine.
de temps en temps, voſtre Femme de-
mande la grace pour ſes enfans : cela
l'en fera aimer, & empeſchera qu'ils ne
luy faſſent tant de peine.
Ne vous indignez point auſſi , ſi
quelquefois voyant voſtre colere trop
allumée & que vous frappez trop ru-
dement ſes chers nourriſſons, elle va au
ſecours; & vous arrache les verges des
mains. Cela eſt excellent , lors qu'il ſe
fait auec concert , & d'vn mutuel ac-
cord. Car l'enfant demeure dans la
crainte : & ne reçoit pas vn grand mal.
quelquefois voyant voſtre colere trop
allumée & que vous frappez trop ru-
dement ſes chers nourriſſons, elle va au
ſecours; & vous arrache les verges des
mains. Cela eſt excellent , lors qu'il ſe
fait auec concert , & d'vn mutuel ac-
cord. Car l'enfant demeure dans la
crainte : & ne reçoit pas vn grand mal.
216
La Direction & la Conſolation
Ælian
3.c.23. Mais quand il arriueroit , ſans vo-
ſtre permiſſion : donnez quelque choſe
à vne Mere attendrie. Le Pelican non
ſeulement ſe tire du ſang de la cuiſſe
pour nourrir ſes pouſſins : mais ſe iette
auſſi au milieu des flammes, pour les
en deliurer.
3.c.23. Mais quand il arriueroit , ſans vo-
ſtre permiſſion : donnez quelque choſe
à vne Mere attendrie. Le Pelican non
ſeulement ſe tire du ſang de la cuiſſe
pour nourrir ſes pouſſins : mais ſe iette
auſſi au milieu des flammes, pour les
en deliurer.
III. Vous deuez faire plus de cas
de l'amour de voſtre femme, à qui vo-
ſtre colere eſt onereuſe : que de la ſatiſ-
faction de voſtre paſſion : veu que cette
douceur , meſlée auec voſtre aigreur,
Plin.
7.c.25. eſt propre à produire de bons effets. Le
fiel de l'Aigle eſt excellent pour la veuë
ſi on le meſle auec le miel de l'Attique.
de l'amour de voſtre femme, à qui vo-
ſtre colere eſt onereuſe : que de la ſatiſ-
faction de voſtre paſſion : veu que cette
douceur , meſlée auec voſtre aigreur,
Plin.
7.c.25. eſt propre à produire de bons effets. Le
fiel de l'Aigle eſt excellent pour la veuë
ſi on le meſle auec le miel de l'Attique.
IV. La trop grande ſeuerité abbat
l'eſprit des enfans : les rend ſtupides &
puſillanimes : ou les met en furie, & les
rend fougueux & indociles. La Lam-
proye deuient furieuſe, ſi elle boit du
vinaigre : Pluſieurs naturels ſe roidiſſẽt
contre la rigueur , & ſe rendent trai-
tables à vne douceur prudente & mo-
derée : mais il n'y en a preſque point, à
qui l'excez de la rigueur ne nuiſe beau-
coup. Vne petite pluie penettre & fer-
tiliſe la terre. Les orages & les torrens
que des pierres & des cailloux durs &
inutiles.
l'eſprit des enfans : les rend ſtupides &
puſillanimes : ou les met en furie, & les
rend fougueux & indociles. La Lam-
proye deuient furieuſe, ſi elle boit du
vinaigre : Pluſieurs naturels ſe roidiſſẽt
contre la rigueur , & ſe rendent trai-
tables à vne douceur prudente & mo-
derée : mais il n'y en a preſque point, à
qui l'excez de la rigueur ne nuiſe beau-
coup. Vne petite pluie penettre & fer-
tiliſe la terre. Les orages & les torrens
rauagent
217
des perſonnes Mariées.
rauagent & enleuent tout: & ne laiſſentque des pierres & des cailloux durs &
inutiles.
V. Ne vous rebutez point, ſi quel-
qu'vn de vos enfans paroiſt moins poli,
moins ingenieux , & moins propre à
vos deſſeins. Ce ſera poſſible celuy qui
releuera toute voſtre famille : & ceux
dont vous faites plus d'eſtat , & que
vous croyez deuoir eſtre la ſplendeur
de voſtre maiſon : en ſeront l'opprobre.
qu'vn de vos enfans paroiſt moins poli,
moins ingenieux , & moins propre à
vos deſſeins. Ce ſera poſſible celuy qui
releuera toute voſtre famille : & ceux
dont vous faites plus d'eſtat , & que
vous croyez deuoir eſtre la ſplendeur
de voſtre maiſon : en ſeront l'opprobre.
Saül , Roy des Iuifs, appella ſon
quatrieſme fils Eſbaal : qui ſignifie , le
feu, la ſplendeur & l'amour du Roy. Il
fut ſi laſche, & ſi peu propre à gouuer-
ner le Royaume, qu'il tint ſept ans par
le ſecours d'Abner ( qui ſignifie ) Pere
ou Prince lumineux , qu'on l'appella
Iſboſeth: c'eſt à dire, homme de confu-
ſion , homme contemptible.
quatrieſme fils Eſbaal : qui ſignifie , le
feu, la ſplendeur & l'amour du Roy. Il
fut ſi laſche, & ſi peu propre à gouuer-
ner le Royaume, qu'il tint ſept ans par
le ſecours d'Abner ( qui ſignifie ) Pere
ou Prince lumineux , qu'on l'appella
Iſboſeth: c'eſt à dire, homme de confu-
ſion , homme contemptible.
Le Fils de Ionathas fut nommé
Meribaal : qui eſt autant, que ſi l'on
euſt dit, vn Seigneur belliqueux & vail-
lant. Il fut puis apres dit Miphiboſeth :
qui ſignifie, homme meſpriſable à ſon
ſeul regard : homme qui a vn viſage &
vn maintien contemptible.
Meribaal : qui eſt autant, que ſi l'on
euſt dit, vn Seigneur belliqueux & vail-
lant. Il fut puis apres dit Miphiboſeth :
qui ſignifie, homme meſpriſable à ſon
ſeul regard : homme qui a vn viſage &
vn maintien contemptible.
K
218
La Direction & la Conſolation
Au contraire, ceux qui eſtoient re-
iettez par leurs parens à des occupa-
tions baſſes & abjettes: ont eſté eſleuez
de Dieu-meſme , ſur la teſte de tous
leurs freres, & de leurs parens. Dauid
eſtoit retenu, par ſon Pere Iſaï, à la gar-
de des brebis, pendant qu'il pouſſoit
ſes freres dans les charges des armées.
Son Pere penſoit ſi peu à ſon auance-
ment : qu'il ne le rappella pas ſeule-
ment des champs, lors que Samuel luy
declara que Dieu luy auoit ordonné
d'oindre pour Roy celuy de ſes enfans
qu'il luy deſigneroit dans ſon logis.
Iſaï fit aſſembler ſes ſept autres fils; &
laiſſa Dauid auec ſes brebis. Mais les
autres n'eſtant point choiſis du Ciel,
Samuel fit venir ce petit berger , le
moins âgé de ſes freres, & le plus ne-
gligé : & par vne ſainte onction , le
declara ſucceſſeur de la Couronne.
Les jugemens de Dieu ſont admirables,
& paſſent entierement noſtre portée &
noſtre preuoyance.
iettez par leurs parens à des occupa-
tions baſſes & abjettes: ont eſté eſleuez
de Dieu-meſme , ſur la teſte de tous
leurs freres, & de leurs parens. Dauid
eſtoit retenu, par ſon Pere Iſaï, à la gar-
de des brebis, pendant qu'il pouſſoit
ſes freres dans les charges des armées.
Son Pere penſoit ſi peu à ſon auance-
ment : qu'il ne le rappella pas ſeule-
ment des champs, lors que Samuel luy
declara que Dieu luy auoit ordonné
d'oindre pour Roy celuy de ſes enfans
qu'il luy deſigneroit dans ſon logis.
Iſaï fit aſſembler ſes ſept autres fils; &
laiſſa Dauid auec ſes brebis. Mais les
autres n'eſtant point choiſis du Ciel,
Samuel fit venir ce petit berger , le
moins âgé de ſes freres, & le plus ne-
gligé : & par vne ſainte onction , le
declara ſucceſſeur de la Couronne.
Les jugemens de Dieu ſont admirables,
& paſſent entierement noſtre portée &
noſtre preuoyance.
VI. Enſeignez vos enfans par vous-
meſme , ſi vous le pouuez : au moins,
faites leur rendre compte, de ce qu'on
les fera plus ſoigneux : & ſe voyant
éclairez par vous & par leur Maiſtre,
comme par deux yeux toûjours veil-
lans, ils ne s'endormiront point dans
leur deuoir , & ne ſeront iamais en
tenebres.
meſme , ſi vous le pouuez : au moins,
faites leur rendre compte, de ce qu'on
219
des perſonnes Mariées.
leur enſeigne dans les claſſes. Ce ſoinles fera plus ſoigneux : & ſe voyant
éclairez par vous & par leur Maiſtre,
comme par deux yeux toûjours veil-
lans, ils ne s'endormiront point dans
leur deuoir , & ne ſeront iamais en
tenebres.
Quand le Soleil éclaire noſtre He-
miſphere : la Lune & les Eſtoiles éclai-
rent l'autre. Si le Maiſtre donne de la
lumiere à vos enfans dans ſa Claſſe.
Si vous, ſi voſtre femme, ſi le reſte de
voſtre famille les illumine par vos con-
noiſſances & par vos vertus , ils de-
uiendront bien-toſt des enfans de lu-
miere , & illuſtreront en leur temps
voſtre Maiſon.
miſphere : la Lune & les Eſtoiles éclai-
rent l'autre. Si le Maiſtre donne de la
lumiere à vos enfans dans ſa Claſſe.
Si vous, ſi voſtre femme, ſi le reſte de
voſtre famille les illumine par vos con-
noiſſances & par vos vertus , ils de-
uiendront bien-toſt des enfans de lu-
miere , & illuſtreront en leur temps
voſtre Maiſon.
VII. Si vous ne pouuez vaquer à
leur inſtruction , choiſiſſez les plus
ſçauans & les plus vertueux Maiſtres
que vous pourrez. Il importe beau-
coup d'auoir vn bon Iardinier , pour
planter les arbres d'vn verger,ſi on veut
Plato
in Al-
cib.
Crini-
tus de
honor. en gouſter des fruits.
leur inſtruction , choiſiſſez les plus
ſçauans & les plus vertueux Maiſtres
que vous pourrez. Il importe beau-
coup d'auoir vn bon Iardinier , pour
planter les arbres d'vn verger,ſi on veut
Plato
in Al-
cib.
Crini-
tus de
honor. en gouſter des fruits.
Les Rois de Perſe enuoyoient leurs
enfans aux Maiſtres qui enſeignoient à
monter à cheual ; & les faiſoient aller
Diſc.
l.1.6.2. torze ans, ils leur donnoient des hom-
mes les plus renommez en ſageſſe, en
iuſtice, en temperance, & en force, qui
fuſſent dans tout le Royaume : & ils
eſtoient appellez, les Precepteurs Ro-
yaux. Le premier leur enſeignoit la
ſcience des choſes naturelles, & les In-
ſtituts , & manieres de viure & d'agir
des Rois. Le deuxiéme leur inculquoit,
que toute leur vie, ils aimaſſent & pra-
tiquaſſent la verité ſur toutes choſes.
Le troiſiéme, qu'ils ne ſe laiſſaſſent ia-
mais domter par aucunes de leurs paſ-
ſions : mais qu'ils s'efforçaſſent de ſe
mettre dans vne parfaite liberté d'eſ-
prit : de ſe commander premierement à
eux meſmes , & de n'eſtre eſclaues
d'aucun vice. Le quatriéme , enfin,
les exhortoit & les ſtiloit161 à auoir vn
cœur162 genereux & ſans crainte.
enfans aux Maiſtres qui enſeignoient à
monter à cheual ; & les faiſoient aller
K ij
220
La Direction & la Conſolation
à la chaſſe dés l'âge de ſept ans. A qua-Diſc.
l.1.6.2. torze ans, ils leur donnoient des hom-
mes les plus renommez en ſageſſe, en
iuſtice, en temperance, & en force, qui
fuſſent dans tout le Royaume : & ils
eſtoient appellez, les Precepteurs Ro-
yaux. Le premier leur enſeignoit la
ſcience des choſes naturelles, & les In-
ſtituts , & manieres de viure & d'agir
des Rois. Le deuxiéme leur inculquoit,
que toute leur vie, ils aimaſſent & pra-
tiquaſſent la verité ſur toutes choſes.
Le troiſiéme, qu'ils ne ſe laiſſaſſent ia-
mais domter par aucunes de leurs paſ-
ſions : mais qu'ils s'efforçaſſent de ſe
mettre dans vne parfaite liberté d'eſ-
prit : de ſe commander premierement à
eux meſmes , & de n'eſtre eſclaues
d'aucun vice. Le quatriéme , enfin,
les exhortoit & les ſtiloit161 à auoir vn
cœur162 genereux & ſans crainte.
VIII. Si vous auez ſoin de vos pro-
pres enfans, ne negligez point ceux
que voſtre femme a eus d'vn autre Ma-
ry. Careſſez-les meſme, auec plus de
tendreſſe exterieure ; & tenez forte-
ment la main que les voſtres les ai-
C'eſt le meilleur moyen de maintenir
la paix, & la proſperité de voſtre Mai-
ſon , & durant voſtre vie, & apres vo-
ſtre mort.
pres enfans, ne negligez point ceux
que voſtre femme a eus d'vn autre Ma-
ry. Careſſez-les meſme, auec plus de
tendreſſe exterieure ; & tenez forte-
ment la main que les voſtres les ai-
221
des perſonnes Mariées.
ment , les reſpectent & les aſſiſtent.C'eſt le meilleur moyen de maintenir
la paix, & la proſperité de voſtre Mai-
ſon , & durant voſtre vie, & apres vo-
ſtre mort.
Les Poëtes nous racontent, que Ca-
ſtor & Pollux freres de diuers Peres
s'entr'aimerent ſi cordialement , que
Pollux, fils de Iupiter, deuant eſtre im-
mortel , il ceda à ſon frere Caſtor la
moitié de ſon immortalité : C'eſt pour-
quoy, ils furent tous deux tranſportez
au Ciel , pour y luire l'vn apres
l'autre.
ſtor & Pollux freres de diuers Peres
s'entr'aimerent ſi cordialement , que
Pollux, fils de Iupiter, deuant eſtre im-
mortel , il ceda à ſon frere Caſtor la
moitié de ſon immortalité : C'eſt pour-
quoy, ils furent tous deux tranſportez
au Ciel , pour y luire l'vn apres
l'autre.
Si la Charité, qui eſt vn feu diuin,
enflamme & éclaire vos enfans , ils
pourront tous s'échauffer l'vn l'autre
en l'amour des biens eternels , & au
deſir des heroïques actions, & reluire
enſemble. Si Caſtor & Pollux paroiſ-
ſent, dans le Ciel, tous deux à pareille
heure ; c'eſt vn ſigne de beau temps.
Iamais vous ne l'aurez , ny beau , ny
bon , ſans vne mutuelle concorde , &
ſans la ſplendeur des vertus dans
voſtre logis.
enflamme & éclaire vos enfans , ils
pourront tous s'échauffer l'vn l'autre
en l'amour des biens eternels , & au
deſir des heroïques actions, & reluire
enſemble. Si Caſtor & Pollux paroiſ-
ſent, dans le Ciel, tous deux à pareille
heure ; c'eſt vn ſigne de beau temps.
Iamais vous ne l'aurez , ny beau , ny
bon , ſans vne mutuelle concorde , &
ſans la ſplendeur des vertus dans
voſtre logis.
K iij
222
La Direction & la Conſolation
§. III. Auis au Mary, touchant
ſes ſeruiteurs & ſes ſeruantes; que
ſa Femme ſupporte.
I. Conſiderez, que vos ſeruiteurs &
vos ſeruantes ſont d'vne meſme na-
ture que vous : & qu'ils ſon éleus à
l'eſtat de la Grace & de la gloire, auſſi
bien & auſſi auantageuſement que
vous. Ils ont eſté creés de la meſme
matiere, rachetez par le meſme Sang
du Fils de Dieu, & deſtinez à la meſme
recompenſe du Paradis.
vos ſeruantes ſont d'vne meſme na-
ture que vous : & qu'ils ſon éleus à
l'eſtat de la Grace & de la gloire, auſſi
bien & auſſi auantageuſement que
vous. Ils ont eſté creés de la meſme
matiere, rachetez par le meſme Sang
du Fils de Dieu, & deſtinez à la meſme
recompenſe du Paradis.
Les Gymnoſophiſtes, Philoſophes de
Diodor
l.2.c.
18. l'Inde, auoient vne Loy entr'eux , que
perſonne n'eſt eſclaue ; mais que tous
ſont nez libres , & doiuent eſtre hono-
rez en cette qualité. Et le Philoſophe
Bion enſeignoit , Que les ſeruiteurs
vertueux ſont libres : & que les Mai-
ſtres vicieux, ſont eſclaues. I'ay prou-
ué cette verité au premier liure du
Sect.1.
& 2. Traité que i'ay fait pour l'inſtruction
& pour la conſolation des ſeruiteurs &
des ſeruantes.
Diodor
l.2.c.
18. l'Inde, auoient vne Loy entr'eux , que
perſonne n'eſt eſclaue ; mais que tous
ſont nez libres , & doiuent eſtre hono-
rez en cette qualité. Et le Philoſophe
Bion enſeignoit , Que les ſeruiteurs
vertueux ſont libres : & que les Mai-
ſtres vicieux, ſont eſclaues. I'ay prou-
ué cette verité au premier liure du
Sect.1.
& 2. Traité que i'ay fait pour l'inſtruction
& pour la conſolation des ſeruiteurs &
des ſeruantes.
II. Seneque tres-ſage Philoſophe
conſeille de viure parmy ſes ſeruiteurs,
auec familiarité , auec douceur & de-
noüit le cœur163, renforce les bras, eſ-
ueille l'eſprit, pour aimer, pour ho-
norer, pour ſeruir & aider leurs Mai-
ſtres, en tout lieu & en toute occur-
rence.
Sabell.conſeille de viure parmy ſes ſeruiteurs,
auec familiarité , auec douceur & de-
223
des perſonnes Mariées.
bonnaireté. Cette Charité leur épa-noüit le cœur163, renforce les bras, eſ-
ueille l'eſprit, pour aimer, pour ho-
norer, pour ſeruir & aider leurs Mai-
ſtres, en tout lieu & en toute occur-
rence.
l.6.
Inne.
ad. 1.
Vn ſeruiteur, dans la ville de Tyre,
ſauua la vie à Straton ſon Maiſtre, & le
fit Roy de cette Republique , parce
qu'il l'auoir traité auec douceur &
debonnaireté.
ſauua la vie à Straton ſon Maiſtre, & le
fit Roy de cette Republique , parce
qu'il l'auoir traité auec douceur &
debonnaireté.
III. Si vous abaiſſez vos ſeruiteurs,
contre leur gré, à des offices trop vils
& trop laborieux : vous vous priuerez
ſouuent de leurs trauaux , dans leurs
occupations ordinaires, lors que vous
ſerez abſent : ou ils tomberont mala-
des de dépit, ou ils s'enfuiront de vo-
ſtre logis , ou feront quelqu autre
ſottiſe. Ce qui ſe fait à contre-cœur,
n'eſt iamais de longue durée.
contre leur gré, à des offices trop vils
& trop laborieux : vous vous priuerez
ſouuent de leurs trauaux , dans leurs
occupations ordinaires, lors que vous
ſerez abſent : ou ils tomberont mala-
des de dépit, ou ils s'enfuiront de vo-
ſtre logis , ou feront quelqu autre
ſottiſe. Ce qui ſe fait à contre-cœur,
n'eſt iamais de longue durée.
Vn ieune Lacedemonien , d'honneſte
famille, eſtant fait priſonnier de guer-
Plin
Lacon re par le Roy Antigonus , fut vendu à
l'encant auec les autres eſclaues. Il ſer-
uit alegrement & fidellement à celuy
qui l'auoit acheté : tandis qu'il ne luy
ſance. Mais ſon Maiſtre luy ayant
ordonné d'apporter vn pot de cham-
bre, il refuſa d'obeïr. En eſtant fort
preſſé par cét homme enflammé de co-
lere , il monta promptement ſur le toit
de la maiſon : & criant à haute voix,
Tu verras ce que tu as acheté , ſe pre-
cipita la teſte deuant ſur le paué : & ſe
l'écraſa. C'eſt vne imprudence de con-
traindre violemment vn ſeruiteur à des
actions à quoy il a vne trop grande re-
pugnance naturelle.
famille, eſtant fait priſonnier de guer-
Plin
Lacon re par le Roy Antigonus , fut vendu à
l'encant auec les autres eſclaues. Il ſer-
uit alegrement & fidellement à celuy
qui l'auoit acheté : tandis qu'il ne luy
K iiij
224
La Direction & la Conſolation
commanda rien d'indigne de ſa naiſ-ſance. Mais ſon Maiſtre luy ayant
ordonné d'apporter vn pot de cham-
bre, il refuſa d'obeïr. En eſtant fort
preſſé par cét homme enflammé de co-
lere , il monta promptement ſur le toit
de la maiſon : & criant à haute voix,
Tu verras ce que tu as acheté , ſe pre-
cipita la teſte deuant ſur le paué : & ſe
l'écraſa. C'eſt vne imprudence de con-
traindre violemment vn ſeruiteur à des
actions à quoy il a vne trop grande re-
pugnance naturelle.
IV. Ne chargez point auſſi vos ſerui-
teurs au delà de leurs forces. Leur
cœur laiſſera refroidir l'affection qu'ils
vous porteroient: & par conſequent, ils
agiront moins à voſtre profit qu'ils
n'euſſent fait. Contentez-vous, lors
qu'ils font comme les autres ſeruiteurs
de voſtre ville , aux maiſons qui ſont
ſemblables à la voſtre: ou qu'ils gardent
les conditions du contrat , qu'ils ont
fait auec vous, à l'entrée de voſtre logis.
teurs au delà de leurs forces. Leur
cœur laiſſera refroidir l'affection qu'ils
vous porteroient: & par conſequent, ils
agiront moins à voſtre profit qu'ils
n'euſſent fait. Contentez-vous, lors
qu'ils font comme les autres ſeruiteurs
de voſtre ville , aux maiſons qui ſont
ſemblables à la voſtre: ou qu'ils gardent
les conditions du contrat , qu'ils ont
fait auec vous, à l'entrée de voſtre logis.
Il y auoit à Suze , ville Royalle de
Perſe , des bœufs , dont chacun tiroit
tous les jours , cent ſeaux d'eau, pour
la auec promptitude , & ſans aucune
contrainte: Mais il eſtoit impoſſible de
leur en faire tirer vn ſeul dauantage :
nonobſtant toutes les careſſes qu'on
leur fiſt : & toutes les baſtonnades
qu'on leur donnaſt.
Perſe , des bœufs , dont chacun tiroit
tous les jours , cent ſeaux d'eau, pour
225
des perſonnes Mariées.
les jardins du Roy. Ils faiſoient ce-la auec promptitude , & ſans aucune
contrainte: Mais il eſtoit impoſſible de
leur en faire tirer vn ſeul dauantage :
nonobſtant toutes les careſſes qu'on
leur fiſt : & toutes les baſtonnades
qu'on leur donnaſt.
Le jugement naturel dicte à vos ſer-
uiteurs ce qu'ils vous doiuent , ſelon
les gages que vous leur donnez : &
ſelon la couſtume de la ville, où vous
viuez. Conformez-vous y : ſi vous ne
voulez paſſer dans leur eſprit , pour
vn barbare , & pour vn homme , qui
ne merite pas d'eſtre ſeruy.
uiteurs ce qu'ils vous doiuent , ſelon
les gages que vous leur donnez : &
ſelon la couſtume de la ville, où vous
viuez. Conformez-vous y : ſi vous ne
voulez paſſer dans leur eſprit , pour
vn barbare , & pour vn homme , qui
ne merite pas d'eſtre ſeruy.
V. Eſtudiez le naturel de vos
ſeruiteurs & de vos ſeruantes. De
cette connoiſſance dépend la bon-
ne conduite , & l'efficacité du gou-
uernement. Les vns ſe captiuent par
amour, & par de bonnes paroles, les
autres ſe gagnent par les loüanges :
les autres, par bien faits : quelques-
vns, par crainte & par menaces. L'on
en trouue meſmes, qui ne marchent
point, ſi l'on ne les pique. Si l'on man-
que de cette lumiere , on gaſte tout
les vns, & abatant le cœur aux autres.
ſeruiteurs & de vos ſeruantes. De
cette connoiſſance dépend la bon-
ne conduite , & l'efficacité du gou-
uernement. Les vns ſe captiuent par
amour, & par de bonnes paroles, les
autres ſe gagnent par les loüanges :
les autres, par bien faits : quelques-
vns, par crainte & par menaces. L'on
en trouue meſmes, qui ne marchent
point, ſi l'on ne les pique. Si l'on man-
que de cette lumiere , on gaſte tout
K v
226
La Direction & la Conſolation
pour l'ordinaire : rendant orgueilleuxles vns, & abatant le cœur aux autres.
Sur cette penſée, diuers Princes &
diuers Rois ſe ſont déguiſez, pour con-
noiſtre ce qui ſe paſſoit dans leurs
Royaumes : afin d'eſtre aidez, par cet-
Hector
Boeth.
l. 17.
hiſt.
Scot. te veuë, en leur gouuernement. Iac-
ques I. Roy d'Eſcoſſe, changeoit quel-
quefois d'habit : & ſe meſloit parmy
ſes Sujets, particulierement parmy les
Marchands , pour voir leur maniere
d'agir , dans les banquets , & dans le
trafic.
diuers Rois ſe ſont déguiſez, pour con-
noiſtre ce qui ſe paſſoit dans leurs
Royaumes : afin d'eſtre aidez, par cet-
Hector
Boeth.
l. 17.
hiſt.
Scot. te veuë, en leur gouuernement. Iac-
ques I. Roy d'Eſcoſſe, changeoit quel-
quefois d'habit : & ſe meſloit parmy
ſes Sujets, particulierement parmy les
Marchands , pour voir leur maniere
d'agir , dans les banquets , & dans le
trafic.
Frideric le vieux, Duc d'Auſtriche,
oncle de l'Empereur Frideric III. con-
Æneas
Sylu. l.
3. de
Alph. uerſoit ſouuent auec les villageois, s'e-
ſtant caché ſous vn habit de villageois.
Il ſe donnoit à loüage164, pour cultiuer
la terre : & pour faire , à la iournée
d'autres trauaux. Il jettoit alors des
diſcours de ſoy & de ſes Courtiſans.
Comme il fut interrogé , pourquoy
il en vſoit de la ſorte. Ie ne puis, dit-
il, ſçauoir autrement la verité.
oncle de l'Empereur Frideric III. con-
Æneas
Sylu. l.
3. de
Alph. uerſoit ſouuent auec les villageois, s'e-
ſtant caché ſous vn habit de villageois.
Il ſe donnoit à loüage164, pour cultiuer
la terre : & pour faire , à la iournée
d'autres trauaux. Il jettoit alors des
diſcours de ſoy & de ſes Courtiſans.
Comme il fut interrogé , pourquoy
il en vſoit de la ſorte. Ie ne puis, dit-
il, ſçauoir autrement la verité.
Si voſtre condition le permet, tra-
uaillez quelquefois auec vos ſerui-
teurs, pour les ſoulager en leurs la-
mains & à leurs langues , quels ils
font. Ils prendront auſſi courage, de
faire plus joyeuſement, & auec plus
de perfection, ce qu'ils verront que
vous deſirez & eſtimez.
uaillez quelquefois auec vos ſerui-
teurs, pour les ſoulager en leurs la-
227
des perſonnes Mariées.
beurs. Vous verrez bien-toſt à leursmains & à leurs langues , quels ils
font. Ils prendront auſſi courage, de
faire plus joyeuſement, & auec plus
de perfection, ce qu'ils verront que
vous deſirez & eſtimez.
VI. Ne mépriſez iamais vos ſerui-
teurs, en telle ſorte qu'ils vous ayent
en horreur, & qu'ils conçoiuent quel-
que deſir de vangeance. Ils ſont main-
tenant ſous vos pieds : demain, peut-
eſtre, ils ſeront ſur voſtre teſte. Nous
voyons chaque iour que la rouë de
Fortune tourne en tous les Eſtats &
eſleue de la pouſſiere ceux qui ram-
poient par terre, au plus bas de la lie
du peuple. On a auſſi ſouuent veû
tomber du plus haut du Ciel les plus
grandes & les plus brillantes Eſtoiles,
pour s'eſteindre dans la bouë , ou
pour ſe noyer dans les abyſmes.
Herod.teurs, en telle ſorte qu'ils vous ayent
en horreur, & qu'ils conçoiuent quel-
que deſir de vangeance. Ils ſont main-
tenant ſous vos pieds : demain, peut-
eſtre, ils ſeront ſur voſtre teſte. Nous
voyons chaque iour que la rouë de
Fortune tourne en tous les Eſtats &
eſleue de la pouſſiere ceux qui ram-
poient par terre, au plus bas de la lie
du peuple. On a auſſi ſouuent veû
tomber du plus haut du Ciel les plus
grandes & les plus brillantes Eſtoiles,
pour s'eſteindre dans la bouë , ou
pour ſe noyer dans les abyſmes.
l. 30
Darius, Roy de Perſe, auoit eſté ſer-
uiteur de Cyrus, & auoit porté le Car-
quois où eſtoient les fléches.
uiteur de Cyrus, & auoit porté le Car-
quois où eſtoient les fléches.
Seleucus, le premier Roy des Grecs
en la Syrie & en l'Aſie , apres Alexan-
dre : auoit eſté valet de pied de ce va-
leureux Conquerant.
en la Syrie & en l'Aſie , apres Alexan-
dre : auoit eſté valet de pied de ce va-
leureux Conquerant.
228
La Direction & la Conſolation
Seruius Tullius, le fils d'vn eſclaue,
Dionyſ
Halicar
l.3. fut le ſixiéme Roy de Rome, eut vn
regne tres-heureux, & triompha trois
fois de ſes ennemis.
Dionyſ
Halicar
l.3. fut le ſixiéme Roy de Rome, eut vn
regne tres-heureux, & triompha trois
fois de ſes ennemis.
Les ſeruantes ont auſſi eſté ſouuent
eſleuées à de tres-illuſtres dignitez,
par l'affection qu'vn Roy ou vn Em-
pereur leur a portée. En la Chine &
en diuers Royaumes , les Princes &
les Rois n'ont nul eſgard aux richeſſes
ny à la Nobleſſe, lors qu'il eſt question
de leurs femmes. Ils n'ont l'œil qu'à
la beauté & à la gentilleſſe de l'eſprit.
De ſorte que ſouuent ils prennent des
filles de Charpentiers, de Menuiſiers,
de Cordonniers, & de ſemblables Of-
ficiers tres - raualez.
eſleuées à de tres-illuſtres dignitez,
par l'affection qu'vn Roy ou vn Em-
pereur leur a portée. En la Chine &
en diuers Royaumes , les Princes &
les Rois n'ont nul eſgard aux richeſſes
ny à la Nobleſſe, lors qu'il eſt question
de leurs femmes. Ils n'ont l'œil qu'à
la beauté & à la gentilleſſe de l'eſprit.
De ſorte que ſouuent ils prennent des
filles de Charpentiers, de Menuiſiers,
de Cordonniers, & de ſemblables Of-
ficiers tres - raualez.
§ IV.
Auis au Mary, pour ce qui
concerne le Pere & la Mere
de ſa Femme.
I. Vous deuez louër voſtre Femme,
de ce qu'elle vous preſſe d'aimer &
d'aſſiſter ſes parens. Si elle ne le fai-
ſoit pas, vous la devriez tenir pour
vne ingrate & pour vne barbare. Elle
leur doit la vie, & tout ce qu'elle a.
Et vous leur deuez voſtre Femme ,
eux , ne ſeroit pas au nombre des
viuans.
de ce qu'elle vous preſſe d'aimer &
d'aſſiſter ſes parens. Si elle ne le fai-
ſoit pas, vous la devriez tenir pour
vne ingrate & pour vne barbare. Elle
leur doit la vie, & tout ce qu'elle a.
Et vous leur deuez voſtre Femme ,
229
des perſonnes Mariées.
qu'ils vous ont donnée : & qui, ſanseux , ne ſeroit pas au nombre des
viuans.
II. Suppoſé la verité, que Dieu nous
a enſeignée, Que l'homme & la fem-
me ne ſont qu'vne meſme chair : le
Pere & la Mere de voſtre femme ſont
voſtre Pere & voſtre Mere : & par con-
ſequent vous eſtes obligé de les cherir,
de les aider , & de les ſeruir en cette
qualité. Ils vous ont donné leur fille,
qui eſt leur ſubſtance. Ils vous font
heritier de leurs biens, qu'ils vous ont
acquis auec beaucoup de ſueurs. Ils
vous ont desja mis en main vne bon-
ne ſomme d'argent pour voſtre ma-
riage, & ſe ſont priuez des douceurs
de la vie , pour vous accommoder.
Ils deſirent voſtre auancement , vos
richeſſes & vos honneurs, comme les
leurs propres. Leurs bons auis vous
peuuent eſtre vtiles, à cauſe de l'ex-
perience qu'ils ont dans les affaires.
Leurs amis & leurs parens ſeront vn
grand renfort à voſtre famille. Les
prieres qu'ils feront pour vous & pour
vos enfans , vous obtiendront les fa-
vous apporteroient de grands dom-
mages.
Deut.a enſeignée, Que l'homme & la fem-
me ne ſont qu'vne meſme chair : le
Pere & la Mere de voſtre femme ſont
voſtre Pere & voſtre Mere : & par con-
ſequent vous eſtes obligé de les cherir,
de les aider , & de les ſeruir en cette
qualité. Ils vous ont donné leur fille,
qui eſt leur ſubſtance. Ils vous font
heritier de leurs biens, qu'ils vous ont
acquis auec beaucoup de ſueurs. Ils
vous ont desja mis en main vne bon-
ne ſomme d'argent pour voſtre ma-
riage, & ſe ſont priuez des douceurs
de la vie , pour vous accommoder.
Ils deſirent voſtre auancement , vos
richeſſes & vos honneurs, comme les
leurs propres. Leurs bons auis vous
peuuent eſtre vtiles, à cauſe de l'ex-
perience qu'ils ont dans les affaires.
Leurs amis & leurs parens ſeront vn
grand renfort à voſtre famille. Les
prieres qu'ils feront pour vous & pour
vos enfans , vous obtiendront les fa-
230
La Direction & la Conſolation
ueurs du Ciel. Leurs maledictionsvous apporteroient de grands dom-
mages.
27.
Maudit ſoit, dit Dieu au Deutero-
nome,
celuy qui n'honore pas ſon Pere. Et en l'Eccleſiaſtique,
& ſa mere
la.
Eccl.3. benediction du Pere affermit la mai-
ſon: & la malediction de la mere en ar-
rache les fondemens
Aux Prouerbes , vous auez,
Celuy.
Prou.
19 & 30 qui afflige ſon pere & ſa mere ſera mé-
priſé d'vn chacun , & reüſsira mal en
ſes entrepriſes. Ceux-là meritent d'eſtre
mangez des corbeaux & des aigles,
eſtant pendus prés des torrens, qui ſe mo-
quent de leurs peres & de leurs meres,
à qui ils doiuent la vie
III. Pour qui reſeruez vous voſtre
affection , ſi vous ne la donnez à vos
parens , & à ceux de voſtre femme ?
Ils ſont les plus grandes richeſſes que
vous puiſſiez ſouhaiter , & les plus
precieux meubles , que vous puiſſiez
poſſeder.
affection , ſi vous ne la donnez à vos
parens , & à ceux de voſtre femme ?
Ils ſont les plus grandes richeſſes que
vous puiſſiez ſouhaiter , & les plus
precieux meubles , que vous puiſſiez
poſſeder.
Platon au Traité qu'il a fait pour
Plato
11. de
legib. la bonne police d'vne Republique,
en parle de cette ſorte:
Plato
11. de
legib. la bonne police d'vne Republique,
en parle de cette ſorte:
Ceux dont les.
231 des perſonnes Mariées. peres & les meres, ou les grand-peres
& les grand-meres ſont au logis comme
vn Threſor, doiuent croire fermement
que iamais ils n'auront vne Diuinité
plus efficace, & qui leur apporte plus
de commoditez: s'ils les honorent & les
aſsiſtent, comme la raiſon & leur deuoir
les y obligent
Concluez : & iugez , que voſtre
Femme a vn iuſte ſujet de trouuer
mauuais , que pour de chetifs inte-
reſts pretendus , vous mépriſez ſes
parens : & que par ce moyen vous
vous priuiez & toute voſtre famille,
des benedictions que le Ciel y verſe-
roit , ſi vous vous corrigiez de ce
defaut. Concluez auſſi, qu'elle en-
courreroit les maledictions ſuſdites,
ſi elle ne vous prioit de les aimer &
de les aider.
Femme a vn iuſte ſujet de trouuer
mauuais , que pour de chetifs inte-
reſts pretendus , vous mépriſez ſes
parens : & que par ce moyen vous
vous priuiez & toute voſtre famille,
des benedictions que le Ciel y verſe-
roit , ſi vous vous corrigiez de ce
defaut. Concluez auſſi, qu'elle en-
courreroit les maledictions ſuſdites,
ſi elle ne vous prioit de les aimer &
de les aider.
232
La Direction & la Conſolation
Filet décoratif.
CHAPITRE VIII.
La Conſolation & la Direction d'vne
Femme, dont le Mary ne gagne
rien, ou par pareſſe, ou
par maladie.
LEs Mariages ne ſe font pas ſeu-
lement , pour la procreation des
enfans : mais auſſi pour rendre la vie
plus douce , par vne mutuelle com-
munication de biens & de trauaux,
entre l'homme & la femme. Quand
donc l'vn ou l'autre vient à manquer
à ce deuoir , celuy qui reſte ſeul eſt
accablé ſous le faix, eſtant obligé de
porter tout le poids des fatigues , &
de gemir , dans vne fâcheuſe amer-
tume.
lement , pour la procreation des
enfans : mais auſſi pour rendre la vie
plus douce , par vne mutuelle com-
munication de biens & de trauaux,
entre l'homme & la femme. Quand
donc l'vn ou l'autre vient à manquer
à ce deuoir , celuy qui reſte ſeul eſt
accablé ſous le faix, eſtant obligé de
porter tout le poids des fatigues , &
de gemir , dans vne fâcheuſe amer-
tume.