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Advis aux hommes martyrisez

ADVIS DONNÉ AUX HOMMES MARTYRISEZ PAR LEURS FEMMES. ADVIS SALUTAIRE ET TRES-NECESSAIRE aux gens de bien, qui se laissent battre par leurs femmes. NOUVELLE GAZETTE ENRHUMÉE. Avec les Remèdes pour se garantir du Rhume, Mal de Tête & d’Estomach. LE TESTAMENT DU SCIENTIFIC ET PRAULIFIC PICOTIN Baron des Capilotades, Marquis des Ragouts, etc. Suivant la copie de Paris 1651.

Lille : Leleu, Libraire, 1877.

AVERTISSEMENT

S’il est une pièce qui manque aux Joyeusetés de Techener, qu’on chercherait en vain dans les Facéties de Caron et que Jannet non plus n’a pas réimprimée dans son Recueil, c’est bien celle qui a pour titre
LE TESTAMENT DU SCIENTIFIC ET PRAVLIFIC PICOTIN, Satyre en vers de huit syllabes divisés par douzains, où l’Auteur anonyme, digne émule des Engoulevent, des Gautier Garguille et des Tabarin, parodie, dans  la langue du Pont-Neuf le style grave et majestueux des notaires du Châtelet.
Il s’agit, dans la pièce que nous nous réimprimons, d’un pauvre diable, poëte, c’est tout dire, qui pour avoir démontré par A plus B à une jeune demoiselle que les enfants ne se faisaient plus comme jadis par l’oreille, et par elle accusé, est condamné à être pendu; il se plaint dans cette Église burlesque, saupoudrée sinon de sel attique mais de gros sel gaulois, des rigueurs de sa Belle et distribue en même temps à ses amis, dans chaque strophe ou couplet, tout ce qui compose son avoir, hardes et mobilier, sous réserve d’un legs spécial à la cruelle qu’il nomme, pour les besoins de la rime, ou Isabelle ou Rosette, le tout très-lestement trouvssé et rappelant pour la forme, en le modernisant toutefois,  célèbre Testament de Villon, avec variantes et gloses appropriées au sujet.
Quant à la pièce qui lui sert de préface, intitulée : ADVIS AUX HOMMES MAL CONTENTS ET MARTYRISEZ, c’est une semonce aux mal mariés, les exhortant à la patience et dont la moralité est que les Cocus seront sauvés en cette vie et dans l’autre; et comme annexe les Status et Ordonnances de ladite Confrérie.
Pour épilogue et remerciement au lecteur, nous y joignons : LA NOUVELLE GAZETTE ENRHUMÉE, AVEC LES REMÈDES ASSUREZ POUR SE GUÉRIR DU RHUME, MAL DE TÊTE ET D’ESTOMACH, pièce désopilante qu’un Mondor quelconque débitait avec force drogues aux Parisiens de l’an de grâce 1657, et cette Gazette, nous l’espérons du  moins, lue et goûtée des enrhumés du temps présent, nous vaudra l’empressement et la reconnaissance des acheteurs, leur promettant, aussitôt l’écoulement de cette brochure, la mise au jour de plusieurs autres facéties. J.L.

ADVIS DONNÉ

Aux hommes mal contents, & martyrisez dans leur logis par leurs Femmes, avec les Reglements & Statuts, aux Confreres de la Confrerie, d’aller payer leursdites Confreries, aux lieux assignez par lesdits Confreres, à peine d’encourir les peines cy-dessus déclarez.
Veu par nous, Prince des Francs Coeurs, Comte de bon appetit, Baron de Machefor, Marquis de Boitout, Comte de la Saulcecourte, & Seigneur dominant des vignobles scis entre le S Valerien & le Courtois : La Requeste à Nous présentée, par plusieurs hommes de cette Ville mal contents, & quasi réduits au desespoir, expositive, quoy bien que tous les jours de fort grand matin, aucuns des suplians sortent de leurs maisons pour passer la journée du mieux qu’ils peuvêt, & gagner à la sueur de leurs corps de quoy subvenir aux necessitez de leurs familles, & les autres ayans des biens, et es commoditez suffisantes pour vivre fort honnestement sans beaucoup de travail vacquent le long du jour à leurs petites affaires, & se divertissent quelques fois avec leurs amis selon que les occasions s’en rencontrent, & lors que touts les dits complaignans retournent chez eux le soir, leurs femmes veulent sçavoir à quoy qu’ils ont passé le temps & quels discours ont tenus, à moins de quoy faire ils estoient contraints d’endurer dix milles injures, sans oser dire ny répondre un seul mot : même aucuns d’eux pour éviter la furie de leurs dites femmes, & d’estre bastonnez : aussi contraints de prendre la fuite, quitter et abandonner le logis. Pourquoy & attendu qu’ils n’osoient plus rentrer dans leurs dites maisons, n’y aller en compagnies à cause des railleries qu’on faisoient d’eux. Ils nous requeroient vouloir promptement remédier à ce désordre, qui par succession de temps pourroit s’étendre jusques dans les plus grandes & considerables familles, pour à quoy satisfaire, après y avoir mûre- ment pensé, ou assistoient plusieurs de nos Chevaliers de la Table Ronde, Gripsis, Gripminois, et le Vivat : considérant que tels procédez dérogent entièrement au genre masculin, & que cette dissention renverseroit insensiblement tous lesdits Confrères, à la conservation desquels nous avons un notable interest; Avons de nostre avis permis & permettons à tous les hommes, de quelques qualité & condition qu’ils soient, enrichis de Tiltres & honneurs de Martyrs, Martyrisez, de mettre entre les mains, lorsque leurs femmes voudront faire les entenduës, la Mestrologodono, pour les corriger & admonester, selon et ainsi qu’ils adviseront estre à faire par raison, & arrivant qu’elles ne veulent obeyr ny condescendre ausdites remontrances, entendons qu’elles soient traitées à toutes rigueurs, mesme par ruptures de leurs bras & jambes, pour ce fait estre mise au coin du feu pour prendre garde à ce qui se passera dans la maison, en cas qu’elle rescidivent dans leur méchanceté ordinaire, & à prononcer les injures scandaleuses, ainsi qu’elles ont accoustumées à l’encontre de leursdits marys : Voulant qu’elles soient mises & exposées à la porte pour servir de risée aux passans côme folles et insensées : Donné à Rodon, sous le contre-sel de nostre Ripaillerie entre deux Tréteaux, l’An mil six cens verse tout plain, au mois n’y mets point d’eau : Ainsi signé en la minute original, Franc Coeur, Tost assis, Jamais saoul, Haptout, Engoule vents, Vivat, Massa, qui dit, Tope, & Tingue.
1 ADVIS SALUTAIRE ET TRES-NECESSAIRE aux gens de bien, qui se laissent battre par leurs femmes. Dedié aux Confreres & Soeurs de la haute & basse, pauvre & riche, vieille & nouvelle, noble et roturiere Confrairie des Martyrs, martirisez par leurs des-honnestes indicrettes & mal advisees femmes, nouvellement installee au lieu appellé Mal’encontre.
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Agere & Pati, Chap. Si j’eusse bein pensé.
Mes Tres-chers Confrères, vous n’estes pas ignorans que dès long temps il y a une Confrérie des Martyrs, érigée ie ne sçay où, instituée par je ne sçay qui, & de la quelle on ne parle je ne sçay comment : Mais l’ayant meurement considérée en toutes ces dépendances, apres avoir esté de plusieurs et specialement de ceux de la ruë des mauvaises paroles, & en la ruë Tourne-cul. J’ay délibéré sur leurs instantes prières & pour la cômodité de nous tous, de désigner un lieu asseuré, ou l’assemblée se trouvera s’il luy plaist, pour faire eslection des Maîtres & Gouverneurs de la côfrerie, & pour délibérer des choses qui y serôt requises & nécessaires : Et pour ce, il est enjoint de par Thibault le persecuté, Général des affligez, à tous ceux qu’il appartiendra, de ne se présenter pour ce faire enroller, qu’il [sic] ne soiët chargez de persecutions & d’oprobes, pricipalemêt de fièvres quartaines, mal bosses, voleurs & yvrognes, & toutes autres injures & supplices pratiquez par les exécuteurs à l’endroit desdits Martyrs, et prendre garde que Martin baston 3n’y ait passé : car il seroit du tout indigne de converser avec lesdits Martyrs; comme aussi ceux qui se presenteront devant Monsieur le Doyen, & Messieurs les Gouverneurs, pour estre examinez, leur est enjoints d’apporter le certificat de leurs martyrs ou mariages, dont la teneur s’ensuit.
Nous soubs-signez __________ demeurant à__________ certifions que ___________ aussi demeurant en la dite Ville, a estè accordé à S.Prix, financé à S. Innocent, marié à S. Merry, les nopces faites à la Grimace; le souper à la Vallée de Misère, & de la, coucher en la rue de la Tannerie, & le lendemain s’en alla (comme son devoir estoit) aux Martyrs, & sa femme aux filles repenties, & de leur retour en leur maison seize en la rue des afflictions, Parroisse songe y auparavant, & ce sont presentez chacun un bouquet, l’un fait de soucy & l’autre de diverses pensées, & pour les conserver, les ont mis rafraichir dans  une phiole d’amertume remplie de larmes tombées du fin fond de leurs entêndemens.
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Statuts & Ordonnances de la Confrérie.
Item, sera fait eslection de deux maistres, les plus souffreteux & persecutez qui se puissent trouver entre les Confrères, & seront tenus establir des Commis en divers endroits, pour la commodité de ceux qui se voudront faire enroller.
  • En la rue qu’on appelle va te coucher sans souper.
  • En la ruë ie suis maistre quand je suis seul.
  • En la ruë souvent faut que ie me taise.
  • En la ruë doublee de vesche.
  • Pour les Soeurs, en la rpavee d’Andouille sans cuire.
  • En la ruë donnez leur du bon dans la mitaine.
  • Et ne recevront aucuns Confreres si leurs chapeaux ne tourne.
  • . Et ne recevront aucunes Soeurs, si elles ne sçavent dire Mercy-Dieu, les mains sur les roignons.
  • Est fait deffences à tous ceux & celles, qui ne sont côme cy-dessus a esté dit; de s’y présenter à peine d’encourir un affront signalé en présence de toute l’assemblée : Fait ce iour de ma grande affliction, au mois de mon martyre, l’année, prens y garde si tu veux.
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Tres-chers Confreres & Soeurs, vous serez advertis de vous trouver demain audit lieu des Martyrs au matin, pour y recevoir vos bouquets.
La Consolation des Mariez.
L’Homme qui a une bonne femme est bien-heureux, car il est en repos.
L’homme qui a une méchante femme est bien-heureux, quant il est patient & les patiens sont bien-heureux.
L’homme qui est Jannin & qui n’en sçait rien est bien-heureux, car il est Innocent, & les Innocents sont sauvés.
L’homme qui est Jannin & qui le sçait bien est bien-heureux, quant il est patient, car les patiens sont bien-heureux.

LE TESTAMENT DU SCIENTIFIC & DU PRAULIFIC PICOTIN, Baron des Capilotades, Marquis des Ragouts, Duc de Courboüillon, Commandeur des Estuvées, Grand Maistre des Soupers, bref, Lieutenant général sur l’Intendance de la Cuisine : Dedié à Messieurs de cette Ville.

Il demande : CETTE EPITAPHE
Passant qui que tu sois considere la fin,
& pleure la disgrace du pauvre Picotin,
Qui est mort pour sa Rosette;
Un soir il la trouva cachée dedans un coin,
Il luy posa le cul sus un botteau de foin,
Et luy fit la chosette.
La fille ayant perdu ce qu’avoit de plus cher,
Courut de tous cotés pour son Maître chercher,
Triste & toute épleurée,
Puis l’ayant recontré luy dit, vangez le tort
Que m’a fait Picotin, par un violent effort
Il m’a deshonorée.
Le Maistre ayant appris l’énormité du faict,
Le dit à la Justice;
On saisit Picotin, on le met en prison,
L’on mande le Boureau qui en fait la raison
Par un cruel supplice.
LA NOUVELLE GAZETTE ENRHUMEE Avec les Remedes asseurez pour se garantir du Rhûme, mal de Teste & Estomach.
A Paris, le 10 du courant 1657.
ORDONNANCE POUR LE RHUME
Les Malades estans au lit
Prendront le Remède susdit :
Un quarteron d’indiférence,
Autant de résolution,
Dont vous ferez infusion
Avec du jus de patience,
Point de procez ny de Donzelle,
D’ambition, ny de querelle,
Un grand poinçon de gayeté,
Trois onces de société,
Avec deux dragmes d’exercice,
Point de soucy ny d’avarice,
Trois bons grains de dévotion,
Point de nouvelle opinion,
Ne faisant fort peu d’abstinence,
Mettant tout dans un pot à ance,
Pour en prendre soir & matin
Dans un verre remply de vin :
Vous verrez que cette pratique
Au Médecin fera la nique.
REMÈDE POUR LE MAL D’ESTOMACH
Prenez plain un panier de vent
Et de l’eau d’un moulin à vent,
La cervelle d’une coignée,
Avec le jus d’une araignée.
Du sang d’un ciron, une livre,
Et l’entendement d’un hûme yure,
Les quatre pieds d’un rossignol,
Et les os d’un fromage mol,
Et de la moele d’un caillou
Que trouverez je ne sçay où :
De l’herbe qui croist dans un four
Qui est chausée cent fois le jour :
Toutes ces mixtions ensemble,
Vous pillerez, si bon vous semble,
Dans un moriter qui soit d’estoupe
Puis en versez dans une coupe,
Au matin quand vous leverez,
Seulement deux doigts en prendrez.
Vous frotant l’estomach d’un grez,
Et très-bien vous en trouverez.

Notes

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